Chapitre 11

Voilà, je termine enfin cette journée de boulot interminable. Je suis fatigué, mais ce n'est pas fini. Je suis déjà las devant toutes les choses qu'il me reste à faire. Trop à régler surtout, je le sais bien, pas besoin que je l'écrive la liste sur du papier, elle tourne assez dans ma tête comme ça avec le bilan merdique de vie en ce moment. C'est simple au travail, j'ai merdé sur toute la ligne et je suis encore dans la moise pour tout le reste. Autant le dire avec les bons mots, je n'ai pas à être tendre avec moi, je ne le suis pas avec les autres. Je suis un gros nul !

D'abord, j'ai blessé Thomas avec mes grands airs de grande folle outragée que j'avais pris pour me protéger. La blessure que m'affliger ma famille était encore à vif malgré tout ce que j'avais fait pour l'oublier. Il ne savait pas qu'il avait appuyé là où ça fait mal. Je lui devais des excuses et même beaucoup plus. Même si faire des excuses valables mon amant était un de mes soucis, il n'était pas le seul. Il fallait ajouter le cancer de ma mère, les responsabilités qu'elle voulait m'attribuer et en dernière position mon travail. J'étais si angoissé pour tous mes problèmes que j'avais presque pété un câble heureusement que ma supérieure avait été compréhensive au final quand j'avais craqué. Je rangeais mes affaires en y pensant. J'avais bien de la chance de ne pas avoir été licencié au vu de mon attitude.

Dès mon arrivée, on m'avait demandé gentiment de rattraper les maladresses d'une de mes collègues avant la fin de la journée. Putain, j'avais râlé toute la matinée en le faisant. Quelques coups de fil à l'étranger pendant quelques heures, j'avais réussi cet exploit. Je préparais un dossier contre Mademoiselle Annabelle Masson qui avait un physique agréable c'est certain, mais il n'était pas à la hauteur de ses compétences professionnelles. À se demander comment, elle avait peu obtenir son travail. Quoi que je me doute qu'elle présentait très bien à l'accueil, la caricature de la belle plante potiche. J'avais été soulagé d'avoir enfin clôturé ce dossier administratif urgent et tout le reste.

Après j'avais dû continuer sur ma routine habituelle. Je n'en pouvais plus, j'avais l'impression d'avoir deux journées en un. Une heure plutôt j'ai tout envoyé balader quand quelqu'un était venu me demander de regarder un énième petit dossier supplémentaire pour vérifier le travail de la bimbo Annabelle. Ma franchise m'a fait dire tout haut ce que je pensais du travail de cette incompétente à ma supérieure. J'étais tellement énervé. La pauvre, elle avait subi ma colère, surprise de cet excès d'humeur. Elle me connaissait plutôt comme un homme plutôt d'humeur joyeuse et assez gentil malgré ma franchise.

— PEM, il y a problème dont tu voudrais parler ! avait-elle dit d'une voix douce et posée.

Voilà comment Anne-Marie Douanier avait stoppé net mon envolée verbale en refermant calmement la porte de mon bureau.

Je l'avais regardé s'asseoir rapidement dans le siège des invités, rassemblant les pans de sa grande jupe colorée. Son regard gris avait croisé le mien et j'y avais lu toute la sollicitude de cette femme pour moi. J'hésitais à parler, que pouvais-je dire à ma cheffe. Elle n'était pas une amie pourtant elle avait juste l'air amical avec son sourire plein d'indulgence à mon égard.

— Ce qui sera dit ici le restera ! affirma-t-elle pour me rassurer.

L'air sûr de cette petite bonne femme aux cheveux blonds courts grisonnants me fit craquer et j'avouais tout.

— De gros soucis familiaux ! soufflais-je.

Je ne sais pas par pourquoi commencer ! Mais le dire à haute voix avait lâché les vannes en moi. C'était libérateur, je me retrouvais en train de pleurer dans ses bras alors qu'elle tentait de me consoler avec des gestes très maternels.

Hoquetant, entre deux sanglots, je lui expliquais vaguement mes problèmes. Elle comprenait très bien qu'apprendre la veille que ma sa mère allait mourir était un choc. Et encore plus de se retrouver bientôt en charge d'une adulte handicapée.

Anne-Marie me rassura en tendant un mouchoir et en m'assurant qu'elle ferait son maximum pour que je ne fasse plus autant d'heures supplémentaires et puisse avoir des congés selon mes besoins. Elle faciliterait leur autorisation. Je ne serais plus le dernier. Fini les collègues prioritaires, car ayant des enfants, elles avaient bien en profité depuis cinq ans.

— Je veux que vous puissiez passer du temps avec votre maman. Et nous allons voir comment ici on peut vous aider lorsque vous réorganisez votre vie à cause de ses nouvelles responsabilités.

Ces mots avaient eu un drôle d'écho en moi. Maman, elle avait pendant si longtemps simplement été « Mère » comme le désiraient les gouvernantes et mon père. Une distance avait toujours été maintenue entre nous, et voilà que la maladie construisait enfin un pont entre nous. Dommage que celui-ci soit éphémère. À peine construit, sa destruction était déjà annoncée ! avais-je pensé.

Un bip me sort de mon souvenir. Un message sur mon téléphone. Un espoir enflamme mon cœur. Thomas ? Je désire ardemment qu'il ait répondu au texto que je lui ai envoyé hier soir. L'étincelle disparut rapidement. Encore une de ses satanées publicités m'annonçant une promotion dans l'une des boutiques que je fréquente rarement. T'es trop con PEM !

J'avais sursauté à chaque notification pour rien elles n'amenaient que des rappels de mes soucis ou du vide de ma vie. Encore autre, un coup d'œil à mon téléphone, c'est l'heure de partir. « Je cours, je vole » enfin presque, je maintiens un peu le standing dû à ma fonction, je ne dois pas ressembler à ses étudiants trop pressés de quitter leurs cours et l'université. Dès l'enceinte du campus passé, je me retiens plus, j'accélère direction la station de métro la plus proche. Je vais le faire. Rayer un point important de cette liste que j'ai établie. J'exulte presque à cette idée. Je dévale les escaliers en enfilant mon casque.

Pour une fois, je suis attentif à mon voyage, un changement de ligne est prévu, ce n'est pas mon parcours habituel, mais il risque de le devenir. Je vais rejoindre le centre d'hébergement où vit ma tante. Le son entraînant de ma compilation positive attitude remplit mes oreilles et me booste. Le temps file vite. Un couloir puis un autre et hop nouveau métro, je cours, je vole toujours. Je me sens léger quelques instants. Je trouve ça presque incroyable. J'aurais peu appréhendé de la rencontrer, de connaître le secret honteux de ma famille, mais non. Car pour moi, on se ressemble, nous sommes deux exclus pour cause de bienséance. Ce matin, Maman m'a écrit dans un message que Katy était une belle âme et qu'elle avait hâte de câliner son neveu. J'espère qu'elle ne sera pas déçue quand elle me verra. Qu'elle voudra bien me serrer dans ses bras et me donner un peu d'amour dont elle semble débordée d'après les dires de sa propre sœur.

Plus qu'une station et un peu de marche. La chanson Love is all qui emplit mes oreilles m'exulte à une attitude encore plus positive. Oui, l'amour est tout ce dont j'ai besoin pour y arriver. Je dois y croire.

Merde ! J'écarquille les yeux devant le bâtiment qui me fait face. Ce n'est pas possible que ce soit là. Je vérifie l'application de mon téléphone. Pour elle, je suis bien arrivé au bon endroit. Elle ose même me demander si je suis satisfait de son service. Validation par pur réflexe. Ce n'est pas un immeuble triste et froid comme je m'y attendais, rien de si sordide.

Je cherche partout une plaque dorée indiquant la nature de l'institution, mais rien de plus que le nom qui n'avait rien d'évocateur. C'était simplement celui de la belle demeure bourgeoise si familière avec ses fenêtres bordées de pierres blanches taillées. Elle se dressait derrière le portail de fer forgé ouvragé avec un joli panonceau en émaux proclamant la « Villa Les Lilas » le tous décorés par des grappes de fleurs d'un beau violet pâle.

J'appuie sur l'interphone qui a remplacé depuis longtemps la cloche qui devait se trouver là il y a longtemps. Je fixe quelque temps l'emplacement vide. Où est passée la clochette cuivrée ? Quelques bips, une voix m'interpelle. Fin brutale de mon interrogation retour à la réalité à Katy et à notre future rencontre.

— Villa Les Lilas ! Vous désirez ?

Je bafouille des mots incompréhensibles, trop vite sortis de ma bouche. Je stoppe respire un bon coup avant de reprendre plus posément.

— Je viens voir Anne-Catherine...

Je ne peux pas ajouter le nom de famille. Le portait-elle ? Mes grands maternels l'avaient rejeté.

— Oh ! Je vous ouvre et préviens Katy immédiatement.

J'inspire et pousse la grille. J'y suis presque. J'avance vers l'inconnu, mais je n'ai pas peur. J'aime le bruissement de mes pas sur le gravier blanc. Il me raccroche à la réalité du moment, car il me semble étrangement familier. Une, deux, trois, rapidement, je grimpe ses marches qui me sépare de cette lourde porte en chêne et de ma tante.

Woah ! Le hall d'entrée est digne d'un bel hôtel de luxe, rempli de plantes luxurieuses en pot, de consoles où trônent des bouquets de fleurs fraîches. Bien loin d'un centre médical quelconque. J'admirais le double escalier en marbre qui permettait d'accéder aux étages. Elle descendra de là ? Côté gauche ou droit ? Ressemblera-t-elle à Maman ? Une version d'elle un peu différente ? Voilà mon esprit m'a encore submergé. Je ferme les yeux un instant.

— Bonjour !

La même voix grave etprofonde que l'interphone sans le côté métallique et grésillant. Je vois quej'ai à faire à un responsable à la manière de se tenir. Il est sûr de lui et deson bon droit à être là, pas comme moi. Je dois reconnaître que c'est un belhomme malgré ses cinquante ans et plus. Surtout qu'il sourit franchement touten avançant vers moi. J'apprécie ses cheveux blancs, barbe taillée, bellecarrure mise en valeur par des vêtements ajustés et stylés. Je retiens un miamdevant ce sugar daddy succulent àsouhait. Je ne suis pas dans un bar du Marais où je pouvais baver à volonté surtous les plus beaux stéréotypes que pouvait fournir la population des gays deParis. Je suis ici pour Katy et rien d'autre. Et puis j'espère avoir bientôtdes bras encore plus musclés dans lesquels me faire câliner, dorloter ceux deThomas.    

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