Chapitre 68


— Espen, qu'est-ce....

Il ferme la porte brutalement après avoir provoqué un chaos dans mon esprit. Je touche mes lèvres avec confusion et je réprime ce sourire qui tente de prendre forme sur mes lèvres. Je me prépare assez rapidement et j'enfile une robe fleurie qui m'arrive jusqu'aux genoux. C'est une robe assez simple mais qui a quand même sa touche professionnelle.

Je fais le choix de me maquiller cette fois-ci. Même si mes hématomes ont un peu disparu, j'ai un peu honte de rencontrer des associés de Espen avec une tronche amochée. Un peu de fond de teint,  deux traits eyeliners, du mascara et du rouge à lèvres, c'est bon, je suis prête.

Quant à mes cheveux, je les ai simplement lissés et détachés.

Je rejoins Espen avec une boule au ventre et ce dernier daigne à peine me lancer un regard avant que nous partons en direction du restaurant. Une demi heure plus tard, nous sommes accueillis dans un restaurant dont la décoration fait un peu bohème et convivial.

— Attends-moi ici.

Espen m'abandonne et suit un serveur en regardant autour de lui. Je trouve assez bizarre que cette rencontre va se dérouler dans un endroit pareil. Ce resto est visiblement prisée par les touristes et cette déco contraste fortement avec ces présumés mafieux.

Je m'attendais à un resto chic et élégant pour cette rencontre et non à un p'tit resto bohème.

Espen revient et m'ordonne de le suivre. Nous arrivons à une table éloignée des autres et ma confusion s'agrandit davantage face à la petite taille de cette table qui est destinée pour deux personnes.

— Et tes associés ? Ils ne viennent pas ? je lui questionne alors qu'il tire une chaise afin que je prenne place.

— Ils ont eu un imprévu. Ces connards viennent tout juste de me prévenir, siffle-t-il avec humeur. Mais comme nous sommes déjà là, autant manger, non ?

Avec une moue, je hoche la tête et attrape la carte du menu.

Je n'aurai jamais imaginé qu'un jour je me retrouverai face à face avec Espen dans un restaurant. On dirait un rencard mais je chasse cette idée de ma tête. Il ne m'a pas invité pour un rencard mais pour l'accompagner à cette soit disant rencontre avec ces associés fantômes.

— Tu n'as pas pris ton téléphone avec toi ?

— Je l'ai laissé à la villa et je l'ai éteint. J'ai pas envie qu'on vienne me faire chier, je réponds lentement.

— Tu as raison, je vais faire pareil, dit-il vivement en éteignant son téléphone sous mes yeux.

Je lui lance un regard perdu et pose la carte du menu sur la table.

— T'es bizarre, Espen. Tu peux me dire ce qu'il se passe ?

D'un geste las, il hausse les épaules.

— Tu as fini de choisir ce que tu veux bouffer ?

— Je le ferai si tu me dis que ce tu trames encore.

Il m'ignore ouvertement et appelle le serveur.

— Je vais prendre votre plat du jour et pour madame ça sera une salade césar...

— Je vais prendre un filet de boeuf saignant et comme accompagnement des frites et une salade verte, je l'interromps aussitôt en lui lançant un regard noir.

Il me lance un sourire insolent.

J'ai horreur qu'on choisisse pour moi. Il croit vraiment que c'est une petite salade qui va me caler ? J'ai un grand appétit. Nous commandons ensuite nos boissons et ensuite le serveur tourne les talons.

Je jette un regard dans la pièce et sens toujours le regard intense du diable sur moi. Putain, je vais vraiment manger toute seule avec lui. Cette fois-ci, il n'y aura pas Antonio qui pourra m'aider dans ce genre de situation. Je suis vouée à moi-même.

— Tu es désormais fraichement diplômée. Tu as l'intention de nous quitter pour réaliser ton rêve, n'est-ce pas ? me questionne-t-il subitement.

Comme réponse, je hausse les épaules. Je n'ai aucune idée de ce que je pourrai faire, à vrai dire.

— J'ai décidé de continuer mes études parce que je l'ai promis à mon père mais maintenant, je suis perdue.

— Tu peux revenir à la maison et travailler pour moi.

Je ricane légèrement et le serveur apporte nos boissons.

— Je suis bien où je suis et tant qu'Alexa vit toujours chez toi, je ne poserai plus mes pieds. Je ne veux plus la revoir.

— Elle ne sera plus à la maison. Après tout ce qu'elle t'a fait, elle a intérêt de rester loin de moi, rétorque le diable après avoir bu une gorgée de son martini.

— J'aime bien Tampico et tant que je n'ai pas pris de décision quant à mon avenir, je continuerai de travailler avec Nico. Il est plutôt sympa comme type.

Je suis enfin diplômée et normalement, comme toute personne normale, je devrai trouver un vrai taf. Avec les études que j'ai enduré pendant cinq ans, plusieurs portes sont ouvertes comme taffer dans des labo ou encore mieux, intégrer la police scientifique.

Mais pour l'instant, j'ai plutôt envie de chômer et même voyager ! Après Cancun, j'aimerais retourner au Texas pour retrouver quelques potes d'enfance et j'ai même songé à faire un road trip avec Alira mais vu que notre relation s'est dégradée, je peux tirer un trait à cette idée.

Cette dernière me menace toujours d'annuler ce mariage sinon ce sont mes proches qui en paieront les frais. J'aimerais tellement croire qu'elle me raconte des balivernes mais d'après les investigations d'un de mes potes, Alira est étroitement lié eaux flics, limite elle travaille avec eux dans le but de démanteler un réseau de trafic d'être humain qui appartient à  la famille Gonzalez.

Elle trahit son propre clan, sa propre famille et je me demande pourquoi vouloir mettre sa vie en danger. Est-ce tout simplement une rébellion parce que le chef des Gonzalez ne veut pas qu'elle prenne ma place à ce mariage ?

Je soupire sur cette pensée et nos repas sont enfin servis. Bizarrement, ça se passe à merveille. Espen lance une discussion plutôt banale mais pas du tout ennuyante. Au contraire, c'est même étonnant qu'on arrive à discuter si longuement. Et le repas, n'en parlons même pas ! C'est divin !

Nous nous apprêtons à partir et j'attends Espen près de voiture, ce dernier étant parti régler l'addition.

Du coin de l'oeil, je remarque qu'un homme s'approche de moi en titubant. Je chuchote des jurons dans ma barbe, sachant à quel genre d'énergumène j'ai affaire et comme je l'ai prédit, il m'adresse la parole avec une voix lente et grave :

— Une si joliee robe doit certainement cacher un corps de déesse.

Il rit comme un sombre con et je repousse sa main qui tente d'attraper le pans de ma robe.

— Tu devrais t'en aller le vieux, je risque de te blesser.

Enfin, non. Je ne pourrai pas le blesser. Mon corps est toujours courbaturé de dernier duel et je veux pas faire sauter mes points du suture ! Cependant, le soulard insiste toujours et raille :

— Comment une si belle créature peut se défendre ? Une femme ne sait pas se battre ! Aller, suis-moi. Je suis un homme qui te fera monter au septième ciel.

— Dégage, putain !

S'en suit une gifle. J'espère qu'il a saisit le message et qu'il s'éloigne loin d'ici. Je suis en mauvaise posture pour me défendre mais si Espen débarque, ce pauvre crétin regrettera instantanément d'avoir vu la lumière du jour.

Sonné, il me mire avant qu'il prend air fâcheux.

— Sale pute ! Tu portes un robe de prostituée et tu fais bander tous les mecs des alentours mais tu te fais désirer ! Attends, tu vas voir, puta !

Il revient à la charge et attrape mes deux épaules avec force. Par réflexe, mon genou part droit en direction de ses parties intimes mais il esquive mon coup. Alors que je m'apprête à riposter, une ombre surgit de nulle part et ce que je craignais arrive. Espen sépare le saoulard de moi et lui fait passer un savon avec ses poings aussi féroce que les autres.

Le pauvre homme, avachi sur l'asphalte, tente de se défendre mais le diable est plus fort que lui. Quelques passants nous observent et il faut à tout prix mettre un terme à cela mais le petit hic : quand Espen est dans cet état second, il vaut mieux éviter d'intervenir.

Mais si je n'interviens pas, il va commettre un meurtre sous les yeux de tous !

— Espen, arrête toi ! je lui crie, bouleversée par tous ces regards posés sur nous.

Rien.

Nada.

Et puis, c'est impossible qu'il puisse m'entendre ! Il doit être loin dans son univers ! Putain, Mira, tu es dans la mouise...

Le seul moyen plausible c'est de l'approcher et justement, c'est ce que je fais.

Avec hésitation, mes pas s'orientent dans sa direction et prenant mon courage à deux mains, je saisis le poignet du diable. Son regard sombre et froid croisent le mien et un frisson d'effroi parcoure mon épiderme. Cette fois, ce n'est pas seulement le temps qui s'arrête mais également mon souffle qui reste bloquer dans mes poumons.

Son visage m'effraie. Ses traits sont tiré par une colère et son regard... ses yeux autrefois verts sont tellement sombre comme les abysses d'un fond d'océan. Espen est loin de nous et je dois à tout prix le faire revenir avec nous.

— Allons-y !

Avec force, je tire sur son poignet pour qu'il me suit et mais il est tellement lourd et refuse d'obtempérer.

— S'il-te-plaît, retournons à la maison, je le supplie en fronçant les sourcils.

Alléluia, il obéit. Je fouille dans ses poches et prends sa clé de voiture. Je le force à s'installer sur le siège passager. Je jette un dernier regard inquiet à cet pauvre homme inerte sur le sol, puis démarre en trombe.

Durant tout le trajet, Espen est resté silencieux et heureusement pour lui qu'il l'a fermé ! J'ai tellement honte après tout ce qu'il s'est passé.

Arrivés à la villa, il se réfugie dans sa chambre et je prendre une douche chaude pour évacuer tout ce stress. Une fois propre, je désinfecte mes blessures et me laisse tomber sur le matelas en grimaçant.

Et il fallait que la soirée se termine sur une mauvaise note, c'est tellement frustrant ! Pourquoi fallait-il qu'il se bat ? Pourquoi se battre même ?! Une simple menace de mort était largement suffisante.

D'un geste las, je tâtonne ma table de chevet et attrape le livre de citation. C'est vrai que je ne l'ai plus ouvert depuis un certain temps. En fait, j'avais oublié que je détenais ce livre.

La citation que je lis me laisse sur le cul :

«  J'aurais aimé comprendre plus tôt que le coeur voit beaucoup plus de choses que les yeux. »

Je jette le livre de l'autre côté de la pièce et remonte mon nez avec une grimace. Je mets sur le côté et songe. Est-ce qu'il l'a battu pour moi ? Dans l'unique but de me défendre et de me protéger ?

S'il me défend c'est parce qu'il tient à moi, non ? L'autre fois, il a aussi pris m'a défense mais on ignorait de ce qu'on pouvait ressentir l'un à l'autre.

Bon sang, pourquoi je me sens si perdue !

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