Chapitre 1
Le crépitement des flammes, des cris de guerres, de douleur... Le martèlement des sabots des Bêtes des Chevaucheurs faisait trembler la terre autant que mon coeur. Il battait si vite qu'il faisait exploser mon corps de l'intérieur. Un petit mur de pierre, là, ... Ma maison... Ma maison était en train de brûler sous mes yeux... Enfin, ce qu'il en restait, c'est-à-dire un tas de pierre effondrées, des poutres calcinées, encore dévorées par des flammes affamées. Les Chevaucheurs avaient attaqué en pleine nuit, réveillant tout le village, semant la terreur...
Une main apaisante se posa sur mon épaule, calmant mon angoisse pour un instant :
"N'aie pas peur, petit-frère. Je suis là, je te protègerai.
- Yohito..."
Ma voix tremblait, mais pas la sienne. Il n'avait pas peur, moi, si. Il avait treize ans, j'en avait sept.
Le seul endroit qui selon moi aurait pu nous protéger venait de disparaître sous mes yeux. Nous n'avions plus de maison.
Pourtant, il me prit sur son dos, et commença à marcher vers la rivière. J'aurais voulu tourner la tête pour regarder un Chevaucheur qui s'approchait de notre maison, mais mon grand-frère accéléra. Soudain mon inquiétude doubla :
"Yohito, où sont Papa et Maman ?"
Il se mit à courir sans répondre. Ses pieds s'enfoncèrent dans le sol spongieux de la berge, puis martelèrent les galets. Nous arrivions près d'une barque que nous avions construite, tous les deux, avec notre père ; quand nous entendîmes un cri de rage, le dernier cri d'un brave guerrier.
J'espérais que Papa et Maman allaient bien, qu'ils s'en étaient sortis...Je m'imaginais mon père, avec son épée, campé devant le Chevaucheur, à côté de la maison. Oui je le croyais du fond du cœur, ce cri ne pouvait venir de lui.
Notre embarcation glissait doucement à la surface de l'eau, elle s'enfonçait dans la forêt.
Ici, l'obscurité était presque rassurante, comparé à l'éclat sauvage des flammes. L'air était plus doux, plus respirable, la fumée ne me prenait plus à la gorge ; j'étais apaisé. Pourtant, tandis que Yohito accrochais la barque à la branche d'un noisetier, un mauvais pressentiment s'ancra à nouveau dans mon cœur. Qu'allions nous devenir ? Mon grand-frère me regarda alors dans les yeux, et me dit :
« Hardex, je veux que tu sois toujours heureux. Papa et Maman sont morts pour que tu vives, alors accomplis leur volonté, profite de la vie, et de tout ce qu'elle peut t'offrir. »
Cette révélation me déchira le cœur. Mes craintes s'étaient réalisées... Ce cri, tout à l'heure, c'était donc celui de mon père ? Et si je n'avais pas été là, seraient-ils toujours en vie ? La culpabilité m'assaillit.
« Sois courageux comme le Tigre, continua-t-il, fidèle comme le Husky, têtu comme l'Ânon, et libre comme le Loup. Sois ce que tu es au plus profond de toi-même. »
Sa dernière phrase résonna dans l'air lourd du soir.
« Yohito, tu..., bégayais-je.
-Fais-toi des amis, me coupa-t-il, tu ne pourras compter que sur eux.
-Qu'est-ce que tu racontes ? Pourquoi tu me dis tout ça ?
-Adieu, petit-frère. Reste libre et loyal, toujours. »
Mon grand-frère poussa mes épaules, je basculai en arrière, je ne résistai pas. Je ne comprenais pas que j'étais en train de tomber dans la rivière. L'eau glaciale me coupa le souffle. Je me débattis tant bien que mal pour regagner la surface. Le courant, pourtant très doux, commençait à m'entraîner vers le lac. Les poumons remplis d'eau, je m'accrochais à une racine qui sortait de la berge, fit jaillir ma tête ruisselante des ondes sombres, crachai de l'eau glacée, pris une grande goulée d'air.
Je retrouvai vite mes esprits. Pourquoi m'avait-il poussé dans l'eau ? Je regardais dans sa direction, il n'était plus là. En m'agrippant aux touffes d'herbes environnantes, je me hissai sur la berge, dérouté. Il m'avait abandonné. J'avais du mal à y croire. Il était parti. Et pour toujours, vu les recommandations qu'il m'avait faites. Mes parents étaient morts. J'étais seul. Pourquoi mon frère s'étaient-il enfui ? Qu'est-ce qui l'avait fait fuir, lui qui n'avait peur de rien ?
Je ne me souciais plus de la fatigue qui engourdissait mes membres, suite à ma chute dans la rivière, ni de la faim dévorante qui me tiraillait le ventre, ni des écorchures qui couvraient mes bras et mes jambes. Ma tête me tournait, complètement embrouillée, mes pensées s'entrechoquaient. Je ne comprenais plus rien.
Les vêtements trempés, je m'appuyais contre un arbre, sur le point de m'écrouler, quand une main se posa sur mon épaule ; mais cette fois, ce n'était pas Yohito.
« N'aie pas peur. Je suis là. Je te protégerai, déclara un jeune homme d'une trentaine d'années, sa barbe d'un brun très clair finement taillée. Les Chevaucheurs sont en train de partir ! Ils ont peur que la Harde ne rapplique s'ils restent trop longtemps au même endroit. La forêt n'est pas sûre. Certains doivent encore traîner dans le coin. Viens avec moi.
-Qui es-tu ? répondis-je, interloqué.
-Je suis ton cousin, Sirius. Tu ne te souviens pas de moi, car je n'habite pas à Valtarden **(c'est le village où vivent les personnages)**. Ma femme Kirielle et moi vivions à Lagdhol, le village voisin. Pourtant, tu m'as déjà vu une fois, ta famille étais invitée chez moi, il y a presque 4 ans. »
Cette fois, je me rappelais un beau jour de mai, où il faisait tellement chaud, qu'avec Yohito, nous jouions à nous arroser avec de l'eau. Cela devait être le jour de cette invitation, car nous n'étions pas à Valtarden ; même si je n'avais aucun souvenir de lui.
« Pourquoi es-tu ici ? déclarai-je d'un air pensif.
-Kirielle et moi, nous voulions aménager à Valtarden. Nous sommes arrivés ce soir. »
Je pensais à tout ce que j'avais perdu, cette nuit. En à peine une heure, tout ce à quoi je tenais avais disparu. Que devais-je faire, maintenant ? Yohito disait souvent « Fais ce que te dis ton cœur, ta tête est plus intelligente que toi, et cherche sans cesse à te tromper. », mais qu'est-ce que j'en avais à faire, de lui ? Yohito m'avait laissé seul ; mon frère était un lâche, d'ailleurs, je faisais ce que je voulais.
« Que dois-je faire ?
-Viens avec moi, proposa de nouveau mon cousin.
-Où ça ? répondis-je d'un ton las.
-Chez moi. J'ai acheté une petite maison. Elle a été en partie détruite par les Chevaucheurs, mais on peut y vivre sans problème. Je la réparerai. Avec ton aide, si tu veux bien, ajouta-t-il en souriant.
Comme je restais silencieux, il caressa mes cheveux roux foncés, et m'emmena avec lui.
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