Le lendemain, en soirée, Eliott était chez lui et commençait à se préparer à manger en repensant au récit qu'avaient fait les membres du collectif sur la manifestation. Lui n'était pas venu, manifester le jour même de son procès étant une bien mauvaise idée. Ils avaient ainsi débarqués dans le hall du ministère progressivement, descendant par petits groupes par l'entrée des visiteurs puis s'y dispersant, banderoles réduites. Quand environ deux cent personnes furent descendues, elles se rassemblèrent et se mirent à protester contre le procès, déployant les banderoles et lançant divers sortilèges faisant apparaître des pleines lunes flottant dans l'atrium. Après plusieurs minutes de désordre, ils transplanèrent presque en même temps, avant qu'un quelconque débordement ne puisse avoir lieu, laissant flotter les lunes. Eliott souriait doucement, songeant à la colère noire dans laquelle était certainement entrée Joanna, quand on toqua à la porte.

Il se leva, un peu méfiant, et préféra prendre sa baguette avec lui, puis alla ouvrir. Il tourna la clef dans la serrure puis regarda par l'entrebaillement après avoir abaissé la poignée. Dehors se trouvait un jeune homme, peu éclairé par les lumières de la rue alors qu'il faisait déjà nuit.

« Salut Eliott... Je peux entrer ? »

Eliott haussa les sourcils puis ouvrit la porte avant de se reculer pour le laisser passer. Il avait environ le même age que Eliott, d'origine asiatique, un peu élancé, avec de courts cheveux noirs.

« Je peux déposer min manteau quelque part ?

- Oui oui, attend... Sur le porte manteau là. Et puis enlève tes chaussures tant qu'à faire.»

Le jeune homme s'éxecuta tandis que Eliott fermait la porte. Ils se dirigèrent ensuite vers le salon.

« Tu voudrais boire quelque chose ? J'ai un peu de thé.

- Oh pourquoi pas oui !»

Eliott hocha la tête et alla dans la cuisine tandis que le jeune homme s'asseyait dans un des fauteils en déposant sa besace à côté, avec un air légèrement gêné, comme si venir ici le rendait inconfortable. Eliott revint quelques minutes plus tard avec deux tasses de thé, dont une qu'il tendit à son visiteur, puis s'assit et le regarda quelques instants avec le même air un peu gêné puis demanda :

« Alors Brendon, qu'est-ce qui se passe ?

- Le boulot Eliott, c'est pas passé inaperçu la manif au ministère aujourd'hui. Et moi j'ai un avantage sur les autres journalistes : je connais ton adresse.»

Eliott but une gorgée puis demanda, légèrement agacé :

« Alors tu viens pour ça seulement ?

- Pour tout te dire ça fait un bail qu'on ne s'est pas vu, alors j'ai sauté sur l'occasion pour venir rendre visite. Mais évidemment, j'ai un article à écrire. Du coup, tu es vraiment devenu...

- Oui ?

- Je.. Enfin, un loup quoi. C'est vrai ?

- Oui. J'ai été mordu il y a deux mois.

- Oh et... Comment tu vas ?

- Pas terrible figure toi. Mon père ne veut plus me voir et Martin me tuerait s'il pouvait.

- Oulah, je les en pensais pas capable.

- Tu penses que moi je m'en doutais ?

- Non t'as raison c'est idiot. Tu aurais dû m'en parler, je me fiche bien que tu te fasses mordre moi.

- On s'est pas vu depuis presque huit ans maintenant. La première chose à laquelle je pense quand je deviens un loup garou c'est pas vraiment de reprendre contact avec mon ex. »

Il soupira.

« Désolé, je sais pas pourquoi je suis si sarcastique aujourd'hui.

- Franchement je vais pas te le reprocher, vu tous tes problèmes. Je me suis renseigné sur le procès, tu sais que c'est pas banal ? Kader Al-Mansur ! Et puis comme témoin Emily, ta meilleure amie... Ou copine maintenant ?

- Meilleure amie. Ça change pas. »

Bredon rigola un instant :

« Toujours là pour faire perdre les paris de ceux qui vous casaient ensemble même après tant d'années ! Et puis sinon, un procès contre Joanna Hunting ! J'ai lu le résumé, c'était... Tendu visiblement. Elle est si affreuse qu'elle en a l'air ?

- Tu verrais, encore pire.»

L'atmosphère se détendait progressivement entre les deux hommes, puis Brendon demanda :

« Du coup, j'ai été chargé d'écrire un article sur ce qui est arrivé pour la Gazette de demain. J'ai déjà fait une grosse partie du travail, mais j'aurais voulu idéalement savoir si c'était possible d'avoir quelques mots de ta part. Et puis, si tu pouvais relire mon article, pour voir si je dis pas trop de bêtises ! Je préférerais éviter de faire une bourde, vu comment c'est tendu en ce moment avec ce sujet.»

Eliott le regarda en hésitant, puis demanda :

« Je peux lire d'abord ? »

Brendon hocha la tête et sortit un parchemin de sa besace avant de le tendre à Eliott qui le prit avant de le lire en détail, tentant de bien tout saisir malgré les retouches et flèches pointant dans diverses directions. Quand il eut fini, il le redonna à Brendon, qui le rangea, puis finit son thé avant de s'assoir au fond de son fauteil. Il réfléchit un instant.

« Déjà, si jamais tu savais pas, dans les "quatre aides" qu'a eu Joanna, il y a Martin.

- Oh... Désolé, je ne peux pas en parler autrement que les aides, le procès c'est elle contre toi, et si je commence à insister sur un nom sans raison, ça va se voir que tu as relu. Mais je ne savais pas que Martin avait été si loin... À Poudlard c'était pas le genre !

- Personne n'est jamais "le genre" avant de te traiter de velu, pourtant regarde ma vie. J'ai plus grand monde. Oh et mon emploi !  »

Il se massa les tempes :

« Avec tout ça Rolf va savoir. Bon, tant pis je suppose. Il aurait fini par savoir de toute façon.»

Il souffla, agacé, puis reprit :

«Bref, à part ça c'est pas mal. Évite le terme Loup Garou peut-être, c'est pas hyper professionnel, limite insultant en fait quand c'est pas un loup qui l'utilise... Prend plutôt lycanthrope. Mais sinon c'est pas mal. J'ai pas grand chose de plus à dire en fait. Ça ferait tâche et puis pour moi c'est peut-être mieux de rien dire ? »

Brendon haussa légèrement les épaules puis dit :

«Liam O'Maley, le type qui dirige ton collectif, a demandé une espace pour parler et il l' a reçu donc dans quelques jours y aura des revendications dans la Gazette de toute façon.

- Parfait alors. Et sinon, toi comment ça va depuis le temps ?

- Oh ben tu vois : je suis passé de Sorcière Hebdo à la Gazette donc je suis assez content. J'ai un copain depuis environ six mois, tout roule à ce niveau. Et j'ai emménagé dans Londres, aussi. Tu viens quand tu veux, je te laisserais mon adresse.»

Eliott hocha la tête et sourit légèrement :

« Content de savoir que tout va bien alors, ça fait plaisir de te voir après tout ce temps.

- C'est réciproque. Bon, je dois y aller, j'ai un article à finir pour la Gazette de demain.»

Il se leva puis remit son manteau et ses chaussures, tandis que Eliott l'accompagnait dans l'entrée. Les deux jeunes hommes se serrèrent la main et Brendon dit gentiment :

« Bon, prend soin de toi Eliott. Et fais pas gaffe aux idiots, t'es un gars bien. On se revoit quand tu veux.

- À la prochaine alors. Merci d'être passé.»

Brendon fit un V avec les doigts avant de sortir. Eliott regarda la porte un instant, ne s'étant pas attendu à revoir son ancien compagnon en ce jour déjà bien rempli.