Chapitre 19
Daëri
Je remarque que tout le monde a l'air occupé et tendu aujourd'hui. Je me demande ce qu'il se passe. Je décide de suivre Atmos. Mais en même pas quelques pas, il dit sans se retourner:
-C'est drôle ça, maintenant tu me suis? Je suis pas censé t'approcher, tu te souviens?
Je m'arrête. C'est peut-être ce sol granuleux de merde qui m'a trahi. Je réponds à Atmos:
-Je sais qu'il se passe quelque chose!
Il s'arrête aussi et se retourne. Il me dit calmement:
-Oui, et c'est pas ton problème.
Je répète avec une voix ridicule:
-"Oui et c'est pas ton problème".
J'ajoute sombrement:
-Débile.
Il éclate de rire. Avec son regard brillant, contrastant avec ses cheveux nuit, il me dit:
-Tu vois quand tu veux, tu p...
-La ferme, c'était pas drôle. Maintenant, parle.
Atmos étire à nouveau ses lèvres pourries et dit:
-Force moi.
Je souffle de colère, regrettant de ne pas avoir quelque chose de dangereux. Je regarde au niveau de sa ceinture. Il ne semble pas avoir d'arme, du moins pas visible. Je lève les yeux, il me regarde avec un mélange de surprise et d'amusement. Quand je comprends pourquoi je lui réponds dégoûtée:
-Je cherchais quelque chose avec lequel te tuer. Je regardais pas...et puis étouffe-toi vraiment.
Il me sourit toujours, mais soudain Blade arrive sur un skate antigravité. Il lui dit contrarié:
-On va pas t'attendre 50 ans pendant que tu dragues Lucifer.
Atmos rit tandis que je crie à Blade:
-Espèce d'imbécile!
Ce dernier esquisse un sourire mettant en valeur ses pommettes et répond:
-Je t'aurais avant lui, t'inquiète.
Il est lunatique ou quoi? Son ami pouffe et je m'apprête à répondre à Blade, quand il tourne son attention vers Atmos. Il lui dit plus sérieusement:
-On y va.
Blade divise son skate et Atmos monte sur le nouveau, puis ils disparaissent. Je serre ma mâchoire et cherche rapidement autour de moi. Je vois une moto antigravité et souris. Je finis de la trafiquer avec la faille que Papa m'avait montrée. À ma plus grande joie ça fonctionne sur les leurs aussi. Son propriétaire peut aller se faire voir. J'avance un peu aléatoirement sur les routes. Après un moment je finis par enfin les apercevoir. Je ralentis un peu, mais continue. Enfin sûre de là où ils se rendent, je suis mon propre chemin avec le mode semi-automatique de la carte. J'arrive devant les portes de la prison, mais les deux gardes s'empressent de me faire barrage de leurs corps. Ça me fait bien sourire avant que je leur demande:
-Il y a un problème?
L'un d'eux me sort:
-C'est pour une visite?
Je hoche la tête, regarde mon bipper et ajoute:
-C'est l'heure non? Vous me laissez entrer?
Un des gardes fait "discrètement" signe de ne pas le faire à l'autre, qui me demande:
-Vous venez voir qui?
Je rétorque:
-Je suis obligée de répondre?
Le garde qui avait bougé la tête en signe de désapprobation m'informe:
-Bien-sûr, c'est une prison ici, pas un bar.
Je souris et m'assieds sur une marche. Il me demande:
-Vous faites quoi là?
Je réponds:
-J'attends des explications.
Quand il approche, son parfum m'agresse. Il est trop fort pour mon nez, pas habitué à leurs odeurs. Elles sont beaucoup trop loin, du neutre du cotton m'enveloppant depuis des années. Le garde me dit:
-Il n'y a rien à expliquer.
Passé l'odeur qui me perturbait plus que son aura se voulant intimidante, je le menace doucement pour que l'autre ne m'entende pas:
-Allez-y approchez. Soit je perds, mais vous amoche un peu, soit j'ai de la chance et j'attrape votre tazer. Et vous bougerez comme un vers paniqué.
Il se met à rire avant de me dire:
-D'accord. Vous avez gagné, dormez ici si vous voulez.
Au bout de ce qui doit être une heure, j'enlève mes écouteurs rapidement en voyant Atmos et Blade sortir. Ils sont suivis d'Havo à qui Atmos dit:
-Il veut pas l'ouvrir, j'en ai marre ç...
Moya apparait puis en me repérant elle crie:
-Elle fout quoi ici?!
Ils se tournent tous vers moi et je les salue de la main. Blade s'approche agressivement, mais par réflexe je lui donne un coup de pied au ventre. Ça le fait gémir en lançant un:
-Salope!
Passé le choc, il m'attrape et me fait tomber au sol. La surface est plus dure que celle des autres endroits ici, et je le sens. Les autres attrapent Blade avant qu'il ne puisse m'en foutre une et je me relève en tenant l'arrière de ma tête. Moya commente ennuyée:
-Super.
Elle sort son scanner de poche et l'utilise sur moi. Je la laisse faire à cause de la douleur et mon instinct de conservation. Justement et heureusement, elle dit:
-Pas de traumatisme.
Elle regarde Blade qui est toujours fumant de colère et ajoute à son intention:
-Refais plus ce genre de connerie. Sa spécialité c'est de vous provoquer. Je sais que vous n'êtes pas assez bêtes pour jouer à son jeu.
Je soupire et elle me mitraille du regard avant de dire:
-Toi, tu ferais mieux de faire attention. Il n'y aura pas toujours quelqu'un pour l'arrêter.
Je lève les yeux au ciel puis demande:
-C'est quoi qu'il est pas foutu de faire Atmos?
Blade réplique:
-C'est pas ton problème pétasse.
Je lui lance:
-C'est ta mè...
Atmos crie:
-Non! Non! Putain, arrêtez deux minutes!
Il retourne à l'intérieur, suivi des autres. Un des gardes me dit:
-C'est vrai alors, t'es une sale teigne.
Je lui fais un de ces sourires clairement hypocrites, qui disparaissent en une demi-seconde. Au bout d'un moment à attendre toujours sur les marches, il y a l'apparition d'Exxio, Havo et Yoa, la femme qui a tous ces piercings argentés. Celle qui a aussi failli m'égorger et fait d'ailleurs partie du conseil, malgré ses vingt ans. Elle a deux ans de moins qu'Atmos et ils l'ont choisie elle plutôt que lui. Je me demande bien ce qu'elle peut avoir de si exceptionnel. Je reporte mon attention sur Havo qui dit à Exxio:
-On n'a pas le choix, on doit essayer.
Exxio répond:
-Elle va le massacrer et on saura rien. Elle est contre nous.
Yoa leur dit:
-On a voté, maintenant, ça suffit.
Elle s'approche puis s'arrête devant moi pour me dire:
-Tu nous suis.
Je me lève et m'exécute ravie. Passé les murs blancs de la prison, on entre dans un couloir chromé. Yoa met sa main dans un trou et dit:
-Quatre.
En pivotant des deux côtés, la porte s'ouvre sur un couloir dans lequel on s'enfonce. En avançant, on passe d'autres portes. Après un moment dans cette espèce de labyrinthe on retrouve le groupe. Ils sont agglutinés et se disputent devant quelque chose. Quelque chose derrière une de ces vitres noires je suppose. Atmos regarde dans ma direction et dit:
-Putain, vous l'avez vraiment ramené ici.
Ena lui répond:
-Calmos, on n'a pas le choix.
Blade ajoute:
-Elle va juste le buter et on sera dans la merde.
Je demande:
-Qui?
Ena appuie sur une tablette et la vitre n'apparaît plus noire. Je m'approche et dans ce qui doit être une salle d'interrogation je vois un homme, attaché en croix. Je demande amusée:
-Je suis censée le torturer?
Certains crient presque en même temps:
-Non!
Je leur dis:
-Oh arrêtez le déni. Vous l'avez attaché et vous m'avez fait venir ici. C'est pas pour jouer aux cartes avec. Ou regarder Atmos ou je sais pas qui, échouer à le faire parler. Surtout Atmos.
Je m'arrête de sourire face à son regard furieux puis lève un sourcil avant de lui dire:
-Eh oui t'as pas tapé assez fort on dirait. Ton tas de muscles te sert à quoi?
Blade siffle:
-Tu vas fermer ta gueule?
Justement, je l'ouvre, mais Moya me menace:
-Commence et tu finis dans l'une de ces cellules.
La vitre de l'une d'elle révèle une geôle "normale" qui s'allume. Je demande piquée:
-Pourquoi j'ai pas fini dans l'une d'elles au lieu de la blanche?
Yoa à côté de Moya lui donne un coup de coude puis me sourit, avant d'appuyer à nouveau sur sa tablette. Une des vitres change et mon cauchemar immaculé réapparait derrière elle. Maintenant, je réalise que bizarrement il pourrait paraître similaire à mon champ. Mais moi je les vois si contrastantes, comme teintes de blanc. Un rêve et un cauchemar. Le cauchemar doit se voir sur mon visage, parce qu'Ena me dit:
-T'es sortie maintenant. Yoa, c'est pas drôle vraiment.
Cette dernière dit avec son rire de gamine:
-Moi, je trouve que si.
Elle ne peut pas avoir eu deux ans d'existence de plus que moi, pour prendre en maturité. C'est juste pas croyable. J'inspire et fais remarquer à la gamine:
-Pourquoi j'avais pas senti cet endroit en entrant? C'était pas du tout le même trajet.
Yoa me dit:
-Bien sûr qu'on n'allait pas te laisser t'orienter pauvre idiote. Manipulation sensorielle.
Je réplique:
-C'est toi l'idiote. T'es même pas foutue de faire parler un pathétique humain.
Moya me prévient:
-Tu ne devrais pas la provoquer.
Je réplique:
-Sinon quoi? Elle va voter pour qu'on m'égorge?
Yoa sourit et me dit:
-Ce genre de décision basée sur l'impulsivité, est contre notre concept de démocratie. C'est pour cela que tu es toujours en vie. Et ce malgré la haine qu'on éprouve pour ton père. Maintenant, tu vas te rendre utile. Et s'il meurt avant d'avoir parlé, tu vas retourner dans ta cellule, ou effectivement finir égorgée. Parce que t'as pas atterri dans une utopie non plus ma grande. Le bien commun est plus important que ta pauvre vie, ou ton envie de nous les briser. Mais moi je me montrerais gentille. Je te promets que je te laisserais le choix entre la lame, ou te noyer dans ce verre de lait qui a failli t'emporter la dernière fois.
Je serre les dents de colère pendant que Moya dit:
-Comment ça s'il meurt avant d'avoir parlé? On va la laisser le tuer?
Yoa soupire et Atmos dit:
-C'est pas une bonne idée.
Blade ajoute :
-J'espère qu'il va se débrouiller pour que les rôles s'inversent.
Je l'ignore alors qu'Ena lui dit:
-Lâche-la, Daëri laisse le vivre s'il te plaît.
Elle est mignonne. Je soupire et réponds:
-Ça aurait été tellement plus simple si ça avait été une femme.
Face à leurs regards, j'explique:
-Par exemple d'après des recherches, juste la mettre nue ça va commencer à la secouer un peu plus qu'un homme. Mais si l'interrogatoire est fait par un homme, ou on y invite un en plus. Là, elle risque de vraiment paniquer face à la menace. Elle va donc parler assez vite dans la plupart des cas.
Ils me fixent troublés et Atmos brise le silence en disant:
-Comment tu peux suggérer ce genre de choses, en tant que femme?
Je deviens tendue, mais rejette tout sentiment en disant justement:
-Des fois les sentiments sont inutiles, l'empathie aussi. J'ai jamais dit de faire pire, juste lui faire peur. C'est l'option la plus gentille.
Papa m'a appris à être forte. Tant que ce n'est pas moi, ce n'est pas moi. Je dois continuer à me battre par tous les moyens. Blade demande:
-C'est quoi, la pire des options?
Ena dit:
-Blade.
Atmos ajoute:
-Non, vas-y, dis-nous.
Je soupire et réponds:
-Vous le savez sûrement au fond...
Mais par exemple, il pourrait y avoir des coupures aux zones sensibles. Ça me fait penser à quelque chose comme l'excision maintenant. Couper et enlever les organes génitaux d'une femme. C'est une pratique étrange qu'on voulait faire passer comme une tradition, une initiation, dans certains peuples de l'ancien monde. Mais c'est risqué à pratiquer, il y a l'évanouissement plus on avance dans le processus et pire.
Ena a la main sur sa bouche et Atmos a un regard vide dirigé vers moi. Zy lui, est clairement dégoûté. Aelia, elle a l'air aussi effrayée qu'Ena. Blade secoue doucement la tête avec un air impassible.
J'ajoute amusée:
-Mais c'est toujours la même chose, les gens se soucient beaucoup de ce qu'ils ont entre les jambes. Il y a beaucoup de nerfs. Ça marche pour les hommes aussi. On peut électrocuter, verser de l'acide, d...
Havo me coupe:
-Ok merci, on a compris que t'es pas toute seule là-haut.
Je souris brièvement et Blade sort de son état pour demander amusé:
-Donc tu penses faire ça toi-même? Déshabiller ce gars et jouer avec?
Je secoue la tête dégoûtée, avec une vague de frissons. Je réponds:
-Quelqu'un d'autre le fera, quelqu'un qui aura les couilles.
Je souris tout comme Havo qui secoue la tête. Je demande en les regardant:
-Donc? Ou je peux retourner dehors non?
Je regarde Yoa qui l'air ennuyée lance un regard vers Havo quand Moya dit:
-J'y vais, je l'accompagne.
Ils la regardent pas aussi surpris que je l'aurais pensé. Je me demande ce qu'elle a bien pu faire par le passé avant médecin. Cette dernière pénètre dans un sas en beuglant:
-Bouge-toi!
Je m'exécute en lui lançant un regard noir, mais m'arrête à l'entrée et regarde Yoa et Havo pour leurs demander:
-Pourquoi on l'interroge?
Yoa fixe Havo et je leur dis:
-Vous vous attendez vraiment à ce que je l'interroge, sans savoir sur quoi? J'ai l'air d'une magicienne?
Yoa émet son rire de fée aigu, que j'aurais plutôt attribué à Aelia. Havo demande:
-Moya, Yoa?
Yoa lâche ennuyée:
-Ok.
Moya dit:
-Pareil.
Cette dernière m'explique donc:
-Ce gars est parti en mission. Nyx les a eus, mais c'est le seul qui est revenu en vie. Sans une égratignure. On l'a trouvé à l'entrée du désert. On l'a ramené avec...bref, il ne les mènera pas jusqu'à nous. Le truc, c'est qu'il refuse de nous dire ce qu'il a vu ni ce qui est arrivé aux autres.
Je demande:
-Vous avez un conditionnement?
Moya fronce les sourcils et je lui dis:
-Je suis pas inculte, donc?
Elle me répond:
-Oui, mais on l'a déjà désamorcé. Pourtant, il ne parle toujours pas. Je crois qu'on lui en a fait un autre. Ce qui veut dire qu'on va devoir revoir tout le nôtre. Putain...
Je soupire et lui dis:
-On va voir
Une fois à l'intérieur de la cellule aux murs chromés, comme l'endroit où se trouve l'écran teinté, je me retrouve devant un jeune brun. Je l'approche, il est dans un uniforme bleu et attaché en X. Il me regarde avec des yeux bleus très clairs et un visage innocent, ses lèvres elles sont souriantes. C'est dommage qu'on doive sûrement lui casser la gueule. Quoique...on peut facilement épargner sa tête. Moya me dit amusée:
-Tombe pas amoureuse, tu sais pourquoi on est là.
J'expire bruyamment et en quittant les quelques outils de torture des yeux je réplique:
-Je ne tombe pas dans ce genre de faiblesse, moi.
Moya répond en souriant:
-On verra bien un jour, bientôt même.
Je fronce les yeux confuse mais me reprends. En pointant les outils, je fais remarquer:
-On ne les a pas utilisés. Vous l'avez interrogé avec quoi? Des bonbons?
-On a essayé de lui parler en l'effrayant un peu en l'attachant comme ça.
-Lui parler? C'est pour ça que vous avez envoyé Atmos avec sa psychologie pourrie, et que logiquement il a échoué?
Moya lève yeux au ciel en étirant ses lèvres de poupée. Je m'approche un peu plus du prisonnier. Il fronce les sourcils en me voyant de près. Il dit doucement:
-Merde c'est elle.
Je réponds en souriant:
-Bonjour à toi aussi euh...
Il répond mal à l'aise:
-Tevia.
Je hoche la tête et lui demande curieuse:
-Comment tu sais qui je suis et que je suis ici? T'étais pas en mission?
-Je suis parti en mission après ton arrivée
Je demande pleine d'espoir:
-Donc mon père t'a parlé de moi?
-Pas que je m'en souvienne
Je grimace de colère puis me reprends, soupire et réfléchis. Je lui demande en souriant:
-T'as peur?
Il se met à rire ce qui enflamme mon contrôle de moi. Pour arranger les choses, il sort:
-T'es juste une sale gamine.
L'audace. Ça vient vraiment de celui qui pourrait passer pour mon frère avec sa gueule de bébé? Enfin adoptif. Je l'informe:
-J'ai 18 ans sale connard.
Il se tait en grimaçant ses insultes au lieu de les exprimer. Je continue:
-Je ne sais pas ce qui est arrivé à tes petits amis, mais on va sûrement le découvrir. Moi, je pense que ça a dû être quelque chose d'horrible, connaissant mon père. Tu sais? Celui qui m'a élevé?
Son regard dévie vers les "jouets" sur la longue table chromée. Elle ressemble à un glitch de jeu vidéo par sa forme. Moya nous surveillant, est assise sur une surface similaire, semblant sortir du mur près de la table. Tevia tente de bouger, mais les liens en métal ne bougent pas d'un centimètre. Il est aussi pathétique qu'un insecte. Je soupire et lui dis:
-On a un large choix d'outils juste pour jouer avec toi comme tu peux le voir.
En tant que zone visée, j'indique son entrejambe du regard et du menton, mais à une bonne distance. Malgré tout le dégoût me saisit, altérant mon sourire moqueur. Il ricane et me répond:
-T'as déjà vu une bite au moins gamine?
Mon sourire rejoint définitivement l'obscurité et je me dirige vers la table, ignorant les désapprobations de Moya. Elle n'arrive pas à temps à m'empêcher de prendre le pistolet à clou. Je tire dans un coin vers les liens de Tevia pour voir le fonctionnement. Moya s'approche et je crie:
-Si t'avances je le bute!
Ce dernier se tord le plus possible entre les liens en métal tandis que Moya me rappelle:
-Si t'en fais trop, il sera plus physiquement capable de parler.
Je soupire, mais tire juste à côté de lui, ce qui le fait crier. Je lui dis:
-Maintenant écoutes sale fils de pute je me fous de qui t'es. Je suis pas de ta putain de cité, je suis coincée ici. Et là je suis avec toi juste parce que je m'ennuyais, donc crois pas que je vais t'épargner. Maintenant, dis-moi ce qu'il s'est passé.
Il répond agité:
-J'en sais rien! Je le jure!
Je soupire et vise, mais il me dit:
-Attends! Attends!
J'hésite et profite de sa panique pour demander:
-On te menace?
J'ajoute avec un sourire:
-T'as une famille?
Il demande paniqué:
-Vous n'allez pas leur faire de mal?
Avant que Moya puisse l'ouvrir, je réponds:
-Si tu parles, parce qu'ils préfèrent sûrement sauver la majorité de la cité. Même si ça coûte quelques personnes. Je ne pense pas me tromper là-dessus.
Tevia se met à implorer:
-S'il te plaît, s'il te plaît! Nyx ne m'a pas fait de chantage ni rien.
Je demande:
-T'as un implant?
Il répond:
-Non...je ne pense pas
Moya m'informe:
-Il n'en a pas, sauf s'ils en ont développé de nouveaux. Mais on en aurait entendu parler.
Comment ça? Il y a des taupes avec Papa? Je m'approche de Tevia et lui dis:
-Tente quoi que ce soit et c'est un de mes clous qui va la toucher ta bite.
Il hoche la tête. Je risque alors de m'approcher pour commencer à examiner ses iris, malgré ses clignements d'yeux énervants. Moya m'informe:
-Pas de lentilles, on a tout vérifié avant de partir. Il n'a que sa bouche fermée.
Je dois commencer. Si je ne plonge pas je ne finirais jamais avec lui. Je ne vais pas me dégonfler devant eux. Je recule et tire dans la cuisse de Tevia lui arrachant un grave:
-Putain!
Moya s'exclame:
-Daëri c'était pourquoi ça?
Pendant que mon corps se détend, je lève les yeux au ciel et réplique:
-Arrête maintenant, c'est pas un bébé. Tu veux tes infos ou pas?
Elle se tait et à Tevia qui gémit de douleur je dis:
-Maintenant réponds. Ou tu veux plus de douleur?
Il se met à respirer rapidement et Moya le scanne avant de dire détachée:
-Il est juste paniqué.
Parfait. Je préviens Tevia:
-T'inquiètes pas on a de quoi te garder debout normalement. Pas de sommeil pour toi La belle aux bois dormants.
Une impression d'agressivité, devient assez bruyante pour couvrir mes autres sentiments malaisants. Poussée par cette dernière, je tire sur un des bras de Tevia et il hurle de douleur. Son hurlement ne fait que nourrir la nuée sombre qui m'a investi. C'est donc maintenant l'autre bras qui est touché, le faisant grogner fort. Je vise sa tête et il s'écrie:
-Non! Non! Non!
En souriant, amusée, je réponds:
-Oui c'est vrai je m'emporte, donc t'as toujours rien à dire?
J'observe les taches de sang se répandant dans son uniforme de façon assez satisfaisante, malgré l'odeur de métal. Tout ça est beaucoup plus intense que les simulations où j'affrontais des adversaires à "mort", ou mon combat avec mon escadron. J'inspire et propose à Tevia:
-On pourrait te soigner si tu parles.
La voix déformée par ses tremblements de douleur, il répond:
-Je te jure que je me souviens de rien.
-T'as oublié ou t'as envie d'oublier?
-J'ai tout oublié sauf...le message.
-Quel message?
Commençant à sembler fatigué, il répond:
-Si je le répète, ils me tueront ou m'enfermeront pour toujours.
Je ne peux plus reculer ou ils me prendront pour une faible. Je dois forcer.
Je tire dans son autre cuisse, il grogne bruyamment et je le menace en criant presque:
-Si tu ne me le dis pas, moi, je vais te tuer. Et ce sera pas rapide. Donc fais ton choix. C'est moi ou eux.
Il hésite donc je tire dans sa main. Il me le rend en blessant mon oreille avec ses cris. Moya fait remarquer:
-Je suis surprise qu'il ne t'ait pas insulté jusqu'à maintenant.
Je réponds:
-Instinct de conservation.
Prise par la frustration, je continue:
-Ok, parce que je me faisais chier j'ai fait trainer ça depuis le début, mais là ça commence à me gaver.
Moya me suit en disant:
-Tu fous quoi Daëri?
En prenant le pistolet laser, je réplique:
-Je vais tirer là où ça fait mal.
Elle écarquille les yeux et je réponds:
-Comme le pistolet à clous, vous l'avez bien mis là pour une raison? Vous avez pas l'esprit plus clean que moi.
Moya bredouille:
-C'était pour un cas extrême.
-Ça l'est.
-Ok, mais s'il répond tu ne tires pas.
Ne sachant pas si j'aurais voulu faire ça ou non, je réponds:
-Ok.
Quand je reviens vers lui Tevia a les yeux fermés assez fort à cause de la douleur. Je vise et lui lance:
-Eh!
Il les rouvre puis les écarquille avant de dire:
-Ok, ok je vais parler. C'est bon!
J'avais raison, faut toujours viser là. Je fais un signe de tête à Tevia pour qu'il l'ouvre enfin. Mais ce n'est plus vers moi qu'il regarde. Il regarde Moya. Je n'ai même pas envie de me demander pourquoi maintenant. Je veux d'abord mon résultat. Tevia, qui a dû remarquer mon air impatient, me regarde à nouveau et me dit avec un léger sourire:
-J'ai vraiment cru que t'allais te débarrasser de mes couilles. Mais il fallait que je tente pour survivre.
Survivre? Sans se remettre à sourire, sûrement pour éviter de m'énerver, Tevia continue:
-Tout ça, c'était une expérience et c'est toi le sujet. Je suis un prisonnier. Avant il y a quelques jours, je refusais d'avouer mon crime, vu que j'avais été condamné à mort de toutes les façons. Mais Atmos a réussi à me faire parler et après on m'a proposé de participer. Donc j'ai accepté en échange de la prison à vie.
Il expire et sourit. Je pourrais toujours tirer, ça serait drôle après tout ça. Moya ayant sûrement intercepté mon idée crie:
-X-187 ouvert!
Les liens s'ouvrent et l'homme tombe. Je demande:
-Qu'est-ce qu'il a fait pour être condamné?
Après s'être assis difficilement en grognant et râlant Tevia lui-même me répond:
-J'ai tué ma copine et le gars avec qui elle me trompait. Elle était enceinte. Je le savais pas. De toutes façons c'est pas le genre de choses qui doit te remuer.
Je contracte ma mâchoire et expire pendant que Moya le laisse sortir. Quand il ne reste plus que nous dans la pièce, elle me dit:
-Tire sur moi, ils t'attendront dehors.
Je lui dis sincèrement choquée:
-J'y avais pas pensé. Je ne sais pas pourquoi d'ailleurs...
Elle sourit et je la mitraille du regard.
Une fois dehors avec les autres je m'indigne:
Maintenant, vous faites des expériences de merde sur moi?!
Moya répond:
-On voulait évaluer ton niveau de violence.
Blade commente:
-Là, je suis sûr que t'as explosé le score.
Je me défends:
-Vous faites pire dehors.
Il réplique:
-On a une raison, une cause. On n'aime pas ça.
Yoa continue:
-Contrairement à comme tu t'es bien amusée.
Je me défends:
-Je l'ai à peine touché.
Moya me dit:
-On ne sait pas ce que t'aurais fait de pire si je ne t'avais pas calmé.
Havo ajoute:
-Inverse vos places, t'imagines la douleur?
Je serre les dents et me contente d'expirer malgré mon tressaillement dissimulé. Je leur rappelle:
-C'est un criminel. Il a quand même tué 2 personnes...et demi? Trois? Bref, il a tué et il refusait de parler.
À ma surprise, ils se mettent à rire et Zy me demande:
-Ton cher Papa, il en a tué combien de personnes?
Je garde le silence contrariée face aux gestes d'approbation s'ajoutant aux expressions des autres. Ena me regardait choquée jusque-là, Blade l'air énervé et méprisant. Pour je ne sais quelle raison, Aelia avait l'air inquiète. Les deux autres gardiens que je ne connais pas, une femme et un homme me regardaient apeurés. Je porte mon regard sur Atmos, qui me méprise du regard lui aussi. Je ne sais pas pourquoi ça me donne envie de me replier sur moi-même comme une boule de papier. Je regarde Moya et les autres membres du conseil pour leur dire:
-C'est vraiment tordu ce que vous avez fait. Le jeu d'acteur et tout, du début à la fin. J'y crois pas.
Yoa me demande sur un ton sarcastique:
-Qu'est-ce qui est tordu? T'évaluer, ou le fait que t'aies torturé quelqu'un sans difficulté?
Je me défends:
-Vous me l'avez demandé. Vous m'avez armé, vous me l'avez jeté en pâture.
Moya réplique:
-T'étais prête à débattre pour qu'on te laisse faire. T'avais même pas à le toucher. Tu pouvais juste poser des questions, non? Je sais que t'es assez maligne pour avoir pu obtenir des réponses sans le blesser. On a même pas dû jouer la moitié de notre jeu d'acteur avec ce que tu faisais.
Énervée, je respire profondément et leur demande:
-Vous avez eu ce que vous vouliez. Maintenant dans quelle cellule vous allez me mettre?
M'attendant à la blanche, je réfléchis à l'offre de Yoa tout à l'heure, quand Exxio me dit:
-Aucune, on va juste te surveiller de plus près.
Je ricane et leur fais remarquer contre mon propre instinct de survie:
-Si vous êtes si malins, pourquoi vous laissez une bombe sur pattes dehors?
Havo dit:
-On a voté. Tu n'as pas encore commis de crime majeur pour devoir y retourner. Mais on est aussi conscients, de la menace que tu peux représenter. Tout comme certains de nos citoyens en liberté conditionnelle.
Je réponds sarcastique:
-C'est fou, je pensais vraiment que tout le monde était bon ici.
Moya rit puis me dit plus sérieusement:
-Impossible.
J'ajoute:
-La déviance est humaine.
Moya dit ennuyée:
-Tu recommences avec tes foutues leçons.
Je dis fièrement:
-Je viens d'y penser. C'est pourtant très facile et c'est vrai. Vous avez utilisé ma déviance, pour obtenir la réponse que vous vouliez malgré moi. Vous êtes satisfaits avec le fait que je fasse le sale boulot du processus, que je passe pour le monstre. Alors que c'est vous qui m'avez jeté une proie au visage. Vous saviez très bien ce que vous faisiez.
Je quitte les plus vieux du regard et en lance un accusateur aux plus jeunes. Mais avant de me disputer avec les iris noirs de Blade, je croise les verts d'Atmos. Son regard m'enveloppe de malaise. Je m'en défends en disant:
-Oh aller c'est bon j'ai compris.
Je prends une voix d'enfant et continue:
-"C'était pas très gentil Daëri, t'étais pas obligée de faire ça."
Mais pas amusé du tout il s'en va carrément. Blade s'approche de moi, malgré les avertissements des autres. Il s'arrête. Avec son regard onyx fin me coupant, il me dit:
-T'as vraiment réussi à complètement plomber son moral en moins d'une heure. Après que sa journée ait très bien commencé en plus, un record. Bravo. Et tu sais quoi? Aelia a failli vomir et Ena et Zy voulaient aller aider ce gars, avant que tu fasses pire. Mais je suppose que tu t'en fous, ou ça te fait jouir.
Je lève les épaules en souriant, ils l'ont mérité. Blade continue:
-T'as joué avec lui. T'aurais pu en finir beaucoup plus tôt sans lui faire tout ça. Je le sais.
Il s'en va dans la direction d'Atmos. Je ne sais pas moi-même ce que veut dire le fait que je ne sais pas si j'ai aimé ce défi, ou si j'ai dû "foncer" dedans pour ne pas perdre la face, ou je ne sais pas...
J'apprécie au moins le fait d'avoir pu diriger leurs émotions. Ça me venge un peu de leur manipulation.
On attend que Moya ait fini de s'occuper de Tevia (si c'est bien son nom) pour partir. J'observe les plaies que j'ai infligées, se faire nettoyer et soigner douloureusement, derrière la vitre. Tevia laisse échapper un cri que l'on a la joie d'entendre, car la pièce a été sonorisée pour que Moya puisse parler aux autres. En étendant un gémissement de douleur, je finis par penser tout haut:
-Ça me fait penser aux expériences justement. Enfin bizarrement, parce qu'ils ont pas aussi mal normalement.
Pour éviter le malaise avec les gosses de maternelle, je suis restée avec les membres du conseil, dont les têtes se tournent toutes vers moi à cause de ce que je viens de dire. Je me retiens d'esquisser un grand sourire. Je leur révèle :
-Apparemment, il y a un de ces mutants qui ressemble à un arbre. Mais il parle...un peu? On devait m'en dire plus.
Exxio dit de sa voix caverneuse:
-Elle est folle et ne fait que mentir pour nous énerver.
Je réplique irritée:
-Tss, un jour vous verrez si je mens.
Visiblement exaspéré, Exxio a plissé son regard azur et même son visage. Ça fait pouffer Moya derrière la vitre. Il lui sourit et je ne peux empêcher mon cœur de se ramollir un peu. C'est honteux. Havo me sauve d'une certaine façon, quand il me demande calmement:
-Tu les as vus toi-même, les mutants?
Un peu ennuyée, je lui réponds:
-Je devais bientôt, quand ils seraient tous complètement changés. C'était censé être une surprise. Mais vous avez tout fait foirer.
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