Chapitre 9 - Partie 1
Léolia entra dans la chambre et s'enquit de l'Etat de Lia. La jeune femme avait été plus calme ces derniers jours, ce qui contrastait avec l'état capricieux lors de son arrivée. La domestique s'inquiétait que sa maitresse soit malade. Mais il n'en était rien. Lia s'était sentie vidée depuis son entretien avec Bérénice, et cet après-midi elle devait y retourner, comme promis.
L'Iclite se trouvait sur son lit, pensive. Elle n'avait même pas entendu la domestique entrer dans la chambre. Si bien que lorsque cette dernière arriva à son niveau, Lia sursauta de surprise.
— Vous devez vous préparer miss, vous avez encore loupé le petit déjeuner ! Il faut que vous mangiez ! En plus ce matin c'est la représentation !
Lia tourna mollement la tête vers son interlocutrice.
— La représentation de quoi ?
— Eh bien des costumes de la saison pardis.
Voyant l'incompréhension sur le visage de Lia, Léolia entreprit de lui expliquer que la Représentation était une sorte de défilé où tous les boutiquiers venaient exposer ce qu'ils pensaient être la future mode vestimentaire pour la saison. A la fin, les Belfroid choisissaient l'habit et la couleur de référence à porter pour être « hype ».
Lia se laissa tomber en arrière, peu vivifiée par la perspective de rester assise plusieurs heures et voir défiler des dizaines de personnes pour choisir la couleur de la saison. C'est si superficiel, pensa-t-elle. Elle était beaucoup plus préoccupée par son agenda de l'après-midi.
— Borloc y participe-t-il ? demanda-t-elle quand même.
— Bien sur ! Chaque année il se bat pour la première place avec Brochon, le boutiquier d'en face ! C'est un vrai spectacle que de les voir se disputer.
Lia ne put retenir un petit rire. Tant de fois Borloc avait craché sur son concurrent, qu'elle ne résista pas d'imaginer la scène.
— Vous viendrez n'est-ce pas ?
— Puisque je n'ai rien d'autre à faire ...
— Alors dépêchez-vous, ça commence dans une heure et vous êtes encore en tenue de nuit !
Après avoir été pomponnée pendant ce qui avait paru à Lia des heures, elle put enfin sortir de la chambre, non sans avaler une tranche de pain et un peu de lait que la domestique lui avait apporté. Elles arrivèrent toutes les deux dans le jardin du château, après avoir monté de nombreux escaliers. Lia, essoufflée, repéra au loin le Borloc qui s'énervait sur une femme, surement une de ses mannequins.
— Arrêtez d'bouger bon sang ! qui m'a refilé un'empotée p'reil ! Ah si j'gagne pas face à c'te rat d'Brochon j'vous l'f'rais p'yer cr'yez moi ! Parole d'Borloc !
Il marqua une pause et reprit quand il aperçut Lia :
— Oh ! Ma bonne dame quelle belle surprise ! C'la f'sait bien longtemps qu'vous 'tiez pas v'nu à la boutique ! C'est qu'le Borloc il s'inquiète ! Il fait attention à sa clientèle. C'pas comme l'aut' vautour d'Brochon qui pense qu'à la richesse !
Lia lui sourit et lui rendit sa petite révérence. Ce boutiquier avait le chic de lui faire oublier quelques instants la réalité. Ce sourire mourut immédiatement lorsqu'elle vit Jason monter sur l'estrade, son visage toujours aussi tendu et le regard inexpressif. N'était-il jamais joyeux ? Lui arrivait-il de ne pas être antipathique ? La colère montait à nouveau en elle. Le Borloc du le voir aussi puisqu'il salua rapidement la jeune femme avant de s'en aller en courant retrouver ses mannequins et râler à nouveau à propos de leur inaptitude.
Au loin, Tristan fit signe à Lia qu'il lui avait gardé une place. Elle s'empressa avant que quelqu'un d'autre ne la lui prenne. Ils échangèrent quelques banalités. La jument n'était plus blessée et Tristan participerait demain à la chasse. Lia lui sourit et le remercia silencieusement de rester avec elle. Elle ne savait toujours pas si elle pouvait lui faire totalement confiance mais aujourd'hui, il était la seule personne à tout savoir sur elle et à l'aider. Elle ne pouvait pas se permettre de perdre ce soutien indispensable, malgré la gentillesse de Léolia et la bonne humeur du Borloc.
Des applaudissements retentirent quand les premiers sons de ce qui ressemblait à une trompette se firent entendre. Le défilé commençait.
Lia s'égosilla lors du passage du Borloc. Il tenait la main d'une jeune fille, sublime, qui portait une robe jaune ocre. Elle marchait sur des talons d'au moins 20cm, le Borloc et son exubérance ... Lia eu mal pour elle. Elle cria encore plus fort pour les encourager. La tenue reçu une belle approbation au vu du baromètre de bruit (une personne semblait s'en occuper et noter en fonction du bruit que faisaient les spectateurs).
Lia ne put s'empêcher de jeter un regard vers Jason, puisque c'était lui qui se chargeait de voter. Toujours aussi inexpressif, il applaudissait lentement. Au moins il avait une réaction.
Ce fut au tour du Brochon. Elle le devina au visage du Borloc qui devint rouge vif et au flot d'insulte qu'il assena en sa direction. La fille au bout du bras du Brochon était pâmée d'une magnifique robe bordeaux. Beaucoup plus habillée que celle du Borloc, elle permettait d'afficher facilement la valeur et la richesse de celle qui la portait. Des petits diamants ornaient le tissu du bas du buste jusqu'au bas de la robe. Les manches s'arrêtaient mi-épaule et la fille portait des espèces de gants en laine fine, gris, qui remontaient jusqu'au-dessus du coude. Parfait pour les temps frais qui s'annonçaient. Ses épaules étaient recouvertes d'un châle de la même couleur que les gants. L'habits était chaleureux mais assez froid pour sublimer la classe du mannequin. Les deux saluèrent Jason dans une longue révérence, puis lorsque ce dernier fit un hochement de tête, ils repartirent. Ils étaient acclamés par la foule mais Lia ne pouvait décidé s'il y avait eu plus de bruit pour lui ou pour le Borloc. Le choix allait être dur, la jeune fille devait bien admettre que le Brochon était un concurrent de haut prestige et de très bon gout.
Quelques autres boutiquiers défilèrent mais aucun n'eut l'émulation qu'avaient créé les deux autres. Vint alors le moment des récompenses. Tous les boutiquiers, ainsi que leurs mannequins, s'avancèrent en ligne devant les gradins et attendirent le verdict de Jason. Ce dernier écoutait attentivement ce qu'un de ses conseillers lui chuchotait à l'oreille. Il acquiesça et se leva.
- Mesdames, messieurs. C'est encore aujourd'hui un grand honneur de vous voir si nombreux au défilé saisonnier. Je dois admettre que vous m'avez tous impressionné par vos créations, et par le choix de vos mannequins, lança-t-il avec un petit sourire.
Alors la foule se mit à rire et Lia leva les yeux au ciel. Fallait-il toujours faire allusion à la sexualité et au désir ?
- Néanmoins, l'un d'entre vous remportera le titre honorifique de Grand Couturier de l'Automnale. Et cette personne est ...
La foule se tut d'un seul coup, plus aucun bruit ne transparut. On eut dit qu'ils avaient arrêté de respirer.
- Monsieur Borloc !
Une ovation de la foule et le vieux Borloc, les larmes dévalant ses joues, avança pour remercier Jason. Il salua la foule puis se retourna vers le Brochon et lui fit un des sourires les plus hautain que Lia n'ait jamais vu. Elle appréciait grandement le Borloc mais elle abhorrait cette façon de traiter son concurrent, si ennemis soient-il.
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