Chapitre 2 : Le réveil
La jeune femme était sonnée. Elle ne savait pas ce qu'il venait de se produire. Une attaque fulgurante par un homme. Elle s'était débattue mais la partie était perdue d'avance. La suite était un immense trou noir. Elle avait mal partout, son corps encore frêle était couvert d'ecchymoses qui bleuissaient à vue d'oeil. Petit à petit, elle recouvrait ses sens. Notamment une douleur fulgurantes apparut. Son visage la faisait souffrir, mais également, son crâne, à l'endroit ou elle avait été frappée pour l'assommer, ses seins, son ventre et ses jambes. Tout son corps était courbatu.
Elle toucha son visage avec sa main gauche. Son nez était enflé, et une de ses pommettes était ouverte. Sa main descendit sur sa gorge. Une coupure nette, mais petite lui barrait le cou. Elle préféra s'arrêter là. Elle était toujours allongée dans la position dans laquelle elle se trouvait, sur le ventre. Elle décida de se mettre sur le dos. Se retourner lui prit toutes les forces qui lui restaient. Elle se sentait vide, ne savait pas ou elle se trouvait et n'avait plus aucun souvenir de ce qu'il s'était passé.
Elle resta un temps qui lui sembla des heures dans cette position, sans possibilité de bouger, clouée au sol dont des pierres lui rentraient dans le dos, à tenter de retrouver ses forces. Mais ce laps de temps lui fut profitable : elle eut un éclair de lucidité et se rappela son nom. Thétis. Oui, elle en était sûre, cela lui disait quelque chose. Thétis. Son nom. Elle n'avait maintenant plus qu'à retrouver ses souvenirs.
La nuit tombait à présent. Elle commençait à avoir froid et ses souvenirs n'étaient toujours pas revenus. Elle tenta de se lever mais n'y parvint pas. Ses muscles refusaient obstinément de lui répondre. Elle resta donc encore allongée sur le dos pendant quelques heures ou elle s'assoupit, pour sombrer dans un mauvais sommeil, non réparateur. Elle se réveilla aux premières lueurs de l'aube, réveillée en sursaut par un bruit, tous les sens en alerte et le vit approcher, suivit par un chariot tiré par une mule ...
***
- Tiens, tiens, tiens, mais qu'avons nous là...
- Laissez-moi tranquille,
- Voyons, je ne vais pas te faire de mal. Pas la peine de le prendre comme ça !
- Que me voulez-vous ?
Elle tenta encore de bouger et cette fois son corps répondit. Elle se leva d'un bond et chancela. L'homme sembla surprit.
-Que fais-tu là, jeune fille ?
- Je... allez-vous en !
- Ce n'est pas un endroit très sûr pour une jeune et jolie jeune femme telle que toi, j'en ai peur. Laisse moi t'aider.
- Je ne veux pas de votre aide.
Thétis aurait aimé de l'aide, au moins pour rentrer dans une ville, ou même un village. Mais toutes les cellules de son corps lui criaient de fuir cet homme.
- Allez-vous en ! laissez-moi !
- Je ne vais pas te laisser au milieu de nulle part. Tu pourrais faire de mauvaises rencontres.
- C'est déjà le cas. Laissez-moi !
A peine eut-elle le temps de terminer sa phrase qu'il se jeta sur elle et la plaqua au sol. Il a fit basculer sur le ventre et lui maintint les bras dans le dos. Elle se débattit mais peu à peu, ses forces la quittèrent. Il se pencha sur elle, prenant appui sur son dos, l'écrasant de tout son poids et lui murmura à l'oreille.
- Alors comme ça, je suis quelqu'un de mauvais ? Tu n'as pas idée.
- Je...
- Tais-toi et laisse toi faire, sinon cela sera encore plus douloureux. Et tâche de me donner du plaisir, ça n'en sera que moins long pour toi.
- Vous rêvez, siffla-t-elle entre ses dents.
Au moment ou il la pénétra, elle fut submergé par une vague de douleur, mais également, sans doute provoqué par cette douleur et ce sentiment de haine qui l'envahissait, de souvenir. Tous les souvenirs oubliés de cette dernière journée la submergèrent. Elle sut alors ce qu'elle avait subi, avant d'être laissée pour morte. Et cela lui fit froid dans le dos. Elle avait temporairement perdu l'usage de ses membres, perdue dans la découverte de ce qui lui était arrivé.
Lorsqu'elle reprit conscience, l'homme était toujours la, exécutant sa besogne pour arriver à sa propre jouissance, presque comme un robot. Il la dégouta. Elle sentait que la haine deformait maintenant ces traits. L'homme dû également s'en rendre compte car il se stoppa net dès qu'il la vit. Mais il n'eut le temps de rien faire.
Une onde de choc sortit du corps de la jeune femme et le propulsa contre son chariot. La mule prit peur et partit au galop, lui écrasant la jambe. L'homme hurla, réussit à s'asseoir pour regarder le désastre : sa jambe pendait lamentablement tenue par les muscles et la peau, les os étant tous deux brisés. L'homme serrait sa jambe entre ses mains contractées par la douleur en criant. Thétis sentait les larmes de douleur qui coulaient sur ses joues malgré le fait que la nuit l'empêche de les voir. Elle se sentait soudain plus puissante, ressentait beaucoup plus de choses. En fait, elle ressentait tellement de nouvelles choses qu'elle était totalement déboussolée, elle n'arrivait plus à traiter toutes les informations qu'elle recevait. Elle sentait les larmes, la douleur, les jurons et insultes que l'homme lançait à son encontre. Elle sentait les animaux autour d'elle, et des vies, plus loin d'elle. Elle savait maintenant où était la ville ou le village le plus proche en utilisant la concentration de vies qu'elle ressentait. Cela dura un petit moment, puis elle sombra, submergée par les évènements et le flux trop important d'informations arrivant à son cerveau.
***
Un coup. Thétis se força à reprendre conscience. L'homme s'était maintenant trainée jusqu'à elle. Il la chevauchait malgré sa jambe blessée et la rouait de coups. Elle garda les yeux fermés et tenta de retrouver cette haine qui l'avait déjà sauvée. Lorsqu'elle ouvrit les yeux, l'homme fut de nouveau projeté en l'air. Cette fois, l'afflux ne fut pas des souvenirs, mais des rituels et des incantations magiques, un savoir qu'elle ne possédait pas.
Elle réussit enfin à se lever, malgré tout ce qu'elle avait subit. Elle savait que ces nouvelles capacités y étaient pour quelque chose. Elle s'approcha de l'homme, qui criait de nouveau de douleur. Elle décida de tester son nouveau savoir. Elle utilisa donc le premier souvenir qu'elle avait vu. Elle tendit la main dans la direction de l'homme et prononça l'incantation correspondante. Le sort jaillit de sa main en un rayon bleuté et frappa l'homme à la poitrine quand celui-ci la regarda, le regard plein de douleur et de rage. Il n'eut pas le temps de parler ou d'esquisser le moindre geste. Thétis sentit le sort se propager en lui, et détruire tout ce qu'il trouvait, organes, vaisseaux, nerfs, muscles et os. Lorsqu'il arriva à la peau, celle-ci subit le même sort. Bientôt, il ne resta plus rien de l'homme.
***
Thétis ne savait pas quoi faire, elle était maintenant seule, pouvait de nouveau marcher, mais ses forces commençaient à lui faire défaut. Elle finit par se décider à partir dans la direction qu'avait prise la mule, qui était également la direction d'une des deux villes qu'elle avait identifié comme étant les plus proches de l'emplacement où elle se trouvait.
Le début de la marche fut assez agréable, ses muscles, tout d'abord douloureux se détendirent et chauffèrent et elle se sentit bien. Puis la fatigue prit le dessus. Elle se rendit vite compte que cette fatigue était à la fois liée à ce qu'elle avait subi mais était également lié à l'utilisation de ses nouveaux pouvoirs. Elle se promit que si elle survivait, elle testerait ses limites afin de ne jamais les franchir. Elle fit une pause, dans une clairière dégagée en plein cœur de la forêt. Elle n'avait rien à manger et ne voyait aucun point d'eau à proximité. Il fallait qu'elle trouve au moins un peu d'eau afin de ne pas mourir de soif avant d'arriver à la ville.
Soudain, elle entendit un grand bruit, comme un choc. Elle se tourna mais ne vit rien. Le bruit fut suivit de braiements d'un âne visiblement paniqué. Elle se força à se relever puis marcha dans la direction des braiements. Elle le vit. L'âne était bloqué par sa carriole entre deux arbres. Il tirait mais la carriole et les liens de cuir étaient trop solides pour rompre. Elle s'approcha et tenta de calmer l'animal paniqué.
***
Après plusieurs minutes à tenter de dégager la carriole et l'âne récalcitrant de leur piège, Thétis eut la curiosité de regarder dedans. Ce qu'elle vit lui fit lâcher un sourire. Il y avait des rations pour l'âne, des provisions et des peaux de chèvres, que l'homme allait probablement vendre au marché.
Après s'être rassasié, puis avoir donné une ration de fourrage à l'âne, Thétis monta sur le chariot et s'allongea sur les peaux de chèvre. Celles-ci étaient particulièrement douces. Elle ne tarda donc pas à se laisser emporter par le sommeil. Elle n'avait pas dételé l'âne car n'était pas sûre d'arriver à lui remettre son harnachement. Ainsi, elle dormi dans la charrette, promenée dans la forêt par l'animal. Elle était déjà perdue et ne risquait donc pas de se perdre d'avantage.
A son réveil, le soleil pointait. Elle s'était endormie comme une masse et n'avait pas rêvé. Elle était maintenant beaucoup plus reposée et comptait bien arriver au village avant le soir, pour éviter d'autres mauvaises rencontres. Elle donna une ration de grains à l'âne et mangea un repas frugal, composé de galettes d'avoine et d'un peu de miel.
Elle prit ensuite le chemin du village. Il lui semblait qu'il était un peu plus proche qu'hier. Il était probable que les pérégrinations de l'âne en train de chercher de l'herbe lui avait finalement rendu service. Elle resta assise dans la carriole, bercée et parfois bousculée par les chaos de son avancée dans la forêt. L'avancée était longue et difficile car aucun chemin ne couvrait cette partie de la forêt. Elle passa donc plus de la moitié de la journée à faire avancer péniblement l'âne. Ils finirent par déboucher sur une route carrossable. Elle en fut ravie mais préféra s'arrêter avant de l'atteindre afin de manger un bout.
Après un autre repas, une fois l'âne un peu reposé, elle reprit la route. Elle avait eu le temps de réfléchir à ce qu'elle devrait dire en cas de questionnement sur ce qu'elle faisait ici, non accompagnée. Elle avait décidé de dire que son père était décédé durant le chemin du retour et qu'elle raccompagnait leurs biens jusque chez eux pour que son frère puisse reprendre l'affaire familiale et aider sa mère à la maison. En effet, elle n'avait plus de mémoire mais savait qu'en Grèce, les femmes n'avaient que peu de droits, et notamment pas celui de se promener et de faire des affaires seules.
***
Elle était à trois jours d'Athènes lorsqu'elle les vit. Elle fit forcer l'allure à l'âne, espérant que la vitesse plus importante leur évite d'avoir le temps de se poser trop de questions. Mais ce fut peine perdue. Les trois gardes s'arrêtèrent, la toisèrent et lui barrèrent le chemin. Elle n'eut d'autre choix que de s'arrêter.
- Que fais-tu là, seule ?
- Je...
- Alors ? Que fais-tu là ? Tu n'as pas le droit de sortir seule.
- J'étais avec mon père. Nous étions allés vendre nos peaux à Mégare, mais nous avons été attaqués en chemin et il est mort. Je ramène notre carriole à la maison pour que mon frère puisse reprendre l'affaire.
- Pourquoi un père irait vendre des peaux avec sa fille et non avec son fils ?
- Il voulait m'offrir un présent. Ce n'est pas interdit.
- En effet, nous sommes juste curieux de savoir pourquoi une jeune fille se déplace seule alors que les lois l'interdisent.
- Je vous l'ai dit, nous avons été attaqués.
- Probablement car il n'était pas accompagné de son fils. Cela lui apprendra. Un fils aurait pu le défendre.
- Mon père ne se serait jamais caché derrière son fils pour se défendre, il se serait interposé comme il l'a fait avec moi.
- Passe, mais rentre chez toi directement, tu pourrais faire de mauvaises rencontres.
- Oui, c'est mon but. J'ai eu bien trop peur.
- Avance alors.
***
Le reste du voyage se déroula sans encombres. Thétis entra dans Athènes par la porte nord-est, qui l'amena directement au pied de l'acropole. Elle était très intriguée par ce temple, regroupant toute la vie religieuse de la ville, mais savait qu'elle ne pouvait s'y attarder pour le moment. Elle décida donc d'aller directement au Pirée, pour vendre sa cargaison de peaux, la carriole et l'âne avant de se faire remarquer davantage.
Le port du Pirée était un port immense. Bien plus grand que tous ceux qui lui avaient été donnés de voir lors de ses voyages avec sa famille. Elle déambula et trouva ce qui semblait être un vendeur d'ânes. Elle lui demanda combien il était prêt à lui offrir pour le tout.
- C'est que je ne suis pas vendeur de peaux, je ne peux pas offrir un prix car je ne pourrais les vendre. Je vous en propose 300 drachmes.
- Ce n'est même pas le prix de l'âne.
- Tais-toi femelle, je prends des risques en monnayant avec toi. Alors accepte ou pars, et ne me fais pas perdre mon temps.
- J'en veux au minimum 600 drachmes.
- Jamais. Va-t-en. Reviens quand tu me les laissseras à 300.
- Tu as raison, je vais trouver un autre vendeur.
Elle repartit et s'approcha d'une échoppe de peaux.
- Bonjour,
- Bonjour
- Mon père est décédé sur le chemin et a souhaité que je vienne ici vendre la cargaison de peaux que nous transportions. Combien m'en offrez-vous ? Il m'a donné un ordre de prix pour ne pas les brader, afin que notre famille puisse survivre.
- Combien t'a-t-il demandé de les vendre ?
- Il m'a dit de vous demander votre prix.
- Hum...
Le marchand sortit de son échoppe et vint vers la carriole, il souleva le tissu qui les protégeait.
- Alors ? S'enquit-elle
- De la bonne qualité. Sont-elles toutes comme cela ?
- Mon père était un maître en la matière, et traitait ses peaux comme la prunelle de ses yeux.
- Alors en sa mémoire, je t'en offre 500 drachmes.
- Vendu !
Le marchand sortit les peaux et les porta dans son échoppe deux par deux. Elles étaient bien roulées et lourdes. Il y fit extrêmement attention. Cela prit donc un certain temps. Il lui tendit les pièces.
- Voila tes 500 pièces. Pars maintenant. Si on me voit effectuer des transactions avec une femme...
Elle récupéra la bride de l'âne et partit avec son argent en poche. Elle tenta de dissimuler la bourse du mieux qu'elle put. Mais 500 pièces prenaient de la place. Elle se décida donc de se trouver une chambre pour la nuit.
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