Chapitre 4 - Lia

«Lia, debout on est lundi !» me cria ma mère depuis le couloir.

Je me forçai à franchir la distance qui séparait mon lit de la salle de bain, chaque pas me soutirant un hoquet de douleur. Je n'étais pas allée à l'école du reste de la semaine, après que ma mère m'ait trouvée étendue sur le goudron détrempé d'une ruelle sans nom mercredi dernier. Pendant ces 4 jours de repos, seules les contusions de mes bras et de mes épaules avaient eu le temps de guérir, et le bas de mon corps était fourbu et peu réceptif.

Je passai autour de mes yeux une quantité anormale de fond de teint, réussissant presque à masquer le reste de bleu tenace qui s'accrochait à mes joues. Je retirai mon bas de pyjama avec précaution, et grimaçai quand j'aperçus les traces violettes et gonflées qui recouvraient mes jambes habituellement minces et bronzées. J'enfilai alors un collant noir avec délicatesse. Malheureusement, je sentais qu'il me faudrait un moment avant que je ne puisse remettre de short.

Il fallait que j'aille doucement, car le moindre mouvement trop brusque m'arrachait un cri étouffé. Je finis enfin de m'habiller, enfilant un T-shirt rouge avec mon collant noir, et rejoins ma mère avant de prendre le bus. Elle m'embrassa le front et me recommanda d'être prudente, avant de me laisser partir, mon sandwich quotidien dans la main.

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«Lia Charity, votre absence a été justifiée. Bienvenue au lycée Godot.»

Je me dirigeai vers le stade pour mon premier cours de la journée: sport. Je n'avais aucune idée du sport que nous allions pratiquer, car M. Pitchett aimait les surprises. Je priais silencieusement que nous aurions ping-pong, le seul sport qui n'engageait que les bras et les épaules.

Bien sûr, ce n'était pas le cas. Lorsque M. Pitchett nous annonça la discipline qu'il attendait de nous, je sus que je n'avais pas fini de souffrir. Un regard sur la paroi d'escalade qui s'offrait à nous et mon cœur rata quelques battements.

J'enfilai mon baudrier et mes chaussons et m'arrimai solidement à la corde, prenant de profondes inspirations pour calmer mon petit cœur sensible. J'adorais l'escalade, mais c'était un sport TRÈS physique et je doutais être capable d'arriver jusqu'en haut.

Finalement, je trouvai un arrangement. Je me décidai à n'utiliser que mes bras pour me hisser tout en haut de la voie. Je faillis décrocher de justesse plusieurs fois, mais j'arrivai sans encombre en haut, où je vis par la fenêtre un signal qui me glaça le sang.

Une colonne de fumée rouge s'élevait haut dans le ciel. Je connaissais ce signal, mais je ne m'attendais pas à le voir apparaître de sitôt. Maintenant, il fallait que je trouve un moyen de m'éclipser discrètement pour entrer en contact avec les services secrets de Diphékos.

Je m'agrippai du bout des doigts au rebord du mur et utilisai mes bras douloureux pour me propulser en avant, atterrissant brutalement sur le sommet du mur. Je m'empressai de détacher mon nœud de 8 et entrouvris la fenêtre tout juste assez large pour laisser passer ma mince silhouette. Je contrôlai ma chute jusqu'en bas, où j'atterris sur mes jambes avec un grognement sourd, m'arrêtant une seconde pour tenir mon genou à deux mains avant de continuer.

J'arrivai en trombe chez moi, et fonçai directement vers la salle blindée derrière la cuisine. Ma mère y était déjà, assise dans son fauteuil roulant. M'ayant entendue arriver, elle pivota vers moi, l'air anxieuse.

«Lia, ils pensent que c'est l'heure,» me dit-elle.

Mon visage se décomposa à vue d'œil. Toute ma vie, j'avais redouté ces paroles, depuis qu'on nous avait envoyées ici, en fait. C'étaient les paroles qui annonçaient le début de ma mission, les paroles qui nous informaient que la fin était proche, que Fluxel avait enfin décidé d'exécuter ses plans de conquête sur Diphékos. Je connaissais par cœur ma mission: écouter, neutraliser. Essayer de glaner des informations mine de rien tout en détruisant tout ce qu'il était en mon pouvoir de détruire.

«Maman, je ne peux pas...» je m'étranglai.

Sans un mot, elle prit une de mes mains dans la sienne, toute petite et frêle, et commença à me frotter le dos avec l'autre main de façon rassurante, avant de jeter sur moi un journal de la semaine dernière que je n'avais jamais vu et que je rattrapai par pur réflexe.

Je compris aussitôt que ce n'était pas le moment de rigoler: le gouvernement Fluxelien avait le prétexte parfait pour conquérir Diphékos, grâce à l'attentat d'un gang de Diphékiens.

Soudain, les écrans géants dont étaient recouverts les murs de la salle s'allumèrent pour la première fois en 10 ans.

« Lia Charity, ton tour est venu de rétablir la paix dans ce monde. Rappelle-toi de ta mission. Sauve ta nation. Bas-toi pour la liberté, celle de tout un peuple, de toute une culture. Écouter, neutraliser. Ton pays est avec toi, Lia Charity. »

Quand le président eut fini, les écrans s'éteignirent. Ma mère me jeta un regard désolé. Je savais qu'elle ne se pardonnerait jamais de m'avoir imposé ce poste malgré elle. Quand nous avons déménagé en Fluxel, c'était son travail, mais j'avais dû prendre le relais il y a quelques années, lorsqu'elle fut immobilisée dans son fauteuil roulant. Pendant quelques mois, nous avions craint pour sa vie, mais elle était une combattante et s'en était sortie.

Ma décision était prise, j'opèrerais ma première opération de sabotage vendredi, histoire de donner à mes contusions le temps de guérir totalement. Je commencerais par quelque chose de mineur, une station de bus, et taguerais le mur.

«Bonne nuit maman,» lui soufflai-je en rentrant dans ma chambre.

(....)

NDA: Coucou! Un chapitre un peu plus actif, comme je vous l'avais promis !
Le chapitre 5 va être assez actif aussi, et à partir de là.... suspense....
C'est enfin vendredi, donc je vous souhaite à tous le meilleur week-end possible!!!
À la prochaine ❤️

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