Le sang de Lia se figea et le puzzle s'assembla dans sa tête. Cette sensation étrange, comme l'impression qu'on s'infiltrait en elle, dans son sang. C'était réel. Anna l'avait sondé. Elle était entrée en elle, dans chaque cellule de mon corps.

— Mais, commença-t-elle, j'ai toujours appris qu'on ne les mutilait qu'à leur maturité. Elle est beaucoup trop jeune non ?

— Oui ... Mes parents l'ont sauvé d'une famille mal intentionnée. Ils l'ont payé de leur vie ...

— Je suis désolé...

Elle hocha la tête avec un faible sourire, puis se retourna pour continuer de reboucher un trou dans le mur.

 Tristan était à présent réveillé et jouait avec Anna. L'Iclite s'approcha d'eux. Ils étaient sur le sol, à côté du feu. Lia s'assit dans le canapé et posa la couverture qu'elle avait gardé sur les épaules. Ils dessinaient, enfin Anna apprenait à Tristan à dessiner. Ce dernier remarqua enfin sa présence.

— C'est incroyable, cette petite a un don pour le dessin, regarde ça !

Il lui tendit le dessin d'Anna. On y voyait plein de signes tribaux dans les coins et au milieu des tas d'animaux, des châteaux et même le visage d'une fille. Lia leva la tête vers elle, émerveillée par ce qu'une petite de son âge pouvait déjà faire. La fillette pointa son doigt vers elle. Alors la jeune fille pencha la tête et fronça les yeux pour lui faire comprendre qu'elle ne saisissait pas.

— C'est toi.

Lia se retourna, Alice avait presque murmuré ces mots et lui lança un clin d'œil. La jeune femme se concentra à nouveau sur le dessin. Elle le regarda plus intensément et se rendit compte qu'il y avait quelque chose sur la tête. Elle le rapprocha et découvrit un œil sur le front alors que les yeux étaient fermés.

— Je crois que c'est sa manière à elle de te dire qu'elle sait ce que tu es, lui annonça Tristan, en se levant.

Lia continuait à regarder ce dessin. La manière dont Anna la représentait l'intriguait. Sur le dessin, elle ne voyait plus avec ses yeux mais avec sa tête, grâce à son don. La fillette discernait un lien entre leurs deux dons. Comme si on avait mutilé les yeux de Lia pour que son don s'extrapole. Elle s'émerveilla devant la subtilité d'Anna.

— C'est magnifique Anna, murmura-t-elle avec un grand sourire.

La fillette lui rendit son sourire, serra la main à Tristan en guise de trêve pour leur bataille de dessin et se leva pour rejoindre Alice . Lia se pencha vers Tristan.

— Fais-moi voir comment tu m'as dessiné, le taquina-t-elle.

Il hésita quelques instants et lui tendit sa feuille. Elle ne put s'empêcher de sourire à la vue de ses dessins, qui semblaient plutôt provenir d'un enfant de trois ans qu'à un garçon d'une vingtaine d'année. Elle reconnut des châteaux aux murs maladroits, des chevaux et bœufs aux pattes douteuses, des fleurs et des arbres ainsi que ce qu'elle imaginait être la représentation d'une éclipse (un rond noir qui surplombe un rond clair). Mais elle ne voyait pas ce qui pouvait ressembler à une femme.

Elle tourna la tête vers lui, en fronçant ses sourcils d'incompréhension. Alors il lui pointa du doigt un dessin sur le côté.

— Là ce sont tes cheveux, là ton nez et là, la couverture.

Il l'avait dessiné endormie dans le canapé, comme elle l'était quelques heures plus tôt. Lia fut gênée, alors elle lui sourit et lui rendit la feuille. Comme elle se levait du canapé et s'apprêtait à rejoindre leurs  deux hôtes, pour les aider à préparer la soupe, il l'attrapa le bras.

— Lia, je sais que tu es persuadée que je t'ai trahi, mais je te promets qu'il n'en est rien.

— Peut-être Tristan, mais je ne peux pas oublier en une journée des semaines où je t'ai haï. Allons à Humelac et  on avisera.

Au plus profond d'elle, elle savait et peut être qu'elle avait toujours su qu'il ne l'avait pas trahi. Elle lui en voulait de ne pas avoir été là pour la sauver. Mais ça, Lia n'avait pas le droit de le penser, car c'était trop égoïste. Par-dessus tout elle s'en voulait encore plus de ne pas avoir réussi à se sauver soi-même. Elle ne voulait pas dépendre de quelqu'un, encore moins d'un homme, puisqu'elle en avait dépendu toute sa vie et que son futur en dépendrait également. Jason ... Elle prit une grande inspiration à cette pensée pour calmer son cerveau en ébullition. Ils devaient repartir.

Ils dirent au revoir aux filles qui les avaient reçu pour ces quelques heures de repos. Lia se baissa au niveau d'Anna et lui caressa la joue. Le regard de la fillette était toujours inexpressif mais elle savait à présent que c'était son Ouïe qui prenait le pas sur son regard. Elle lui fit son plus beau sourire et l'embrassa sur le front avant de saluer Alice. Ainsi ils partirent, reposés et prêt à affronter Humelac.

Après plusieurs jours à cheval ou à marcher pour laisser la monture se reposer,  ils arrivèrent à l'orée d'un village qui s'apparentait plus à une petite ville. On pouvait entendre les bruits d'une ville en plein effort, les charrettes sur les pavés, les marchands qui scandaient des boniments pour leurs marchandises.

— Bienvenue à Humelac, lança solennellement Tristan.

Lia sentit sa gorge se serrer et son pouls s'accélérer. L'épicier posa une main sur le bas de son dos, comme pour la calmer et lui dire qu'elle n'était pas seule pour affronter son destin. Alors ils marchèrent lentement, Lia voulait prendre son temps. Une fois passé l'entrée, plus possible de faire marche arrière. 

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Et voila !! Enfin l'arrivée à Humelac et bientôt la rencontre avec Jason, j'espère que vous avez aussi hâte que moi ^^ Merci pour tout, et n'hésitez pas à laisser un petit commentaire et à voter si vous avez aimé ce chapitre, ça fait toujours plaisir et ça motive :) <3
La bise !