XXXI - Celestia - Quatrième mouvement


Au bout d'un vol qui leur parut interminable, au-dessus de chaînes rocheuses couvertes de neige, ils aperçurent enfin une vallée, telle une immense saignée verte. Au-delà, sur un python s'élevait comme pour percer le ciel, se dressait une forteresse de pierre grise qui semblait être directement née du roc, sans l'aide de la main de l'homme. Elle ne possédait aucune grâce, juste une force inébranlable. Sur un autre promontoire, liée à la bâtisse principale par un pont étroit, se trouvait une tour solitaire. D'après ce que lui en avait dit son ami Luciellus, Aïzie comprit qu'il devait s'agir de Cimes.

Il se rapprocha d'Ivara :

« Il ne faudra pas se faire repérer, lui cria-t-il, nous risquerions d'être mal accueillis ! »

La jeune fille acquiesça et lui désigna une montagne pas trop éloignée, d'où surgissait une corniche en terrasse, idéale pour y poser les khaïtes. S'en remettant à leur jugement, Celestia les suivit. Une fois installés à ce poste d'observation, les trois voyageurs se concertèrent sur la stratégie à choisir pour délivrer Catena. Se trouvait-elle enfermée avec les autres chaînes à l'intérieur de la tour isolée ? Était-elle retenue ailleurs ? D'après Luciellus, l'angelier la suspendait parfois dans une cage de fer au-dessus du vide, en particulier lorsque le jeune Ange revenait en retard des longues – et dangereuses – missions que le seigneur l'envoyait accomplir.

« Peut-être que je devrais approcher seul, déclara Aïzie, en contrebas des murs afin d'éviter qu'ils me repèrent. Je pourrais ainsi me rapprocher suffisamment pour déterminer où se trouve Catena...

— À moins que je ne n'y aille moi-même, proposa Celestia. Après tout, il y a d'autres Anges dans ces forteresses ; peut-être me prendront-ils pour une messagère ordinaire !

— Non, répliqua fermement Ivara. Nous ne pouvons courir le risque de te voir capturée. D'après Luciellus, ils sont mauvais, impitoyables... Ils me donnent honte d'être humaine. »

Le silence seul lui répondit ; quand elle se tourna pour recueillir l'avis d'Aïzie, le garçon baissa les yeux, comme s'il ne pouvait la regarder en face.

« Quelle importante, murmura Celestia, d'être humain ou pas. Le cœur dépend si peu de l'enveloppe qui le contient. Celui de certains anges est aussi dur que de la pierre et il existe des humains bons et tendres, comme vous l'êtes... »

Elle observa pensivement l'endroit :

« Aïzie, Iavara... N'êtes-vous pas des semeurs de tempêtes ? Ne pouvez-vous pas faire venir des nuées pour couvrir notre avancée ? »

Les deux jeunes gens échangèrent un regard, un peu confus :

« À la vérité, répondit Ivara doucement, nous n'y avons même pas pensé. Mais tu as raison, Celestia. C'est de loin la meilleure des solutions. Es-tu prêt, Aïzie ? »

Le garçon acquiesça fermement. Ils se retournèrent vers leurs khaïtes et les enfourchèrent, pour les diriger en un vaste arc de cercle qui le mena vers le ciel, où ils allaient pratiquer leur art si singulier...

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