Chapitre 6
Kurtis relâcha Eliana rebroussant le chemin, tandis que la jeune femme resta interdite devant ce qu'elle venait de voir. Henri avait reçu une balle en plein cœur et n'était pas mort. Un doute s'immisça dans son esprit ; comment un homme pouvait-il résister à ça ? On ne voyait ça que dans les films. Que ne savait-elle donc pas d'Henri ?
Le jeune fiancé la regarda sans un mot, puis rejoignit à toute vitesse Kurtis qui était entré dans la maison. Le clan se dispersa jetant un coup d'œil aux étrangers sur leur territoire. Oscar et Émile vint aux côtés d'Eliana et le balafré lui demanda surpris :
— Vous étiez au courant de ce tour de passe-passe ?
— Non. Secouant la tête. Mais je savais qu'il était spécial.
— Aucun chasseur n'a ce pouvoir ! indiqua Émile.
— Comment est-ce possible ?
— Nous n'en savons rien.
— Moi, je peux vous expliquer. Clama une voix.
Les trois acolytes se tournèrent et virent Mélanie, les mains croisées devant elle, comme si celle-ci attendait quelque chose. Eliana fronça les sourcils ne comprenant pas vraiment pourquoi, cette femme voulait lui parler. Ne devait-elle pas être en colère contre celle qui a fait détourner son fils de son clan ? Que s'était-il donc vraiment passé lors de son départ ?
Mélanie leur fit signe de les suivre, dans la maison coloniale, où ils trouvèrent refuge dans la cuisine. Les sbires de Connor restèrent sur leur garde n'acceptant aucun breuvage de celle-ci ; après tout, ils étaient des ennemis.
Assise face à face à la table de la cuisine, Mélanie regarda sa tasse de thé fumante devant elle, ne sachant pas par où commencer. C'était peut-être plus simple de commencer par le début, songea la femme. Elle leva les yeux vers Eliana qui la regardait avec impatiente ou plutôt irrités de ce silence.
— Notre ordre a vu le jour, en l'an 1880, lorsque la Déesse de la lune défit la malédiction qu'elle donna aux loups-garous des siècles plutôt. Notre principal but était de faire régner la paix entre les êtres surnaturels et d'en abattre lorsque c'était nécessaire. Mais certains anciens ont trouvé d'ouvrages relatant des rituels...
— Des rituels ? répéta Eliana incrédule.
— Ils choisissaient les femmes qui étaient potentiellement plus fortes...
— Pour faire quoi ?
— À enfanter... Des chasseurs encore plus forts, en fait ce que nous croyions. Lorsque je fus choisie, Kurtis m'a préparée et devant quelques membres du clan, nous avons passé à l'acte une nuit de pleine lune.
— Mais rien ne s'est passé comme prévu ? conclut Eliana.
— Non.
— Le temps s'est comme arrêté... Dans les vapes d'orgasmes et de la boisson qu'on m'avait fait boire, je réalisai à peine ce qui se passait. Je l'ai aperçu.
— Qui donc ?
— Je ne sais pas... Mais il était là... Nu comme un ver, la beauté d'un dieu, mais le regard aussi mauvais qu'un démon sorti des enfers. Il a pris possession de mon corps, je n'ai jamais connu de sensation pareille, rougit-elle. Au petit matin, personne ne s'était aperçu de ce qui s'était passé. On m'a crue folle pendant quelque temps, disant que la boisson m'avait fait halluciner. Je n'ai plus rien dit, jusqu'au jour de l'accouchement. Henri est né... mais il n'était pas seul. Un fœtus à moitié formé était dans une autre poche, c'était celui de Kurtis. L'homme de cette nuit-là est apparu comme par magie dans la chambre, prenant mon fils dans ses bras. J'ai vu de la fierté dans ses yeux, mais ceux de Kurtis étaient remplis de rage. Il ne prit pas que son enfant n'est pas survécu et menaça l'homme inconnu. Bien sûr, le père de Henri ne s'est pas laissé faire et a presque tué Kurtis sans même bouger le petit doigt. J'ai compris à ce moment-là que mon fils allait être spécial. Nous lui avons caché la véritable identité de son père pendant des années, mais il comprit que son...
— Son ombre... coupa Eliana.
— Vous l'avez vu ?
— Non, mais je me suis rendu compte qu'elle n'était pas toujours là. Une seule fois, elle est partie...
— Oui, cela dépend de ses émotions. Il s'est rebellé contre nous et je ne pouvais que le comprendre.
— Pourquoi ne pas lui avoir dit ?
— Kurtis ne voulait pas. Il ne voulait pas que le reste du clan ne sache que le rituel eût échoué. Celui-ci disait à tout le monde qu'Henri était son fils, mais ce n'était pas vrai. C'est mon fils qui a trouvé cette maison... C'est vrai, elle lui appartient...
— Mais...
— Lorsqu'il vous a rencontré... Il a tout abandonné. Son clan, son devoir, ses responsabilités. Henri était le meilleur entre nous tous...
— Et surtout le plus craint ! grogna Oscar.
— En effet... à cause de sa nature...
— Qu'est-il vraiment ?
— Seul, lui le sait. J'ai des doutes qu'il ne soit pas tout à fait humain. Vous l'aimez ? demanda-t-elle en regardant Eliana droit dans les yeux.
— Oui, plus que tout au monde. Je donnerai ma vie pour lui.
— Pourquoi êtes-vous venu ici ? Il a passé une dizaine d'années loin de nous, en se faisant passer pour mort et maintenant, Henri revient. Ce n'est pas normal.
— Ma fille a été enlevée... souffla Eliana.
— J'ai une petite-fille, se réjouissait Mélanie. Comment est-elle ? Comment s'appelle-t-elle ? À quoi ressemble-t-elle ?
— Euh...
— Ce n'est pas la fille de votre fils ! grogna Émile.
— Pardon !
Eliana baissa la tête, elle ne voulait pas engager cette discussion. Pour elle, Henri était bel et bien le père de Jade. Ils s'étaient rencontrés alors qu'elle n'avait que trois mois de grossesse et tout de suite, il l'avait acceptée comme sienne. Henri lui avait même donné son nom de famille, sans rien demander en retour. Bien sûr, celui-ci fut au courant de la nature secrète du véritable père de Jade, mais ne dit rien. Il aimait Eliana.
La jeune femme releva la tête, jetant un regard meurtrier à Émile avant de regarder Mélanie. Elle venait de lui confier la nature de son fiancé, peut-être devrait-elle en faire de même. Eliana poussa un soupir et dit :
— Pour moi, Henri est bel et bien le père de Jade. Ça n'a aucun doute. Il est avec moi, depuis le début.
— Mais...
— Il n'y a pas de, mais... Henri est son père et c'est tout.
— Ces loups sont ici dans notre demeure... Henri n'aurait jamais travaillé avec des chiens... Qui est le père de ta fille ?
— Ça ne te regarde pas, Mélanie ! surgit la voix d'Henri. Jade est ma fille. Pour ce qui est d'eux, désignant Oscar et Émile, ce sont des aides de plus.
— Tu as changé, Henri.
— Je n'ai pas changé. J'ai trouvé ma lumière auprès d'Eliana.
Eliana se leva pour aller dans les bras de Henri qui l'a cueillie avec un baiser. Elle remercia Dieu intérieurement, qu'il soit venu à son secours. La jeune femme n'avait rien demandé à celle-ci et ne voulait pas étaler sa vie privée à des inconnus. Sans regarder Mélanie, Henri dit à ses compagnons de route.
— Venez, je vais vous montrer vos quartiers.
Sans se faire prier, Eliana et les deux hommes suivirent Henri dans la partie Est de la maison. La jeune femme ne parla pas, mais trouva étrange l'ambiance qui y régnait. Une fois dans ses appartements, Eliana comprit qu'elle était dans l'ancienne chambre de son fiancé. Tout était parfaitement rangé et rien ne semblait avoir bougé depuis des années. Malgré cela, il n'y avait aucune poussière. La jeune femme s'avança tranquillement afin de faire le tour de la chambre et finit par s'asseoir sur le lit moelleux de son fiancé. La couleur sombre reflétait bien la personnalité de Henri et elle essaya de l'imaginer plus jeune.
— Pourquoi appelles-tu ta mère par son prénom ? demanda Eliana.
— Parce qu'elle ne s'est jamais comportée comme telle. Au moment, où elle sut que je n'étais pas de Kurtis, je n'étais pas assez bien.
— Mais tu as les laissé vivres ici.
— Le clan avait besoin d'une maison pour vivre.
Henri enleva son t-shirt et Eliana en profitant pour l'observer. L'impact de balle lui avait laissé une cicatrice violacée près de son cœur. Son corps fut recouvert de sang et la jeune femme grimaça. Elle avait en horreur.
— Je vais aller me doucher. Tu m'accompagnes !
— Non, je ne préfère pas.
— Comme tu veux ! haussant les épaules.
Le fiancé disparut derrière une porte et la jeune femme resta assise sur le lit. Elle essaya de comprendre la nature de Henri, mais ne craignait pas pour sa personne. Celle-ci aimait celui qui partageait sa vie depuis une dizaine d'années et elle ne le regrettait pas. Elle attendit l'eau coulée et pour une raison inconnue, Eliana alla retrouver Henri dans la salle de bain. Celle-ci enleva ses vêtements avant de rejoindre son fiancé sous l'eau.
— Je pensais que tu n'allais jamais oser.
— Moi non plus. Répondit-elle faisant un sourire.
Eliana prit un gant de toilette et entreprit de nettoyer le corps de Henri minutieusement. Elle eut un sourire salace, mais ses actes ne dépassèrent pas ses pensées. Celle-ci préféra rester le plus droit possible afin de ne pas faire de vague. Henri enleva le gant de toilette afin de nettoyer sa jeune promise à son tour. Toutefois, là où sa main passa, il déposa un baiser sur la peau d'Eliana. Celui-ci s'attarda à ses seins ce qui fit sourire la jolie blonde. Henri tourna la jeune femme dos à lui, faisant parcourir ses mains vers l'entrejambe de sa fiancée. Elle poussa un gémissement au moment où elle sentit l'érection de Henri dans son dos. Henri s'amusa à caresser le clitoris d'Eliana qui arqua le dos.
— Ma douce Eliana, embrassant la base de son cou, tu es si.... Il la tourna vers lui. Tu es à moi.
— Oui, je suis à toi.
— Épouse-moi Eliana, souffla-t-il contre sa peau. Nous avons assez attendu.
Elle se recula pour regarder s'il était sérieux et ne vit aucun signe de mauvaise blague. Bien sûr, celle-ci rêvait de l'épouser depuis qu'il lui avait demandé en mariage, mais elle voulait partager ce moment avec sa fille. C'était hors de question que Jade n'assiste pas à ça.
— Lorsque nous retrouverons Jade, je te promets que nous nous marierons.
— Tu seras à moi, pour toujours.
— Oui, pour toujours. Sourit-elle.
À cette réponse, Henri plaqua le corps d'Eliana contre le mur de la douche, en se frottant contre elle.
— Tu es sur Henri, demanda-t-elle d'une voix mielleuse. Nous ne l'avons jamais fait sans protection.
— Nous ne sommes plus des enfants Eliana.
— Tu sais... Il y a des risques.
— Aucun risque n'est trop beau pour toi... Roucoula-t-il.
— Nous n'en avons jamais parlé...
— Peu importe... savourons ce moment.
Henri souleva les jambes d'Eliana, s'introduisant en elle, sentant sa chaleur autour de son membre. Il donna des coups de reins qui les firent gémirent tous les deux. Eliana comprit à ce moment-là qu'elle comptait vraiment pour lui.
***************
Une heure plus tard, Alexander et sa tante Liev quittèrent le territoire en direction de la frontière canado-américaine. Ils prirent leurs formes lupines en dehors de la réserve pour ne pas faire peur aux villageois, courant à toute allure. Ça faisait un moment qu'Alexander rêvait de fouler les terres qui l'avaient vu grandir sous sa forme animale. Peu d'endroits encore sauvages subsistaient et il fallait toujours faire attention aux humains qui pouvaient s'aventurer par mégarde.
Alexander contempla sa tante, se demandant à qui elle ressemblait. On avait souvent vanté la ressemblance que celle-ci avait avec son arrière-grand-mère, mais celui-ci ne l'avait jamais vu. Peu de gens ou de loups connaissaient où ceux-ci se cachaient et pourquoi ? Même son grand-père fut une énigme, le voyant qu'une a deux fois par année.
Liev s'arrêta, forçant son neveu de faire pareil. Elle regarda les alentours avant de hurler d'une manière peu commune. On aurait dit un vulgaire loup. Sur leur droite, une masse grise fonça vers eux, plus qu'elle se rapprochait, plus celle-ci devenait plus petite. Un Canis Lupus, l'appellation scientifique donnée par les humains afin de différencier les groupes animaux, fit une révérence une fois devant eux. Alexander ne comprit pas le dialecte, ne devrait-il pas pourtant le comprendre ?
Le jeune homme vit le petit loup faire un signe de la tête avant de les inviter à les suivre. Sans se poser de question, Alexander suivit le guide en compagnie de sa tante. Ils s'enfoncèrent dans une forêt dense et lugubre avant déboucher dans une clairière presque vierge. Sans crier gare, Alexander se trouva plaquer au sol par un autre loup noir aussi costaud que lui. Sonné, il ne put distinguer si c'était un mâle ou une femelle. Celui-ci se releva en dégageant les dents, mais surtout ne comprenant pas pourquoi sa tante restait là, sans rien dire.
Un autre loup vint lui montrer ses dents à Alexander et ce fut, à ce moment que Liev en profitant de prendre une apparence humaine afin de dire :
— Mère ! C'est un membre de notre famille.
La dernière arrivée se tut en faisant une grimace. Elle rejoignit son compagnon afin de le calmer et tous les deux prirent une apparence humaine. Alexander les contempla un instant, ces deux loups ne semblaient pas avoir plus que trente ans. Comment était-il possible de sembler si jeune, si ceux-ci étaient vieux ? Liev invita son neveu à reprendre forme humaine afin de montrer une forme de respect, mais celui-ci ne le vit pas d'un bon œil. Pour une fois, que le jeune loup ne fut pas le premier à montrer de l'hostilité, il fallait que celui-ci montre du respect. Il ronchonna en pivotant sa tête et Liev le lui grogna dessus, exaspérée de son comportement.
Il sentit une puissance s'immiscer en lui, l'obligeant à se transformer. Alexander ne saisit pas ce qui lui arrivait sur le coup, ce fut lorsque le jeune homme posa les yeux sur sa soi-disant arrière-grand-mère, qu'il comprit. Celle-ci était dotée de pouvoir qu'aucun loup de sa connaissance ne possédait. Alexander ne fut pas en mesure de se battre plus longtemps et reprit forme humain, malgré lui.
Alexander put lire de la surprise dans ses yeux, lorsqu'elle le vit nu devant lui. Non, ce ne fut pas par sa musculature, ni par son engin que celle-ci fut surprise, mais plutôt, par la ressemble frappante ; entre son mari et lui. Tout comme Killian, leur fils, Alexander ressemblait très portrait à James, mais seule sa taille les différenciait. James était beaucoup plus grand que celui-ci.
— Mère, Père, s'approcha Liev. Je vous présente votre arrière-petit-fils, Alexander.
— Tu ressembles beaucoup à ton grand-père. Dis émerveillé Lyra.
— Je ne vois pas de quoi vous parlez. Ronchonna ledit grand-père.
— Bien sûr. Levant les yeux au ciel. Quel est le plaisir de vous voir ici ? demanda celle-ci auprès de Liev.
— Nous avons quelques ennuis sur le territoire. Nous ne savions pas de quoi il en retournait, jusqu'à Alexander se pointe le bout du museau.
— Ah bon ! Je croyais que la réserve était sous la protection....
— Non, je ne parle pas des gens de la réserve, mais des gens de la meute.
James et Lyra se regardèrent en fronçant les sourcils.
— Que se passe-t-il ? questionna James.
— Disons que la pomme n'est pas tombée très loin des racines de l'arbre familial. Renchéris Liev en jetant un regard mauvais à Alexander qui baissa la tête.
— Tu pourrais parler plus clairement, non ! gronda la bête de James.
— Alexander a déterré, semblerait-il, une vieille querelle.
— Une querelle ?
— Entre vampire et loup.
— Ce n'est pas nouveau. Souffla James. Ils sont toujours dans nos pattes.
— Mais cette fois-ci, la querelle fait l'objet d'une discorde personnelle. Une personne dont vous avez été en guerre, bien avant ma naissance. Une personne qui vous a manipulé toutes les deux.
— Non ! c'est impossible.
— J'ai bien peur que si, mère.
— Allons chez nous. J'ai peur que même si le territoire est protégé qu'on puisse nous écouter.
Les quatre membres de la famille Wood se transformèrent afin d'aller dans la maison familiale qui jadis fut remplie d'enfants.
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