Chapitre 5 - Partie 1
— Roland ?
Il lui sourit et l'obligea à manger quelques bouts de pain. Au début l'entreprise était difficile, sa bouche était encore un peu pâteuse et elle avait l'estomac qui n'était plus habitué à recevoir de la nourriture. Elle resta silencieuse. Roland lui tendit sa gourde d'eau pour qu'elle puisse s'abreuver mais il la lui reprit, en faisant signe d'y aller doucement. Son corps devait se réhabituer petit à petit. Lorsque Lia fut suffisamment repue et hydratée pour reprendre pleinement conscience de ce qui l'entourait, elle observa les alentours. Ils étaient dans la forêt et la nuit était tombée. Un cheval était attaché à un arbre.
Elle comprit alors qu'ils avaient dû faire du chemin. La jeune femme se retourna vers Roland, avec appréhension. Etait-ce lui qui l'avait sauvé ? Et, l'avait-il réellement sauvé ou l'amenait-il aux Maréchaux. Que savait-il ?
— Vous allez mieux ?
Lia hocha prudemment la tête. Elle ramena les genoux sur sa poitrine, il faisait froid. L'homme se leva, alla vers son cheval et revint avec une couverture qu'il passa sur ses épaules. L'iclite le remercia avec un sourire timide.
— Maintenant, pouvez-vous me dire ce que vous avez fait pour finir prisonnière de cet idiot de Raenar ?
Lia détourna le regard, elle n'avait pas encore la force d'affronter celui de son interlocuteur, noir. Elle cherchait aussi désespérément ce qu'elle allait pouvoir dire. Il était absolument certain qu'elle ne pouvait pas lui parler de son Don et encore moins que Raenar voulait l'entrainer pour l'utiliser sur lui. Elle se rappela alors une des phrases de son père « Pour qu'un mensonge paraisse véritable, il faut qu'il soit proche de la vérité ».
— Je n'en ai aucune idée, feignit-elle, il m'a seulement dit « Vous pourrez maudire Tristan ». Mais je ne sais pas de quoi il parle.
— Tristan ? Il avait pourtant l'air normal hier.
Lia ressentit comme une brûlure au creux de son ventre. La douleur remonta ensuite jusqu'à ses poumons. L'air devenait rare. Tristan était au château ? Il était donc revenu et n'avait pas cherché à la retrouver? C'était donc bien lui qui l'avait dénoncé. La jeune fille avait du mal à s'avouer qu'elle avait secrètement gardé en soi l'espoir que tout cela ne fût qu'un quiproquo, qu'une histoire inventée par Raenar pour qu'elle se sente seule et prise au piège, sans aucune autre porte de sortie que celle de l'aider. Elle sentit sa gorge se serrer et la rage lui monter aux yeux.
— Oh je vois ... Espèreriez-vous que ce soit lui qui soit venu vous sauver ? rétorqua-t-il avec un petit sourire en coin. Sacré Tristan, toujours à piétiner l'espoir des femmes.
Elle tourna la tête, nauséeuse, ne supportant pas d'être tournée en ridicule. Et surtout parce qu'il avait raison. Il laissa échapper un petit rire devant sa réaction puis lui tendit une autre gourde. La jeune fille l'attrapa, perplexe et l'ouvrit. Les effluves de whisky lui montèrent au nez. Elle le toisa, choquée. Il s'esclaffa à nouveau devant sa réaction innocente et puérile.
— Ça vous tiendra chaud, lança-t-il, vous auriez tort de vous en priver.
Alors elle but une grande gorgée, non sans dégout. Elle sentit le liquide lui brûler l'œsophage et la gorge avant de le sentir réchauffer son estomac.
Elle toussa d'écœurement et Roland ne manqua pas de se moquer, une fois de plus.
Il reprit la gourde qu'elle lui rendait et il tendit la main pour la relever.
— Où allons-nous, demanda-t-elle, sur ses gardes
— Vous m'accompagnez sur ma prochaine visite, mademoiselle.
— Et où se trouve-t-elle, cette prochaine visite ?
— Ce sera la grande surprise, mais cela vous plaira, j'en suis sûr.
Il rit de son propre mystère et l'aida à monter à cheval. La jeune fuyarde était de moins en moins rassurée, mais elle n'avait pas d'autre choix que de le suivre. Elle ne survivrait pas une nuit dans la forêt, seule. Elle était encore trop faible.
Ils étaient en chemin depuis quelques heures. Roland lui avait expliqué que c'est une des servantes, qui lui avait appris qu'elle était retenue prisonnière par Raenar. Une sur laquelle elle avait tenté de s'exercer. Cette discussion lui avait apprit deux choses : au-delà de tout ce qu'on avait pu lui dire sur Roland, il n'était pas une si mauvaise personne car il était venu la sauver. Deuxièmement il savait qu'elle avait un don, mais pas lequel. Elle ne savait donc toujours pas comment se positionner face à lui. Elle lui devait probablement la vie, car une journée de plus et elle serait morte deshydratée.
Soit il allait être sa rédemption soit il serait son bourreau. Tout ce que Lia savait, c'est qu'aujourd'hui elle n'avait plus Thaïs, plus Tristan et plus Raenar; qu'elle se trouvait dans un lieu inconnu et qu'elle n'avait aucune idée du chemin pour gagner Humelac. Elle n'avait donc pas le choix que de suivre celui dont tous l'avait prévenu de se méfier. Mais ce sont aussi ces personnes-là qui l'avaient trahie et abandonnée.
Ils s'arrêtèrent dans une petite taverne où Roland salua tous les hommes. Elle se rappela leur discussion dans le jardin du château. Il devait certainement être l'espion de son « maitre » dans toute cette région de la Communauté. On pouvait lire sur le visage de ces hommes la crainte, mais aussi le respect et l'admiration. Cela la confortait dans l'idée que Roland n'était pas quelqu'un de mauvais.
Ils s'assirent et Roland commanda de quoi manger et boire. Ils trinquèrent et Lia se jeta sur la nourriture. Son estomac s'était réhabitué et elle pouvait à nouveau se nourrir en quantité convenable. Son appétit fit rire Roland à gorge déployée.
— Ne vous étouffez pas ! Personne ne vous volera votre part, se moqua-t-il.
La jeune femme manqua de recracher un des morceaux de viande qu'elle avait pris en hâte puis porta la main à sa bouche, gênée. Elle déglutit longuement, posa ses couverts, s'essuya les coins de la bouche avant de lui sourire.
— Je ne sais pas comment vous remercier Roland.
Elle avait décidé de le brosser dans le sens du poil, pour finalement arriver à mieux cerner le personnage. Elle mourrai aussi d'envie de découvrir qui était son maître. Mais par-dessus tout elle voulait connaître leur prochain arrêt.
— J'ai ma petite idée, répondit-il, avec un sourire carnassier.
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