Chapitre 13

Aujourd'hui était une journée comme toutes les autres depuis la rentrée. Max était joyeux, Idori, confiant et audacieux, essayait de convaincre son ami de laisser Royal emmener Zalden sur le toit de l'école, d'où ils auraient une meilleur vue, Elta et Téméria était à peu près les seules à écouter le cours, et pendant que l'apprentie-guerrière aux cheveux blonds très clairs levait les yeux aux ciel d'un air exaspéré, l'autre aux yeux ambrés reprenait Kod (qui ne cessait de bailler et qui s'en fichait de tout) tout en essayant de cacher son amusement. Quand Maître Alfann annonça la fin du cours, les élèves filèrent vers la sortie avec des soupirs de soulagement. Quand je me levai d'une des places du fond que j'occupai d'ordinaire avec mes amis, pour rejoindre les autres à la sortie, je remarquai qu'au niveau de l'allée, le mur du fond était creusé légèrement, comme pour gagner de la place. Je haussai les épaules, et sortit.

Les apprentis-guerriers étaient particulièrement excités, car ils allaient assister à leur premier cours de pouvoir. Maître Katanor nous avait donné rendez-vous dans la deuxième cour.

« Bonjour les jeunes. Alors je vais faire simple. Tout d'abord, vous n'avez pas tous un pouvoir. Ensuite, vous n'avez pas tous la force mentale et la détermination pour l'éveiller. Et pour finir, aujourd'hui, à moins d'une exception, aucun d'entre vous n'éveillera son pouvoir. »

Quelques exclamation de surprises et de déceptions fusèrent, mais la plupart continuèrent de fixer le prof avec détermination, entre autres Elta, Téméria, et, à ma grande surprise, Max, Idori...et moi.

« Voilà, c'est dit... Chaque année, je dois recommencer... et à chaque fois c'est si dur de voir vos petits regards tristes que vous n'arrivez pas à cacher... Mais bon. Si vous avez été profondément affectés par ce que j'ai dit, c'est que vous n'aurez probablement pas la force mentale pour éveiller un pouvoir, se reprit le prof dont les cheveux dégradés du brun au sable retombaient proprement du côté droit. »

Ma curiosité s'était éveillée. Je voulais tout savoir sur les pouvoirs.

« Bien. Commençons. Il y a deux façons de procéder. La première est de rester calme, et de se concentrer. La deuxième, est d'être dans le feu de l'action et de déchaîner tous ses réflexes. Aujourd'hui, nous allons tester tranquillement les deux ; mais honnêtement, sans vouloir casser l'ambiance, pour éveiller un pouvoir, il vaut mieux être dans des conditions extrêmes, voir entre la vie et la mort. »

Voyant que ces propos avaient eu pour seul effet d'affermir notre regard, il sourit et continua.

« Pour commencer, installez-vous dans la position qui vous convient, que vous préférez, et fermez les yeux.

-Super, un cours de sieste, commenta Max avec un grand sourire.

-Franchement, je m'attendais un peu à ça... fit Idori en s'allongeant confortablement sur le sol, résigné.

-Vous feriez mieux de vous reposer avant la séance de Parkour... conseilla Téméria.

-Ou d'écouter le cours, » rectifia Elta.

L'élève aux yeux bleu argentés était sérieuse et travailleuse. Mais sous son caractère agressif se cachait un tempérament attentif aussi bien aux autres qu'aux cours.

La plupart s'étaient assis ou allongés de différentes façons, à côté de leur éclateil ; pour ma part, je choisis de rester debout. Je me mis donc au fond, près du mur. C'était comme ça que je me sentais le mieux. Je pouvais bouger facilement, seuls mes pieds étaient en contact avec le sol dur et rugueux. Je clos mes paupières et écoutai les consignes du Maître.

« Concentrez-vous sur vous-même, écoutez votre cœur battre, puis regardez plutôt votre âme. Regardez qui vous êtes vraiment, et ce que vous désirez. Il vous faut choisir une motivation ; pourquoi ... voulez-vous éveiller votre pouvoir ? »

Ça faisait longtemps que je ne m'étais pas demandé qui j'étais vraiment, ni ce que je voulais ; que j'étouffai mes émotions, que je ne voulais pas les entendre...  je ne souhaitai vraiment pas replonger dans mes souvenirs, revoir ma vie défiler, laisser ma douleur ressurgir... mais à peine Maître Katanor eut-il prononcé ces mots, qu'une petite voix dans ma tête me hurla des choses que je ne voulais pas entendre, parce que...parce que... Non ! Non... je ne voulais pas le savoir... mais la petite voix criait si fort que rien ne pouvait la couvrir. PARCE QU'IL EST EVIDENT QUE TU ES LE FILS DE WARGEN ET D'ETERNELIA, MORTS, ET QUE CE QUE TU VEUX, C'EST TE VENGER DE TON FRERE !

« Non... » Je mis une seconde à me rendre compte que j'avais murmuré ce mot au lieu de le penser. J'ouvris les yeux pour me sortir de l'enfer de mon esprit. Le silence régnait. Les autres élèves n'avaient pas ouvert les yeux, plongés dans leur pensées. Personne n'avait remarqué ma respiration saccadée, et la sueur qui perlait sur mon front. Si, quelqu'un m'avait vu. Maître Katanor me fixait d'un air interrogateur, et me demanda si tout allait bien d'un mouvement de menton. Je secouai la tête, lui indiquant de ne pas s'inquiéter. Comme il me regardait toujours, je replongeais malgré moi dans l'instabilité de mon esprit. Des souvenirs surgissaient de tous côtés, la voix de mon frère résonnait contre mon crâne... Je décidai alors d'agir. WOH !! ON SE CALME ! Mes émotions s'atténuèrent un instant, mais la même voix sarcastique me demanda si j'étais fou. C'EST MOI QUI DECIDE, ICI ! Je ne crois pas que...protesta-t-elle. C'EST MOI QUI DECIDE, ICI ! répétai-je. Pour me donner de la force, je pensai à mes amis, qui était là, tout près de moi...Déterminé, j'organisait mes idées : déjà, OUI, j'étais le fils de Wargen et d'Eternalia, mais j'en était fier, car ils étaient morts pour défendre le village. Quant à Yohito, je ne le considérais plus comme mon frère. Non. Il n'était pas digne d'être le fils de deux guerriers comme mes parents. D'ailleurs, je ne voulais pas me venger, je voulais... le surpasser... oui, c'est ça, je voulais le surpasser.

Quelques minutes plus tard, le prof brisa le silence et continua ses instructions :

« S'il y a un élément que vous avez toujours apprécié plus que les autres, imaginez-le au fond de vous-même, comme s'il avait toujours été là. Faites-le tourbillonnez dans votre corps, puis autour de vous-même, et laissez-le peu à peu s'échapper de vous, uniformément, naturellement.

Sinon, ressentez tous ce que vous aimez, vos passions... laissez-les s'exprimer à travers votre corps. Laissez votre énergie s'extraire de vous-même. »

Au bout d'un moment, il annonça :

« Vous pouvez rouvrir les yeux... Nous allons faire des petits combats, pour que vous soyez « dans le feu de l'action »»

Doucement, je soulevai mes paupières alourdies. Chacun émergeait doucement. Soudain, mon regard se posa sur Idori. Il s'était finalement assis en tailleur et avait posé ses mains sur ses chevilles. Concentré, il n'avait pas encore ouvert les yeux. Mais ce qui avait attiré mon attention, c'était le courant venteux qui entourait le garçon, et faisait voleter se mèches noirs et les feuilles dorées de la saison des Brumes.

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