— Zade, qu'est-ce que tu lui as fait ? cria Kaly, aussi inquiète que furieuse.

Au loin, la fumée se dispersait peu à peu et après quelques secondes, la vampire put enfin distinguer la silhouette de Zade, portant dans ses bras Zéas, inconscient.

— Allez, on rentre, dit Zade en faisant un signe de tête à Kaly, sans oser la regarder dans les yeux.

— Qu'est-ce que tu lui as fait ? réitéra sa fiancée, plus sèchement.

— Il se réveillera dans quelques minutes, t'inquiète pas.

Son ton se voulait calme, mais de l'amertume et un léger regret se révélaient dans sa voix. Les émotions de la sorcière ne passèrent pas inaperçues, mais son âme sœur ne dit rien et se contenta de ne pas plus la réprimander. Elles passèrent la porte d'entrée en silence et Zade allongea Zéas sur le sofa de la remise. Elle resta un instant à le contempler, détailler son visage paisible, figé dans une expression qu'elle ne reverrait sûrement pas. Son visage détendu paraissait tellement plus jeune que lorsque ses grands yeux verts la fixaient, renvoyant sur elle toutes les horreurs qu'il avait vues.

— Zade...

Kaly se tenait derrière elle et posait sa main sur son épaule.

— Je veux pas passer le peu de temps qu'il me reste ici à vous regarder vous disputer.

— Mh, répondit la sorcière en s'éloignant, laissant la main de sa fiancée glisser dans son dos.

Elle fit quelques pas pour atteindre l'escalier, puis, la paume sur la rambarde, se retourna, l'autre main en l'air.

— Mais, là, c'est lui qui a commencé, t'es d'accord ?

— Zade ! C'est toi l'adulte, fais un effort.

— Il a vingt ans, Kaly. Zéas n'est plus un enfant.

La voix de la sorcière s'était faite plus douce. Sa fiancée haussa les sourcils, les yeux vides, puis s'accroupit auprès de son frère.

— C'est vrai, j'avais oublié.

Elle passa ses doigts entre les mèches blondes de l'homme qu'elle voyait encore comme un petit garçon.

— Je monte, dit Zade.

Elle ne pouvait pas supporter le regard triste de Kaly, bloquée dans un passé qui ne reviendrait jamais. Mais après quelques pas, elle s'arrêta dans l'escalier pour observer les deux vampires. Elle n'osait pas se l'avouer, mais elle aurait voulu mieux s'entendre avec Zéas. Pour Kaly. Mais le sort fatal réservé à sa fiancée en avait décidé autrement. Les yeux dans le vide, elle fixait sans voir les deux blonds et s'assit machinalement sur les marches, cachée par la rambarde. Zéas ouvrit les yeux, paniqué, puis déçu de découvrir qu'il était de retour dans la boutique.

Zade quitta la cage d'escalier, il valait mieux pour elle qu'elle ne soit pas dans les parages. Elle se rendit dans sa chambre, épuisée de sa longue journée, et s'écrasa sur le lit.

***

— C'est vrai, est-ce que c'est vrai ?

Une voix aiguë se mêlait aux nuages.

— Je veux que ce soit vrai.

Douce, mais sûre d'elle.

— On peut redevenir gentil, même si on a été méchant ?

Est-ce qu'elle pourrait un jour se pardonner pour tout ce qu'elle avait fait ?

— Awan, je te promets qu'une fois que j'aurais fait tout ce que j'aurais à faire, je reviendrai t'aider à sortir d'ici.

Sa propre voix était là aussi, comme un écho.

— Tu as promis, Zade.

Elle avait promis.

— Zade ?

— Je suis désolée. Je suis désolée !

— Zade.

La sorcière se réveilla en un sursaut à l'entente de son nom et trouva Zéas, assis sur son lit.

— Où est Kaly ? demanda-t-elle immédiatement.

— Elle nous prépare quelque chose à manger, avec le peu de chose qu'on a pu trouver dans tes placards.

Zade s'allongea à nouveau en soupirant, presque honteuse de son manque de ressources. Elle massa ses yeux encore endormis, puis, quand elle voulut se relever, elle remarqua les iris verts malicieux encore tournés vers elle.

— Qu'est-ce que tu veux ? dit-elle en quittant le lit en prenant soin de le contourner.

— Oh, deux petites faveurs, vraiment pas grand-chose, répondit-il, l'air de rien.

La rousse s'arrêta devant la porte, fermée. Elle pensait pourtant l'avoir laissée ouverte.

— Est-ce que tu nous as enfermés ?

Son intonation outrée fit sourire son beau-frère, qui répondit en haussant les sourcils :

— C'est mieux si elle ne nous entend pas.

— Alors, qu'est-ce que tu veux, Zéas ?

Elle croisa les bras, sentant déjà que ce qu'il allait lui demander serait loin d'être aussi petit que promis.

— Est-ce que tu peux m'enlever ça ?

Un air de dégoût passa sur son visage tandis qu'il pointait ses oreilles, ses mains puis sa queue de chat.

— S'il te plait ? ajouta-t-il, un sourire forcé sur le visage.

La sorcière haussa les sourcils.

— Je t'avais dit de pas sortir, tu m'as pas écoutée...

Le sourire sur les lèvres de Zéas disparut, il se leva du lit, les sourcils froncés, puis fit demi-tour en se pinçant l'arrête du nez.

— Je veux juste de nouveau être un vampire.

— C'est irréversible, annonça Zade en souriant. Désolée.

Un grognement sortit des lèvres de Zéas.

— Bon, et la deuxième chose ? demanda Zade.

— Ah oui, j'ai une proposition.

Il s'allongea sur le lit, et avant que Zade ait pu dire quoi que ce soit, il continua :

— Je sais qu'on n'est pas toujours d'accord...

— Jamais, même, compléta la sorcière.

— Jamais, c'est vrai. Mais on a quelque chose en commun.

Le cœur de la sorcière se serra. Elle sentait Kaly qui cuisinait au rez-de-chaussée depuis tout à l'heure. Peut-être que Zéas et elle pourraient mettre de côté leur rancœur, juste un instant, pour profiter de la présence de la vampire qu'ils aimaient tant.

— Oui ? insista-t-elle pour savoir où il voulait en venir.

— On devrait la ressusciter.

Zade soupira. Ce n'était pas ce qu'elle attendait.

— Je pense pas que je suis prête à tuer autant de gens une deuxième fois. D'ailleurs, ça la fâcherait et en plus... Zéas, je crois que j'ai fait une erreur en la ramenant ici, continua-t-elle en s'asseyant sur le lit. Elle me manque déjà.

— Elle n'aura pas le temps de nous manquer une deuxième fois ! Je pensais plutôt à une méthode... plus sûre.

Zade se releva.

— Pas question, je dénoncerais jamais Colombe au monarque.

Le blond se releva à son tour, un sourire malicieux sur les lèvres.

— Oh, ce n'est pas à Colombe que je pensais...

Les mains de Zade tremblaient.

— Non... jamais je...

Des coups résonnèrent contre la porte, faisant sursauter la sorcière.

— Zade ? On mange ! s'exclama sa fiancée d'une voix douce. Je nous ai préparé un bon petit plat à déguster tous ensemble !

— J'arrive ! dit-elle, cachant à peine son trouble.

Les pas disparurent dans les escaliers, et Zéas sortit une clé de sa poche, puis déverrouilla la porte. Avant qu'il ne sorte, Zade attrapa son bras, lui chuchotant à l'oreille.

— Ne brisons pas une promesse que nous avons promis de tenir.

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Serait-ce le début des révélations ? Hehe, encore un peu de patience et soyez prêts pour une suite mouvementée...