Je reste silencieuse tout au long du trajet, tracassée par les paroles du diable. Une fois arrivés, je me réfugie dans ma chambre et prend soin de taquer la porte avant de me déshabiller et me glisser sous ma couette, seulement vêtue de mes sous-vêtements.

Cependant, je le crois à moitié. C'est vrai qu'Espen est un fou mais dans son coeur de pierre, il a de la compassion pour ses amis. Comment peut-on tuer notre ami pour une erreur si insignifiante ?

Il n'aura pas le courage de tuer son fidèle compagnon, du moins, j'y crois fort.

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PDV Espen

«  deux coeurs liés, c'est deux personnes qui se parlent avec le fond de l'âme »

Les jambes sur mon bureau, je balance légèrement ma tête pour affirmer cette citation que je viens de lire dans mon nouveau livret que j'ai reçu il y a trois semaines.

De temps en temps, afin d'apaiser ma pensée, je lis quelques citations à la con comme celle-ci et je trouve une sorte de soulagement. Bizarrement, à chaque citation que je lis, j'ai l'impression qu'on me décrit. Ce livret de merde est vraiment ensorcelé !

— Dio, encore ce livret !

Vivement, je me redresse et cache le livret dans un de mes tiroirs tandis qu'Antonio s'approche de moi avec un air amusé. Il s'installe en face de moi et j'allume une cigarette, embarrassé qu'il m'ait vu faire la meuf inspirée.

— Ne le dis à personne, lui dis-je en crachant une bouffée de fumée dans sa direction.

— Ne t'inquiète pas, je ne veux pas risquer ma vie. Alors comment s'est passé les négociations avec les Vargas ?

Voilà comment ruiner ma journée juste en énonçant ce maudit nom de famille.

Je pousse un long soupir et fume nerveusement  ma cigarette.

— Pendant la soirée de l'autre débile, les négocations se sont mal passées mais je suis tout de même rester poli.

Antonio arque un sourcil.

— À ma façon, je soupire. Hier, j'avais un rendez-vous avec le vieux Vargas. Ce sac à merde ne veut pas annuler le mariage ! Selon lui, Elsie est la femme parfaite pour son erreur de la nature.

Je sais que c'est perdu d'avance, alors pourquoi j'insiste bordel ? Pourquoi je me casse la tête pour un mariage ?

Elsie doit accepter, je ne peux rien faire pour son destin et je me sens... mal. Je me sens mal car étant le grand frère, je n'ai pas pu protéger ma soeur et je la laisse se diriger vers la gueule du loup.

— Angelo ne sera pas un bon époux pour elle. Je sais qu'il va la battre et ma stupide soeur va se laisser faire, je siffle en écrasant ma cigarette.

Antonio me regarde d'un air peiné et je me lève, me dirigeant vers la baie vitrée.

— J'ai eu une enfance de merde qui m'a transformé en une mauvaise personne. On m'a toujours forcé à obéir, être sans coeur, répandre la peur aux autres mais quand j'ai su que j'avais un petite soeur, la seule chose dont je me suis promis, ce qu'elle ne devienne pas comme moi, je raconte nostalgiquement en observant la gamine patauger dans de la terre. Je veux qu'elle ait le choix de qui elle veut être et qu'elle devienne une bonne personne mais j'ai foiré mon rôle.

— Elle est une bonne personne. Elsie a accepté travailler avec nous parce qu'elle le voulait, me rassure Antonio. Tu as été un bon frangin avec elle et je le dis avec le coeur. Elle sait que tu remues ciel et Terre pour annuler son mariage contractuelle et elle est très reconnaissante.

Antonio essaie de me réconforter mais ce n'est pas suffisant pour me faire sentir comme un incapable. Soudain, ma dernière conversation avec la gamine remonte dans ma tête et je commence à douter.

Si elle avait raison ? Si la clé pour aider ma soeur est de la marier avec un de mes subordonnés ?

Non, cette idée est complètement folle et je me mettrai à dos tous les chefs sauf si un incident survient avec un de mes subordonnés.

Comme baiser et tomber enceinte.

Une image écoeurante se déroule dans ma tête quand je songe Elsie et Matteo baiser et je chasse cette idée de ma tête.

— Je connais un Hernandez célibataire. Il est docile, calme et drôle. Je pense qu'il sera parfait pour Elsie...

— J'ai une idée de malade dans ma tête mais je risque la mort, j'annonce subitement.

PDV Almira

Je cueille plusieurs acotinum nappolus avant de sectionner la partie la plus intéressante, les racines. C'est avec précision que je découpe délicatement les racines de la plante avant que je sens une présence à côté de moi qui me déstabilise. Agacée qu'on m'observe, je porte mon attention sur Elsie.

— Qu'est-ce qu'il y a ?

— Rien, je...

— Elsie, tu sais que je déteste qu'on m'observe quand je fais mon taf et si t'es là, c'est pour me demander quelque chose, je souffle avant d'ajuster mon chapeau sur la tête. Crache le morceau.

La rousse hésite pendant quelques secondes avant de faire le premier pas :

— Enfin, je ne vais rien te demander mais j'ai écouté la conversation d'Espen et Antonio, avoue-t-elle.

— On n'écoute pas à travers les portes.

— Espen n'a pas réussi à annuler le mariage avec Angelo. J'envisage à quitter le pays avec Gaël.

Interdite, mon cisaille se glisse entre mes doigts avant de tomber près de mes pieds. Je me tourne à nouveau vers elle, la fixant comme si elle est devenue une extraterrestre.

C'est bien Elsie devant moi ou une malade mentale ? Fuir le pays sachant que son frère la tuera quand même ?

— Qui t'a mis une idée pareille, Elsie ! Voyons, tu ne peux pas partir comme ça, tu vas foutre encore plus de bordel !

— Je m'en bats les seins, Mira, rage-t-elle avant de récupérer mon cisaille. Cette situation me rend malade et plus les jours passent, plus les problèmes s'aggravent. Je ne peux pas me marier avec ce type, c'est au-dessus de moi.

Elle reste silencieuse pendant quelques seconde set je profite à mettre de l'ordre dans mes pensées. Bon sang, dans quel problème elle est !

Sa vie ne tient qu'à un fil et je me sens si désemparée pour elle.

— J'aimerais tellement t'aider Elsie mais je ne sais pas comment, je chuchote, peinée.

— Tu dois garder le secret mais avant de partir, j'ai un rendez-vous avec Angelo.

— Comme si ça ne suffisait pas assez ! Tu vas perdre ton temps avec ce con, dis-je avec sarcasme.

— Pourtant je dois le faire, affirme-t-elle en me regardant durement. Peut-être, il va changer d'avis si je discute avec lui.

— C'est officiel, tu es la fille la plus stupide que je connais. D'accord, va le voir mais crois-tu il va accepter ta requête par pitié ? Je l'ai vu à la soirée et il a l'allure d'un pervers.

Perchée sur la balustrade, j'ai vu Espen discuter avec les frères Vargas. J'ai reconnu assez aisément le frère de Santiago et contrairement à celui-ci, Angelo n'est pas une personne saine d'esprit. Il me fait penser à un pervers ou à un pédophile. Quand j'ai croisé son regard fou, j'ai eu la chair de poule.

Cependant la fille juste en face de moi dont je considère comme limite ma soeur, veut discuter avec ce fou. Ses espoirs sont trop grands, une discussion ne sera pas utile avec ce tas de merde d'Angelo.

Malgré mes avertissements, Elsie décide de s'en aller à son rendez-vous et j'hésite à la rattraper avant de retrouver mon activité. L'esprit tracassé, je découpe encore mes racines et ma pensée se focalise sur Angelo et un frisson me traverse.

Pour une raison dont j'ignore, une voix au fond de moi me dit que ce type ne prétend pas ce qu'il est vraiment.

Je confesse mes doutes avec les jumeaux qui m'écoutent attentivement.

— J'aimerais que vous surveillez de près Angelo. Je voudrais tout savoir de lui.

Niguel me lance un regard, confus.

— On ne peut pas espionner un membre des familles alliées. C'est une preuve de méfiance et je doute qu'elles vont pas apprécier si on suit ton plan.

— Je m'en fiche de vos lois à la con ! C'est la vie d'Elsie qu'on parle et mon sixième sens me dit que ce Angelo est bien pire que le diable aka Espen, je rétorque vivement. Si vous voulez qu'on annule ce mariage, vous devez coopérer.

Les jumeaux échangent un regard.

— OK, affirme Gaël avec son regard sombre. Je fais ça pour Elsie mais si on se fait prendre, on t'accuses.

— Espen n'est pas au courant ? demande Niguel avec inquiétude.

— Je lui avouerai plus tard, je leur rassure. Pour l'instant, ce qui nous importe ce sont les vices d'Angelo. On doit les mettre sous la lumière.