trente-deux
Et peut-être que le plus dur pour Pierre est de se séparer de la brune comme il vient de le faire en quittant son appartement après l'avoir embrassée tendrement. Il l'abandonne le temps de deux jours pour se rendre à Rouen pour voir sa famille. Il pense à ses frères qu'il retrouvera pour l'habituel feu d'artifices, ils ont l'habitude de le célébrer sur les bords de la Seine dans leur ville natale.
Et c'est ce même feu d'artifices qui fait réagir Pierre au bout de cinquante minutes de trajet. Il fait demi-tour pour rejoindre de nouveau Isis, il se hâte de frapper à sa porte pour qu'elle puisse ouvrir, ce qu'elle ne tarde pas à faire en fronçant les sourcils.
- Tu as oublié quelque chose ? questionne-t-elle surprise.
- Toi.
Le pilote s'approche pour une étreinte et Isis ne peut cacher sa surprise qui se traduit par de la crispation quand elle noue ses bras dans le dos de Pierre. Elle dépose un petit baiser sur sa mâchoire pour le saluer malgré le fait qu'ils se soient séparés une heure plus tôt.
- Je vais y aller, mais je t'embarque avec moi.
Il accompagne ses propos en encadrant le visage de la brune de ses doigts. Le métal froid d'une de ses chevalières fait frissonner la peau de Isis qui se perd dans son regard bleuté. Les lèvres rosées de Pierre se rapprochent inexorablement des siennes pour les capturer.
Elle est soulagée de sentir la langue du jeune homme se glisser près de la sienne pourtant elle ne répond pas à son échange avec la même intensité qu'il donne. Elle est encore troublée par ce qu'il vient de dire, il n'était pas prévu qu'elle l'accompagne voir sa famille pour la fête nationale, en ce quatorze juillet.
D'un commun accord, le couple s'était entendu pour prendre leur temps. Et cela passe aussi par ne pas précipiter le contact entre Isis et la famille de Pierre, la brune souhaite reconstruire des bases solides pour leur relation. Elle veut être patiente tout comme Pierre. Ele veut développer leur relation, passer du temps avec lui, le découvrir comme la première fois.
Pierre sent bien la réticence de la brune qui se traduit par une attitude crispée. Elle n'ose pas lui rendre son baiser, ses pensées sont embrouillées par ce qu'il vient de dire et Pierre le remarque bien en s'éloignant d'elle. Ses mains se posent sur ses épaules dénudées, il n'y a que les fines bretelles de son haut noir qui cachent quelques millimètres de peau.
Immédiatement, Isis baisse les yeux en constatant qu'il la fixe de son regard bleuté. Elle dépose ses mains sur ses avant-bras musclés afin de suivre le contour de ses veines saillantes. Elle trouve cette activité bien plus intéressante que de regarder Pierre dans les yeux, là où elle se sent analysée.
- Je sais que tu ne voulais pas les rencontrer dans l'immédiat, mais tu ne vas pas rester ici toute seule, dit-il tout bas.
- J'ai l'habitude.
- Il y aura des feux d'artifices, soulève Pierre. Et je meurs d'envie de les voir avec toi.
Sa main se pose sur sa joue qu'il caresse doucement, puis ses doigts glissent jusque sous son menton pour la forcer à relever le regard dans sa direction. Isis n'a pas le choix, elle se sent stupide d'avoir les yeux humides en comprenant que Pierre n'a pas oublié sa peur. Elle comprend qu'il ne vient pas seulement pour qu'elle puisse rencontrer ses parents.
Il vient surtout pour qu'elle ne soit pas seule pour la fête nationale où son anxiété peut-être démesurée. Elle est touchée par cette attention, encore plus lorsque Pierre avoue qu'il veut être à ses côtés, non pas pour l'aider, mais pour les regarder avec elle. Il a cerné le problème mais il ne le dit pas à haute voix.
- Est-ce que tu as envie de les voir avec moi ? questionne-t-il tout bas.
Elle acquiesce en le serrant dans ses bras. Un poids immense quitte ses épaules lorsqu'elle lâche un premier sanglot contre lui, les bras de Pierre la soutiennent inlassablement et elle est tellement soulagé qu'il soit à ses côtés pour ce jour particulier.
- Mes parents sont gentils, tu verras.
- Je suis sûre que les feux d'artifices seront magnifiques.
- Puis, ils adorent les chiens.
Isis est soulagée d'entendre qu'elle peut emmener Joyce avec eux. Elle accentue son étreinte autour du pilote en nouant ses bras dans son dos. Elle dépose une multitude de baisers sur sa barbe taillée pour le remercier, elle est tellement reconnaissante qu'elle ne parvient pas à le dire à haute voix.
Le pilote l'entraîne bien rapidement vers sa chambre afin de l'aider à préparer ses affaires. Elle l'observe mettre divers vêtements dans sa valise, il les plie précautionneusement tout en jetant des coups d'œil à Isis assise sur le lit. La brune caresse la tête de la chienne, elle acquiesce de temps à autre quand Pierre forme diverses tenues pour avoir son approbation.
- Un petit top vert pour porter chance et une jupe, dit-il. Mignon, j'aime bien.
- Pierre, est-ce que tes parents savent...
Elle questionne d'une petite voix tandis que Pierre attrape des sous-vêtements dans l'un des paniers du dressing. Isis devrait probablement rougir de le voir observer en détails la dentelle de ses soutiens-gorge d'un œil expert. Il le fait exprès, probablement pour se donner un air, mais elle est bien trop préoccupée par la rencontre avec ses parents pour rire de son spectacle.
- ... que je suis ton plan ? complète-t-elle.
Il se tourne finalement vers elle, un rictus étire ses lèvres lorsqu'il montre fièrement un soutien-gorge rouge, comme une victoire. Isis aurait roulé des yeux si seulement elle n'était pas aussi tourmentée par la situation. Elle aurait effectué le même sourire malicieux que Pierre si elle n'était pas prise par son anxiété.
Pierre se redresse pour s'assoir aux côtés de la brune sur le lit. Il prend conscience de son anxiété par son corps crispé et par ses ongles plantés dans la chair de sa cuisse. La main du pilote se lie à la sienne et il y trace de petits gestes circulaires avec son pouce pour la rassurer.
- Maman sait que tu es mon amoureuse, que tu as un joli prénom et que tu comptes beaucoup à mes yeux, bien plus que ce que je veux admettre.
Isis sent son cœur s'arrêter, elle enlace le pilote sans attendre avec force pour le remercier. Ses lèvres se déposent sur les siennes et dans leur étreinte, elle en profite pour récupérer le soutien-gorge rouge que tenait le jeune homme dans ses mains.
- Tu ne peux pas prendre celui-ci, il ne suit pas avec mon haut, souligne-t-elle.
- Il est mignon et on ne le verra pas.
- Je vais me balader avec des bretelles verte et rouge comme une guirlande de Noël ? Il faut en prendre un autre...
- S'il te plaît, j'aimerais bien t'enlever celui-ci, insiste le pilote d'une voix basse.
- Et si je n'en mets pas ?
Les yeux bleutés du pilote s'écarquillent instantanément et il s'empresse d'approuver cette idée en glissant ses mains sur la taille de Isis qui ne cesse de sourire en l'observant.
- Ça sera tentant mais...
- Tes parents ne vont pas t'arrêter tout de même.
- Rien ne peut m'arrêter quand il s'agit de toi.
Elle sourit avant de lui asséner une petite tape sur l'épaule et Isis finit par trouver suffisamment de force pour se relever. Ses affaires prêtes, elle suit Pierre jusqu'à sa voiture qu'il s'empresse d'ouvrir. Elle se sent mieux assise sur le siège passager que debout au milieu de la rue, Joyce est allongée à ses pieds. Elle a reculé le siège pour lui laisser un maximum de place pour le trajet.
Elle ne dit presque rien durant celui-ci, elle se contente d'observer Pierre conduire avec attention. Parfois, sa main se dépose sur sa cuisse pour l'empêcher de s'enfoncer ses ongles dans sa chair et elle finit par dire alors qu'ils sont presque arrivés :
- J'ai des toc, tu sais.
- Tout le monde en a.
- Tout le monde va les voir, murmure-t-elle en pensant à son obsession pour les volets fermés.
- Et alors ?
Pierre se tourne vers elle pour la rassurer que ce n'est ridicule. Il raconte qu'il en a également, qu'il a des superstitions idiotes lorsqu'il monte dans sa monoplace du côté gauche mais que personne ne s'est jamais moqué de ce geste.
Il arrête le moteur avant de quitter le véhicule, il fait le tour de ce dernier afin de rejoindre la brune. Il lui désigne sa maison d'enfance d'un doigt et Isis se sent tout à coup fébrile. Pierre le remarque, il l'étreint quelques secondes pour qu'elle puisse puiser de l'énergie en lui.
- Respire, ça va le faire.
- Comment est-ce que tu sais...
- Je le sais, c'est tout. Je les connais comme je te connais toi.
Elle acquiesce tandis que Pierre dépose un baiser sur sa joue. Il s'agit d'un dernier encouragement alors qu'il vient lier ses doigts aux siens, il avance tous les trois vers l'entrée de la maison. Pierre presse la poignée et la porte s'ouvre sous leurs yeux, elle n'était pas verrouillée. Il s'agit d'une chose que ne peut pas faire Isis, elle verrouille tout derrière elle et Pierre s'empresse de tourner la clef dans la serrure.
Des voix émanent depuis le salon et Pierre avance dans un petit couloir sans lâcher la parisienne. Elle serre sa main avec force lorsqu'ils passent la porte menant au salon où toute la famille de Pierre est réunie sur des canapés. Elle se sent effroyablement mal à l'aise en constatant qu'une femme s'approche d'eux pour les étreindre avec force, tout en s'exclamant :
- Mais je ne savais pas que vous viendriez tous les deux !
- Ça s'est fait au dernier moment, man'. Je te présente Isis.
Le sourire de la mère de famille s'agrandit lorsqu'elle embrasse Isis qui est stoïque. Elle déclare qu'elle s'appelle Pascale et qu'elles peuvent se tutoyer et Isis ne fait que balbutier en voyant les autres membres de la famille se présenter à elle.
Elle est incapable de retenir le moindre prénom entre ses quatre demi-frères et leurs compagnes. Isis se retrouve bien vite coincée entre l'accoudoir d'un des trois canapés et Pierre. Il se tient à sa droite et ses doigts ne cessent de parcourir sa colonne vertébrale pour la rassurer, Isis parle très peu.
En réalité, elle ne parle pas. Elle se contente d'essayer de suivre les conversations mais tout est compliqué lorsque l'on est pas habituée à côtoyer autant de monde. Tout est encore plus compliqué lorsqu'elle ne connaît pas l'endroit où elle se trouve, ses yeux découvrent le salon et cette baie vitrée qui l'angoisse.
- Elle est vraiment adorable, souffle l'un des frères de Pierre en caressant la golden.
Isis se pince les lèvres en acquiesçant, elle préférait avoir Joyce près d'elle plutôt qu'à l'autre bout du salon. Il ne fait que la distraire à la caresser et Isis s'en veut de lui avoir retirer son harnais indiquant son statut. Elle ne voulait pas recevoir de questions mais voici qu'elle se tient en état de détresse émotionnelle.
Elle plante ses ongles avec force contre ses cuisses, ce que Pierre remarque bien. Il finit par dire à sa famille qu'ils devraient passer à table, et tout le monde quitte le salon pour rejoindre la terrasse où la table est déjà installée pour le grand malheur de Isis. Son regard est véritablement paniqué, elle n'a plus manger en terrasse depuis des années et elle sent son cœur flancher.
- Pierre, je peux pas, murmure-t-elle d'une voix étranglée.
Il ne reste qu'eux dans le salon et le pilote se pince les lèvres avec force en essuyant tendrement la larme solitaire roulant sur sa joue. Sans attendre, ses bras enlacent la brune qu'il serre avec force contre lui tandis qu'un sanglot s'échappe de ses lèvres.
Isis reste dans cette étreinte en attendant que son angoisse passe. Le pilote frotte son dos de bas en haut, ce geste est apaisant. Elle ne veut vraiment pas y aller, ce que Pierre a bien compris, mais il attend que ses larmes cessent avant de se lever pour demander à sa famille de regagner l'intérieur. Il ne sait pas quelle excuse inventer, il ne peut pas non plus divulguer les craintes de Isis, il reste simplement impuissant à déposer un tendre baiser sur son front.
- Mon poussin, est-ce que tu peux ramener...
Pascale vient de traverser la baie vitrée et elle tombe nez à nez face aux deux amoureux enlacés. Elle voit les larmes sur les joues rosées de Isis et elle s'approche immédiatement d'eux. Avant qu'elle n'ait le temps de poser une question, Pierre la devance :
- Ne pose pas de questions man' mais dis leur de rentrer à l'intérieur pour manger s'il te plaît.
La mère de famille hoche de la tête mais son inquiétude ne diminue pas en voyant l'état de la jeune femme que tient son fils dans ses bras. Elle ne pose pas de questions et elle s'empresse de faire le chemin inverse et Pierre peut entendre sa voix lorsqu'elle déclare :
- Il va falloir rentrer, ils annoncent de la pluie dans une quinzaine de minutes !
Aussitôt un brouhaha commence tandis que toute la famille rentre à l'intérieur et Isis se sent mieux en étant installée dedans, face à la baie vitrée. Ses yeux rougis ne font aucun doute sur le fait qu'elle a pleuré mais personne n'en fait la remarque ou la questionne.
Au milieu du repas, une léchouille attire son attention et Isis baisse les yeux vers la golden qui vient de laisser sa langue râpeuse glisser sur son avant-bras dans un geste affectif. Elle esquisse un petit sourire en comprenant qu'elle a fait le tour de toutes les personnes présentes à cette table. Il s'agit de sa manière à elle de lui dire qu'elle ne risque rien.
Et Isis en est soulagée, même si le plus dur reste à affronter dans la soirée.
lentement mais sûrement les progrès sont là <3
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