4- Le requin
-C'est pas possible, encore cet endroit ?
-A chaque fois qu'on s'endort on arrive ici Greg, c'est inévitable.
Quand Greg apparut dans cet endroit blanc, sans presque aucun mobilier ni fenêtre, il fut accueilli par April et Paola. Toujours sans explication sur ce lieu, ils avaient décidé de le nommer "la Chambre". Le choix a été simple : ils y étaient toujours pendant leur sommeil.
Greg était à peine arrivé qu'April se jeta sur lui en lui expliquant qu'elle devait lui dire quelque chose. Curieux, le jeune homme l'écouta parler sans l'interrompre.
A la fin du récit, Greg resta bouche bée, il ne savait pas quoi dire. C'est Paola qui brisa le silence.
-Arrête t'as sûrement eu une hallucination. T'es dans le désert, tu as faim et soif, il fait chaud, tu imaginé tout ça c'est tout.
-Non Paola. Je t'assure que je dis la vérité. J'ai bel et bien vu la scène dans ma tête : l'un de nous va se faire dévorer par un requin.
***
Gary était assit à un arrêt de bus. Il se sentait faible. Et pour cause: il avait passé la nuit à la belle étoile et son estomac était vide depuis plusieurs heures. Pour lui, la nourriture, c'était sacré. Depuis la mort de ses parents quelques années auparavant, il y avait trouvé refuge. Cet ado de 16 ans avait maintenant un bon petit ventre, mais il l'assumait totalement. Il pourrait faire du sport, mais il n'en avait jamais eu envie. Se dépenser, ce n'était pas son fort. Gary préférait nettement rester toute la journée dans son canapé à jouer à la console plutôt que de faire du sport. Paresseux et parfois maladroit, il était cependant très poli et serviable, quand c'était dans ses cordes, ce qui faisait de lui une personne attachante.
Sur le banc de l'arrêt de bus, son humeur était au plus bas. En plus d'être affaibli, il était perdu. Gary se trouvait dans une grande ville, avec de nombreux bâtiments, certains très hauts, il y avait énormément de véhicules de toutes sortes et le vacarme incessant devenait vite très fatigant. Pire que ça, toutes les personnes qu'il a rencontrées ne parlaient pas sa langue ! D'ordinaire peu sociable, Gary ressentait à ce moment là un besoin de communiquer. Ses amis lui manquaient, sa petite vie lui manquait. En cet instant, il préférait être tranquillement chez lui, quitte à ce qu'une bombe explose, plutôt que perdu dans cette fourmilière géante, sans manger et sans console.
Réalisant que cette pensée était horrible, il plongea sa main dans sa poche et examina le ticket, visiblement valable pour prendre le bus. Il l'avait trouvé plus tôt par terre, dans la rue. Quelqu'un l'avait certainement fait tomber. Dans son malheur, Gary réalisa qu'il avait de la chance : grâce au bus, il allait pouvoir visiter la ville tout en restant assis, sans se fatiguer.
***
Ce qui frappait le plus Wendy quand elle entrait dans la bibliothèque, ce n'était pas le silence qui y régnait, ni même les énormes étagères remplies de livres. Non, c'était cette odeur. Le parfum des livres, des vieux comme des plus récents, emplit le bâtiment et, contrairement à Luke, n'était pas vraiment au goût de la jeune fille. C'est la première fois qu'elle entrait dans ce genre d'endroit. Elle détestait les bouquins, elle les avait toujours détesté. Sans doute parce qu'elle a toujours vu son grand frère un livre à la main ; elle en était maintenant dégoutée. Tout le monde lui répétait sans cesse que lire, c'était bon pour l'imagination et ça permettait de voyager sans se fatiguer. Wendy répondait toujours que les films étaient encore plus efficaces et moins fatigants.
-On est dans un monde parallèle, sur une planète totalement étrangère, et toi tu nous emmène dans une bibliothèque. Tout va bien.
-Écoute Wendy, je suis blessé, j'ai passé un mauvais moment à l'hôpital, j'ai le droit de venir me détendre ici non ?
-Oui oui... Ce qui me dégoute c'est que je sois obligée de te suivre partout.
En effet, bien qu'ils ne s'entendaient pas toujours très bien, Luke et Wendy étaient obligés de rester ensemble. Tout d'abord parce qu'ils étaient dans un endroit qu'ils ne connaissaient pas, il ne devaient pas prendre le risque de se perdre. De plus, ils étaient les seuls du groupe à ne pas être seuls. Alors que Greg, Paola et les autres avaient atterris sur Terre en solitaire, Luke et Wendy, pour une raison qu'ils ignoraient, étaient ici ensemble. Il devaient profiter de cet avantage. Mais ce qui obligeait vraiment Wendy à rester avec son frère, c'était que celui ci avait besoin d'être accompagné. Quelques heures plus tôt, lorsqu'ils étaient apparus sur Terre, Luke s'était directement plaint d'une intense douleur aux jambes. Il n'arrivait plus à les bouger. Des passants au grand cœur les avaient aidé en appelant les secours. Plus tard, à l'hôpital, le médecin avait finalement conclu que Luke était paralysé des jambes et allait devoir être en fauteuil roulant. Le jeune homme aurait besoin de beaucoup de repos. La bibliothèque étant l'endroit préféré de Luke, ils avaient décidé d'aller y faire un tour pour se changer les idées. Mais Wendy voyait l'heure tourner...
-On devrait chercher un endroit où passer la nuit.
-J'ai vu un hôtel pas très loin d'ici, on, peut aller voir si ils ont une chambre pour nous.
Les voilà donc en route pour un petit hôtel au coin de la rue. Pendant les quelques minutes qu'ils passaient à l'extérieur, allant d'un endroit à un autre, ils réalisaient qu'ils étaient dans une ville énorme. Les bâtiments étaient tellement grands qu'ils pourraient toucher le ciel ; les rues étaient très larges, les voitures étaient toutes très bien entretenues et il y avait énormément de piétons sur les trottoirs. Les jeunes voyaient des restaurants et magasins en tout genre. Ils rentrèrent enfin dans le hall de l'hôtel, qui semblait simple et pas très grand.
-Bienvenue à Los Angeles ! déclara le réceptionniste quand ils arrivèrent devant lui.
Luke lui dit qu'ils avaient besoin d'une chambre pour la nuit, mais le réceptionniste informa que malheureusement, sans argent ni papiers d'identité, c'était impossible. Les jeunes insistaient en disant qu'ils n'étaient pas de la région et appuyaient sur le fait que Luke est blessé mais l'homme, bien que compatissant, ne pouvait pas enfreindre la règle. Ce refus énerva Wendy, qui avait souvent du mal à se contrôler...
-Mais c'est dégueulasse ! Vous voyez bien qu'on est dans l'incapacité de trouver un toit pour la nuit, l'hôtel est la seule solution si on ne veut pas dormir dehors ! Et vous, vous faites quoi ? Vous nous envoyez dehors ! En d'autres termes vous nous envoyez à la mort monsieur ! N'avez-vous donc aucun cœur ? Ce n'est vraiment pas humain d'envoyer deux jeunes âmes dormir dans la rue !
-C'est pas grave Wendy. Ce monsieur fait son travail. Viens, on va chercher un autre endroit pour passer la nuit.
Ils se dirigèrent tous les deux vers la sortie, lorsque le réceptionniste les interpella.
-Attendez !
Ils se retournèrent.
-Vous ne pouvez pas avoir de chambre ici..
- Oui merci on a comprit ! répliqua Wendy
-...mais vous pouvez en avoir une chez moi.
-Vraiment ? demanda Luke, qui n'osait pas y croire.
- Mon fils aîné a quitté la maison il y a quelques jours, pour vivre sa vie de son coté. Donc sa chambre est libre.
Le frère et la sœur se regardèrent, sceptiques. Au bout de quelques secondes, Luke hocha la tête, et Wendy se mit à courir vers l'homme.
-C'est génial merci beaucoup !
***
Chris était sur une très petite île déserte. Du sable, un palmier, et lui. C'est tout ce qui était sur cette île. Typiquement celles représentées dans les bandes dessinées. Sauf que là, Chris n'était pas dans une bande dessinée... Il se sentait comme en enfer. Cela faisait plusieurs heures qu'il y était, et il n'avait rien à faire. Le matin il avait réussi à attraper un petit poisson,mais réalisait après qu'il n'avait rien pour le faire cuire. Sa tentative pour allumer un feu était vaine... Il avait de quoi se maudire de ne pas avoir prêté plus d'attention au livre de survit qui trainait dans sa chambre depuis qu'il est petit. Il adorait la nature mais préférait les animaux aux végétaux. D'ailleurs, tuer un petit poisson, même pour sa survie, lui était très difficile pour lui. Et il avait encore plus de mal à le supporter maintenant qu'il comprenait qu'il l'a fait inutilement puisqu'il ne pouvait pas le manger. Il pouvait l'avaler cru, mais cette idée l'écœurait. Il le ferait seulement quand il n'y aura plus aucune solution. Pour le moment la faim était encore supportable et en tant qu'éternel optimiste, il avait encore de l'espoir d'allumer un feu. Le plus difficile pour lui, c'était la soif. La chaleur le faisait transpirer à grosses goutes alors qu'il ne s'activait pas énormément, et la sensation de soif s'intensifiait de minute en minute. Et voir toute cette eau autour de lui n'arrangeait pas les choses. Malheureusement, l'eau salée n'était vraiment pas bonne et ça donnait encore plus soif.
Alors qu'il commençait à perdre espoir en pensant qu'il n'y avait pas de solution de secours, il aperçut quelque chose à l'horizon... Un bout de terre ? Non certainement pas, ça devait être le soleil qui lui tapait sur la tête. Pourtant, il se refusait de penser que c'était un mirage. Et si c'était vraiment la terre ferme ? Il ne pouvait pas en être sûr. Devait-il y aller à la nage, quitte à ce qu'il n'y eu rien finalement ? Ou devait-il rester ici, alors qu'il y avait bel et bien une terre au loin ? Chris hésitait.
"J'y vais ou j'y vais pas ? Si j'y vais je vais sûrement crever d'épuisement, mais si je reste ici, je vais mourir de faim et de soif... Mieux vaux mourir en essayant !"
Il se jeta à l'eau et commença à nager. Chris était sportif, il avait l'habitude de nager dans les piscines ou les lacs, courir dans les bois, et faisait parfois du vélo. Mais dans cette mer, faible et inquiet, il commençait rapidement à montrer des signes de fatigue.Le mental était là et lui permettait de ne pas abandonner. Il vit le bon côté des choses en remarquant que l'eau n'était pas trop froide et assez calme. De plus, au fur et à mesure de son avancée,son impression se confirmait : il n'avait pas halluciné. La terre,visiblement habitée, n'était maintenant plus très loin de lui.Chris regagnait espoir en se disant qu'il avait peut-être bien fait d'essayer... C'est alors qu'il sentit une présence derrière lui. Il a la sensation d'être suivi. Lorsqu'il tourna la tête, il manqua de s'évanouir. Un requin long d'environ quatre mètres était tout près de Chris. Ses longues dents blanches étaient très impressionnantes et ses petit yeux noirs le fixaient avec insistance. Il semblait se déplacer tranquillement, au contraire de Chris qui faisait tout son possible pour nager le plus vite possible. Mais il savait bien que l'animal allait bientôt le rattraper.
"Il ne va faire qu'un bouchée de moi ! Je suis épuisé je ne peux pas nager plus vite... Allez Chris, tu as eu une vie passionnante et tu vas mourir en servant de repas à un animal affamé... C'est plutôt pas mal comme mort, non ?"
Le jeune homme n'abandonnait pas en voyant ce prédateur se rapprocher dangereusement. Il garda son sang froid mais savait pourtant qu'il vivait ses dernières secondes.
-Ce poisson a l'air bon, dit une voix qui venait de derrière lui.
"Il me compare même à un poisson... Eh, mais il parle ?"
Chris pensa à une autre hallucination. Les requins ne parlaient pas. Mais alors, qui venait de parler ? Il regarda autours de lui, mais il n'y avait personne.
-Ce n'est pas ton imagination, c'est bien moi qui te parle.
Chris ne comprenait rien à ce qui lui arrivait. Tandis que plein de questions se bousculaient dans sa tête, le jeune homme perdait un peu de vitesse.
-Toi, le requin ? Mais, comment ? Pourquoi ?
- Eh oh, je suis un requin quand même, mon estomac est plus grand que mon cerveau. Écoute petit, passe moi ton poisson et je te laisserais tranquille.
-Mon poisson ? Quel poisson ?
-Celui qui est dans ta poche imbécile ! L'odeur de son sang se sent à des kilomètres à la ronde, alors dépêche de me donner avant que d'autres requins arrivent, qu'on soit obligé de se partager le poisson et qu'on te blesse dans notre combat. Si t'es blessé ça va encore retomber sur nous et on va en prendre plein la gueule alors qu'on a rien fait, alors file moi ce poisson tout de suite !
Avec le stress et la fatigue, Chris avait oublié ce fameux poisson qu'il avait pêché plus tôt. Il se hâta de le lancer dans la gueule du requin, qui le goba d'un coup, salua Chris et s'en alla.
Quelques minutes plus tard, alors que Chris, encore sous le choc de ce qu'il venait de se passer, n'a pas bougé, un homme avec une combinaison,un masque de plonger et des palmes arriva près de lui.
-Vous... Vous avez fait fuir le requin ?
-Heu, oui on dirait.
- Ça fait 10 ans que je suis secouriste à la plage de Sydney, et je n'ai jamais vu quelqu'un se débarrasser seul d'un requin, sans revenir couvert de blessures !Je vais appeler les journalistes, vous allez devenir une star !Mais bien sûr avant, laissez moi vous ramener sur la plage. Vous avez l'air exténué !
***
Après cette journée riche en émotions, Chris s'est vu offrir une chambre d'hôtel pour un temps illimité. Il ne perdit pas de temps pour se coucher et s'endormir.
Dès lors, il se retrouva dans la "Chambre", où se trouvait uniquement Greg.
-Hey, bonne nuit mon pote !
-Pourquoi tu dis ça ? demanda Chris.
-On est ici quand on dort. Tu viens d'arriver, alors tu viens de t'endormir. Alors je te souhaite une bonne nuit.
-Ah, heu merci.. A toi aussi alors.
-Moi je vais bientôt me réveiller, expliqua Greg. Comment tu vas ?
-Plutôt bien... Tu vas jamais croire ce qu'il m'est arrivé ! J'ai été poursuivi par un requin, j'étais à deux doigts d'être dévoré, et tout à coup j'ai réussi à parler avec lui !
-Vraiment ? T'as été poursuivi par un requin ?
-Oui,et j'ai eu la peur de ma vie. Mais après c'était plutôt sympa, des journalistes vont m'interviewer demain et j'ai eu le droit à un hôtel gratis.
-April l'avait prédit. Elle m'a dit qu'elle avait eu une vision, elle a vu l'un de nous se faire courser par un requin.
-C'est vrai ?
-C'est vrai. Elle n'avait jamais eu de visions comme ça, dans notre monde. Et toi tu dis que tu as réussi à communiquer avec le requin ? T'en est certain ?
-J'en suis absolument certain. J'arrivais à lui parler par la pensée, comme par télépathie. C'était super bizarre.
-C'est fou. April qui a des visions prémonitoires, toi qui parle aux animaux... Il faut croire qu'en arrivant sur cette planète, nous avons acquis des compétences hors du commun.
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