Chapitre 31
Daëri
J'essaie d'arranger les choses en me cachant des gens chez moi...enfin chez nous? On a laissé leur endroit à Zy, après qu'Atmos m'ait demandé s'il pouvait s'installer avec moi. Je lui ai assuré qu'on ne me frapperait plus et qu'il n'avait pas besoin de me protéger. Pourtant il m'a dit qu'il voulait juste rester avec moi. Je sais que ce n'est pas complètement faux, mais je sais aussi qu'il voulait surtout, beaucoup jouer les gardes du corps. On a bien vu ça quand on a failli s'entretuer au début de notre cohabitation. Là on a découvert que l'on était "trop" ou "pas assez" pour plein de choses selon l'autre, quand il s'agit d'entretenir un logement.
Il était sur le point de se barrer pour demander un autre endroit où vivre à Exxio. C'est alors que je lui ai rappelé que ses motivations, pour "squatter mon appart", étaient donc un mensonge. Il a fait demi-tour et m'a dit que j'avais tort "parce qu'on ne supporte pas toute cette souffrance, juste pour jouer les chevaliers". Il a alors ajouté qu'il venait de prendre sa décision, et qu'il allait "squatter mon endroit". Il a ensuite continué en disant qu'on avait qu'à se prendre la tête, jusqu'à ce que, moi, je déménage. Ça deviendra alors "son endroit".
En attendant, "notre endroit", j'y travaille trop selon Atmos. Mais c'est juste des dessins. Ça pourrait être pire. À force de tourner en rond, sans bipper en plus, j'ai supplié les membres du conseil de me donner quelque chose à faire. Ces corbeaux m'ont bien eu. Ils m'ont fait faire des posters, contre Papa. Des posters pour inviter les gens à participer activement à leur révolution, en fonction de ce qu'ils savent faire. Donc les inviter à se battre aussi.
On m'a aussi forcé à signer les posters de façon évidente. Logiquement du coup les gens les vandalisaient, mais au moins ils les regardaient avant. Malheureusement pour moi, ils ont arrêté de les saccager. Il n'y avait donc plus d'espoir, pour que le conseil me fasse arrêter de les dessiner.
Je soupire et Atmos s'assied à côté de moi avant d'étirer ses lèvres. Je lui rends son sourire. Après avoir observé mes ratures sur mes dessins, il demande:
-Qu'est-ce qui ne va pas Da Vinci?
Je ris doucement, puis lui réponds:
-Je dois en faire de nouveaux. Mais je suis à court de choses à mettre pour trainer mon p...Nyx dans la boue.
Atmos me regarde pensif. Ça lui donne son air sérieux, face auquel je ne peux pas m'empêcher de m'inquiéter. Est-ce que je l'ai énervé en disant presque "mon père"? Il devrait au moins essayer de comprendre. Il me sort de mes pensées avec un:
-Eh.
Je reporte mes yeux sur lui et son visage maintenant éclairé me rassure. Il continue:
-Je sais que ça doit pas être facile...mais je peux t'aider, du point de vue de quelqu'un qui ne l'aime pas. Du tout.
Je soupire et hoche la tête. Soudain un éclair me vient en pensant à ce qu'Atmos vient de dire. Je lui dis:
-Les mutants, si on leur rappelle...
Il secoue la tête à ma confusion, puis m'explique:
-On veut de l'aide, pas des gens enragés. Ça ne donne pas de bons résultats en général.
Je hoche la tête et il suggère:
-T'as qu'à t'utiliser.
Je lui lance un regard confus et il me dit:
-Il corrompt les enfants, comme le joueur de flute de Hamelin.
Je ne peux pas m'empêcher de lui lancer un coup d'œil irrité. Il répond à mon regard par:
-On va pas se disputer là-dessus maintenant. T'as besoin d'un poster, j'ai eu une idée. Tu savais que ça n'allait pas te plaire, comme les autres posters que t'as dû faire.
Je soupire puis réfléchis au visuel. Il commence à m'expliquer:
-Le joueur de flute, c'est un c...
-Je connais.
Il met sa grosse tête ornée de cheveux noirs en face de moi et me dit:
-Ça va passer. T'auras plus à y penser quand t'auras fini.
-Ah bon? Même quand ça sera affiché genre partout? C'est une espèce de moquerie.
En me caressant la joue, il répond doucement:
-Non, ça montre que c'est pas ta faute.
Je soupire et m'y mets.
***
Atmos regarde Daëri armée d'un fusil laser, tirer sur deux robots aux yeux-écrans rouges, avançant vers elle. Atmos essaie de s'approcher pour l'aider, mais ne peut pas bouger. Les robots, eux, avancent malgré leurs dommages. Atmos essaie de crier pour appeler Daëri. Mais il se réveille d'un coup, sous une lumière tamisée et le regard inquiet de celle-ci.
***
Daëri
Atmos me regarde encore paniqué, donc je pose ma main sur sa poitrine. Je lui dis doucement:
-Atmos calme toi, t'as encore rêvé?
Il respire plus lentement quand il hoche la tête, avant de me ramener contre lui un moment. Je le regarde et demande:
-Qu'est-ce que t'as vu?
Il hésite puis me dit:
-Tu te battais contre deux robots, contre Nyx?
Je ne sais pas quoi dire puis fronce les sourcils confuse. C'est pas possible. Je lui dis:
-Ça veut dire que je vais essayer de le tuer...
-Comment tu peux le savoir?
-C'est juste logique, Atmos.
Il me sourit et dit:
-Oui, j'avais oublié que je suis bête.
Ça me fait sourire aussi et je réponds:
-Mais non t'es pas bête, t'es juste secoué. Au fait qu'est-ce que t'as étudié avant?
Il me dit:
-Les armes. Boom!
Je me mets à rire et il m'imite pendant que je me recouche sur lui.
***
Aujourd'hui, j'ai enfin eu le courage de sortir pour dessiner. On ne m'a pas craché dessus ni insulté. Du moins pas oralement. Les regards étaient assez écrasants, mais ça aurait pu être pire. Je pense réessayer. Le chemin du parc aux baraques est assez long, pourtant c'est pas l'Everest. Mais il faut déjà que je sorte du parc. Soudain, on m'attrape, et la force me tenant violemment me traine. En me débattant, je crie:
-Lâchez-moi! Mais lâchez-moi putain!
J'entends deux personnes rire donc c'est perdu d'avance. On me jette par terre, derrière des buissons. Je continue de me débattre pendant qu'on me plaque au sol. Je distingue un peu mes agresseurs, dans l'obscurité naissante, de la journée qui meurt. Celui aux cheveux sombres me dit d'une voix rocailleuse:
-Atmos n'est plus là pour protéger ton cul de meurtrière.
Il a l'air d'avoir mon âge. Il a aussi des bagues aux dents, assorties à son regard froid, presque transparent. L'autre a un air enfantin avec son visage moins fin que son acolyte. Il se baisse à quelques centimètres de mon visage, avec son haleine brulée par la cigarette et l'alcool. Il me dit d'une voix beaucoup plus claire:
-Tu veux savoir ce que tu mérites?
Je lui donne un coup de tête et sous les rires de son collègue il recule en émettant des:
-Putain! Espèce de pétasse!
Il se calme et je les observe. Ils me regardent avec cet air me terrifiant. Beaucoup plus que le jour où je me suis faite capturer, ou qu'Atmos m'a presque tuée. Mon cœur s'emporte comme ma respiration. Je me mets à me débattre plus farouchement. Malheureusement Haleine brûlée, me tiens maintenant aussi les jambes en rigolant. Celui aux bagues dit:
-On va te laisser te fatiguer.
Je m'arrête de me débattre et Haleine brûlée me lâche en disant:
-C'est bien.
Il s'approche du haut de mon corps tandis que son ami me tient. En paniquant, je me remets à bouger et hurle:
-Lâchez-moi putain!
Haleine brûlée me dit:
-Ça aurait pu être facile, mais ce sera plus drôle.
Pile au moment où les éclairages de nuit se mettent en marche, il sort un couteau. Putain je vais mourir comme ça. Au lieu de me couper, c'est mon t-shirt qu'il attaque. Me doutant de la suite encore pire que la mort, je me débats encore plus. Je crie:
-À l'aide! Aidez-moi putain! S'il vous plait! Quelqu'un! Au secours!
Je me mets à tousser à force de crier. Tout ça sous leurs rires et le bruit de mon t-shirt en train de se faire déchirer. Je me mets à pleurer en même temps que je crie d'une voix tremblante:
-À l'aide! Au secours!
Je continue de pleurer, à l'idée que les gens s'en fichent sûrement ou que personne ne m'entend. Je ne sais pas lequel est le pire. Le brun demande à l'autre en riant:
-Tu coupes le soutif ou tu l'enlèves?
La lame s'approche à nouveau de moi pendant que je les implore:
-Laissez-moi partir, s'il vous plait.
Soudain, la lame est contre mon cou quand le blond dit:
-Blade aussi aurait voulu partir.
Ils lui parlaient à peine. Je me retiens de leur dire ça. Je suis déjà reconnaissante qu'il ait éloigné sa lame de mes seins, pour l'instant. Soudain, mon espoir remonte un peu en entendant la voix d'Aelia crier:
-Vous êtes vraiment deux connards!
Elle s'approche un couteau de combat à la main. Ils me lâchent et je me remets à respirer correctement. Mais je ne suis toujours pas soulagée. Ils pourraient attaquer Aelia ou la convaincre de les laisser faire. Non, elle n'est pas comme ça. Je pensais aussi qu'Ena n'était pas comme ça. Incapable de me lever, je me recroqueville sur moi-même. Comme une idiote, au lieu de courir. Le blond dit à Aelia:
-Wow détend toi, elle le mérite et tu le sais.
Elle répond:
-Toi, tu fermes ta gueule. Tu connaissais à peine Blade. Et tu vas mériter ce qu'il va t'arriver si le conseil découvre ce que t'as fait.
Il réplique:
-On sait qu'elle dira rien, comme quand Ena lui a cassé la gueule.
Ah oui tu crois ça? Aelia demande:
-Ena a fait quoi?!
Il lui dit:
-T'en as pas entendu parler?
Aelia répond confuse:
-Ça lui ressemble pas...on s'en fout dégagez! Allez!
Cheveux sombres demande:
-Pourquoi tu l'aides?
Aelia crie:
-Tais-toi et bouge Ramon!
Je calme mes pleurs trop intenses, pour enfin me lever maladroitement et courir. Aelia me rattrape et je me remets à paniquer. Ma respiration repart trop rapidement, tandis que mes pleurs redoublent. Elle me dit doucement:
-Daëri, tu dois te calmer.
Mais j'y arrive pas, tout est tellement rapide en moi. Aelia pose ses mains sur mes épaules et me dit:
-Tu sais sous son sale caractère, Blade était tellement bon, qu'il t'aurait pardonné. Et il leur aurait cassé la gueule salement...s'il avait survécu.
Elle essuie mes larmes puis continue:
-Et puis je crois au pardon, mais t'attends pas à ce que je te pardonne maintenant. Même si je t'ai sauvé la vie. En quelque sorte.
Elle s'en va et je m'assieds par terre, pour continuer de verser encore plus de larmes, en pensant à ce qu'ils m'auraient fait. Je ne peux pas stopper ces scénarios. Ils m'auraient sûrement violé et personne ne s'en souciait ici. Pourtant je les vois au loin. En plus de ça, il y a Blade. Il me manque alors que c'est moi qui ai tout fini. Au bout d'un moment, après que j'ai presque frappé le peu de personnes qui ont essayé de m'approcher, Atmos arrive. Il se baisse et me demande essoufflé:
-Daëri qu'est-ce qu'il s'est passé? Qu'est-ce qu'il y a? On t'a fait du mal? Ton t-shirt...putain qu'est-ce qu'on t'a fait?! Daëri calme toi.
Il essaie de me toucher et je le pousse violemment. Ils sont tous comme ça, j'aurais dû le savoir. Papa me protégeait. Atmos insiste:
-Daëri, c'est moi, je vais pas te faire de mal.
Les sillons sur mon visage accélèrent et je ne sais pas pourquoi, mais j'essaie de lui dire:
-Ils...i...
Je m'arrête parce que j'ai du mal à respirer. Atmos a maintenant l'air peiné et ajoute:
-Je t'en supplie Daëri, viens, on va rentrer. Viens...
Il caresse ma joue, mais je recule. Il s'assied et reste avec moi, jusqu'au moment où je me calme enfin. Après de longues minutes. Il laisse s'écouler encore du temps puis s'approche à nouveau et me dit:
-Respire lentement, calme-toi s'il te plaît.
Au bout d'un moment, j'y arrive et le regarde mieux. Il me demande:
-Je peux te porter? On rentre ok?
J'hésite, mais décide de hocher la tête. Je m'accroche tellement à lui quand je suis dans ses bras...on reste comme ça un moment.
Quand je me réveille enfin de ma sieste des heures calmantes plus tard, je vois Atmos tourner la tête. Il s'approche et me demande:
-Ça va mieux?
Je hoche la tête, remarque des bleus sur sa joue et fronce les sourcils. Il me dit:
-C'est rien t'inquiètes.
J'espère qu'il n'a pas fait ce que je crois. Non, il ne sait même pas. J'inspire puis essaie de lui expliquer:
-Il y avait deux...deux ho...
-C'est réglé t'inquiètes pas, c'est fini.
Je fronce les sourcils et en espérant que ça soit ça je demande:
-Comment ça? Le conseil les a eus?
-Pas encore.
-Ils sont où?
Atmos garde le silence puis face à mon regard insistant, il répond:
-Ils doivent être à l'hôpital ou chez un docteur. Je sais pas...
-Tu les as frappés? C'est ça les bleus hein?
Il hausse les épaules et répond:
-Ils sont vivants.
Je caresse son visage en évitant ses bleus et, me sentant coupable, je lui dis:
-T'aurais pas dû faire ça.
Il réplique avec un regard intimidant:
-Ils n'auraient pas dû faire ça.
-Je suis désolée.
Il prend ma main et dépose un baiser dessus avant de dire:
-Le sois pas.
Je souris, le cœur réchauffé, puis lui partage mes pensées:
-Ils me haïssent. Les gens au parc, ils les auraient laissés me...
J'inspire longuement et il dépose un baiser sur mon front me réconfortant avant de dire:
-Non, je pense pas...
Je lui lance un regard piquant auquel il répond par:
-Tu connais l'effet spectateur. Ils pensaient sûrement que quelqu'un d'autre allait t'aider.
Je secoue la tête et lui dis:
-Non, c'est trop. J'étais pas dans Le cratère du parc. J'étais dans un coin du parc. Les gens s'y rendent, même aussi tard. Beaucoup de gens...
Atmos a l'air pensif avant de répondre:
-Peut-être que t'as raison, qu'ils sont mauvais...
-Non Atmos. Te mets pas à penser ça à cause de moi. C'est ton peuple, pas le mien.
Il caresse ma joue puis dépose ses lèvres sur les miennes et dit:
-Un jour, tout ira bien, ok?
Mes lèvres s'étirent et il les embrasse à nouveau.
Plus tard, je suis pensive sur la chaise à bascule à côté du lit. Je finis par conclure tout haut pour Atmos:
-Peut-être qu'en fait t'aimes bien une partie de ton côté mauvais. Mais tu ne peux pas l'être. Du coup, tu veux quelque chose pour compenser, quelque chose de malfaisant comme moi. C'est pour ça que je t'attire.
Ne souriant plus, il s'approche. Il arrête ma chaise et se penche en m'enfermant dans son regard. Il me dit:
-Arrête d'avoir ce manque de confiance, sur pourquoi je suis avec toi.
Je le pousse et vais me coucher sur le lit ennuyée. Je lui lance:
-Arrête d'utiliser tes pouvoirs sur moi.
-Je le fais pas, c'est juste évident. Et ce que j'aime chez toi, c'est pas ton obscurité, mais ta lumière.
Je secoue la tête et le contredis:
-Quelle lumière? Elle est tellement faible.
Il se couche à côté de moi. Là, ça me rappelle nos premières soirées sous les étoiles. À l'arbre aux cristaux. Ses pommettes font remonter ses lèvres et les étoiles sombres sur sa peau. J'observe son beau regard plissé quand il me dit:
-Ta lumière est plus forte que ce que tu penses, et elle grandit.
Je lui rends son sourire avant de lui donner mes lèvres. Une fois loin de ses lèvres, je me remets à penser. Face à son regard ne souriant plus je lui partage mon idée:
-Peut-être que ce qu'il s'est passé au parc, c'est un remboursement. Pour ce que j'ai laissé mon père faire. Et peut-être aussi que ce que j'ai fuis, réussi à fuir toutes ces années, me rattrape.
Il fronce les sourcils confus. Après avoir fait mon choix, j'inspire longuement. Je lui dis doucement:
-Tu veux savoir comment je pense que ça a commencé? Que l'obscurité est née?
Avec ses yeux complètement connectés aux miens, il me dit:
-Oui.
Je me retiens de pleurer face aux souvenirs qui m'envahissent. Après une longue inspiration, je lui révèle:
-Depuis que j'avais 5 ans ma mère me vendait. Enfin elle se faisait payer par des hommes pour...pour...
Il me tire vers lui et je réalise que je suis en train de pleurer. Il me murmure:
-Te fais pas de mal, j'ai compris. Ne le revis pas, retourne pas là-bas.
Je hoche la tête contre lui, il dépose un baiser sur ma tête et je lui dis malgré tout:
-À 7 ans, j'en pouvais plus, j'ai essayé de tout finir. C'est là que Nyx m'a trouvé.
Atmos continue de caresser ma joue et le côté de mon visage en disant doucement:
-7 ans...
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