Chapitre 61

L'esprit évasif, c'est la sonnette qui me fait prendre conscience. Difficilement, je me lève et ouvre la porte à Alira qui me lance un regard neutre. Elle me serre lentement dans ses bras et entre dans l'appartement en soupirant fortement.

—Tu fais une de ces têtes, dis-je avec un sourire crispé. Installe toi, Lira.

— Toi aussi tu ne sembles pas être dans ton assiette. Je me demande bien pourquoi.

Elle s'installe sur le canapé et je sens que l'atmosphère emplie de tension. Il y a un truc qui cloche chez ma sœur, mais allez savoir pourquoi. Peut-être c'est juste une impression.

Je lui tends un verre de jus et m'assois près d'elle.

— Qu'est-ce qui t'a poussé venir jusqu'ici ? J'avoue que ça m'a un peu surprise.

— Pourquoi ça t'a surpris ? Tu attendais une autre personne ? me demande-t-elle aussitôt.

— Non, du tout ! je m'écris vivement. C'est juste que je trouve qu'on s'est un peu éloignées depuis ces cinq derniers mois et on se texte rarement, du moins, tu répondais rarement mes messages.

— Mira, si je ne te répondais c'est tout simplement que j'étais occupée. Tu sais, j'ai un taf et comme toi, je dois me faire une réputation à Cuidad Victoria. Je ne veux plus me dépendre de maman.

Lentement, j'acquiesce.

— Et qu'est-ce que tu fais comme taf ? Tu déglingues des gens ou bien ?

Elle rit sardoniquement.

— Je ne peux pas te dire, pour l'instant, Mira. Sinon, c'est aujourd'hui que tu as obtenu tes résultats ! Je me suis permise de jeter un coup d'œil et tu es enfin diplômée en chimie ! Tu as l'intention de fêter ?

— Pas du tout. J'ai juste prévu passer la soirée avec toi.

— C'est décidé, ce soir nous irons en boîte ! s'enthousiaste-t-elle en se levant.

Je l'observe se diriger jusqu'à la cuisine et son idée ne me plaît pas spécialement mais si cela lui fait plaisir, alors je suis partante.

Je me demande quel est le métier qu'elle occupe ou bien quel rôle elle occupe dans la mafia des Gonzalez. Contrairement à moi, Alira a été vite plongée dans ce monde sale et cruel. À son adolescence, on lui a appris à vendre la drogue et à la transporter aux pays frontaliers. Rapidement, elle s'est  habituée à ce style de vie tandis que moi, ça ne fait que quelques mois que je suis plongée dans la criminalité.

Discrètement, j'envoie un message à une de mes connaissances et lui exige des recherches sur ma soeur.

Je dois à tout prix savoir si elle ne se met pas en danger ou non. Matteo et Alira sont ma seule famille et je deviendrai folle s'il leur arrive malheur.

— D'ailleurs, je prolonge mon séjour pour quelques jours. ça ne te dérange pas j'espère !

J'arrête tout mouvement et me tourne à elle.

— Pourquoi ?

— Eh bien, les confrontations commencent demain et je veux bien assister.

— Tu participes ?

— Jamais de la vie ! Je n'ai pas les qualité pour, Mira, rétorque-t-elle en levant les yeux. Mes amis seront présents et je voudrais tout simplement les revoir. Je trouve que tu es bien curieuse, Mira.

— Je ne suis pas curieuse, je m'inquiète pour toi. Je croyais que tu... enfin...

— Participer à ces évènements de merde ? Je n'ai pas besoin de ça pour me faire un nom. Au contraire, je trouve ceux qui participent sont tout simplement ridicule, ils cherchent juste faire leur intéressant mais en vrai ils n'ont rien dans leur calbar.

Je ris légèrement et range les derniers couverts.

— Nous sommes pas sœurs pour rien. J'ai le même avis que toi, je lui avoue en m'essuyant les mains.  D'ailleurs, demain je serai accompagnée d'un mec, donc ne sois pas étonnée.

— C'est ton plan cul du moment ? Il s'appelle comment ?

J'évite ses questions en me réfugiant dans ma chambre mais Lira me suit de près en m'assénant d'autres questions. Agacée j'élucide toutes ses interrogations et je sais qu'elle n'est pas convaincue par mes réponses mais pour le moment, elle devra se contenter. 

(...)

Le lendemain

C'est avec anxiété que nous arrivons au lieu du rendez-vous et la première chose qui m'impressionne est cet océan de gens. Je ne m'attendais pas que ces confrontations allaient attirer autant de spectateurs et encore nous sommes le premier jour. Je n'ose même pas imaginer pour les prochains jours.

— Nous y sommes ! s'exclame Andres, excité par l'effervescence de l'évènement.

S'il pète la joie alors croyez-moi, on peut clairement lire sur mon visage que je n'ai strictement aucune envie d'être dans un endroit pareil.

Avec Andres et Alira, nous suivons la foule et l'air frais de la soirée me fait un peu greloter.

— Pourquoi dans un endroit pareil ? Ils n'ont pas réussi à soudoyer la municipalité locale ? je demande amèrement.

Littéralement, nous sommes en plein compagne, entouré de plantations de café et de maïs. C'est un endroit avec peu d'habitation et perdu au milieu de nul part.

— Loin des flics et plus nous nous portons mieux. C'est impossible qu'on organise des évènements pareils à Tampico, cette ville est touristique et croyez-moi, il vaut mieux éviter les touristes. Ils peuvent nous emmerder, explique Andres.

— C'est vraiment un endroit parfait pour ce genre d'évènement. Allons suivre la foule, lance Alira.

Nous suivons la direction de la foule pendant une dizaine de minutes jusqu'à arriver à un vieux entrepôt laissé à l'abandon dont la nature a su s'imposer à nouveau. Des voitures de courses sont stationnées à l'entrée et grâce à leurs phares, je peux distinguer des lianes grimper sur la tôle du bâtiment.

— On dirait qu'on est arrivés un peu en retard, souffle ma soeur.

Nous entendons plusieurs personnes parler dans un micro qui grésille. La foule nous pousse à l'intérieur et me sépare des autres. Putain, il ne manquait plus que ça !

Je cherche du regard Alira et Andres mais ces putains de gens m'engouffrent de plus en plus et me voilà au milieu de la foule, coincée. Mon regard se pose sur le podium où un homme explique les consignes à appliquer mais je m'en fiche royalement de ce qu'il dit.

Je cherche toujours du regard une connaissance et enfin, au fond de la pièce, j'aperçois Matteo avec les jumeaux. Ils sont donc déjà là. Malheureusement, je crains que je ne pourrai pas les joindre tout de suite, cet entrepôt est tellement grand et surtout, bondé de gens. J'ai l'impression que tout le village est réuni !

— Pour cette nouvelle éditions des Confrontations, nous remercions Don Reyes Espen qui a investi personnellement à l'évènement ! Ce soir, il participera à la course ainsi que d'autres participants à son niveau ! Applaudissez-le !

Mon regard se converge sur une grande carrure qui s'impose sur le podium et la foule hue davantage, faisant exploser mes tympans.

Après cinq mois.

Cinq petits mois.

Je le revois et je n'avais pas prévu qu'un jour on se verrait à nouveau. C'est vrai, quelle conne ! Je ne peux pas éviter mon patron jusqu'à mon dernier souffle mais au moins j'aurai tenté. Sa carrure dominante dégage une aura autoritaire, presque malsaine et son regard vert balaye la foule.

Avec angoisse, j'essaie de me faire toute petite et je me cache derrière un groupe de meuf. C'est sûr qu'il ne me verra pas !

Discrètement, je le détaille à nouveau et quelque chose qui me frappe le visage, c'est sa coiffe. Auparavant, ses cheveux étaient mi-longs et joliment plaqués sur le côté mais cette fois-ci, ils sont coupés court comme s'il allait à l'armée. Une coiffe simple mais qui renforce son visage froid et dur.

Quand Espen s'exclame au micro, c'est mon cœur qui s'affole. Entendre à nouveau sa voix me rend comme liquide et je me cache davantage derrière ce groupe de meuf. J'attends encore jusqu'à qu'il déclare qu'il est l'heure de rejoindre la piste de course.

La marée de gens m'emporte avec eux à la sortie et contre mon gré, je suis obligée de suivre la même direction. J'attrape mon téléphone et envoie un message à ma soeur mais une personne me pousse brutalement. Mon téléphone glisse entre mes mains.

Non, non !

Je tente de faire demi-tour mais mierda ! La foule ne semble pas vouloir m'aider. À contre-coeur, j'abandonne mon téléphone et souhaite une chose, c'est qu'il soit toujours au même endroit. Oui, j'ai encore espoir de le retrouver après la course.

— Mais où se trouve la piste de course ?!

— De l'autre côté du petit bois ! Là-bas la route est assez large pour les voitures ! me répond une des spectatrices.

Parce que je vais devoir traverser un bois ? Tard comme ça ?

Je me lamente sur mon sort et suis de près les spectateurs en faisant attention où je mets mes pieds. Enfin le petit bois traversé, je retrouve Andres et cours dans sa direction. Revoir une tête dont je connais est un sentiment tellement agréable, limite je veux même sauter dans ses bras.

— Bordel mais t'étais passée où ?! me crie-t-il avec inquiétude.

— J'étais emportée par la foule. Putain, ça fait du bien de te revoir ! Tous ces gens me filent la nausée !

—On n'est qu'au début, Almira. D'ailleurs, tu sais où es ta soeur ?

Je hausse les épaules et me colle plus à lui.

— Sûrement avec ses potes ou avec un mec, ne t'inquiète pas pour elle, Alira est encore en vie.

— Allons prendre une boisson avant que la course commence, me propose-t-il.

J'acquiesce et nous nous dirigeons vers un petit stand. En chemin, je lui détaille encore à quoi consiste sa mission. Il vaudrait mieux lui expliquer ce que j'attends de lui sinon on ne sera pas crédible.

— T'es sûr que ton frère n'aura pas envie me refaire le portrait ? Je tiens vraiment à mon visage, surtout depuis le jour où j'ai refait mon nez.

— Matteo comme tous les autres frères du monde, va s'inquiéter pour moi et il te prendra à part pour te poser quelques questions. À chaque réponses, tu mens et je m'en fiche de ce que tu diras. Quant aux autres, ils ne vont pas te faire chier, dis-je lentement.

— Mais le Jefe ? demande mon ami, anxieux.

Je reste silencieuse, marchant toujours vers la ligne de départ.

— Quant au jefe, il va t'ignorer et s'il cherche à te connaître, évite-le au maximum. Quant, au baiser urgent, on le fera uniquement quand la situation devient difficile. Nous approchons du groupe, que la mission commence !

Matteo m'aperçoit et m'adresse un grand sourire avant de m'enlacer. Je salue les jumeaux et Elsie et wow ! Son ventre est vraiment immense, on dirait un ballon de baudruche.

— Mais qu'est-ce que tu as fait à tes cheveux ?! Ils étaient si longs et soyeux ! On dirait une sorcière ! raille la rousse.

—Ne dis pas ça, sa nouvelle coupe lui va à ravir, me défend mon frère. C'est vrai qu'on voit plus tes épaules mais je trouve que ça te change. D'ailleurs, pourquoi tu les as coupé ?

Parce que un connard a coupé ma belle chevelure soyeuse avec l'aide d'une dague aiguisée ? C'est la vérité mais pour ne pas l'inquiéter, je lui raconte encore des bobards.

De coin de l'oeil, je vois le diable accompagné de sa diablesse venir dans notre direction. Rapidement, je prends la main d'Andre qui est tendu comme un arbre à mes côtés et discrètement, je lui écrase le pied en lui faisant passer mon avertissement.

Il faut que ça soit crédible !

— Mais quelle conne ! Je vous présente Andres, mon petit  ami, je m'exclame vivement.

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