- Chapitre 1 -
Quelque chose me faisait garder un peu d'espoir. Je pensais rencontrer de bonnes personnes à mon lycée, qui pourraient me comprendre, m'aider. Mais dès que je m'approchais des gens pour tenter de me sociabiliser, ils me répondaient vaguement, comme s'ils cherchaient à me fuir. Je devais les intimider, avec ma couleur de cheveux peu banale pour une adolescente de dix-sept ans, mon mètre quatre-vingt-cinq et ma maigreur.
Ensuite, il y avait le dépaysement. Je ne me suis jamais habituée au mode de vie des français. Le Japon me manquait tellement, et en France, je me sentais seule... Mes parents pensaient que tout se passait bien, ils étaient tellement heureux d'être rentrés chez eux qu'ils ne faisaient plus vraiment attention à moi. Ma séparation avec Yumika fût très difficile à vivre... Je pensais que seulement les premières semaines seraient compliquées, que je me ferais de bons amis et qu'elle me manquerait un peu moins. Malheureusement, cela eu l'effet inverse. Plus les jours passaient, plus elle me manquait et plus j'essayais de trouver un sens à ma minable vie. Mais je ne parvenais pas à en trouver un... Je devenais de plus en plus dépressive, et je perdis énormément confiance en moi, dans ce pays que je n'aimais pas. Tout ce qui me faisait penser au Japon me donnait envie de pleurer. Ce que je désirais le plus au monde, c'était de rentrer chez moi, retrouver la vraie Elliko, celle qui avait réussi à surmonter les plus gros coups durs de sa vie. J'avais envie de me rouler en boule sous ma couette et pleurer jusqu'à en mourir de déshydratation.
C'est à ce moment-là qu'a véritablement commencé ma longue descente aux enfers. Je ne mangeais plus. Moi qui m'étais crue guérie de mon anorexie, je me trompais. Je portais des grands sweets larges pour masquer ma maigreur. Mes notes scolaires chutaient. Je me renfermais sur moi-même. Mes troubles de la mémoire empiraient et me rendait folle : je ne savais plus si j'avais fait telle ou telle chose. Je parlais de moins en moins avec Yumika. Au début, je pensais que cela m'aiderait à tenir. Mais je m'étais peu à peu rendue compte que cela me détruisait plus qu'autre chose. J'avais l'impression d'être un boulet pour elle, d'être ce genre de personne qui baisse les bras trop vite, d'être ce genre de personne qui n'a aucune place... Et elle, était impuissante au bout du téléphone. Elle ne pouvait pas m'aider. Elle ne pouvait plus rien faire... Je ne vivais plus. Je ne parlais plus.
J'avais commencé à exprimer du mépris envers tout le monde, j'en voulais à tout le monde, je détestais tout le monde... J'en voulais à mes parents biologiques de m'avoir fait connaître cette erreur qu'est l'Homme... J'en voulais à ce stupide éboueur de m'avoir retrouvée... J'en voulais à mes parents adoptifs d'avoir payés mes soins médicaux... J'en voulais à Yumika de m'avoir donné la force de continuer... Je m'en voulais à moi-même de l'avoir écoutée et de ne pas m'être glissée dans le drap froid et tentant de la mort... Personne n'essayait de me comprendre et me jugeai dès le premier regard. Quand je marchai dans les couloirs, les élèves me regardaient complètement apeurés comme j'allais leur sauter dessus pour les égorger. Au début, ces regards me détruisaient plus qu'autre chose... Je voulais pleurer. Ma confiance en moi avait totalement disparue...Je ne comprenais pas la tournure que prenaient les événements... Mais, à force des les endurer chaque jours, ils ne me firent plus rien... Je commençais à ne plus rien ressentir... Ils avaient peur que je les égorgent ? C'était ce que je voulais faire, mais pour être honnête, je préférais les voir affolés que morts à mes pieds. Les Hommes sont tellement stupides, ils ne cherchent pas à comprendre les gens avant de se permettre de les juger, ils ne se mettent jamais à la place des personnes qu'ils excluent, ils ne pensent qu'à eux-mêmes, sont égoïstes et égocentriques. J'avais juste besoin d'un peu d'attention...
Mais c'était trop tard...
Plus les jours passaient, et plus j'aimais ma solitude. De temps en temps, je regardai des groupes de supposés « amis » qui se disputaient pour des broutilles et j'en ricanais dans mon coin. Je ne voulais plus être amie avec des idiots. J'avais tourné la situation à mon avantage et profité de mon imposance. Je voulais être crainte, je voulais que les gens baissent les yeux lorsque je passai à côté d'eux. C'était le seul moyen que j'avais trouvé pour reprendre ma confiance perdue. Je les regardais dans les yeux avec une certaine violence dans le regard. J'aimais regarder leurs visages effrayés. Je commençais à perdre la tête, ma santé mentale dégringolait à une vitesse vertigineuse. Je voulais faire souffrir les gens autant qu'ils m'avaient fait souffrir. J'étais devenue une coquille vidée de toutes émotions.
Je n'étais pas la seule à avoir changée. Mes parents l'étaient aussi. Ils étaient trop occupés à organiser des dîners où ils invitaient leurs familles, qui au passage, était aussi débile l'une que l'autre. Ils ne faisaient plus attention à leur fille. Je crois que revenir en France leur a donné un gros coup de vieux. Ils faisaient attention à chaque centime dépensés, se souciaient de choses complètement stupides du style : "Je prépare des toasts au foie gras ou de caviar pour tante Fabienne ?"
La pire torture pour moi était d'aller au lycée. Les profs me criaient dessus car je ne travaillais pas, car je n'écoutais pas. Je ne les entendais que d'une oreille. Je m'en fichais. Je leur lançais des regards noirs et meurtriers. Le pire est que cela marchait. Ils arrêtèrent de vouloir me parler et me raisonner. Ils m'ignoraient et certains détournaient même le regard lorsqu'il croisait le mien. J'avais arrêté de travailler et je m'étais découvert une passion et un talent dans le dessin. De toute façon, je n'avais plus aucun savoir intellectuel, et dans l'état dans lequel je me trouvais, même compter jusqu'à deux relevait pour moi de l'impossible.
Mes parents devenaient de plus en plus débiles. Ils ne me voyaient même plus. Ils vivaient sans moi et je vivais sans eux. Au lieu de se soucier un minimum de leur fille, ils préféraient se plaindre de la pollution, de leur patron chiant, où même de la hausse exagérée et inutile du prix des poireaux en Normandie. Ils ont finalement compris que j'avais des soucis quand je leur ai annoncé qu'un jour, j'aimais plus que tout voir les gens souffrir, surtout si la souffrance était provoquée par moi. Ils furent alors très surpris de m'entendre dire une chose pareille. Leur réaction fut de me regarder d'un air hébété puis de ne plus m'approcher et de me craindre. C'est tout. Ils ne se sont pas posé plus de questions. J'étais plutôt contente, mais je ne comprenais pas vraiment. Ils vivaient avec une cinglée, et pourtant la seule chose qu'ils faisaient était de m'esquiver. Ils n'avaient pas appelé la police, ni consulté de psychologue. Un jour, j'ai surpris une conversation étrange. Ma mère était en pleurs, et elle ne cessait ne répéter :"C'est trop tard, on ne pleut plus rien faire, il l'a eue, il nous l'a volée..." Je n'avais pas compris de quoi elle voulait parler. Lorsque j'ai tenté de lui soutirer des informations sur ce que j'avais entendu, elle s'est remis à pleurer de plus belle, et ne m'a pas répondu...
J'avais vraiment songé à me défenestrer. Mais j'aimais trop la peur que je créais tout autour de moi ; je ne l'aurais perdue pour rien au monde.
Un jour, alors que je sortais en dernière de mon cours de sciences, le professeur me retint. Il était vraiment très étrange... Il y avait dans ses manières quelque chose qui me dégoûtait, voire même qui m'écœurait.
- Hum... Mademoiselle Dayant, sans être indiscret, qu'est-ce qui ne va pas chez vous ?
J'en fus choquée. Je ne comprenais pas pourquoi il voulait savoir. Cela ne le regardait pas. Et puis... « Sans être indiscret ? ». Il s'attaquait directement à ma vie privée, donc oui, il était indiscret. Je voulais lui cracher à la figure toutes les injures que je connaissais, je voulais le frapper, je voulais le voir souffrir.
- En quoi ça vous regarde ? répliquais-je sèchement en lui lançant des éclairs à l'aide de mon regard.
- Eh bien, je suis votre professeur, je pense donc être en droit de..., dit-il visiblement surpris du mépris qu'il perçut dans ma voix.
- Vous n'êtes rien pour moi. Vous n'avez aucun droit envers moi. Je m'en fiche de vous. Je m'en fiche de tout. Allez plutôt mourir. Ce sera mieux pour tout le monde.
Soudain, l'air se fit plus lourd et une tension palpable se fit sentir. Je tournai les talons afin de fuir cet endroit malsain. Grave erreur. Sans vraiment comprendre ce qui m'arrivait, je plongeai dans les ténèbres.
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Voilà le tout premier chapitre !
J'espère que vous appréciez le personnage... Bon ce n'est que le premier chapitre, donc c'est difficile de donner un avis, et elle va évoluer au fil de l'histoire, mais j'espère que vous l'aimez bien quand même :3
Moi j'ai un peu pitié d'elle... (Désolée Elliko pour tout ce que je te fais subir :'( ) Et il faut savoir que c'est un personnage que j'ai inventé il y a longtemps (il y a 3 ans je crois...) donc je me suis beaucoup attachée à elle xD
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