Chapitre 44

Chapitre XLIV

Erwan

Le mois de décembre a apporté la première neige de l'année, un mercredi après-midi, sur les toits pentus du lycée, mais aussi l'approche des vacances de Noël. Dans une semaine, j'allais enfin dormir et profiter d'un repos bien mérité.

Ce mois en compagnie de Cassiopée avait été un mois incroyable. Il me semblait important d'en faire un petit résumé ici.

Mme Bonham avait parlé avec Cassiopée. Les trois membres de la famille avaient longuement conversé sur le sujet, avant de décider d'un commun accord que Cassiopée ne retournerait pas dans cet institut. C'était une nouvelle que Cassiopée avait accueillie avec un immense sourire et un soulagement incrédule. Moi-même j'avais été incroyablement heureux d'apprendre qu'elle ne risquait pas de partir quelque part dans une chambre d'hôpital où je ne pourrai plus la voir. Mais elle restait. Et mieux que ça, elle avait réussi à établir un dialogue avec ses parents, à leur faire entendre ses idées.

Mon père partait toujours en Suède pour les vacances, sans que je sache où j'allais loger, et, plus important, s'il y allait pour rencontrer ma mère, ou simplement (et cette hypothèse était des plus probables) pour son travail.

Le froid était mordant ; les jours glacés. Les écharpes et les bonnets devenaient repérables dans les foules et les sols étaient glissants. Des flocons tombaient parfois pendant la nuit. J'aimais l'hiver. C'était une saison haïe par beaucoup de gens alors qu'elle dégageait une pureté glaciale et princière.

Gabriel avait réglé ses différents avec Joa. Ou plutôt, il les avait contournés grâce à Cassiopée qui avait habilement amorcé la situation de manière à faire comprendre à Joa qu'il y avait sans doute un homme, quelque part, qui tenait à elle, mais que ce n'était pas Gabriel. Par la suite, pour une question d'honneur, j'imagine, Gabriel lui avait reparlée, de manière assez froide, mais comme il accosterait une amie. Joa avait compris le message.

Mon père m'a emmené une fois manger à la crêperie. Il ne savait pas encore pour Cassiopée et moi, mais ça n'allait sans doute pas tarder. Mme Bonham m'avait, de manière un peu hypocrite, invité à passer Noël avec sa famille. J'avais poliment décliné en prétextant devoir en discuter avec mon père, sans savoir si mon excuse la satisfaisait.

Cassiopée et moi, ça allait à ravir. J'avais l'impression qu'elle souriait plus, qu'elle était plus heureuse. Et puis elle avait gratté son ticket de tombola, en gagnant une petite structure en métal, dont elle se débarrassait en la cachant dans mes affaires de temps à autre. Nous nous entendions de mieux en mieux ; la complicité était devenue quelque chose de spontané, de naturel. J'avais arrêté de compter les moments magiques que j'avais passés avec elle, de la contemplation des nuages pendant des heures aux gâteaux ratés de ma cuisine en passant par les appels de plusieurs heures le soir quand elle ne pouvait pas sortir.

Curieusement, cette relation m'épanouissait également. Je me sentais plus apte à écouter les autres, à chercher à les connaître.

C'était un sentiment incroyable. J'aidais Cassiopée sans même me forcer, et, sans s'en rendre compte, elle m'aidait également, mais dans un sens que je ne croyais même pas possible.

Être blasé, chez moi, c'était une seconde nature. Cassiopée éveillait un intérêt unique, qui n'avait jamais été sollicité par ailleurs.

Le jeudi soir, juste avant les vacances, j'ai eu le droit à une discussion avec mon père.

- Tu sais, Erwan, je me demandais, cette année, au lieu d'aller fêter Noël avec Gabriel... Je me demandais si tu voulais m'accompagner à Stockholm.

Ce à quoi j'ai répondu avec intelligence :

- Hein ?

La surprise, sans doute. Ou l'incrédulité. Mais mon père ne s'est pas démonté pour autant, au contraire, il s'est éclairci la gorge.

- Ta mère et moi bossions dans la même boîte, dans deux pays différents. C'est ce qui nous a permis de nous rencontrer. Quand on m'a demandé d'aller en Suède pour Noël, j'ai appris qu'elle avait repris son poste il y a un peu moins de dix ans, et qu'elle avait ensuite démissionné il y a peu de temps... deux ou trois ans, je ne sais plus trop.

Il s'enlisait dans ses explications. Ses yeux gris étaient un peu rêveurs. Il s'est gratté la nuque, gêné. Je me suis demandé si mon père avait eu d'autres femmes dans sa vie sans m'en parler, après le départ de ma mère.

- Elle est restée en bons termes avec le directeur de l'entreprise suédoise, et quand j'ai expliqué au gars que je devais emmener mon fils avec moi ou alors lui trouver un endroit où loger pour les vacances, il n'a pas hésité, et t'a invité, en me demandant si je voulais qu'il prévienne ta mère.

Mon cœur a fait un bond. Je ne savais pas si c'était une bonne chose, parce que l'amertume m'a aussitôt envahi. Elle était donc à Stockholm. Ou en Suède, du moins. Et si elle voulait me revoir ? Je pourrai enfin avoir des réponses. Ne serait-ce que revoir son visage. Je me souvenais juste d'yeux vert pâle, et de cheveux blonds sur mon visage. J'imagine que j'avais effacé ses souvenirs en même temps que sa présence dans la maison.

- Il y a quelques jours, a poursuivi mon père sans se douter du combat intérieur que mon cœur et mon cerveau livraient, j'ai reçu un mail venant de l'ancienne adresse de ta mère, qu'elle avait désactivée. Elle m'a dit qu'elle aimerait t'accueillir pendant mon séjour à Stockholm. Donc... si tu veux passer Noël avec elle... je te prends les billets.

Le choc. Je suis resté immobile. Oui ? Non ? Gabriel cette année encore, ou une femme que je ne reconnaîtrai sans doute même plus ?

- Elle s'est remariée ? Elle a des enfants ? Je veux dire... je serai seul avec elle ?

Mon père a baissé les yeux. Une boule s'est formée dans ma gorge. Naturellement. Mais curieusement, je ne savais pas qui était le plus affecté par ce qu'il s'apprêtait à m'annoncer.

- Je pense, Erwan. Tu sais... je ne suis pas stupide. Je me doute que si ta mère est remontée en Suède, ce n'est pas seulement pour la beauté du pays.

- D'accord...

- Erwan... ça ne doit pas te faire de mal, tu sais. Ta mère a le droit de se reconstruire.

- En disant au revoir, ça serait mieux passé.

- Elle t'aimait, fiston. Elle t'aimait. Et je suis sûr que c'est encore le cas. Ça fait dix ans qu'elle ne t'a pas vu. Et tu lui manques.

Pour la première fois depuis longtemps, j'ai vu la douleur dans les yeux de Jared. Sans doute parce qu'il pensait que ma mère l'aimait lui aussi, avant de partir.

- Si je ne suis pas bien avec elle... ou avec eux... tu viendras me chercher ?

J'avais baissé la voix. Je me sentais pitoyable. Mais pour une fois, je me sentais en sécurité avec mon père.

- Bien sûr, Erwan.

- Alors OK. Prends les billets.

- La Suède !

- Oui, Gab.

- La Suède !

- Oui.

- Les Suédoises !

- Je croyais que tu n'aimais pas les blondes.

- La Suède !

Il était plus excité que moi à l'idée de ce voyage. Je crois que Gabriel se souvenait un peu de ma mère. Il préférait malgré tout parler du potentiel des individus féminins de ce pays plutôt que de soulever un sujet délicat. Ce que je comprenais. Ce que j'approuvais. Je n'avais pas envie de parler d'elle.

- Les garçons, dans le fond. Taisez-vous ou je vous sépare.

La prof d'histoire était aussi commode qu'un tigre affamé. Gabriel a compris le message.

L'inconvénient, c'était qu'il s'agissait aussi de notre prof principale, et que, vu les remarques sur le bulletin du premier trimestre de Gabriel, il avait tout intérêt à se tenir à carreau.

- Bien, a poursuivi Mme Schreit. La sonnerie ne va pas tarder. Alors je tenais à vous souhaiter de bonnes vacances de Noël, profitez de votre famille, reposez-vous, et n'oubliez pas de me ramener ces trois synthèses de textes. D'accord ? Bien. Une dernière chose avant de vous laisser sortir : nous allons accueillir une nouvelle élève à la rentrée. Passez d'excellentes vacances.

Gabriel et moi nous sommes rués hors de la classe. Ce vendredi était humide et froid, ce qui causait aux salles de classe d'être moites et puantes. Autant dire que c'est avec bonheur que nous avons descendu les escaliers pour respirer un peu d'air frais.

- Espérons que la nouvelle élève redressera un peu le niveau.

J'ai haussé les épaules. Gabriel m'a mis un coup de coude dans les côtes.

- Ah non ! Cassiopée ou pas, tu ne la joueras pas Cameron.

- D'accord, Gabriel.

J'ai ri doucement. Mon souffle a formé un nuage argenté dans la cour de récré. Trois heures de pause se profilaient à l'horizon, et j'en étais ravi. Quoi de mieux la veille des vacances...

- Tu t'envoles quand au pays des aryens ?

- Je suis brun.

- Tu n'es pas Suédois.

- A moitié. Je suis quand même né là-bas. Et je décolle lundi matin.

- Merveilleux. Tu peux venir chez moi ce soir ? Ma mère va encore au restaurant avec mon père. C'était les quatre mois aujourd'hui. Elle ne veut rien me dire, mais du coup elle sait si je vais me retrouver avec une fille en plus à la maison ou non.

- Tu n'as pas essayé de la soudoyer ?

- T'as vu mon bulletin ? Depuis, elle est aussi indéchiffrable que la Joconde. Elle a le même petit sourire en coin, du genre je suis enceinte donc je suis heureuse, mais mon aîné est un boulet.

- Dis pas ça, Gab, ai-je soupiré.

- Tu as de la chance qu'elle t'aime plus que moi, parce que si tu avais été un simple pote, elle m'aurait recalé dans ma chambre avec Cléo et Nausicaa dans les pattes. Seul. Démuni.

Je n'ai pas pu m'empêcher de ricaner.

- Ta mère ne m'aime pas plus que toi. Et j'étais supposé voir Cassiopée ce soir.

- Elle peut venir ! Avec un peu de bol, elle fait partie de ces filles qui adorent les enfants.

Il m'a jeté un regard contrit.

- Si c'est le cas je suis désolé, j'espère qu'elle te laissera passer la vingtaine sans encombre.

- Je ne crois pas qu'elle porte une attention particulière aux enfants, mais tes sœurs sont adorables. Elle dira oui.

Gabriel a fait un petit saut discret pour rétablir la circulation dans ses pieds, mais a failli s'étaler sur une plaque de verglas.

- Il fait quoi, moins cinquante, en Norvège ?

- Suède.

- Elles sont blondes aussi là-bas de toute façon.

- Tant de généralités.

- Tu vas voir ta mère, alors ? a demandé Gabriel avec un air plus sérieux, presque désolé, sans prévenir une seule seconde du brusque changement de sujet.

J'ai mis un moment à trouver quoi répondre. Nous nous sommes assis sur un banc de pierre, humide et glacé, et j'ai frotté mes mains l'une contre l'autre pour les réchauffer.

- Ouais.

- Elle est... seule ?

J'ai senti que Gabriel parlait avec des pincettes, et je n'aimais pas cette impression. Il choisissait ses mots avec soin, comme s'il avait peur de me blesser.

- Non.

- Ah.

- Mari, sans doute. Enfants, peut-être.

- J'espère qu'ils ne sont pas trop jeunes. Enfin si, parce que ça voudrait dire qu'elle ne s'est pas... tout de suite... enfin... non, oublie.

Sa maladresse m'a presque fait sourire. Je me suis levé.

- On rentre ? J'ai froid.

- Je t'avais dit que tu n'étais pas Suédois.

Nous nous sommes dirigés vers l'entrée des bâtiments pour aller manger. Pendant ce laps de temps, Gabriel a jugé utile de me parler d'une Finlandaise qu'il avait bien connue l'année précédente. J'ai décroché. Je me suis demandé comme la rencontre avec ma mère allait se passer.

Puis, j'ai abandonné.

Advienne que pourra...

Ce soir-là, Cassiopée, Gabriel et moi nous sommes donc présentés devant la porte de ce dernier. Cécile a ouvert dans un tourbillon de parfum et d'élégance, un grand sourire sur le visage, son ventre qui s'arrondissait couvé par sa main protectrice.

- Bonjour vous trois ! Entrez vite, vous allez attraper un rhume. Erwan, mon chéri, où est ton manteau ?!

- Il exprime sa suédoisité, a ricané Gabriel.

- Allez, à l'intérieur ! Ada et moi avons fait un gâteau.

A peine la porte s'était elle refermée que Cécile m'étreignait à m'en fêler les côtes. Elle s'est écartée en m'inspectant de la tête aux pieds. Sachant que je faisait une bonne tête de plus qu'elle, c'était plutôt comique.

- Tu as maigri, on dirait. Mon pauvre chéri, je vais en toucher deux mots à ton père ! Je rêve ou tu as encore grandi ?

J'ai souri. Cécile me mettait toujours en confiance. Je me sentais tellement bien ici.

- Et nous avons une invitée, a poursuivi Cécile.

Elle a décroché enfin son regard de mes bras encore couverts de frissons avec un air critique, comme si elle allait me remettre dans la minute une tasse de chocolat et une couverture.

- Comment t'appelles-tu, ma belle ?

- Cassiopée, madame.

Ses yeux ont fait la navette entre son fils et Cassiopée, puis se sont posés sur moi. Son regard noisette s'est éclairé. Le vestibule a paru rayonner.

- C'est un prénom magnifique. Ohhh !

J'ai dévisagé Cassiopée qui souriait tendrement, posée, calme, scandaleusement belle dans son écharpe bleue et ses boucles épaisses.

- C'est donc toi l'heureuse élue ! Viens-là que je t'embrasse. Pas de « madame » entre nous, appelle-moi Cécile.

Elle a serré Cassiopée dans ses bras.

- Tu es superbe. Laisse-moi te présenter mes enfants, puisque je vais vous laisser toute une soirée avec eux.

Nous nous sommes déplacés dans le salon. J'ai cherché la main de Cassiopée derrière moi. Son contact, cette maison ; je me sentais chez moi.

Comme à leur habitude, les jumelles étaient sur le tapis du salon, devant les deux fauteuils rouges et le canapé, en train de construire une tour avec de petits carrés de couleurs, sous l'œil désintéressé d'Ada, qui lisait un livre devant la télévision. J'ai tourné la tête. Cassiopée avait des étoiles dans les yeux. Je ne me souvenais pas de la première fois où j'étais entré dans cette maison, mais je pouvais imaginer que c'était la même chose pour tout le monde. Un foyer baigné d'amour et de bonne humeur.

- Ada est sur le canapé. Et sur le tapis, nous avons les jumelles, Cléo et Nausicaa.

- 'Wan !

Cléo s'est levée pour courir vers moi et s'accrocher à mon tibia. Je l'ai soulevée de terre, et lui ai embrassé le front. Cléo s'est tournée vers Cassiopée et l'a examinée avec curiosité, blottie contre moi.

- Cheveux rouges, a-t-elle dit d'un air suspicieux. Belle.

Cécile a éclaté de rire, une main toujours serrée sur son ventre, le regard brillant.

- Tu as des frères et sœurs, Cassiopée ?

- Non, a répondu l'intéressée d'une voix très douce. Mais j'ai une petite cousine qui doit avoir le même âge qu'elle.

- Maman ? a demandé Gabriel d'une voix traînante. Lundi soir il y a une soirée pas loin, pas longue, sans alcool et sans filles, est-ce que je peux...

- 7 en maths, a déclaré Cécile d'un ton autoritaire en brandissant un doigt sévère devant les yeux de son fils. Ça t'apprendra ! Va bosser au lieu de faire la fête. La vraie vie, ce n'est pas ça, Gabriel !

- Ça va, j'ai le temps...

- Tu crois vraiment que les écoles de théâtre de Paris vont t'accepter pour tes jolis yeux ? Tu as intérêt à te mettre au boulot !

- D'accord, maman...

Cassiopée a souri encore, un sourire doux et mystérieux. Elle s'est approchée de moi et a fait glisser sa main dans mon dos jusque dans mon épaule.

- C'est ta copine ? a demandé Ada d'un air nonchalant, alors que Cassiopée et moi hochions la tête.

- Copine, a répété Nausicaa, sur le tapis, d'un air critique.

Cléo, à vingt centimètres de Cassiopée, a plissé les yeux avant de brandir son poing serré, son petit pouce levé vers le plafond.

- Bien, 'Wan.

Les jumelles étaient couchées. Gabriel était monté avec Ada, vers minuit, pour l'inciter à s'endormir afin d'avoir la paix. Pendant ce temps, Cassiopée s'était coulée dans mes bras, sur le canapé. Les lumières étaient éteintes. Seul subsistait le grésillement de la télévision.

- Je t'aime, Erwan.

J'ai baissé la tête, surpris. Elle me le disait, souvent, sans doute, aux moments les plus inattendus, sans attendre de longues déclarations en retour. Comme toujours, ces quelques mots m'ont touché.

- Moi aussi.

Sa tête posée sur mes cuisses, tournée vers moi, elle a souri doucement. J'ai caressé ses longs cheveux roux.

- J'espère que ça va bien se passer, avec ta mère.

- J'espère aussi...

J'ai levé les yeux vers la télé, qui diffusait un de ces jeux débiles qui passent à l'heure où plus personne ne regarde.

- Je peux venir chez toi ensuite ? a-t-elle demandé à voix basse.

- Ta mère me retrouverait pour m'enterrer vivant.

- Ma mère n'est pas là ce soir.

- Alors avec plaisir.

J'ai ignoré le tressaillement de mon cœur. On entendait, au loin, la voix de Gabriel qui forçait Ada à se mettre au lit. Ada répondait dans des hurlements qui n'allaient pas tarder à réveiller les jumelles.

- Cassiopée ?

- Hm ?

Elle avait fermé les yeux. Elle s'est redressée. Elle avait l'air fatiguée. Elle s'est glissée dans mes bras, somnolente, a blotti sa tête dans mon cou, et a laissé son souffle caresser ma gorge.

- Merci d'être entrée dans ma vie.

Nous sommes rentrés chez moi à une heure assez tardive. Il n'y avait pas de voiture dans le jardin. J'imagine que mon père s'était endormi chez un collège de bureau en essayant de bosser sur une affaire quelconque. Qu'importe. Ma maison n'était pas vide, ce soir - elle était avec moi.

Nous sommes montés dans ma chambre. Nous avons fini le sac de bonbons que nous avions acheté la veille en parlant de tout et de rien dans le noir. Puis, je ne sais pas trop comment, nous avons arrêté de parler. Je me suis retrouvé niché dans son cou à sentir son pouls qui palpitait contre mes lèvres, et ses mains qui frissonnaient le long de mon torse. A entendre sa respiration faire pâlir le silence de la chambre, et à découvrir peu à peu les courbes de son corps.

Il n'y a pas de mythe croustillant sur la première fois à raconter, parce que ce n'était ni sa première fois, ni la mienne. C'était juste un acte spontané et naturel, qui était né dans les vapeurs de désir et d'amour qui flottaient au-dessus de nous depuis que nous étions rentrés. A nos baisers et nos soupirs brûlants se sont mêlés les bras lointains de l'obscurité et le calme de la maison endormie.

Je me suis retrouvé somnolent contre elle avec dans mon esprit les échos de mon nom murmuré et de ses mains fiévreuses. Et quand finalement j'ai trouvé le sommeil, ma respiration s'est calquée sur la sienne, et je me demandé comme j'avais pu espérer, ne serait-ce qu'une seconde, pouvoir passer à côté d'elle sans la regarder au lycée. Pouvoir vivre sans son regard. Pouvoir simplement l'ignorer et me concentrer sur une autre fille quelconque. Non... je n'aurai pas pu. Et il m'avait fallu du temps, beaucoup trop de temps, pour m'en rendre compte.

- Je t'aime, Cassiopée, ai-je murmuré alors que le sommeil l'avait, il me semble, déjà emportée.

« Je t'aime aussi, Erwan » - Cassiopée

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