Amfortas


MACBETH. – J'ai presque oublié l'impression de la crainte. Il fut un temps où mes sens se seraient glacés au bruit d'un cri nocturne ; où tous mes cheveux, à un récit funeste, se dressaient et s'agitaient comme s'ils eussent été doués de vie : mais je me suis rassasié d'horreurs. Ce qu'il y a de plus sinistre, devenu familier à mes pensées meurtrières, ne saurait me surprendre. – D'où venaient ces cris ?

SEYTON. – La reine est morte, mon seigneur.

MACBETH. – Elle aurait dû mourir plus tard : il serait arrivé un moment auquel aurait convenu une semblable parole. Demain, demain, demain, se glisse ainsi à petits pas d'un jour à l'autre, jusqu'à la dernière syllabe du temps inscrit ; et tous nos hier n'ont travaillé, les imbéciles, qu'à nous abréger le chemin de la mort poudreuse. Éteins-toi, éteins-toi, court flambeau : la vie n'est qu'une ombre qui marche ; elle ressemble à un comédien qui se pavane et s'agite sur le théâtre une heure ; après quoi il n'en est plus question ; c'est un conte raconté par un idiot avec beaucoup de bruit et de chaleur, et qui ne signifie rien.

William Shakespeare, Macbeth, traduction M. Guizot


53e siècle standard, espace du système Brocélien


GURNEMANZ
Messire, les terriens se rapprochent de nous.

Arthur reprit ses esprits.

ARTHUR
Depuis quand ont-ils construit ces vaisseaux qu'ils possèdent ?

GURNEMANZ
Cela fait trois cent années que nous sommes partis.

ARTHUR
Je vois. Les graines que je plante croissent vite.
Il est ainsi des royaumes d'Arthur, j'aurais dû m'y attendre.

Il régnait dans la pièce un silence perfide.

ARTHUR
Lance nos chiens sur ces poursuivants insipides.
Qu'ils soient anéantis pour nous avoir défié.

L'Oracle fit un pas, le regard stupéfié.

L'ORACLE
Ils n'ont rien contre vous, ils veulent accéder au Graal.

ARTHUR
Eh bien ils goûteront de tout notre arsenal !
Le Graal est le secret de toute création.
Il n'a qu'un seul élu, et nous nous imposons.

L'ORACLE
« Nous » ? Mais vous êtes seul sur ce vaisseau fantôme.
Avec vos ombres, moi, et votre majordome.
Tous vos chevaliers sont morts dans leur sommeil,
Gurnemanz les a tués avant qu'ils se réveillent.

GURNEMANZ
J'ai agi sur votre ordre, ils s'étaient mutinés.

ARTHUR
Et tu as bien fait !
En travers de ma voie tous seront piétinés !
Ignorants des secrets de la coupe céleste,
Les terriens renifleurs ne sont qu'une autre peste.

L'ORACLE
Seuls accèdent au Graal ceux qu'il estime dignes.

ARTHUR
Nous sommes bien les seuls à remplir la consigne.
Le Graal gratifie les bâtisseurs de mondes.
Et dans la galaxie mon aura est profonde !
Le Système pervers qui asservit les Shardes,
Sa vermine rampante, obséquieuse et blafarde,
Ce peuples infamants corrompant mes États,
Ceux-ci peuvent périr, et ne méritent pas !
Du Graal je suis seul digne. Entends mes mots, Oracle,
Je suis le roi Arthur, le faiseur de miracles.
Maintenant, libérons les Ombres, Gurnemanz.

L'ORACLE
Aucun de vos palais boursouflés d'arrogance
N'atteindra la beauté du monde où j'ai vécu.
Aucun de ces plaisirs que vous vous pensiez dus
N'égalait le bonheur de ma Terre natale.
Vous n'avez pas servi l'ordre sacré du Graal,
Mais le votre, pas plus. Toutes vos créations
Visaient à votre gloire, et portent votre nom.
Vous avez étouffé des étoiles sans nombre,
Plongé tous vos sujets, vos peuples dans les ombres,
Afin de devenir la dernière lumière.
Vous avez asservi, non servi l'univers.
Vous êtes vanité, et vous êtes la mort.
Le Graal sera seul juge de votre sort.
De plus petits que vous sont immensément riches.
Ils possèdent ces cieux que vous mettiez en friche.
Les astres et le ciel jamais ne se perdront,
Tandis que vos États et vos vassaux mourront.
Votre pouvoir sera poussière d'atomes,
Vous serez oublié, le plus petit des hommes.

ARTHUR
Les chiens sont-ils lancés ?

GURNEMANZ
Douze mille, messire.

ARTHUR
Laisse-moi seul.
Et fais-la disparaître.

GURNEMANZ
Les terriens nous appellent, ô magnanime maître.

ARTHUR
Peu m'importe. Entendons-les.
Ma colère parlera tout autant.

AMFORTAS
Mon nom est Amfortas, commandant la mission.
Rappelez vos Ombres, Arthur, il n'est nul besoin de s'affronter.

ARTHUR
Vous nous avez suivi jusqu'ici par défi.

L'homme, par sa prestance, et son altière allure,
Rappelait ce héros qu'était le grand Arthur,
Un souvenir précieux, mais presque mortifère.
Et cela ne faisait qu'augmenter sa colère.
Non ! Point de ce passé ! Le roi était vivant !
L'aura de son pouvoir brillait, invincible.

AMFORTAS
Non, parce que vous approchez du but.
Je ne vous cacherai pas que nous le convoitons autant que vous.

ARTHUR
Le Graal est pour un seul.

AMFORTAS
Il changera de mains.
Le savoir se partage, et profite à chacun.
Peut-être est-ce une connaissance laissée là par d'anciens dieux dont la mémoire s'est fondue en légende.

ARTHUR
Il n'a qu'un seul élu, et ce sera Arthur.
Mon armée s'abattra comme un tourment obscur
Sur chaque misérable avançant devant moi.

AMFORTAS
Nos textes font de vous un bon et juste roi.

ARTHUR
J'ai écrit cette Histoire, elle me rend hommage.

AMFORTAS
Je constate navré qu'Arthur est un mirage.
De tous les mensonges du passé vous étiez le plus atroce. Vous n'êtes qu'un homme seul, et un roi fou ; vous construisez des empires de sable et les regardez se détruire ; les forces qui vous entourent ne sont pour vous que jouets. Je suis déçu, Arthur ; car si de tous les hommes vous êtes le plus puissant, de tous les êtres vivants, vous êtes le plus monstrueux. Le plus malheureux des hommes.

ARTHUR
Je ne suis pas le plus malheureux,
Car mes adversaires le sont plus encore.
Péris, pleutre terrien, dans le feu de mon ire.

AMFORTAS
Vous êtes le passé, nous sommes l'avenir.
Je suis ici pour l'affirmer, une dernière fois, devant vous : tous vos empires sont morts, votre mémoire s'est affadie. Lorsque vous périrez, il ne restera rien. L'univers ne voudra pas se souvenir de vous. Face au silence éternel qui vous attend, vous serez plus petit que le plus petit insecte ; et toutes les gloires que vous vous êtes imaginées viendront hanter votre sommeil éternel comme les ombres damnées de l'Enfer.

ARTHUR
Gurnemanz, fais-le taire.

AMFORTAS
Adieu, triste sire.

ARTHUR
Adieu, misérable.
Comme tous les beaux parleurs, vous serez oublié,
Comme tous les puissants, je serai victorieux.


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Sur ces entrefaites, l'auteur place un petit message ! Ouh que tout ceci est sérieux (donc sans Gudule !). Eh bien j'assume.

Si cela peut vous rassurer, nous avons dépassé la moitié du texte.

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