chapitre 2 : un courrier intriguant.
Deux mois plus tôt..
Nous sommes en plein mois d'août, et la canicule s'est abattue sur Londres , jouant même sur les nerfs des plus placides et apportant son lot de restrictions. Comme la plupart des Londoniens, je fais aussi un peu les frais de cette vague de chaleur. La journée ça va, travaillant dans une vieille bâtisse, il y fait plus frais que dehors mais une fois la journée achevée, une fois ma chambre regagnée, il en va autrement, rendant mon sommeil difficile, m'empêchant de réfléchir à ma situation et à ce courrier qui m' intrigue que j'ai reçu il y a deux jours. Je ne sais pas quoi en penser.
Le courrier en lui même est mystérieux, que me veut exactement ce Maître Hollinger qui se dit le notaire de ma grande tante Helen. Ce dernier veut me rencontrer mais n'en précise pas la raison. Que peut-il bien se passer, que me veut-il ou que me veut ma tante. Je suis autonome financièrement depuis la fin de mes études, je ne dépends plus de sa tutelle, à moins qu'il ne soit arrivé quelque chose à cette dernière. J'avoue je ne comprends pas et cela m'en fait perdre le sommeil. Pour autant que je m'en souvienne ma tante est une personne peu aimable, du moins c'est ainsi que je me la revois. Je ne l' ai rencontré qu'à deux reprises. La première fois lorsque j'avais 10 ans et la seconde l'année de mes 18 ans. Tante Helen vit dans le comté de Canterburry, dans un manoir datant du dix-neuvième siècle, surplombant un petit village de campagne.
Le jour de mes dix-huit ans, cette dernière m'a expliqué que ma mère et elle n'étaient pas en bon termes, qu'elles ne se parlaient plus depuis des années, bien avant que ma mère ne rencontre mon père. Elle n'est jamais rentrée dans les détails, j'ignore encore à ce jour ce qui est à l'origine de cette brouille. En tout cas je me souviens de la suite de cette conversation que nous avions eu, enfin de ce monologue qu'elle m'avait tenu, me rappelant qu'elle n'avait jamais souhaité prendre en charge mon éducation, qu'elle y avait été obligée mais qu'afin que je ne sois pas une gêne, elle m'avait alors éloignée. Ce qui vient me faire m'interroger à présent sur ces deux rencontres.
Ces souvenirs qui remontent, ne font qu'ajouter à ma confusion. Quand mes parents sont décédés, Tante Helen était alors âgée de soixante quatre ans, si bien que je peux comprendre qu'élever un enfant à son âge pouvait être difficile. Pourtant en employant du personnel, j'aurais très bien put grandir près d'elle mais non elle a à l'époque fait le choix de ne pas m'élever. Ce qui avec le recul m'étonne encore plus, c'est que l'on ne m'a jamais caché son existence, dès que j'ai été en âge de comprendre certaines choses, l'on m'a fait faire toutes sortes de cadeaux et dessins à envoyer à cette "bienfaitrice" de l'ombre, ce qui a longtemps été problématique pour moi, rendant ma situation délicate auprès des enfants que ce soit à l'orphelinat ou en pension.
On ne peut pas dire non plus que j' ai eu une enfance des plus dures, je n'ai pas été maltraitée ou autre, l'on m'a seulement laissée de côté. Je n'étais ni une enfant retirée à sa famille, ni une enfant abandonnée sans famille, j'étais juste celle qu'on aimait pas. C'est ce qui a fait de moi quelqu'un de réservé, ne trouvant pas sa place, navigant en eaux troubles, d'une certaine façon laissée pour compte et la cible des moqueries des autres enfants. Ajoutez à tout cela, une dose maladresse et un physique pas très avantageur et vous comprendrez pourquoi, je suis encore à l'heure actuelle seule dans mon coin.
Je ne dis pas que je n'ai jamais eu d'amis, à l'orphelinat cela était vrai, une fois en pension, je m'en suis fait quelques uns, une surtout. Elle s'appelait Jeannie et nous partagions la même chambre, jusqu'à ce que l'on soit séparées quand Jeannie changea d'établissement. C'est pour ça qu'après son départ, je me suis repliée un peu plus et ai continué à travailler pour avoir de bons résultats au pensionnats, puis lors de mes études de secrétariat. Tout cela m'a mené à ce que je fais aujourd'hui, à ce travail que j'aime, à la personne que je suis actuellement. Je ne me plains pas de mon sort bien au contraire, ma vie aurait put être pire, ou mieux, je me suis fait une raison, j'avance à mon rythme ou plutôt je stagne. J'ai un emploi stable, un salaire correct, pas mirobolant non plus mais largement compensé par le fait que je suis logée et nourrie sur place. C'est bien pratique est confortable à mon sens.
Je ne sais pas si c'est la solitude qui me pèse ou autre chose mais depuis que j'ai reçu ce courrier, je me sens inquiète. Pourquoi maintenant, pourquoi ne pas me laisser dans mon coin tranquillement. Je ne dois rien à personne et encore moins à ma tante, elle est peut être mon seul parent encore vivant mais cela s'arrête là.
Poussant un soupir à fendre l'âme, je pose le livre que je tentais désespérément de lire et reprend le courrier du notaire, le tournant dans tous les sens, essayant de deviner la raison de cette prise de contact, on ne sait jamais qu'il y ait un indice glissé dedans. Je sais bien que c'est idiot, qu'il s'agit seulement d'une demande de rendez-vous.
Il est tard et je sais maintenant que je ne trouverais pas le sommeil, même la lecture ce soir ne m'apaise pas, les mots dansent devant mes yeux qui me brûlent, mon cerveau est en ébullition et il ne veut pas me laisser en paix, faisant remonter des souvenirs et des émotions que je pensais enfouies depuis longtemps. A force de retourner encore et encore les mêmes choses dans ma tête, je finis par tomber dans sommeil entre-coupé de phases d'éveil, me laissant épuisée et migraineuse le matin venu.
On dit que la nuit porte conseil, j'ai quelques doutes en ce qui me concerne. Je sais que je dois prendre contact avec le notaire mais je n'en ai aucune envie, bien qu'une part de moi aimerait savoir ce qu'il se trame. Je laisse passer une, puis deux journée supplémentaires avant de me décider à prendre le taureau par les cornes et appeler le notaire. Mon travail étant allégé en ce moment, j'ai un peu de temps à perdre, mon travail étant à jour.
C'est le moment où jamais d'appeler. J'ai les mains moites lorsque je me saisi du combiné du téléphone que j'ai rapproché de moi. Le courrier du notaire en évidence sous les yeux, je compose le numéro d'une main peu assurée. Pourquoi suis-je si nerveuse, il ne s'agit que d'un coup de fil. Je dois m'y reprendre à deux fois pour composer le numéro correctement.
La première fois la ligne est occupée, je raccroche et décide d'attendre quelques instants avant de tenter de le joindre à nouveau. Tout au long de la journée je tente plusieurs fois sans succès de joindre l'étude du notaire, cela sonne sans cesse occupé. Mettant entre parenthèses cet appel, je me décide à prendre un peu d'avance dans le classement des données financières que m'a donné à faire lord Ashton.
Depuis quelques temps ce dernier me donne de plus en plus de responsabilités, des tâches plus complexes, m'impliquant dans ses affaires, me demandant mon avis et m'expliquant certains points épineux sur lesquels il travaille. Mon travail de secrétaire personnelle auprès de lui se transforme petit à petit en poste d'assistante personnelle.
Il est dix sept heures lorsque je me décide à tenter de recontacter l'étude du notaire. Cette fois la ligne ne sonne plus occupée, la ligne sonne, sonne personne n'a l'air de vouloir décrocher. Je m'apprête à décrocher quand une voix de femme essoufflée décroche. C'est tout juste si je ne me fais pas agressée au téléphone. Quand je me présente, je dis à la femme que j'ai reçu un courrier de la part du notaire et qu'il souhaite me rencontrer. Je lui demande, si elle sait pourquoi et si c'est important. Elle me répond qu'elle n'a pas le droit de me donner d'informations, que Me Hollinger est quelqu'un de très occupé et que s'il s'est donné la peine de m'écrire, c'est que cela est certainement important.
La personne que j'ai au bout du fil n'est vraiment pas aimable, convenir d'un rendez vous avec le notaire n'est pas une sinécure, elle me fait comprendre ouvertement que je l'ai dérangée qu'elle s'apprêtait à rentrer chez elle. Je dois faire preuve d'un peu de persuasion pour lui faire comprendre que j'aimerais en finir au plus vite de cet appel et de cette histoire. Plus vite le rendez vous sera pris, plus vite je pourrais reprendre le cours de mon existence et qui je l'espère un semblant de sérénité.
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