Chapitre 90

Je sens la colère de maman jusqu'à la penderie et papa reste encore silencieux, m'angoissant de plus en plus.

Les mots de ma mère repassent en boucle dans ma tête et je crains pour la suite. Elle ne peut pas rester dans la même pièce que lui tellement elle le déteste de lui avoir infligé la pire des souffrances.

Soudain, j'entends un vacarme et alertée, j'ose ouvrir la porte pour épier ce qu'il se passe.

Eh bien, maman a perdu son sang-froid étant donné qu'elle menace mon père avec un couteau de cuisine.

— Crache le morceau, Enrique ! s'emporte-t-elle avec le regard fou.

— Marisa s'est alliée avec le vieux Rodriguez et elle a réussi à infiltrer quelques gars dans le réseau des Reyes, annonce gravement mon père.

Marisa ? Qui est Marisa ?!

C'était donc ça son secret qu'il gardait uniquement pour lui ?

Soudain ma sœur sort brusquement de la penderie et nos parents se retournent dans notre direction.

— Donc, j'ai poireauté une heure de temps dans la penderie pour ça ? C'est décevant, peste ma sœur en s'étirant les bras.

Papa m'envoie un regard confus.

— Qu'est-ce que vous faites ici ? Attendez, vous n'étiez pas de mèche ?

J'ignore sa question et m'approche de lui avec les sourcils froncés.

— C'était ça que tu ne voulais pas me révéler ? C'est qui cette salope de Marisa ? je lui questionne.

Il ouvre sa bouche mais Espen le devance d'une voix plus sombre et plus grave que d'habitude :

— La salope de Marisa est ma mère, muñeca.

Les yeux exorbitants, je l'observe s'approcher dangereusement de mon père qui commence à trembler comme une feuille.

Attendez une seconde.

La mère d'Espen s'est alliée avec l'ennemi ? Mais pourquoi elle ferait un truc pareil ?

La situation se corse de plus en plus et j'ai cette sensation d'être perdue au milieu de nulle part.

Du regard, j'avertis mon époux et il acquiesce lentement pour me soulager. Mais d'un coup, sans crier gare, il attrape mon père par le col de sa chemise et c'est l'affolement total à la maison. Putain.

Je lui ordonne de lâcher mon père mais le diable n'écoute que cette petite voix dans sa tête. Difficilement, j'essaie de l'éloigner de lui mais mes efforts sont en vain.

— J'ai été bien patient avec toi Perez mais maintenant, cesse ton putain jeu et crache tout ce que tu sais sur les Rodriguez ! J'ai hérité la folie de ton pote alors ne me tente pas, persifle Espen avec les yeux sombres.

— Espen, s'il-te-plaît !

— Ça va, Hija. Je vais tout vous révéler si ton mari veut bien me reposer par terre, cède papa avec un regard affolé.

Espen le lâche brutalement mais reste toujours près de lui, le regard menaçant.

Je déglutis difficilement et pousse légèrement le diable mais en vain, il ne bouge même pas d'un poil.

Il s'éloignera quand papa nous avouera tout.

— Papa, parle ! je lui ordonne sèchement. Et n'ose même pas de t'enfuir ici sinon c'est moi qui terminerai le travail d'Espen.

Papa soupire longuement et par précaution, Alira se met à côté de lui.

—Une fois que Francesco m'a envoyé au Texas, la mission se passe comme prévu. J'avais récolté assez d'infos mais lorsque j'ai appris la mort de Francesco, je voulais arrêter. Ton grand-père m'a convoqué et m'a imposé de continuer la mission jusqu'à il me dit d'arrêter. Si j'allais à son encontre, il me le ferait payer sur la vie de Matteo.

Donc le vieux Reyes est aussi un être diabolique ? Et moi qui croyais qu'il était sympa. Pendant tout ce temps, ce type me parlait droit dans les yeux sans aucune once de remords.

Une sensation désagréable m'envahit comme si Espen l'avait senti, il pose sa main sur mon épaule.

— Et ? j'insiste avec la voix étranglée.

— La mission était toujours actuelle. Pendant des années, j'ai récolté des informations qu'on pourrait utiliser à notre avantage mais le vieux voulait plus. Et j'ai trouvé ce plus, continue papa les yeux au sol. Un jour, j'ai surpris une conversation entre deux hommes de main des Rodriguez. Ils parlaient d'une nouvelle alliée venue tout droit du Mexique et cette dernière partageait les mêmes ambitions qu'eux. Écraser les quatre clans et étendre leur business sur tout le bled. Alors pendant des jours, voire des mois, j'ai essayé de dénicher l'identité de cette alliée mais pendant deux ans, elle est restée sous anonymat.

— Donc là, t'essaies de me dire que les Rodriguez ont accepté l'aide d'une incognito ?

Mon père ignore ma question et continue :

— Mais ma persévérance est récompensée. L'année dernière, j'ai appris que l'alliée est tout bonnement Marisa. Je vous épargne ma surprise quand je l'ai découvert en train de discuter avec le chef des Rodriguez autour d'un verre de Dom Pérignon. Le chef veut s'accaparer le pouvoir de chaque clan et Marisa, eh bien...

— Parle putain ! tonne Espen.

— Ta mère veut tout simplement te détruire. Toi et tout ce que tu chéris le plus du profond de ton âme.

Un hoquet s'échappe entre mes lèvres.

Du coin de l'œil, je vois Epsen se déstabiliser. J'essaie de maintenir un contact visuel avec lui mais c'est comme si je fais face à un fantôme. Il fixe dans le vide et ne bouge plus. Seigneur, mais quel cauchemar...

— Espen ?, je l'appelle avec hésitation.

Soudain, comme s'il émergé d'un rêve, il se retourne dans ma direction et ancre son regard verdâtre dans le mien :

— Je vais prendre l'air.

À contre-cœur, j'acquiesce et il s'en va en claquant la porte fortement. Avec les autres, on s'échange un regard inquiet.

Merde.

Ça va chier des bulles.

***

Plus tard.

De retour à la villa, j'attends impatiemment le retour de mon mari mais j'ai l'impression qu'il est inutile d'attendre. Je m'en rappelle d'une discussion que j'ai eue avec lui. S'il est vraiment contrarié, il ira prendre l'air et personne n'a intérêt à le joindre sinon nous souhaitons bonne chance pour notre vie.

Il a besoin d'espace pour encaisser cette nouvelle et j'essaie d'accepter le fait qu'il a besoin d'être solitaire dans ce genre de moment mais je reste toujours inquiète. J'ai peur que quelque chose lui soit arrivé, qu'il soit blessé ou pire, qu'il commet l'irréparable !

Qui sait ? Imaginons qu'il est actuellement de retracer sa maudite mère...

— Mira, tu pues le stress ! Tu m'inquiètes encore plus, souffle Elsie en berçant son gosse.

— J'ai peur pour lui...

— Je sais mais si j'étais lui, il ne voudrait pas que tu te mettes dans cet état. Je suis sûr qu'Espen va bien ! Enfin, j'espère...

Je lui envoie un regard et m'assoie mollement sur le canapé.

Je t'en supplie, reviens...

— Quand il reviendra, je lui collerai un traceur sous la peau, dis-je avec une moue.

Elsie rigole, faisant réveiller son gosse qui chiale à nouveau. Et ce bébé... Seigneur, il fait bouillir mon sang !

— Je t'aiderai si tu veux. Normalement, c'était prévu qu'on choisisse ta robe de mariée...

— Je ne suis pas d'humeur à faire des essayages, Elsie.

— Elle a raison. On doit t'aider à choisir ta robe de mariée. Donc, lève ton cul et let's go ! intervient Alira.

Elsie lève son pouce dans la direction de ma jumelle et je souffle avec frustration. Il est vrai que c'était prévu qu'on fasse quelques essayages mais mon moral est à zéro. Enfin, j'ai mon mari qui s'est perdu dans la nature !

J'ai un mari qui a des tendances meurtrières, accompagné d'un sadisme et là, il est quelque part dans la street.

Cette description me fout des frissons.

— Tu vois, elle est du même avis que moi ! Attends, je vais prévenir le magasin qu'on se met en route ! Tiens, porte Thiago.

— Elsie.

Mais trop tard.

Elle pose son nourrisson chialeur entre mes bras et s'éclipse. Le corps crispé, je berce maladroitement ce bébé qui cesse de pleurer tandis que ma sœur se marre de moi. Enfin ce crâne d'œuf s'est calmé.

C'est moi qui l'ai calmé ?

Imaginons que je sois dotée d'un don qui calme les bébés pleurnicheurs ?

Trop bien.

— La grossesse te va bien je trouve.

— Si elle me va bien, alors à toi aussi, je réplique aussitôt en lui adressant un regard blasé.

Alira grimace et range son téléphone pour s'installer à côté de moi.

— Je sais que t'aimes pas les enfants mais tu seras obligée d'en avoir. En plus Reyes il est vieux, donc...

— Arrête ! Il a vingt neuf ans, d'accord ? Et puis, ce n'est pas parce que je n'aime pas les enfants.. en fait si. J'ai horreur d'eux.

J'ai déjà une conversation avec le diable concernant les enfants. J'ai été clair sur le fait que je n'aime pas les gosses et il accepte mon choix. Peut-être plus tard on aura, qui sait ? Je ne prédis pas l'avenir mais la grossesse m'a toujours effrayé.

Et puis, que je le veuille ou pas, je serai bien obligé de donner un bébé à Espen sinon qui prendra les rennes de la mafia ?

— Tu sais ma sœur chérie, tu peux t'entraîner à être une mère avec ce bougre.

— Qui ça ? Thiago ? Hors de question ! Cet enfant a le don de m'agacer, je riposte aussitôt.

— Mais essaie quand même. Peut-être que tu détesterais moins les enfants.

Je reste toujours silencieuse en berçant le bébé.

Après tout, ma sœur n'a pas tort.

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