Chapitre 15.

Nathan

Après le petit-déjeuner, Elya insiste pour que je joue avec elle mais je refuse. J'ai tout de même des devoirs à faire de temps en temps, même si je fais en sorte de tout faire pendant les heures où je n'ai rien dans mon emploi du temps. Néanmoins, une dissertation de philosophie ne se fait pas en deux heures. Je passe toute la matinée à me prendre la tête sur cette question barbante à propos d'œuvres d'art et de beauté qui ne me passionne absolument pas du tout quand Elya vient me voir dans ma chambre. J'en profite donc pour faire une pause peu avant midi.

- Mamie est en train de faire à manger, m'apprend-elle en grimpant difficilement sur mes genoux.

Je l'aide et la porte pour l'installer confortablement. Elle regarde mes feuilles de brouillon comme si elle comprenait tout mais je détourne son attention en lui demandant ce qu'elle est venue faire dans ma chambre.

- On peut aller au cinéma aujourd'hui, s'il te plaît ?

- Non ma puce. Je te l'ai dit, j'ai du travail. Il faut que je recopie tout ça, expliqué-je en lui montrant les cinq morceaux de papier où sont éparpillés les différents paragraphes de ma dissertation.

- Tu pourras le faire après ?

- Je suis très en retard, tu sais.

- Mais tu peux aussi le faire demain ? S'il te plait Papa, me supplie-t-elle d'une toute petite voix. Ça fait longtemps...

Si elle me parle comme ça, je ne pourrai jamais lui dire non. Je suis trop faible face à sa petite bouille d'ange irrésistible. Elle a toujours su m'attendrir dans le but d'arriver à ses fins.

- Il y a un dessin animé qui a l'air trop bien, ajoute-t-elle.

- Disney, je suppose ?

- Bah oui !

Je ris sous cape et suis déjà prêt à céder lorsqu'elle ajoute quelque chose :

- Tu peux demander à Gaëlle de venir avec nous ?

Je m'interrompt subitement en entendant sa proposition.

- Gaëlle ?

- Oui. Elle n'est jamais revenue depuis la dernière fois. C'est plus ta copine ?

Elle est toujours ma copine, c'est seulement que ces trois dernières semaines, nous ne nous sommes plus revu en dehors des cours. Nous restons seulement discuter de longues minutes lorsque je la dépose chez elle le soir mais elle n'est plus venue à la maison depuis que nous sommes ensemble. J'aimerais passer plus de temps avec elle, mais c'est elle ou Elya. Enfin... C'est ce que je pensais avant que ma fille ne me fasse cette offre qui me surprend.

- On est toujours amis, affirmé-je.

- Pourquoi elle ne vient plus alors ?

- Elle a sûrement des choses à faire, je ne sais pas.

- Tu crois qu'elle voudrait bien venir avec nous voir un dessin animé ?

Je fronce les sourcils.

- Pourquoi tu veux qu'elle vienne ?

- Parce qu'elle est gentille et rigolote et que tu l'aimes bien, rétorque-t-elle comme une évidence.

- Et toi, tu l'aimes bien ?

- Oui.

Ce simple mot me réchauffe le cœur. Ma fille apprécie ma petite-amie, c'est un bon début, non ? Et en plus, elle m'aide à la voir davantage. Que demander de mieux ?

- On lui propose ? la questionné-je sans hésiter en m'emparant de mon téléphone, le sourire aux lèvres.

- Je peux écrire le message ? s'exclame-t-elle joyeusement.

Je lui donne l'appareil après avoir ouvert l'application et elle tape quelques mots. Oui, elle sait se servir de mon portable à force de me voir le faire. Je regarde ce qu'elle écrit à la vitesse d'un escargot.

Moi : Bonjour gaelle cest elya papa veut que

- Hé ! C'est toi qui l'invite, pas moi, protesté-je en lui retirant l'appareil des mains.

- C'est pareil ! rit-elle.

- Non.

- D'accord, je vais changer alors. Donne, s'il te plait.

J'efface le texte et lui rends. Je lis le message en l'aidant à corriger les fautes d'orthographe mais laisse volontairement la ponctuation absente.

Moi : Bonjour gaelle cest elya tu veux venir au cinema avec nous voir un dessin anime

Elle me demande ensuite si elle peut l'envoyer et après lui avoir donné l'autorisation, nous descendons rejoindre ma mère. Ma fille n'attend pas un seul instant pour lui annoncer que nous allons peut-être sortir avec ma petite-amie, alors j'esquive le regard entendu de ma génitrice. Je devine qu'elle doit être heureuse et qu'elle a certainement un sourire jusqu'aux oreilles. Ma relation avec Gaëlle l'amuse autant qu'elle la ravit. C'est à la fin du déjeuner que mon portable sonne. Elya court jusqu'à moi pour regarder la réponse.

Gaëlle : Avec plaisir ! C'est très gentil de m'inviter.

- Oui ! On va au cinéma ! s'écrit Elya en levant le poing en signe de victoire. Je vais me brosser les dents.

Ma mère éclate de rire et je soupire en m'affalant sur ma chaise.

- J'en connais une qui a hâte de sortir, annonce-t-elle.

- C'est elle qui a voulu que Gaëlle vienne avec nous, lui apprends-je.

- Je sais, elle m'en a parlé.

Elle m'explique que ma petite complotrice a, dans un premier temps, demandé à sa grand-mère de sortir. Celle-ci ayant refusé, elle a alors voulu y aller avec moi et avec « la copine de Papa si elle est d'accord ». Il avait tout prévu, mon petit ange démoniaque !

J'envoie donc un message à Gaëlle pour lui dire qu'on viendra la chercher dans une heure. Une dizaine de minutes plus tard, Elya est prête et attend patiemment sur le canapé tout en caressant son chat. Quand je lui annonce que nous partons, elle saute de joie et court jusqu'à la voiture pour s'installer sur son siège et boucler sa ceinture.

- Coucou Gaëlle ! s'écrit ma fille lorsque celle-ci ouvre la portière passager. C'est moi qui ait écrit le message tout à l'heure !

- Oui je sais, rit ma petite-amie en s'installant.

J'ai envie de me pencher vers elle pour l'embrasser mais je préfère me contenter d'un baiser sur sa joue.

- Tu as déjà vu le dessin animé ? questionne Elya.

- Non jamais. Mais il a l'air amusant, pas vrai Nathan ?

- Ouais, j'espère. Je sacrifie ma dissertation qui est pour lundi.

- Tu ne l'as pas encore terminée ?

- Je n'ai plus qu'à recopier. Le petit démon derrière m'a interrompu pour me demander d'aller au cinéma.

- Papa ne voulait pas venir mais quand je lui ai demandé si tu pouvais nous accompagner, il a dit oui, annonce Elya en riant.

Du coin de l'œil, je vois Gaëlle me sourire en se tournant vers moi. Ça semble la ravir d'entendre ma fille dire la vérité.

***

Après le film, ma petite-amie nous propose d'aller manger une gaufre tous les trois, et Elya accepte avec joie. Quand il s'agit de nourriture, elle est toujours présente et, comme chaque fois qu'elle mange quelque chose, elle s'en met partout sur le visage, mais elle reste trop mignonne, et terriblement adorable. Nous rentrons ensuite à la maison mais je la laisse passer la porte seule, retenant Gaëlle par la main en refermant le battant. Ma fille doit certainement être en train de tout raconter à sa grand-mère en ce moment même donc j'estime avoir au moins un quart d'heure de libre.

Je pose mes deux mains sur les joues de la jeune femme face à moi pour prendre son visage en coupe.

- Bonjour toi, souris-je avant d'embrasser chastement ses lèvres.

- Salut.

Je passe ensuite mes bras autour de sa taille et l'attire près de moi afin de lui confier quelque chose.

- C'est la première fois qu'on sort tous les trois, et tu sais quoi ?

- Quoi ?

- J'adore ça.

Son sourire s'étire jusqu'à ses oreilles avant qu'elle ne me réponde.

- Moi aussi. Ta fille est trop marrante. Ça me fait toujours bizarre de me dire qu'elle est ta fille, mais je finirai bien par m'y habituer, pas vrai ? Et puis, elle est adorable.

- J'aimerais lui dire la vérité, je te le jure, mais j'ai peur qu'elle ne comprenne pas, ou qu'elle m'en veuille. Elle m'a déjà parlé de belle-mère et d'amoureuse que je pourrais avoir, mais il y a une différence entre en parler et y faire face.

- Je sais, Nathan, répond-elle en passant ses mains sur ma nuque. Ça ne fait que trois semaines qu'on est ensemble et elle ne m'a vue que deux fois. Il vaudrait peut-être mieux d'attendre encore quelques temps.

- En effet. C'est pour ça que j'ai une idée. Si tu es d'accord, j'aimerais qu'on passe un peu plus de temps tous les trois pour qu'elle apprenne à te connaitre et vis versa.

- Bien sûr que je suis d'accord, me sourit-elle avant de déposer un baiser sur mes lèvres. J'ai envie de te voir plus souvent, alors même si on devra se cacher devant Elya, ça me va totalement.

Elle est tellement compréhensive vis-à-vis de ma situation, ça me surprend énormément. Accepter ma fille est la chose la plus importante à mes yeux, et elle y parvient pour le moment, ce qui me réjouit au plus haut point.

- On peut commencer maintenant, alors ? lui demandé-je.

- Qu'est-ce que tu me proposes ?

- Tu veux manger avec nous ce soir ?

Elle acquiesce vivement et après un dernier baiser, nous entrons dans la maison. Ma mère et Elya sont sur le canapé et j'entends ma fille parler avec engouement. Elle a bientôt terminer son histoire ; elle en est au moment où elle s'est mis de la chantilly jusque dans les cheveux au stand de gaufres. Encore quelques minutes et elle met un point final à son récit.

Gaëlle en profite pour saluer ma mère et je lui demande si ça ne la dérange pas que ma petite-amie dîne avec nous. Elle m'assure que ce n'est pas le cas, et Elya m'affirme être d'accord elle aussi, après avoir insisté pour faire un jeu de cartes. Ce que nous faisons puisque Gaëlle accepte immédiatement.

Nous jouons trois parties de bataille que je remporte avant que ma mère ne parte préparer le repas et qu'Elya décide de s'amuser avec Polly dans sa chambre. Je me retrouve donc seul avec Gaëlle, dans le salon.

- Tu n'es pas obligée de faire tout ça, tu sais, lui dis-je lorsque nous ne sommes que tous les deux.

- De quoi tu parles ?

- D'accepter tout ce qu'Elya propose.

Je ris nerveusement en repensant au fait que moi aussi, j'agis de la sorte. Je cède à tout ce qu'elle de me demande depuis sa naissance. Avant même qu'elle ne commence à parler, je me pliais à ses quatre volontés. Heureusement, ma mère a su me freiner un peu et m'expliquer que ce n'était pas parce que j'interdisais quelque chose à ma fille que je serai un mauvais père. Au contraire. Alors j'essaie de lui dire non quelques fois. Ça me fait mal au cœur lorsque je la rends triste, mais selon Maman, c'est pour son bien. Et je lui fais entièrement confiance.

- Je fais ça parce que j'en ai envie, avoue-t-elle sérieusement. J'ai une petite sœur, tu sais. Je sais comment fonctionnent les enfants.

- Je crois me souvenir que ta sœur est légèrement plus âgée, non ? rétorqué-je amusé.

- Seulement de neuf ans. C'est la même chose.

Elle balaye son argument d'un geste de la main et me sourit avant de m'embrasser la joue. Je regarde autour de nous et, en constatant que nous sommes toujours seuls et que le rire de ma fille résonne depuis l'étage, je me penche vers Gaëlle pour capturer ses lèvres des miennes. Elle se rapproche de moi afin de pouvoir répondre avec ardeur à mon baiser, passant ses bras autour de mon cou.

- Est-ce que tu...

La voix de ma mère nous fait sursauter tous les deux et Gaëlle s'écarte immédiatement de moi, les joues rouges écarlates.

- Pardon, je suis désolée ! s'exclame ma génitrice très gênée. Je voulais seulement vous demander si des steaks de bœuf vous allait pour ce soir.

- Oui, très bien, réponds-je spontanément.

Elle se tourne vers ma petite-amie pour attendre sa réponse mais comme celle-ci ne la regarde pas, elle ne répond pas. Je lui donne un léger coup de coude pour la faire réagir.

- Oui c'est parfait. Merci !

- D'accord. Je m'en vais alors. Continuez ! s'écrit-elle en souriant.

J'éclate de rire, bien qu'embarrassé, et m'excuse auprès de Gaëlle.

- Désolé, elle n'est pas toujours comme ça.

- Qu'est-ce que tu en sais ? C'est la première fois que tu ramènes une fille chez toi, me défie-t-elle amusée.

- C'est vrai. Je vais donc rectifier ce que j'ai dit : j'espère qu'elle ne sera pas toujours comme ça !

Je sais que ce sera le cas. Elle me la dit. Elle est sincèrement heureuse pour nous deux. Pour moi, plus précisément. Je n'ai jamais eu de petite-amie - dont la relation ait mérité que j'en parle à ma famille - alors elle sait que tout ça compte pour moi.

Elle sait à quel point Gaëlle compte pour moi et combien je l'apprécie. Elle ne gâcherait ça pour rien au monde, et moi non plus.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top