Chapitre 19
2 semaines après la consultation, samedi 18h
De : Docteur Roy
Objet : Résultat consultation
À : Lucie Hubert
Cc : Thomas Lefèvre
Bonjour Mlle Hubert,
Je vous ai mis en pièce jointe le certificat de santé que j'ai envoyé à mes supérieurs du concours et malheureusement, j'ai le regret de vous annoncer que votre participation a été refusée. Je dois dire qu'étant donné votre état pulmonaire, je trouve même étonnant que vous ayez pu effectuer vos entraînements durant tant d'années.
En espérant que votre état s'améliorera,
Mes sincères salutations,
Docteur Roy.
Bien sûr qu'elle le connaissait son état pulmonaire pour qui la prenait-il ? Depuis son enfance, elle connaissait la maladie génétique qu'elle avait, mais ne pouvait-il pas lui laisser même un espoir de survie ? Une simple illusion de quelques instants ? Le mot mucoviscidose ne s'oublie pas si vite pour une si petite fille qu'elle était. Quel imbécile ce médecin, pensa Lucie. Et lâche, par la même occasion. Il n'avait même pas eu le courage de lui dire ça en face. 2 semaines pour dire ça ? Comment pouvait-il être si sec dans ses paroles ? Même pas un encouragement, ni d'excuses. Des espérances. La jeune femme sentit une larme couler le long de sa joue. Pour le coup, elle la sentait sa douleur maintenant, et d'une intensité étonnante ! Sa tête tomba sur le bureau de sa chambre où l'ordinateur était posé. Qu'allait-il se passer alors ? Tous ces efforts pour rien ? Oui. Cette triste réalité lui faisait l'effet d'une claque en pleine figure.
Comme ça, cette chanson sera encore plus mémorable une fois qu'on aura gagné. Lucie entendait encore cette phrase que Thomas lui avait dite avant leur merveilleuse nuit. Jamais elle ne réentendra cette chanson. Du moins, cela n'était plus associé dans sa tête à un enthousiasme débordant, mais à de la mélancolie, un mauvais présage. Ses yeux commencèrent à se fermer lentement. Elle avait passé une dure semaine. Chaque soir après le travail, la jeune femme était allée voir Thomas pour qu'ils s'entraînent et elle manquait donc de sommeil, car cela traînait parfois en longueur. Mais maintenant le problème était réglé puisqu'elle ne ferait pas la compétition. C'était mieux ainsi, elle ne pouvait pas continuer de le ralentir.
19h18
Lucie comprit qu'elle s'était assoupie lorsqu'elle se réveilla en sursaut à cause de la porte de sa chambre qui s'était ouverte brusquement sur Julie.
— Il y a Thomas pour toi à l'entrée, lança la jeune femme en un soupir.
Lucie eut un instant d'enthousiasme puis elle se souvint du mail. Il avait dû le lire. Pour la première fois de sa vie, la jeune femme n'avait pas envie de le voir. Elle aurait voulu rester éternellement sur son bureau à attendre comme mettant sa vie sur pause.
— Dis-lui de me rejoindre ici, déclara la cadette.
Julie acquiesça en un hochement de tête puis s'en alla de la pièce. Elle semblait si triste depuis un moment déjà et Lucie ne savait pas comment l'aider. Surtout maintenant que tu es encore plus abattue qu'elle, déclara une petite voix dans sa tête. La fratrie Hubert devait être vouée à avoir un destin malheureux. Le destin. Quel était le sien ? En avait-elle un réellement ? Sa vie n'était-elle pas qu'un futur proche ? C'était bel et bien ce que traduisaient les « espérances » du Dr Roy. Lucie comprit soudainement tout.
Elle se détacha de ses pensées lorsqu'elle vit Thomas dans l'encadrement de la porte.
— Hey ! s'écria Thomas en embrassant la jeune femme.
Ce fut après un baiser timide qu'ils se détachèrent. L'homme tatoué tentait de sourire, mais avait l'air grave. Il n'avait pas cet air rieur habituel.
— Tu as vu le..., commença le danseur.
Il arrêta sa phrase lorsque son regard s'attarda sur l'ordinateur près d'elle et sur le visage peiné de Lucie.
— Tu as donc vu, finit-il.
Celle-ci hocha la tête, muette, et lui, poussa un soupir.
— C'est pas grave, on aura d'autres occasions pour faire des compétitions, s'exclama-t-il avec un semblant d'entrain, comme ça on aura encore plus de temps pour s'entraîner.
Lucie secouait la tête. Non. Il n'allait tout de même pas se sacrifier pour elle. Pour n'importe qui, mais pas pour elle. Elle qui n'était qu'un boulet dans sa vie, elle qui lui causait que des ennuis, elle qui n'apportait que malheur à ses proches. Ses parents, Julie, Jessica et maintenant Thomas. Non, Jessica le méritait, mais pour les autres, il fallait faire cesser tout cela.
— Mais non, ne dit pas n'importe quoi, souffla la jeune femme tout en ravalant ses larmes, tu en connais pleins des danseuses ! s'écria-t-elle avec un enthousiasme factice.
Et toutes plus sexy les unes que les autres, pensa-t-elle attristée.
— Je ne le ferais pas sans toi, renchérit-il d'un air sérieux.
Elle avait la folle envie de le serrer dans ses bras et d'acquiescer. Tout aurait été tellement plus simple, mais le destin en avait décidé autrement.
— Si, mais de toute façon, je n'étais même pas sûre qu'Amanda accepte mes congés, expliqua Lucie.
Thomas la regardait, dubitatif, tandis que la jeune femme affichait un grand sourire. Allait-il gober ce mensonge ?
— Je t'attendrais sagement ici, ajouta-t-elle avec un clin d'œil.
En faisait-elle trop ? Lucie sentait comme une barrière à l'intérieur d'elle-même qui l'empêchait de respirer normalement. Elle aurait voulu inspirer une grande bouffée d'air, mais n'y arrivait pas. Et c'était aussi de plus en plus difficile pour elle d'empêcher les larmes qui lui venaient de couler et un sanglot lui bloquait la poitrine. Encore quelques instants.
— Mais je ne veux pas y aller sans toi, déclara-t-il ému en l'enlaçant.
Elle le faisait souffrir. Elle, Lucie, elle le faisait souffrir. Comment osait-elle ? Il était si affectueux envers elle. Le contact de son torse chaud la rassurait, elle aurait voulu rester dans une telle position éternellement. Pourquoi était-ce si dur ? Il fallait qu'elle se détache de ses bras et qu'elle invente un prétexte afin de le congédier, mais ce fut au-dessus de ses forces. Lucie laissa échapper une larme, puis deux alors qu'il la tenait. La tête posée sur l'épaule du danseur, il ne pouvait pas la voir. La jeune femme s'autorisa finalement à pleurer silencieusement. Sa proximité était si agréable, n'était-ce pas ça le vrai bonheur ? Le paradis que chaque individu cherche désespérément ? Lucie savait à cet instant précis qu'elle vivait le plus bel instant de sa vie. Que demander de plus que cette proximité si rassurante ?
— Ne t'inquiète pas pour moi, je serais d'autant plus contente lorsque tu auras gagné à ton retour, marmonna-t-elle avec une voix sensuelle.
Ce fut un des derniers arguments qu'elle prononça afin qu'il accepte de partir pour ce concours. C'est mieux ainsi, se rassura-t-elle une dernière fois après qu'il soit sorti. Son cœur était écorché littéralement, laissant place à une plaie béante et grandissante depuis son départ. Jamais elle ne reverrait son ange gardien. Jamais elle ne reverrait ses tatouages magnifiques. Jamais elle ne reverrait ses muscles saillants mouvants selon le rythme de la musique. Jamais elle ne sentirait à nouveau la proximité de son torse chaud. Ce fut sur ses dernières pensées qu'elle sombra.
Lundi, 7h47
Ce maudit réveil ne voulait pas s'arrêter de sonner. Était-ce Julie qui l'avait enclenché avant de partir ? Il n'y avait aucun doute là-dessus.
Lucie essayait de sortir de son lit, mais la douleur dans la poitrine la paralysait littéralement sur place. Cette plaie béante qu'était son cœur la brûlait. Pourquoi fallait-il qu'elle tombe amoureuse de Thomas ? Pourquoi était-il si parfait à ses yeux ? Si seulement tous pouvaient être mauvais comme Jessica, au moins Lucie souffrirait moins à devoir tout quitter. La jeune femme aurait voulu effacer ses sentiments en un claquement de doigts afin que le sacrifice de le perdre soit plus doux, mais elle ne pouvait pas. Pourquoi ne l'avait-elle pas fait rester un jour de plus ? C'était impossible, de toute façon, elle n'en avait plus pour longtemps, à son départ la souffrance était si forte pour Lucie qu'elle ne pouvait s'empêcher d'avoir ce sentiment de mort imminente. Mort. Sa simple évocation déclenchait auparavant une profonde angoisse pour la jeune femme, mais à présent, c'était plus un don pour elle, comme un soulagement.
Un long gémissement sortit de sa gorge. Jamais la douleur n'avait été si forte, Lucie souffrait le martyr et le bruit strident et incessant du réveil ne faisait qu'intensifier ce mal-être. Le temps semblait défiler à toute allure et Lucie multipliait les tentatives pour se lever. Il fallait qu'elle aille travailler, au moins pour Julie. Soudainement le réveil s'arrêta. Silence total. Silence traduisant le vide qu'était à présent sa vie. Qu'avait-elle pour elle finalement ? Des parents qui ne l'aimaient pas, une ex meilleure amie détestable, une sœur passant le clair de son temps à pleurer et puis Thomas. Thomas. Ce simple nom lui déclencha des frissons. Il était la lueur d'espoir dans sa vie. Cette lumière qui réchauffait le cœur tout entier de Lucie à chaque fois qu'elle l'apercevait. Il avait été l'illusion pour Lucie d'un monde meilleur. Mais il était parti.
La jeune femme tenta encore une fois de sortir de son lit. Il fallait qu'elle mette de la musique pour penser à autre chose. Sa respiration se faisait de plus en plus difficile et son cœur battant de plus en plus fort dans sa poitrine lui faisait à chaque fois l'effet d'un coup de couteau.
Lucie rampait à présent et tomba comme une masse au sol. Mais la douleur de la chute était minime comparée à celle qui lui déchirait la poitrine. Elle se traîna difficilement jusque son bureau, mais un spasme l'envahit soudainement. Elle hurla de douleur. S'en était trop. Stop ! La jeune femme pleurait toutes les larmes de son corps et laissa tomber sa tête, impuissante. Ses yeux commençaient à se fermer. Lutte pour ta vie Lucie ! lui cria sa conscience. Il faut que tu ailles travailler, tu ne peux pas te laisser aller ainsi ! continua celle-ci. Cela déclencha un rire ironique de la part de Lucie. Aller travailler ! Et puis quoi encore ? Elle n'avait même plus la force de respirer alors de bouger était bien trop.
La jeune femme ne sut par quelle force de la nature elle put retrouver l'usage de ses membres mais elle arrivait à bouger. En réalité, elle avait eu cette motivation lorsque celle-ci avait aperçu un corps étranger sur son bureau : une sorte de toute petite trousse bleu marine. Elle se leva difficilement et tenta de faire bouger ces deux boulets qui lui servaient de jambes afin d'arriver devant le bureau. Elle tremblait tellement que sa vue se troublait, mais elle réussit malgré tout à attraper l'enveloppe bleue. Le contact doux du tissu la rassurait, ses doigts étant la seule partie de son corps ne la faisant pas souffrir. Elle ouvrit avec les mains tremblantes la petite fermeture éclair et découvrit un petit bracelet de perles avec un petit mot.
Tu me manques déjà, je ne sais pas comment je vais tenir pendant un mois... J'ai voulu t'offrir ce bijou pour tu penses encore un peu à moi pendant que je serais à Londres.
Je t'aime mon cœur <3
Mon cœur. Il l'avait pour la première fois appelée mon cœur. L'image qui lui vint à lorsque ses yeux se fermèrent était celle de Thomas au restaurant. Tu me plais beaucoup Lucie. Plus que tu ne l'imagines... Il avait prononcé ces mots en un murmure ce jour-là et Lucie en était restée bouche bée. Elle était désirable aux yeux de quelqu'un. Ce souvenir lui décrocha un énième cri.
Elle regarda alors, les larmes aux yeux, ce bracelet de petites perles, fin et élégant. Les larmes coulaient sur les joues de la jeune femme telle des marées et à la vue du petit cœur au centre des perles, gravé elle ne put s'empêcher d'hurler encore une fois. Son cri lui brisait les tympans tout comme ses poumons se déchiraient depuis son réveil. Thomas... Il était si loin maintenant pour Lucie qu'elle pensa soudainement qu'il n'avait été qu'un mirage dans sa vie. Et si depuis le début, elle rêvait et bientôt, elle se réveillerait ? Cette pensée était intolérable pour Lucie. Elle revoyait comme s'ils se déroulaient devant ses yeux les moments qu'elle avait passé avec lui mais à la vue de la gravure L & T 4ever, sur le petit cœur en argent, toute pensée cohérente dans son esprit disparue. Toutes ses idées se mélangeaient et elle ne voyait que ce magnifique bracelet. Elle le rapprocha de sa poitrine tout en tremblant de tous ses membres.
16h48
Le bruit des ambulances réveilla Lucie pendant quelques instants. Où se trouvait-elle ? Une chose était sûre, elle n'était plus dans sa chambre. La jeune femme entendait, en plus de la sirène, des bruits de voiture et...la voix de Julie. Que se passait-il ?
— Tout va bien se passer Lucie, je suis là, déclara la voix de son aînée, étonnement calme.
Sur les paroles rassurantes de sa sœur, la cadette perdit connaissance pour la seconde fois.
***************************************
Voilà pour le chapitre 19 ! :)
Avez-vous été ému par la maladie de Lucie ? Par le départ de Thomas ? Par le désespoir de Lucie ?
J'espère que vous avez ressenti les émotions que j'ai voulu transmettre et du coup dites moi vos impressions pour que je saches svp :)
Ah oui et je tenais à préciser qu'il reste encore 2 chapitres avant la fin ;)
Bisooouuus <3
PS : N'oubliez pas de voter et/ou commenter ;)
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top