Chapitre 41

Je lui adresse un dernier regard avant d'entrer dans la cabine et tester les deux robes que j'ai choisi pour le mariage.

J'entends Alira chuchoter des insultes à mon égard et au lieu de m'énerver, ça m'amuse. Oui, on me croirait pour une folle mais je n'ai jamais imaginé qu'un jour je me disputerai avec mon duplicata dans un magasin de vêtement. C'est comme si je me disputai avec le reflet d'un miroir. C'est étrange.

Visiblement, son amour l'a tellement aveuglé qu'elle ne sait plus faire usage de sa cervelle. Je trouve ça un peu déplorable car le jour quand ce connard de Santiago lui révèlera sa facette, il va briser son pauvre petit coeur.

D'un coup, le rideau se tire et Elsie me reluque de la tête aux pieds. Habituée par sa personnalité, je soupire et tourne sur moi-même.

— Cette robe ne te va pas. Elle te donne une forme étrange à ton cul, commente-t-elle avec une grimace.

— C'est gentil ça, je lance avec sarcasme.

— Je suis honnête, Mira. Essaie l'autre robe et ensuite on se casse, j'ai la dalle !

D'un geste vif, elle tire à nouveau le rideau. Cette fois-ci, je porte la robe verte et le tissu satinée me chatouille la peau. La robe m'arrive au-dessus des genoux et j'aime le corset à lacet derrière mon dos. Je trouve que ça met en valeur ma peau basanée.

Puis, je prends conscience pourquoi la couleur de cette robe m'attirait et m'intriguait.

La couleur des yeux du diable.

Sans que je puisse me contrôler, un sourire épanoui s'étirent sur mes lèvres et je trouve que cette couleur me va à ravir. C'est décidé, je prends cette robe !

Une fois nous ayons fini nos emplettes, nous partons enfin dans un resto où enfin, je peux enfin reposer mes pieds. Gaël nous a rejoint dix minutes plus tard et s'assoit à côté de moi, en face d'Elsie. Selon lui, il ne peut pas se permettre à s'assoir à côté de sa futur ex parce que à tout moment, Espen pourrait porter des soupçons.

S'ils savaient que j'ai filé une piste au diable...

— D'ailleurs, comment se porte mon frère ? questionne Elsie en évitant le regard de son amant.

— Il ne l'admet pas mais il est nerveux depuis ces derniers temps, rétorque le bras droit avec une mine peinée.

— Qu'est-ce qui l'a ? je demande, curieuse.

L'homme me daigne un regard blasé tandis que je sirote mon cocktail.

— Les Hernandez lui courent après. Alexa est sa promise et ça fait bien longtemps qu'il a reporté son mariage mais cette fois-ci, ils n'ont pas l'intention de le laisser passer.

Je m'étouffe dans ma boisson et discrètement je m'essuie la bouche.

— Cette salope d'Alexa ! persiffle Elsie avec dédain. Depuis qu'elle est promise à mon frère, elle se pète le cul. Il est évident qu'elle considère mon frère comme un trophée.

— Certes mais leur mariage est imminent. Espen aura bientôt la trentaine et il n'a toujours pas de descendant et son grand-père exige beaucoup de lui, note Gaël après une bouchée de son steak. Et puis, les deux sont similaires, ils ne sont pas sérieux.

— Certes mais j'aurai préférée une belle-soeur qui n'a pas une mentalité de pute. Cette Alexa a la chatte la plus visité du pays, rouspète Elsie.

— D'après ce que le chef m'a informé, il s'apprête à signer le formulaire de mariage. Il est trop tard pour protester, annonce-t-il gravement.

J'ai perdu mon appétit et pousse délicatement mon verre avec ce sentiment désagréable au centre ma poitrine.

Je devrais m'en ficher et être heureuse pour lui, alors pourquoi j'ai l'impression qu'on m'arrache les entrailles ?

**
*

Le mariage d'Elsie est aujourd'hui. Aujourd'hui, elle vendra son âme à ce pendejo d'Angelo.

C'est avec un goût amer que je me prépare. Je me chausse des escarpins qui me torturent les bouts de mes orteils et si j'étais une connasse, je serai venue au mariage avec des converses mais pour mon amie, je me sacrifierai avec elle.
Et puis ce mariage regroupe des grands chefs de la mafia, je ne devrais pas me présenter à eux comme une clodo.

Je dépose mon pinceau et malgré les circonstances, je me trouve terriblement belle dans cette robe et avec ce smokey eyes.

Je sors de ma chambre et rejoins mon frère qui m'attend au salon. Au chemin, je croise à nouveau cette Alexa qui me sourit hypocritement. Je l'ignore ouvertement et nos épaules se bousculent. De justesse, je m'appuie contre le mur afin de retrouver mon équilibre avant de lui adresser un mauvais regard.

— Excuse...

— Garde tes maudits excuses pour toi. Si tu ne vois pas assez bien, porte des lunettes, c'est remboursable avec la mutuelle, je crache en passant une mèche derrière mon oreille.

Alexa rit et arque un sourcil, se pivotant face à moi.

Depuis des jours, cette salope s'inscruste chez nous comme un parasite et prend des airs de duchesse. Elle fout un bordel comme par possible derrière elle et ose me piquer mes affaires dans ma chambre ! Oui dans ma chambre !

Comment je sais ? Ça ne sera pas mon frère qui va me piquer mon maquillage et mes produits de skin care.

Pour une autre raison dont j'ignore, Alexa me tape sur le système. Dès qu'elle se trouve dans mon champ de vision, un sentiment désagréable m'envahit et j'ai qu'une seule envie c'est la battre.

Mais Matteo est contre cette idée parce que selon lui, cette Alexa me fera qu'une bouchée.

Malheureusement c'est vrai, je suis nulle en combat...

Ça donne une raison de plus pour m'améliorer en combat !

— Tu me parles comme si j'étais ton amie, raille-t-elle en croisant ses bras. Je suis la femme d'Espen, tu devrais m'adresser avec plus de respect.

Oui, c'est vrai.

Je me mords l'intérieur de ma joue et soutient son regard bleu.

Elle est désormais la diablesse.

— Tu devrais aussi faire attention où tu mets tes pieds, Alexa, dis-je gravement.

— Ne prends pas cet air colérique. Je m'excuse de t'avoir rentré dedans.

— À un moment donné, je vais croire que tu m'en veux.

— T'en vouloir ? s'offusque-t-elle avant de glousser. Pourquoi je vais t'en vouloir ? Je ne te connais pas et tu n'as rien d'extraordinaire.

Je n'ai rien d'extraordinaire ?

Quand je m'apprête à insulter tout son arbre généalogique, une porte s'ouvre laissant le diable s'émerger . Je croise son regard ténébreux et à contre coeur, je canalise cette colère.

Alexa sait de l'avantage qu'elle détient depuis qu'elle est mariée avec Espen. Elle est intouchable. Si je touche ne serait-ce une mèche de ses cheveux ou que je la frappe, le diable me réservera la pire torture qu'il existe.

Il est mon boss et elle est aussi... ma boss.

Le fait d'y penser me rend malade.

— Pourquoi vous jacassez ? Vous me pétez les tympans, s'agace-t-il en s'approchant de nous.

Instinctivement, je m'éloigne de lui, refusant tout contact avec lui.

— Oh, ne t'inquiète pas. On faisait juste connaissance, se justifie Alexa avec un sourire éclatant. Je lui ai aussi félicité pour sa deuxième mission. Tu ne m'avais pas dit qu'elle a fait un travail de pro ?

Elle pose sa main manucurée sur l'avant-bras du diable et ce dernier la dégage d'un geste sec, évitant son regard avec embarras.

Pendant quelques secondes, je suis confuse face à son geste. C'est sa femme, alors pourquoi le simple fait qu'elle le touche, il se comporte comme s'il était... effrayé ?

Le diable, effrayé ? C'est tellement contradictoire ! Peut-être ils se sont disputés tantôt et ils ne se sont toujours pas réconciliés...

C'est la seule hypothèse probable.

— Effectivement.

— Heureusement qu'il est mort. Cet homme était un plaie, souffle Alexa en roulant des yeux. N'empêche, il laisse une famille derrière lui, c'est un peu désolant.

Pendant quelques secondes, je me demande de qui peut-elle parler jusqu'à je comprenne qu'elle me parle de ma cible anonyme.

— Il avait une famille ? je demande dans un souffle.

— Bien sûr, Almira. Ce tocard avait tout pour être un père épanoui mais son comportement était une épine dans le pied. On a tous décidé qu'il devait crever sans que sa femme sache qu'on est derrière le meurtre de son mari. Tu devrais le savoir, avise-t-elle.

— Elle n'avait aucune connaissance sur la victime sauf son état de santé , intervient Espen d'une voix sombre.

— Ah mince... eh bien maintenant tu le sais.

Je crois que c'est un cauchemar...

On m'a fait tuer un père.

Le coeur battant à la chamade, je tourne mes talons et les laisse en plan. Je rejoins mon frère et dès qu'il a vu mon visage, il semble inquiet. Je lui souris afin de le soulager et heureusement qu'il ne m'assène pas questions.

J'essaie me focaliser sur le mariage d'Elsie, ignorant la déclaration d'Alexa qui vient de chambouler toutes mes principes.

Nous arrivons au lieu du rendez-vous et Alira se présente à Matteo qui ne cache pas sa surprise. Je participe à leur discussion malgré que mon esprit soit ailleurs.

— Elle est comme toi quand je t'ai rencontré pour la première fois, m'avoue mon frère en me tendant une assiette de petit fours.

— Comment ça ? Timide ?

Si. Tu étais timide avec moi mais avec le temps tu t'es ouverte à moi. C'est quand même perturbant de parler à deux personnes qui se ressemblent terriblement. J'ai peur de vous confondre.

— Nous sommes toutes les deux différentes, dis-je avec un sourire en coin. Tu sauras faire la différences quand tu la connaîtras davantage, je lui rassure avant de m'empiffrer d'un petit four.

Antonio et Niguel nous ont rejoint une demi-heure après. Ce dernier m'a informé que son frère ne pourrait pas assister au mariage, son coeur étant brisé depuis hier. Hier, Elsie et Gaël ont réellement mis une fin à leur relation et Gaël ne fait que verser toutes les larmes de son corps.

Je peux que le comprendre, c'est une torture d'assister au mariage de l'élu de son coeur.

— On lui a pourtant prévenu, soupire Antonio. On savait tous que cette histoire allait mal finir.

Soudain, Alira m'emmène à part et nous arrivons sur le parking. J'allais lui demander ce qu'il se passe avant que mon regard se pose sur cette silhouette qui immerge d'une voiture.

Seigneur... il ne manquait plus que lui pour gâcher ma journée qui est déjà bien merdique.

— Santiago aimerait entretenir une conversation sérieuse avec toi, m'explique ma soeur avec un regard lourd de sens.

Je hais quand on me fait des choses derrière le dos. Je sais ce qu'elle mijote et au lieu de m'expliquer son problème, elle préfère m'envoyer face à ce pendejo !

On m'a même pas demandé si j'étais consentante ou non.

— Si c'est pour évoquer le mariage, c'est le mauvais timing pour en parler, je lance d'une voix distante dès qu'Alira nous ait laissé seuls.

Je m'appuie contre une voiture, les bras croisés et le regard droit à l'horizon.

— Pourtant, je trouve que c'est le bon moment pour l'évoquer, réplique Santiago en s'accostant à côté de moi, laissant entre un peu d'espace.

— Il n'a rien à dire. Je pense que tu le sais mais je suis sous la protection des Reyes, ce qui stipule que on ne se mariera pas si tôt.

— Certes mais cela ne va pas te protéger éternellement, précise-t-il d'un ton amer. Que tu le veuilles ou pas, tu devras signer ces papiers sinon le malheur s'abattra sur toi.

— C'est une menace ? je réplique aussitôt.

Il esquisse un sourire sombre.

— Prend le comme tu veux.

Je tique en secouant légèrement ma tête, hébétée par sa nouvelle facette. Comment Alira peut aimer un type comme lui ? Plus je le vois, plus il me dégoûte.

Quand je l'ai rencontré pour la première fois, je me suis fait l'idée d'un type réglo, honnête et surtout doté d'un esprit sain. Mais il est aussi tordu qu'un arbre et aussi sadique que son frère aîné.

— Est-ce que tu as conscience qu'Alira éprouve des sentiments pour toi ? Il est hors de question que je me marie avec le type qu'elle aime même si ce dernier est horrible, je déclare avec une moue.

Je l'entends un rire grave émettre de sa poitrine.

— Alira ? Je la considère comme ma meilleure amie et on s'est mis les choses au clair. On ne peut pas s'aimer.

— Mais...

— Tu dois déconner. Alira n'oserait même pas éprouver des sentiments pour moi, me coupe Santiago.

Mais dans quel pétrin suis-je mis ?

Non, ce n'est pas la bonne question mais plustôt dans quel pétrin Alira s'est mis ?

— Mais tu sais quoi ? Tu ne devrais pas voir le mal dans cette histoire, continue Santiago d'une voix plus douce. J'ai conscience que tu es méfiante envers moi et que tu ne m'aimeras jamais mais si on se marie,  sache que tu préserveras toujours ta liberté. Je ne suis pas ce genre de tyran qui va t'empêcher réaliser tes plus grands rêves.

Je tourne ma tête vers lui, interloquée. Il m'adresse un regard intense qui m'électrifie tout mon être.

—Santiago...

— Laisse-moi finir, Almira. Tu es un électron libre comme ta soeur et je me promets que je vais jamais t'entraver la route mais ce mariage est important. Tant que tu le reportes, je risque beaucoup avec ma famille. Je suis conscient que tu me détestes de plus profond de ton coeur parce que tu crois que je suis qu'un enfoiré qui veut nuire à ton bonheur mais on est dans le même bateau et je n'ai pas demandé qu'on m'inflige tout ce merdier.

— Et qu'est-ce que tu proposes, Santiago ? Je meurs d'envie de le savoir, je raille avec sarcasme.

Il prend une mine sérieuse et attrape discrètement ma main. Surprise, je fixe nos mains liées avec trouble.

— Je te propose que tu m'accordes une deuxième chance, m'annonce-t-il, me provoquant ainsi des milliers sentiments contradictoires en moi. Je voudrais que tu apprends à me connaître. Je ne suis pas le connard dont tu imagines.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top