Chapitre 31

La journée touchait presque à sa fin. Au travers des rideaux, l'intensité des rayons du soleil faiblissaient, comme mon corps. J'avais déjà touché le fond pourtant cette fois-ci c'était pire. Rien n'aurait pu me faire tomber plus bas que lui. J'avais réellement la sensation d'être morte. Mon corps ne répondait plus, ma tête ne tournait plus correctement. Perdue dans ma torpeur, de nouveaux coups retentirent. Quelqu'un frappait inlassablement. Ne répondant pas, j'entendis une clef dans la serrure. Ça ne pouvait pas être Angie, elle ne devait rentrer que dans une semaine. Je n'osais pas me retourner pour voir qui était là, peu importait. Il n'y avait que moi et ma douleur, pourtant je savais que quelqu'un se tenait à côté de mon lit, je pouvais sentir une présence...

– Emy, quand vas-tu décider à nous répondre ? hurla cette voix que je reconnus de suite. Ian...

Je ne pouvais lui faire face, je n'en avais pas la force. Et je savais très bien qu'il ne supporterait pas de me voir comme ça...

– Emy, regarde-moi s'il te plaît !

Je ne pouvais toujours pas bouger, c'était vraiment trop dur.

– S'il te plaît...

Sa voix s'était adoucie, sa main se posa sur mes épaules pour me retourner. Lorsque je lui fis face, il eut un mouvement de recul.

– Emy, je-je euh... Parle-moi Emy, pourquoi tu-tu... ? Emy s'il te plaît, parle-moi...

Il me suppliait, mais rien ne pouvait sortir. En cet instant, je me rendis compte que j'étais là physiquement, mais que ma tête n'était plus là. J'étais spectatrice de ce qui se passait sans rien pouvoir faire, je n'étais capable de rien. Me voyant murée dans mon silence, il s'allongea face moi, m'entourant de ses bras. Sentir son corps masculin contre le mien m'était insupportable. Je ne voulais pas de sa proximité, ni même de son contact. Je ne voulais pas de ça, je ne voulais pas être dans les bras de quelqu'un. Je voulais être seule, je ne voulais pas qu'il me voie ainsi, je ne voulais pas de sa pitié ni de rien d'autre. Soudainement je le repoussai avec le peu de force qu'il me restait. Je tapai contre sa poitrine.

– Ian laisse moi ! Je ne veux voir personne ! Lâche-moi ! Va-t'en ! hurlai-je.

Mes nerfs lâchaient, j'en voulais au monde entier. J'en voulais à Jake pour sa trahison, pour ses mensonges, pour cette illusion qu'il avait créé. Je m'en voulais pour ma naïveté, pour avoir fait tomber mon masque aussi facilement, pour avoir espéré à un futur qui n'existera jamais. J'en voulais au monde entier de ne pas m'avoir envoyé de signaux clairs. J'en voulais à Ian de ne pas avoir assez insisté, c'était stupide, mais j'étais si en colère. C'était d'ailleurs la seule chose qui me faisait me sentir vivante à cet instant. J'avais beau hurler contre lui pour le faire fuir. Il ne bougea pas, au contraire, il resserra son étreinte, ce qui me fit littéralement craquer. Mes larmes coulèrent de nouveau. J'étais à bout, je ne pouvais plus les retenir. Il passait ses mains dans mes cheveux et me berçait en même temps. Je restai dans ses bras un long moment, blottie comme une enfant. Puis sans un mot, je le vis se lever et se diriger dans la salle de bain. J'entendis du bruit et compris très vite qu'il faisait couler l'eau. Il revint vers moi et me porta dans ses bras, je passai les miens autour de son cou pour me tenir, même si cela me faisait atrocement souffrir. Mon corps était douloureux, j'avais la sensation d'être couverte de bleus. Avec une grande attention, il me déposa sur le rebord de la baignoire, dans la salle de bain. Le carrelage froid sous mes pieds me réveilla l'épiderme. Avec une grande délicatesse, il me déshabillage. Je ne protestai même pas, que pouvais-je dire après tout ? J'étais qu'une traînée naïve dont les hommes se servaient. Il me souleva et me mit dans la baignoire. J'avais la sensation d'être une vulgaire poupée dont on s'occupait. Il s'asseyait près de la baignoire, me tenait la main, mais ne me regardait pas.

– Emy, dis quelque chose... chuchota Ian en tentant de capter mon regard.

– Je... il n'y a rien à dire Ian, soufflai-je. Tu devrais rentrer, je voudrais être seule.

– Non Emily, tu m'as promis qu'au moindre souci tu m'appellerais et tu es là, comme ça et je devrais partir ? N'y compte même pas. Une fois que tu seras lavée, je te fais sortir d'ici. Tu viens chez Jessy.

Il parlait d'un ton beaucoup plus dur et ferme. Je secouai la tête pour montrer mon mécontentement, mais son regard me fit arrêter. Je n'avais pas envie qu'on me voie dans cet état. Je voulais seulement rester seule chez moi. Après tout, je n'avais besoin de rien ni de personne, car aucun de mes amis ne pourrait combler ce trou béant dans ma poitrine. En deux mois, il était devenu le centre de mon univers. J'avais pu enfin vivre entièrement et pleinement. Mais je devais tirer un trait sur mes sourires, sur mes rires, sur mes dessins remplis d'amour. Adieu la petite Emy amoureuse...

Ian se racla la gorge pour ramener mon esprit sur terre. Il lâcha ma main et quitta la pièce. De là où j'étais, je le vis remplir deux de mes sacs de vêtements qui se trouvaient dans la chambre. Il revint et m'aida à sortir de la baignoire. Après m'avoir frictionnée sans délicatesse, il me donna des vêtements que j'enfilai sans ronchonner. Je me sentais beaucoup trop faible pour me battre, surtout contre lui.

– Quand as-tu mangé pour la dernière fois ? m'interrogea-t-il en détaillant mon corps

Je haussai les épaules en guise de réponse. Quatre jours peut-être cinq ou six, j'avais perdu toute notion du temps... Honnêtement je n'en avais aucune idée et cela importait bien peu en cet instant. La seule chose qui m'obsédait, c'était son double jeu. Comment avais-je pu être aussi aveugle ? Monsieur Double Face m'avait ensorcelée avec ses beaux discours et j'avais plongé les deux pieds dedans...

– Je te jure Emy que quand je vais apprendre ce qu'il s'est passé. Je... Je... Putain je vais l'exposer ce connard ! hurla Ian en faisant les cent pas dans ma chambre.

Alors comme pour l'apaiser, je me blottis contre lui. Il reprit doucement le contrôle et récupéra mes sacs. Après avoir vérifié qu'il n'avait rien oublié, Ian m'aida à marcher jusqu'à sa voiture. J'étais trop faible pour me débrouiller seule et ça me mettait terriblement en colère. Le trajet se passa dans le silence, la tête posée contre la fenêtre, je regardais le paysage, dehors tout me semblait éteint... C'était le parfait reflet de ce que je pouvais ressentir au fond de moi-même, tout était vide, triste, mort, noir rien d'autre...

Soudainement il s'arrêta et se gara devant la maison de Jessy, pourtant je n'étais pas prête, je ne voulais pas affronter son regard, sa pitié... Mais je savais que Ian ne me laisserait pas le choix, je décidai donc de descendre de la voiture sans l'attendre, j'avançai doucement, mais au bout de trois pas, je sentis toute force me quitter. Mon dernier souvenir fut le contact du sol avec ma tête...

Il faisait froid et j'entendais seulement des bribes de conversations sans rien pouvoir faire, sans comprendre ce qui se passait.

– Jessy appelle les secours !

...

– Poussez-vous ! Monsieur que s'est-il passé ?

...

– Ian dis moi qu'elle va se réveiller, je t'en supplie, je refuse de la perdre elle aussi. Je t'en prie...

...

– Son état est stable, votre amie a arrêté de s'alimenter durant plusieurs jours, ce qui a causé son malaise. De plus, le choc subi lors de sa chute a causé un traumatisme crânien ainsi que deux côtes fracturées et une plaie à la tête, il lui faudra du temps pour se rétablir mademoiselle. Soyez patiente.

...

– Angie, je devrais prévenir ses parents, ça fait quatre jours qu'elle est ici...

– Non Ian, elle ne te le pardonnera pas, elle ne leur parle plus depuis longtemps.

...

– Jessy, rentre, je t'appelle si on a du nouveau...

– Ian, laisse-moi rester s'il te plaît. Juste préviens Parker pour moi s'il te plaît.

...

– Même endormie et blessée, elle est superbe !

– Shane ce n'est pas le moment !

– J'essaie juste de te détendre Jess. J'ai vu les médecins, ils ont l'air confiants.

...

– Casse-toi d'ici. Je suis certaine que tout ça, c'est de ta faute.

– Je veux juste la voir, Jessy s'il te plaît. Je veux juste être auprès d'elle.

– Ah oui ? Et tu étais où quand elle est restée seule chez elle ? Un conseil Jake quand elle m'expliquera comment elle en est arrivée là, ne reste pas dans le coin. Je promets de faire de ta vie, un enfer.

Je sentais que mon corps luttait, je devais me réveiller. J'en avais assez de ces extraits de conversations auxquelles j'assistais sans rien faire.

– Ian ? marmonnai-je.

Je n'arrivais pas encore à ouvrir mes yeux, mais quelqu'un saisit ma main plus fermement.

– Emy, je suis là, ne te rendors pas je vais prévenir les médecins.

Sa voix était remplie d'angoisse. La chaleur de sa main avait quitté la mienne. Je tentai d'ouvrir les yeux, mais la lumière m'éblouissait et me faisait mal à la tête. Quelques instants plus tard, j'entendis des pas arriver vers moi, je ne voyais pas très bien, tout me paraissait flou, mais je compris à la blouse blanche que ce fut un médecin.

– Mademoiselle Lucas, comment vous sentez vous ?

Mal ! Crétin ! pensai-je, mais je me contentai d'une petite moue mécontente.

Il m'expliqua longuement qu'ils allaient vérifier si tout allait bien, mes constantes, refaire des bilans, mais je n'arrivais pas à écouter attentivement, j'entendais des mots par ci par là. J'avais passé des heures endormie et pourtant je tombai de sommeil. Ian était resté près de moi tout le long de l'entretien avec le médecin, me tenant la main, il acquiesçait à ce que disait le docteur. Contrairement à Double Face, Ian était là comme toujours...

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Coucou mes petits lecteurs,
Comment allez vous avec ce beau soleil ?

Alors ce chapitre ? Notre petite Emy au fond du gouffre... Heureusement que Ian est là...
Des hypothèses sur la suite ?

Bisous bisous 🖤,
L.

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