Chapitre 1 partie 3
Le sorcier avait sans-doute deviné à partir de ce moment-là, que tout comme lui, Reid n'était pas un humain ordinaire.
Reid se devait, au moins, d'essayer. Jusqu'à présent, ses pouvoirs s'étaient manifestés contre sa volonté. Il ne les contrôlait absolument pas. Toute sa vie, il avait fait parti de ces elysiens qui cachaient leurs dons, en faisant le nécessaire pour les contenir. Jusqu'au jour où ce semblant de contrôle s'était retourné contre lui, et avait failli le tuer.
Alors qu'il continuait, avec Kal, à chercher une faille dans les mouvements de leur adversaire, Reid libéra une vague d'énergie qu'il s'était toujours efforcé de garder enfermée en lui. Il lui suffisait de se laisser aller. Ce n'était pas aussi simple pour une personne qui passait sa vie à contrôler une partie de lui-même. Mais aujourd'hui, il n'avait pas vraiment le choix. Il para une attaque de Lirokin, avant de lui asséner un coup rapide. Puis recula de quelques pas. Kal devait maintenant se défendre seul face à leur redoutable ennemi. Reid rangea son épée dans le fourreau accroché dans son dos.
Campé sur ses deux pieds, il se concentra pour ne pas se laisser submerger par ce flot d'énergie. Elle était si intense qu'elle créa même un mouvement d'air tout autour de lui. Il ferma ses yeux pour pouvoir mieux centrer son attention sur cette énergie uniquement. Il devait trouver un moyen de l'utiliser pour créer une attaque contre Lirokin.
Kal, même en étant l'un des meilleurs combattants résistants, avait du mal à initier une attaque efficace vers le sorcier ; il était surtout sur la défensive. Lirokin était extrêmement rapide. Il n'utilisait peut-être plus ses pouvoirs, mais il gardait sa force et ses réflexes d'elysiens. Kal n'était qu'un homme ordinaire. Un guerrier bien entraîné, et un commandant, mais il n'était qu'humain, son endurance était peut-être celle d'un athlète, cependant elle n'égalait pas celle d'un elysiens qui s'était entraîné toute sa vie.
Lirokin pourrait encore se battre, sans relâche, durant plusieurs heures. Les forces de Kal, elles, diminuaient progressivement. Quoique Reid fasse, qu'il le fasse vite !
L'attaque que Kal para ensuite était si brutalement forte qu'il crut qu'elle détruirait son arme. Elle n'était que légèrement entaillée au final. Les armes des merildis étaient de meilleure facture, elles aussi. Les karianis, qui d'ordinaire, restaient pacifiques, ne se préoccupaient pas des outils de guerres. La majorité de leurs armes étaient importées, et souvent de qualité médiocre. Le coup suivant faillit le trancher en deux ; Kal recula à temps, mais il perdit l'équilibre, et se retrouva à terre.
Lirokin leva son épée pour porter le coup final. Il abattit son arme sur son ennemi. Mais la lame ne toucha jamais Kal. Une force arrêta le geste de Lirokin ; il fut comme paralysé durant quelques secondes, épée toujours levée au-dessus du jeune résistant à terre. L'arme s'échappa brusquement de la prise du sorcier ; celle-ci fut projetée quelques mètres plus loin.
Derrière les deux duellistes, se trouvait Reid, une main tendue en avant. C'était, en apparence, un simple effort, mais il lui coûtait énormément ; il avait le souffle court, sa respiration était rapide, ses habits étaient collés à sa peau par la sueur mélangée à de la terre et au sang de ses précédents adversaires. Quelques mèches de cheveux noirs étaient accrochées à son visage baigné de transpiration. Son autre bras pendait mollement le long de son corps ; il semblait à peine tenir debout. Il tremblait.
Pourtant, il était clair qu'il regorgeait encore de puissance. Un tourbillon d'air créé grâce à de l'énergie elysienne l'entourait, et agissait sûrement comme une sorte de bouclier.
Lirokin récupéra son arme par télékinésie ; il ne se préoccupait plus de l'énergie qu'il gaspillait. En voyant à quel point Reid avait du mal à manifester ses pouvoirs, il devait se dire qu'il ne lui en faudrait plus beaucoup avant d'en venir à bout. Seulement, alors qu'il essayait de s'attaquer à Reid, son arme fut momentanément emprisonnée dans le tourbillon, il dut la lâcher, au risque de se voir s'arracher une main. Quelques secondes plus tard, l'épée fut éjectée de la petite tornade, et atterrit beaucoup plus loin que la fois précédente.
Il lui avait fallu beaucoup de temps, mais Reid avait finit par mettre en place le combo parfait pour résister au sorcier. Une bonne attaque combinée à une défense pratiquement inviolable. Énergétiquement, cela lui coûtait énormément. Néanmoins, Lirokin allait avoir du mal à percer ce bouclier d'air sous haute pression ; il ne pouvait pas utiliser d'arme pour cela, et les forces qu'il lui restaient pour utiliser ses pouvoirs d'elysiens n'étaient plus suffisantes pour briser une défense de ce type.
C'était une bataille d'endurance qui débutait.
Reid savait qu'il ne serait pas capable de maintenir ce tourbillon pendant longtemps ; il espérait seulement que Lirokin le croie plus résistant, et qu'il utilise une grande part de son énergie avant que le bouclier ne s'effondre. Il y avait de grandes chances que Reid ne s'évanouisse lui-même avec. Ensuite, ce serait aux autres combattants d'en finir avec le merildi.
Kal était maintenant aux prises avec d'autres soldats ennemis. Et en réalité, cela rassurait Reid ; de cette façon, il ne pouvait attaquer Lirokin en manquant de se faire tuer de peu. Ce dernier d'ailleurs, tournait lentement autour du bouclier d'air, ses yeux verts émeraudes scrutaient Reid à la recherche du moindre signe de faiblesse ou d'inattention.
Au bout de quelques minutes, il s'arrêta et porta son poignet au niveau de son visage. En tirant sur la manche de son manteau, il découvrit un communicateur portatif accroché à un bracelet de cuir. Un appareil rare à Karianis ; il était très cher et la majorité des karianis ne lui trouveraient pas de réelle utilité. En tout cas, ils ne lui en trouvaient pas avant le début de la guerre.
-Ici Maître Lirokin Rash, dit-il en parlant dans le petit appareil rectangulaire. Connectez le canon DPN, et ciblez le à un mètre de ma position à l'ouest.
Reid le regarda avec effarement. Il ne se doutait absolument pas qu'une telle arme allait être utilisée dans cette bataille, ou même dans cette guerre. Il était naïf. Évidemment que les merildis allaient mettre en oeuvre tous les moyens qu'ils jugeraient nécessaires pour les anéantir.
Mais cette arme, c'est celle qui leur avait permis de survivre face à l'invasion des Tungs environ quinze ans auparavant. Elle avait été utilisée pour défendre les habitants de la planète toute entière. Il était impensable qu'un habitant d'Obériande décide de s'en servir contre un autre. Même s'ils étaient devenus ennemis.
Lirokin reporta son attention sur Reid qui s'essoufflait trop rapidement. Tout son corps était raide à force de maintenir le même flot d'énergie dans le tourbillon.
-Alors qu'est ce que tu comptes faire maintenant ?
Il était dans une situation vraiment compliquée. Cette fois, il ne voyait réellement aucune issue.
-Si tu restes ici, à l'intérieur de ton bouclier, tu te feras désintégrer par une décharge plasmique, alors que moi, je peux facilement en réchapper. Par contre, si tu dissipes le bouclier, tu pourras y échapper, mais tu es si affaibli que je te tuerais sans problème.
Le pire, c'était que Lirokin avait parfaitement raison.
-Il ne te reste plus que quelques secondes à vivre, pauvre idiot, rajouta le sorcier. Et c'est dommage ; tu avais du potentiel.
À peine une seconde plus tard, une détonation retentit dans le ciel, au dessus du champ de bataille. Toute la plaine fut subitement illuminée d'une vive lumière rougeâtre. Une sorte de boule de feu chutait à pleine vitesse droit vers l'endroit où se tenaient les deux elysiens ennemis.
Reid devait absolument sortir de son bouclier ; pour la suite, il avisera, mais dans l'immédiat, il n'avait pas d'autre choix. Il n'eut à se concentrer que pour éviter de relâcher l'énergie utilisée trop brusquement ; dans le cas contraire, son attaque se serait retournée contre lui, et Lirokin aurait facilement gagné.
Le bouclier s'estompa progressivement, mais trop lentement pour que Reid ne parviennent à échapper à l'attaque du canon à plasma. Il était juste en dessous du jet. D'ici dix secondes, le plasma fonderait sur lui, le réduirait à néant, ne laissant à la place qu'un cratère de cendres et de pierre fondue.
C'était sans compté sur son intervention. Pour la première fois, Reid était heureux de percevoir sa conscience prêt de la sienne. Il sentit soudainement un flot abondant d'énergie monter en lui ; il se laissa guider par la conscience de l'intruse qui lui intima, par pensée, l'ordre de stopper la boule plasmique.
« Je te prête assez d'énergie pour ça » lui fit-elle.
Reid leva les yeux au-dessus de lui, un instant plus tard, il leva par instinct ses bras par-dessus sa tête. La boule de plasma ne se trouvait qu'à quelques centimètres de sa peau, arrêtée par une force invisible. Sa lumière était si intense qu'elle semblait beaucoup plus grande qu'elle ne l'était en réalité ; elle ne faisait qu'une vingtaine de centimètres de diamètre. Toutefois sa lumière donnait l'illusion d'un globe incandescent cinq fois plus large.
La chaleur était insupportable, la boule était beaucoup trop proche ; s'il avait évité l'impact, il n'évitait pas les brûlures qu'il aura immanquablement s'il restait trop longtemps dans la sphère lumineuse du plasma.
Il devait l'éloigner de lui, mais il ne savait pas lui-même comment il l'avait arrêtée. Ou plutôt comment elle l'avait arrêtée. Il sentait encore sa conscience toucher la sienne, elle semblait décidée à ne pas intervenir plus. Il devait trouver par lui-même. Il voulait déplacer la boule, s'il ne le faisait pas, elle le brûlerait ; il perdrait le contrôle et serait littéralement réduit en cendre.
-C'est impossible, entendit-il souffler à quelques pas.
Lirokin était encore là. Reid l'avait presque oublié. S'il ne réagit pas assez vite, le sorcier en finira avec lui. Il n'avait pas besoin de réfléchir plus longtemps. Le jeune homme rassembla toute son énergie, et avec un grognement du à l'effort, dirigea par télékinésie la boule vers le sorcier. Ce dernier comprit trop tard ce qui était sur le point de lui arriver. Son hurlement fut subitement tu par un rai lumineux qui le traversa de part en part, séparant le buste du reste de son corps.
Reid tomba à genou dans la boue, à bout de force. Il n'avait aucune idée de la façon dont il avait pu accomplir un tel prodige. Il n'avait quasiment aucun entraînement pour le contrôle de ses pouvoirs ; au mieux, il parvenait difficilement à faire tomber de petites bouteilles en verre vides.
La conscience qui lui avait apporté son aide se retira discrètement. Il savait qu'elle reviendrait quelques heures plus tard, réclamant une quelconque récompense. C'était un autre problème qu'il réglerait après. Sauf que maintenant qu'elle l'avait laissé, il se sentit extrêmement faible. Toutes ses forces l'avaient quitté, il perdit connaissance avant même que son corps ne s'écroule sur la terre dure et craquelée, séchée par la chaleur du plasma.
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