Nous nous étions préparés durant une longue semaine à cette escapade à Godric's Hollow. Aujourd'hui enfin, nous y transplanions. J'avais l'estomac noué, mais il fallait que nous y allions. Arrivés au village, Harry prit connaissance des lieux tandis que je restais un peu en recul en voyant défiler de brefs souvenirs devant mes yeux.

"- Je crois encore qu'on aurait dû prendre du Polynectar." Informa Hermione.

"- Non. C'est ici qu'Alex et moi sommes venus au monde. Je ne voulais pas y revenir sous les traits d'un autre.

- Et moi non plus..." Murmurai-je.

Harry se retourna vers moi et tendit sa main que j'attrapai doucement. Il me ramena auprès de lui, me souriant pour me réconforter.

La cloche de l'église sonna et nous fit tourner la tête vers celle-ci. Hermione s'accrocha à Harry et nous avançâmes. Quelqu'un souhaita une bonne nuit à un autre derrière nous et nous nous retournâmes pour voir qui c'était. Il ne venait pas vers nous.

"- Je crois qu'on est le soir de Noël... Écoutez."

Il y avait quelques chants. On s'approchait de l'église. Autour de nous, des décorations de Noël ornaient les maisons et scintillaient.  

  "- C'est... C'est là qu'ils sont, non ? Votre père et votre mère ? Je vois le cimetière derrière."

Mon cœur se souleva en l'entendant dire ça. Alors ça y est ? On allait les revoir ? La main d'Harry serra la mienne plus fortement. Il pensait la même chose que moi. Il avait peur. Ce n'était peut-être pas une bonne idée de venir ici, après tout...

Il fut emmené par Hermione, mais je lâchai soudainement la main de mon frère, comme si elle était brûlante et que je venais de me faire mal. Je sentis mes yeux s'humidifier.

"- Alexis..."

Hermione se rapprocha de moi et tendit sa main.

"- Viens... Avant que quelqu'un ne nous voit..."

Je levai les yeux autour de nous et pris une grande inspiration avant d'attraper la main de la brunette qui prit l'initiative d'avancer pour nous. Mais lorsque nous arrivâmes au centre de la place, elle se stoppa.

"- Harry, Alexis... Regardez !"  

  Son doigt pointait le monument aux morts qui, au moment même où nous passâmes devant, s'était transformé d'un obélisque aux noms gravés dessus à une statue représentant quatre personnes. Il y avait un homme aux cheveux en pagaille et aux lunettes qui tenait dans ses bras une petite fille de trois ans dont les cheveux arrivaient à peine aux épaules et étaient tout aussi indomptables. L'une des deux personnes restantes tenait un bébé dans ses bras et avait une longue chevelure magnifique. Elle était si belle. Il y avait de la neige déposée sur la statue.

Je m'approchai de la pierre sculptée en observant les visages heureux et paisibles de mes parents. Moi, j'étais hilare, car mon père me soulevait dans les airs. J'aurais aimé voir ça plus souvent.

"- Venez."

En me reculant, je suivis mon frère et Hermione. Nous nous tournâmes vers l'église et nous traversâmes la rue. Je préférais ne pas me retourner, à l'inverse de mon frère qui jeta un œil par-dessus son épaule. Je savais que je ne me sentirais que plus mal.

Le chant de Noël était de plus en plus fort. À l'entrée du cimetière se trouvait une porte étroite qu'Hermione poussa le plus silencieusement possible. Nous nous y faufilâmes. Le chemin était entouré par deux côtés plein de neige immaculée dans laquelle nous allâmes. Nous laissions nos traces dans celle-ci. Elle était profonde. Les rangées de tombes derrière l'église étaient enneigées et la neige qui s'y trouvait été éclairée par les vitraux de multiples éclats rouges, verts ou encore jaunes.  

  "- Regarde, quelqu'un qui s'appelait Abbot. Peut-être un parent éloigné d'Hannah ?

- Parle plus bas." Supplia 'Mione.

Nous nous enfonçâmes plus loin dans le cimetière. Harry était un peu plus loin devant quand Hermione m'attrapa le bras pour me montrer une tombe. J'ouvris de grands yeux en voyant quels morts elle gardait.

"- Harry, ici !" Appelai-je.

Il revint sur ses pas en m'entendant.

"- C'est...

- Non... Mais regarde !"

Il se pencha pour observer ce qui était gravé sur le granit. C'était la tombe de Kendra Dumbledore. Sous les dates de naissance et de mort de celle-ci, il y avait un autre nom. Celui d'Ariana Dumbledore. Puis, une citation qui disait "Là où est ton trésor sera aussi ton cœur". Il me semblait avoir entendu dire que les Dumbledore avaient des racines ici, mais comme notre directeur ne nous en avait jamais parlé, je pensais que c'était des histoires.

"- Tu es sûr qu'il n'a jamais parlé...  

  - Non." Coupa sèchement Harry. "Continuons à chercher.

- Ici ! Oh, non, désolée, je croyais qu'il était écrit Potter."

Je soupirai en l'entendant s'excuser et avançai un peu, mais Hermione nous fit revenir en arrière.

"- Quoi ?

- Regardez ça !"

Elle pointa le symbole marqué sous le nom presque illisible. C'était la marque du livre. Puis, elle alluma sa baguette et éclaira la tombe.

"- Il est écrit Ig... Ignotus, je crois...

- Je vais continuer de chercher nos parents, d'accord ?"

L'air agacé d'Harry me fit soupirer et nous recommençâmes à chercher la tombe de nos parents. Nous passâmes devant quelques tombes aux noms familiers et je m'étais finalement éloignée d'Hermione pour chercher de mon côté.  

Soudain, mes yeux s'arrêtèrent sur une tombe en marbre blanc et dont les écritures semblaient briller. Mon cœur se stoppa en lisant ce qui était écrit. C'était la leur. C'était la tombe de Papa et Maman.

"JAMES POTTER, NÉ LE 27 MARS 1960, MORT LE 31 OCTOBRE 1981

LILY POTTER, NÉE LE 30 JANVIER 1960, MORTE LE 31 OCTOBRE 1981

LE DERNIER ENNEMI QUI SERA DÉTRUIT, C'EST LA MORT"

  Sans me préoccuper du fait que la neige était haute, je m'agenouillai devant la tombe avant d'entendre Hermione arriver près de moi.

"- Harry, ils sont là... Ici..."

Mon cœur tambourinait dans ma poitrine. Je me sentais mal. Je tremblais. Hermione dut croire que c'était à cause de la froideur de la neige, car elle me demanda de me relever, mais elle n'obtenu pas de réponse. Je n'avais jamais pu revenir les voir. Comment j'aurais pu de toute façon ? Je n'habitais même plus dans le pays. Je n'habitais plus dans ce village. Mes yeux me brûlèrent, signe que des larmes allaient arriver d'une minute à l'autre.

"- "Le dernier ennemi qui sera détruit, c'est la mort"..." Répéta la voix de mon frère qui était arrivé. "Ce ne serait pas une idée de Mangemort ? Pourquoi cette phrase est-elle écrite ici ?  

  - Ça ne veut pas dire vaincre la mort à la manière des Mangemorts, Harry. Ça signifie... Enfin, tu comprends... Vivre au-delà de la mort. Vivre après la mort."

Vivait-on après la mort ? Je m'étais toujours posé cette question. Depuis toute petite, j'ai toujours essayé d'imaginer ce qui pouvait bien se trouver dans l'au-delà et si l'au-delà lui-même existait. Depuis toute petite, j'avais élaboré bien des théories aussi farfelues qu'impossibles dans ma tête de petite fille. Je me demandais si un jour, cette vie dont je rêvais, je la vivrai dans la mort et si chaque personne à qui je tenais, mais qui avait disparu de ma vie se sentait bien dans l'au-delà. Chaque soirée d'Halloween, quand les enfants partaient chercher les bonbons, je restais chez moi avec Lou et Victor à leur poser tout un tas de questions sur la mort. Un jour, j'ai passé la soirée à poser encore et encore la même question. Quand j'avais six ans, je leur avais demandé s'ils pouvaient m'emmener chez Papa et Maman et ils avaient échangé un regard triste avant de me serrer dans leurs bras en disant que je ne pourrai les revoir que dans longtemps. Quand j'aurais grandi et compris. C'était leur excuse. Tout le temps. Tu comprendras plus tard. A chacune de mes questions il me répondait "Tu comprendras plus tard".

Mais on est plus tard, et je comprends pas.

Vivait-on après la mort ? Je me pose toujours cette question. Encore aujourd'hui, j'essaye d'imaginer ce qui peut bien se trouver dans l'au-delà et si l'au-delà lui-même existe. Encore aujourd'hui, j'élabore bien des théories moins farfelues, mais toujours autant impossibles dans ma tête un peu plus remplie que celle de cette petite fille. Et je me demande si un jour, cette vie dont je rêve, je la vivrai dans la mort.   

  La tombe gelée et enneigée de mes parents qui cachait leurs restes ne pouvait pas empêcher mes larmes de couler. Elle les déclenchait même. Il fallait que je grandisse, maintenant. Que j'arrête d'imaginer un jour les voir au chemin de Traverse me rendre visite. Rendre visite à leur fille, et même leur petite-fille ou leur futur beau-fils. Ça n'arrivera jamais que dans mes rêves. Pourquoi Harry et moi n'avons pas pu connaître le bonheur qu'aurait pu nous procurer cette famille ?

Et puis pourquoi je me plaignais, moi ? J'ai vécu heureuse. J'ai vécu chez une famille aimante. Elle m'avait aimé comme si j'étais des leurs. Elle m'avait accueillie. Elle m'avait accepté. Même si elle ne comprenait pas tout à ma nature et qu'elle inversait les Mangemorts et les Aurors. Elle me manque autant que cette famille qui m'avait élevée et qui s'était sacrifiée pour mon frère et moi. Des fois, j'ai juste envie de les rejoindre là-dessous. Les rejoindre sous cette tombe qui cache leurs restes. Qui cache les deux personnes qui nous ont donné la vie et laissé les leurs pour nous.  

Ils me manquent terriblement.

  Une main se posa sur mon épaule et me la serra. J'entendais Harry sangloter lui aussi. Je détestais être dans cet état devant lui. Des larmes silencieuses glissant le long de mes joues, je sentis l'étreinte d'Harry se desserrer. Sa main vint me montrer une couronne de roses d'hiver et je levai les yeux vers lui. Ses joues étaient elles aussi pleines de larmes.

J'attrapai la gerbe de fleurs qu'il me tendait.

"- Tous les deux." Affirmai-je d'une faible voix.

Il hocha simplement la tête et je me retournais vers la tombe en même temps que lui pour la déposer. J'aurais aimé leur dire quelque chose, mais les mots me manquaient. Et le temps s'enfuyait. Or, il fallait nous en garder de côté.

Je me relevai rapidement, essuyai mon nez nonchalamment et me retournai vers Harry pour le prendre dans mes bras. Après de longues secondes, je chuchotai.

"- Joyeux Noël, Harry. Joyeux Noël, Hermione.

- Joyeux Noël, Alexis." M'avaient-ils répondu d'une même voix.

Mais alors, quelque chose attira mon regard un peu plus loin. Ou plutôt, quelqu'un.