6. Le vilain menteur
Trois semaines plus tard
Je tire les manches de mon gilet en espérant couvrir les horribles traces de piqûres. Je suis allée faire des examens supplémentaires et la prise de sang était obligatoire. Aucune amélioration de mon état, mais c'est « normal » car le véritable traitement n'a pas débuté. On m'encourage à faire de la chimiothérapie pour éliminer toutes les cellules cancéreuses, mais je connais les conséquences : la perte totale de mes cheveux. Il n'y aurait plus aucun doute de ma maladie.
Allongée dans mon lit, j'essaie en vain de me concentrer sur le texte à étudier. J'ai envie de le balancer pour dormir. J'ai passé mon samedi à l'hôpital, je ne suis pas en forme pour faire mes devoirs.
— Ma chérie ?
La voix de mon père m'interpelle, nous parlons tellement peu que j'oublie parfois sa présence. C'est maman qui s'occupe de tout. Les rendez-vous médicaux, les médicaments et chaque détail en lien avec moi.
— Je te dérange ?
— Non, j'étais en train de lire ce torchon.
Il soupire en lançant un regard à ma chambre. Elle n'est pas rangée, mes vêtements traînent sur le sol, mes cours sont éparpillés sur mon bureau et les médicaments quotidiens sont sur ma table de cheveux. Des bouteilles d'eau et encore des bouteilles d'eau.
— Je tenais à m'excuser de mon absence de ces derniers jours. Ce n'est pas un comportement normal pour un père. Tu mérites toute l'attention du monde et je n'ai pas été capable de te la donner.
— C'est pas grave, papa.
Pour être franche, je ne le pense pas. Il s'est comporté comme un con, ses excuses ne suffisent pas à rattraper ces semaines de silence. La maladie ne fait pas de moi quelqu'un de différent, si ? Personne ne se doute de quoi que ce soit dans mon entourage. Il ne reste que découvrir l'auteur de ce mot et le convaincre de se taire. Mais ça c'est une autre histoire.
— Je vais faire de mon mieux pour t'aider en cette période difficile. Je t'aime, ma chérie.
— Je t'aime aussi.
Il m'embrasse sur le front avant de sortir de ma chambre. Je remarque bien qu'il se force à se comporter normalement. J'aimerais retrouver mon père et pas cet homme froid et austère. Je me sens plus seule que jamais, les choses auraient été plus simples si j'aurais pu évoquer le sujet avec Max. La connaissant elle m'aurait donné pleins de conseils.
Je ferme finalement mon cahier en soupirant puis quitte mon lit. J'ai des choses à faire, mais je m'ennuie. Je suis tellement fatiguée que je dois bouger pour ne pas m'endormir. Le médecin ne plaisantait pas, le traitement est vraiment très lourd. Mais ça serait tellement pire avec la chimio.
Une quinte de toux s'échappe de ma bouche et me pousse à me plier en deux. Je n'arrête pas de tousser, la douleur dans ma poitrine est effroyable. Je fixe le liquide rouge dans ma main. Du sang. Putain, c'est pas bon. Alertée par le bruit, ma mère entre dans ma chambre comme une furie. Elle remarque aussitôt le sang dans ma main.
— Je t'emmène à l'hôpital.
— Je suis en pleine forme, maman.
Elle fronce les sourcils.
— Tu peux convaincre tout le monde, mais je reste ta mère. Enfile ton manteau, je t'emmène voir ton médecin.
— Maman ! Ça peut attendre plus tard ? J'ai manqué suffisamment de cours et... j'ai pas envie que les autres l'apprennent à cause de mes absences répétées.
Je remarque bien qu'elle lutte pour ne rien laisser transparaître.
— D'accord, mais j'appelle ton médecin pour connaître les dispositions à prendre dans ce genre de situation. J'aimerais que tu restes à la maison demain pour te reposer et voir l'évolution de ton état.
— Impossible de te faire changer d'avis ?
— Je suis ta mère ! J'ai encore le droit de décider ce qui est le mieux pour toi, tu es malade Emy et ce n'est pas une petite maladie mais on parle d'un cancer !
Des larmes coulent le long de mes joues.
— Ouais ! J'ai très bien compris que j'étais MALADE !
Je claque violemment la porte de ma chambre pour ne plus la voir. Ce putain de cancer est en train de détruire de ma vie et le pire c'est que je ne peux rien faire pour y remédier.
03.09.2023
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