Chapitre 11
Le cours d'éclateil avait commencé. Maître Ilizza était gentille et motivée, et elle nous avait promis de s'occuper de chacun d'entre nous individuellement, pour nous aider à trouver notre propre style de combat avec notre éclateil, ou, pour ceux qui, comme moi, n'en avait pas, trouver les points faibles et les failles des duos (un duo = un humain et son éclateil) pendant un combat. Nous avions cette matière en première heure, car la majorité avait invoqué hier soir. Nous n'étions pas dans la cour principale, mais dans celle du gymnase, composée de multiples terrains de sport et d'entraînement.
« Vous passerez à tour de rôle sur ce terrain de tennis, expliqua la prof avec patience. Le but de cet exercice et de comprendre votre éclateil, et de vous synchroniser avec lui. Deux duos s'affronteront, donc, chacun d'un côté du filet. Le premier lancera la balle doucement à l'autre duo, et le deuxième devra la rattraper. Jusque-là, rien de compliqué. Mais attention ! Si l'humain et l'éclateil se précipitent tous les deux sur la balle, ils ont perdu. Et c'est pareil si aucun ne la rattrape. Vous n'avez pas le droit de vous parler pour savoir lequel de votre duo la rattrapera. De plus, vous serez tous les deux au centre du terrain. Interdiction de vous mettre chacun d'un côté, ce serait trop facile. Allez, au travail ! »
Max se mit en place avec un petit loup excité, et en face, son ami Idori, un petit faucon gris tacheté sur l'épaule. Les équipes se succédaient. Au départ, elles avaient un peu de mal, et échouaient souvent, mais au fil des parties, les duos se comprenaient de mieux en mieux, et tous virent l'intérêt et les effets de cet exercice. Maître Ilizza prit à part ceux qui n'avaient pas d'éclateil, c'est-à-dire moi, Sorito, un apprenti-guerrier discret aux cheveux noirs, Sallya, tout aussi discrète, et une fille nommé Ruby qui ne désirait pas invoquer.
« Votre objectif sera de créer la confusion dans les duos adverses, pour les empêcher de rattraper la balle à temps. Si elle touche le sol, ils ont perdu. Aidez-vous de votre avantage pour les déstabiliser, feinter, et observer leurs mouvements et leurs points faibles.
-Notre avantage ?s'étonna Ruby.
-Puisque vous n'avez pas à vous occuper d'un animal, ni de vous décider, d'essayer de le comprendre et d'anticiper sa réaction, lui expliqua la prof, il vous suffit de rattraper la balle, alors concentrez vous sur votre lancer, afin de compliquer la tâche à vos adversaires.
-Donc nous sommes en quelques sortes, un niveau 2 de cet exercice, n'est-ce pas ?remarquai-je, perspicace.
-Exact...Mais profitez-en pour apprendre à analyser votre adversaire. Pouvoir prédire chacun de ses mouvements est un grand avantage, en combat. »
Sorito et Sallya hochèrent la tête.
Déçu de ne pas pouvoir profiter de l'exercice autant que les autres élèves, je m'exécutais néanmoins et m'appliquai à leur rendre cet entraînement extrêmement dur, voir impossible.
J'observais, et j'enchaînai un saut vers le haut (comme appris la veille en cours de Parkour, en répartissant bien mon poids sur mes appuis) pour rattraper la balle, puis, toujours en l'air, je la projetais dans un lancer court et puissant. À peine atterri, j'observai avec attention les mouvements et les premiers réflexes de Max. Étant droitier, il poussait naturellement sur sa jambe droite. Viser le côté gauche serait lui faire un cadeau. De plus son loup semblait l'avoir remarqué aussi, car quand la balle était très courte et du côté droit, il filait sans même regarder son maître, car il savait que ce dernier n'aurait pas le temps de réagir.
J'avais toujours aimé observer et analyser les gens. Je le faisait presque en permanence sans même m'en rendre compte. Au bout d'un moment, les autres élèves commencèrent à se plaindre de la difficulté qu'il éprouvait en m'affrontant. Ils préféraient se battre contre Ruby, qui ne pensait qu'à s'amuser plutôt que progresser, ce qui rendait la chose plus facile.
Mais Maître Ilizza ne les laissa pas s'imposer.
« Si vous voulez vous améliorer, vous feriez mieux de vous mesurer à des élèves plus fort que vous. Et puis vous pensez peut-être que dans un vrai combat, vous pourrez choisir votre adversaire ? Détrompez-vous ! »
Il était évident que les quatre apprentis-guerriers qui avait invoqué leur éclateil il y a plus longtemps(à savoir : Kiarès, Kod, Nérilios et Téméria) avaient un sérieux avantage. Et le combat le plus intéressant de la journée, fut sans aucun doute celui contre l'élève aux cheveux noirs et aux yeux ambrés.
Aux premiers abords, Téméria était imprévisible, et se mouvements vifs et gracieux interceptaient les balles sans difficultés. Son cheval n'hésitait pas une seconde pour stopper la trajectoire de l'objet, comme si il savait exactement ce que pensait son invocatrice. Il prenait la balle dans sa gueule, et l'apportait docilement à l'apprentie-guerrière, qui me l'a relançait avec fougue et détermination.
Mais je ne me laissai pas déstabiliser. J'étais têtu, et j'allais lui montrer ce dont j'étais capable. Je tentai des feintes et des changements de stratégies imprévisibles, mais chaque fois, elle ou Rébélior interceptait mon lancer. Puis, je compris. Contrairement aux autres élèves que j'avais combattu, elle n'agissait pas, elle réfléchissait. Voilà pourquoi je ne pouvais pas prédire ses réflexes, et anticiper ses mouvements.
J'essayai alors différents lancers, et compris rapidement comment elle réfléchissait, et posait ses choix. Elle analysait mon premier mouvement, et choisissait alors en fonction de celui-ci, qui du frison ou d'elle-même rattraperait l'objet. Et Rébélior pouvait deviner, à la crispation de ses muscles, si celle-ci s'apprêtait à bondir ou pas. Sans même un regard ils pouvaient agir dans une confiance mutuelle.
Alors, dans mon saut, mon premier mouvement fut celui de l'envoyer vers la gauche, en tendant mon bras ; puis, d'un habile mouvement de poignet, je l'envoyai de l'autre côté. Stupéfaite, Téméria tenta de changer de trajectoire, mais ce manque de temps lui coûta, et la balle retomba par terre. Les autres élèves qui observaient cet affrontement avec attention poussèrent des cris de joie.
Déterminée, elle remis une petite mèche noir dans son chignon, et renvoya la balle à une vitesse hallucinante. Sans hésiter, je me jetai à l'endroit où elle devait atterrir, tout en sachant de j'avais 9 chances sur 10 de rater et de me prendre le sol en pleine tête. J'interceptai la balle dans un dérapage incontrôlé.
Maintenant, je devais choisir ma stratégie avec soin. Téméria était intelligente. Elle avait donc sûrement changé de stratégie, et redoublé de vigilance. Impossible, donc, de savoir ce qu'elle avait en tête avant de lancer le ballon. J'optai donc pour un changement total d'attitude. Oui, c'est ça... il fallait la surprendre. Pour qu'elle ne sache pas quoi décider. Je n'étais pas du tout sûr de moi... alors, dans haussement d'épaules, je me dis : « Si j'essaye pas, je saurai jamais si j'ai découvert la technique du siècle. »
Alors, prenant mon élan, je sautai aussi haut que je pus, et gardai la balle dans mes mains, au lieu de la jeter. Une fois à terre, je restai là où j'étais, et , dans le plus grand des calmes, je lançai doucement la balle en cloche, au centre du terrain, au niveau de la guerrière et de son frison. Voyant le ballon arriver tout droit vers elle, elle tendit la main pour l'attraper, sans faire d'effort, sans contracter ses muscles, sans indiquer à son éclateil qu'elle allait rattraper l'objet. Aussi, l'animal s'avança pour s'en charger. Ils avaient perdu ce point là. En effet, tous les deux avaient tenté de rattraper la balle. J'avais hâte de voir comment elle allait réagir...
« L'exercice est terminé ! annonça Maître Ilizza à ma grande déception. Bravo à tous les deux. Vous avez un talent remarquable, et une capacité d'analyse qui vous sera extrêmement utile en combat. Téméria, quand Hardex a feinté et transformé son mouvement avec son poignet, tu t'étais déjà avancé dans la mauvaise direction. Au lieu de tenter l'impossible en partant dans l'autre sens, tu aurai dû t'arrêter et laisser faire ton éclateil. Quant à toi, mon garçon, quand tu as essayé beaucoup de feintes, au début(sans succès), au lieu de faire la même dans différentes directions, tu aurais dû en essayer plusieurs sortes, pour voir celles qu'elle ne pouvaient pas anticiper. »
Je restai bouche-bée. Je n'avais pas pensé à ça... c'est vrai que si je l'avais fait, j'aurai trouvé plus vite le point faible de mon adversaire.
« Félicitations! Vous avez tous très bien travaillé aujourd'hui, affirma-t-elle à toute la classe. »
Je me tournai vers Téméria, et lui tendit mon poing. Elle le tapa avec le sien.
« Bien joué! Désolé ma vielle, je t'ai laissé aucune chance !fis-je en souriant.
-Parle pour toi, rétorqua-t-elle de la même façon, d'un air de défi, heureusement que Rébélior était de bonne humeur, c'est lui qui m'a retenu de te massacrer...
-Mon pauvre, ajoutai-je à l'intention du brave cheval, tu arrives à la supporter ? »
Il répondit par un petit hennissement accusateur.
« Merci de me défendre !lui dit son invocatrice avec affection, en lui passant les bras autour de son encolure. De tout façon, Hardex est tellement fatigué, qu'avec quelques minutes de plus, on aurait pu l'exterminer sans problème. »
Je mis un instant à me rendre compte que j'étais effectivement à bout de forces... Je respirai par saccades, et mon front perlait de gouttes chaudes. Ma bouche desséchée réclamait de la fraîcheur, et mes jambes tremblantes, du repos.
« Déjà, je suis même pas fatigué ! ironisai-je.
-Tu parles ! Je te souffle dessus, tu tombes, rétorqua l'apprentie-guerrière en riant.
-On parie ?répliquai-je avec entrain.
-Allez, viens manger au lieu de raconter n'importe quoi. »
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