Chapitre 8
Quand est-ce que j'ai vu des yeux nacrés pour la dernière fois ?
- je croyais que tu étais déjà à l'intérieur, tu m'attendais ?
- euh... salut Neji, non je...
Il s'approche de moi et s'adosse aussi à la rembarde.
- ce café te rappelle Hinata c'est ça ? Dit-il un sourire amer sur le visage tout en levant la tête vers le ciel
Après une minute de silence, je me surprends à me confier.
- on venait souvent ici elle et moi, c'était notre lieu de rencontre secret, on a passé beaucoup de moments ensemble ici, et maintenant que...
Je m'arrête. Je sens mes larmes montées. Je les refoule.
- alors toi non plus tu n'arrives pas à l'admettre... dit Neji en baissant la tête cette fois ci
- j'ai trop de souvenirs qui me pèsent, ça me perturbe d'être ici sans elle
- je comprends Naruto
Neji se met en face de moi. Je peux lire la souffrance dans ses yeux. Pourtant il arbore un air ferme et déterminé. Comment faisait-il ?
- à la maison, ça me fait bizarre de ne plus la voir se balader dans les couloirs, la tête dans les nuages. Continue-t-il
Ça doit être dur pour lui, d'avoir passé pratiquement toute sa vie au côté d'une personne et de la perdre aussi brusquement. À lui aussi, tout son être doit se briser de l'intérieur, assez lentement pour que la douleur soit insupportable.
- mais, dit-il la voix tremblant légèrement, il faut qu'on avance Naruto. Sinon, qu'est-ce qu'elle dirait si elle nous voyait nous morfondre comme ça ?
Je relève la tête, sentant comme un léger poids se retirer de mon cœur petit à petit. Pourquoi lorsque c'était Neji qui me parlait, j'écoutais ? Peut-être parce que je l'identifie à la personne qui est le plus apte à comprendre ma douleur.
- t'as raison... soufflais-je non sans peine
- bon, on entre ? Je commence à avoir froid !
Un pas après l'autre. Doucement mais sûrement. Je m'avance à mon rythme, avec l'impression que j'allais me jeter du haut d'un gouffre.
Neji pousse la porte et nous voilà à l'intérieur. J'expire comme si j'avais retenu mon souffle trop longtemps.
Mon regard se pose -presque irrépressiblement- vers la table à laquelle on avait l'habitude d'être elle et moi.
Neji se met à trois table devant sans savoir qu'en moi, deux sentiments se battaient : l'envie de m'y asseoir à nouveau, et la douleur provoquée par des souvenirs du passé
Tenten arrive et me sourit.
- tu me présentes le beau jeune homme qui t'accompagne ?
- je suis Neji Hyûga, enchanté
- moi c'est Tenten et je gère le café !
Ils se regardent durant quelques minutes jusqu'à ce que je sors un toux signalant ma présence.
- bon qu'est-ce que je vous sers ?
- tu prends quoi Naruto ? Me demande Neji
Je suis un peu surpris. Il y a encore quelques jours, il ne pouvait pas me voir en peinture. Et maintenant, il me demande gentiment ce que je veux commander. J'en rirais presque.
- un déca s'il te plaît Tenten
- pour moi, un thé noire. Ça te dit on prend des macarons ?
J'étais perplexe à l'idée d'avoir des macarons en face de moi. Je sais que ça va m'ouvrir des plaies dans le cœur, des plaies que je n'ai pas encore entièrement pansées.
Neji attendait encore une réponse de ma part. Moi j'étais plongé dans mes pensées, sans doute entrain de regarder dans le vide. Et puis il y a Tenten qui sait tout. Elle doit comprendre pourquoi je ne prends plus d'expresso ou encore pourquoi je suis dans cet état à la simple prononciation du mot " macarons ".
Elle était présente. Elle savait à quel point cet endroit me rappelle Hinata, à quel point chaque recoin de la pièce, chaque objet, chaque personne me faisaient penser irrémédiablement à elle. Elle connaissait le lien que j'avais tissé avec Hina, elle sait que maintenant, je n'étais plus qu'une coquille vide.
- et... finit la brune par dire au bout d'un long silence, et si vous preniez plutôt des croissants ? Ils sont très bons aussi !
Voilà ce que j'attendais d'elle. Une diversion. Un changement de sujet. Une solution.
- hum, très bien, va pour les croissants alors. Répond Neji
Tenten s'en va. Neji prend un air sérieux qui me rend perplexe.
- pour être honnête avec toi Naruto, c'est Sakura qui m'a demandé de te parler.
- ah oui ? Comment ça ?
- elle s'inquiète beaucoup pour toi et je dois l'admettre, il y a de quoi s'inquiéter.
Je ravale difficilement ma salive avant de regarder mes mains qui étaient posées sur la table. Je prends du temps avant de remarquer qu'elles tremblent.
- Naruto.
Je relève la tête pour regarder Neji droit dans les yeux.
- depuis quand tu n'as pas dormi ?
- je...
- depuis quand tu n'as pas mangé ?
- c'est que...
- tu t'es regardé dans la glace ou pas ? Il est normal de ne plus savoir comment vivre quand la personne à qui on tenait le plus vient de mourir. Mais Naruto, bon sang ! Si tu continues à tout garder pour toi de cette manière, tu ne t'en sortiras jamais.
Je sens mon cœur se serrer. J'ai la gorge nouer. Je suis à deux doigts d'exploser.
- je sais... soufflais-je, je sais ! Je sais Neji ! Je sais ! Mais j'y arrive pas ! Comment t'as fait pour y arriver, d'ailleurs ?
- Naruto...
- comment tu fais toi ? Il t'arrive à toi aussi de rêver d'elle, non ? Ça t'arrive de faire ce cauchemar dans lequel elle meurt sous tes yeux encore et encore ? Parfois quand tu te regardes dans le miroir, ça t'arrive aussi de la voir, elle n'est-ce pas ? Et quand t'es tout seul dans ta chambre, souvent t'as qu'une envie c'est d'en finir, non ? Alors comment tu fais !?
- Naruto, ne me dis pas que...
- si ! Bien sûr que si ! soufflais-je en posant ma main sur mes yeux. Ce monde est trop sombre sans elle. Elle était mon étoile tu sais ? Celle qui me guidait dans le noir. Celle qui était là quand mes pensées obscures prenaient le dessus...
- tu sais bien que ce n'est pas une solution, même après, tu ne trouveras pas le repos.
- je ne sais plus quoi faire...
- pour l'instant, t'es encore au stade du déni. Et c'est totalement normal. J'ai beau être un membre de sa famille, je suis certain que celui qui souffre le plus, c'est toi. Le deuil vois-tu c'est plus compliqué que ça n'y paraît. Mais tu pourras jamais faire ton deuil si tu n'acceptes pas la dure réalité. Mais si on t'y oblige, ça ne changera rien non plus. Tout ce qu'on peut faire nous, c'est te soutenir. Le plus gros du travail, c'est à toi de le faire. T'en es conscient, n'est-ce pas ?
- ouais... ne t'en fais pas.
- je dirai aux autres de te laisser tranquille, je sais que tu as besoin de temps, il faut te laisser respirer au lieu de toujours s'inquiéter pour toi.
- oui tu ne pourrais pas dire mieux
- je le leur dirai mais à une condition
- laquelle ?
- que tu ne fasses pas l'idiot. L'amour que l'on porte à une personne peut vite devenir un fardeau quand elle part. Ce sera difficile, tu auras sans doute durant quelques jours encore des pensées suicidaires mais t'as pas intérêt à passer à l'acte. De mon côté, je vais les rassurer.
- d'accord, ne t'inquiètes pas. Je suis assez lucide pour savoir que ce n'est pas la solution sinon je ne serai plus là à te parler.
Tenten ramène notre commande. Je remarque à son sourire nerveux qu'elle a entendu une partie de notre conversation. Elle a les yeux larmoyants d'ailleurs. Sans un mot, elle dépose les croissants et les boissons sur la table avant de partir avec précipitation.
- Neji.
- hm ?
- merci pour tout. Dis-je en tentant de sourire du mieux que je peux
- remercie moi quand tu te sentiras vraiment bien.
Je sors un léger rire. Sans doute le premier depuis le décès d'Hina. Je n'arrive pas à croire que c'est grâce à celui qui m'en voulait à mort.
- tu viendras demain, j'espère. Dit-il avant de prendre une gorgée de son thé noir
- oui bien sûr.
- après la cérémonie, il faudra que tu restes, j'ai des choses à te remettre.
- d'accord.
Après avoir fini notre collation. On a payé et on est sortis du café. Neji me tend une petite boîte.
- ça vient de toi ? Demande-t-il
Je l'ouvre et y découvre le collier qu'Hina avait l'habitude de porter. Je ne lui avais jamais vraiment demandé d'où il venait.
- non, elle le portait souvent mais j'ignore de qui il vient.
- je vois. Mais garde le.
- pourquoi ?
- elle avait l'air d'y tenir, alors je te le confie.
- très bien... dis-je en mettant la boîte dans la poche de mon pantalon.
Avant de se quitter, Neji m'a sourit et m'a dit avec sincérité :
- n'hésite pas à m'appeler si besoin
Je ne l'imaginais pas aussi gentil. Il avait toujours ses yeux menaçants quand il me regardait et pourtant aujourd'hui son regard s'est adouci. Ce n'était pas de la pitié je décelais dans son regard, juste du soutien.
En arrivant à la maison, j'avais appelé Sakura pour la remercier.
La nuit était tombée, les étoiles brillaient. Je me sentais plus léger, moins coupable depuis que j'ai discuté avec Neji.
Ce soir-là, pour la première fois depuis qu'Hinata n'était plus de ce monde, j'avais réussi à fermer l'œil.
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