Devoir n°2 : Ilian Hensen


Je ne prends réellement conscience de ce qui se trame sous mes yeux que lorsque l'odeur de la chair brûlé parvint à mes narines. En levant les yeux, je la vois. Elle. Gémissante, les flammes courant sur sa peau. Son nom franchit mes lèvres dans un râle.

Et le sol s'ouvre sous mes pieds, m'engloutissant dans la Terre. Je ne me souviens que d'une chose : la chute sans fin.

Je m'éveille en sursaut, les draps collant à mon torse couvert de sueurs, les crocs à découverts. Je me surprends à chercher des yeux, une trace, même infime de flammes. Au lieu de ça, mon regard ricoche sur les lettres rouges d'un réveil indiquant six heures quarante-sept. Dans la pénombre, j'entends les battements de mon cœur affolé jouer des basses dans ma poitrine. L'obscurité me caresse, m'offrant un cocon où me blottir, mais c'est dommage que le réconfort n'a jamais fonctionné sur moi. J'arrache les draps, les rejette sur le lit, enfile un tee-shirt. Je vérifie que mon colocataire est encore dans les vapes pour sortir.

Je m'engouffre dans le couloir faiblement éclairé par la lumière des bougies. Un vent invisible s'amuse avec la flamme dansante au bout de la mèche. Les flammes, la peau calcinée de cette femme. Ses hurlements qui me traversent l'âme. Je fuis tout ça. Je tourne quelques temps avant de dénicher une sortie sur les jardins. L'hiver se voulait tardif mais à présent que la froideur et la brume perdure, je ne peux me plaindre. D'un pas rapide, je m'éloigne discrètement de la bâtisse, ombre furtive parmi les ombres. J'hume à plain poumons l'air frais de la nuit. Son sombre pouvoir qu'elle opère sur moi, cette attraction insupportable, cette attirance, cette tentation où l'on ne pourrait résister.

Un bruissement parvint à mes oreilles. Je souris avant de bondir et d'arracher le lapin à sa tanière. Il se débat entre mes mains, mes ongles s'enfoncent dans sa chair jusqu'à ce que ce fluide écarlate nimbe son pelage clair puis s'écoule goutte à goutte sur ma peau neige. En se débattant, il parvint à s'échapper de mon étreinte mortelle et disparait dans la forêt, sa petite queue blanche en l'air. Je porte les doigts à ma bouche. Ma langue lèche le doux liquide cuivré et j'en gémis de plaisir. Comment puis-je survivre sans l'instinct de chasse ? Ils tentent de nous l'ôter mais ne parviendront qu'à se heurter à un mur.

Je regagne l'école, du sang séché sous les ongles pour sel indice de ce que je viens d'accomplir.

Les premiers cours de la matinée sont ennuyeux à mourir. Les autres s'amusent entre eux et je profite de ce laps de temps pour les observer à ma guise. Aucune personne ne se différencie vraiment des autres. Toutes les espèces sont présentes, allant du sorcier pur au bâtard. Je déjeune en silence avec les camarades de mon groupe. Le premier cours intéressant se déroule à la serre où je m'amuse à provoquer cette Heather qui se croit plus forte que tous. Désolée, mon ange, mais je vais devoir te faire tomber de ton piédestal.

Le reste se poursuit à l'orée de cette forêt. Une dénommée Crystal me rejoint en pestant puis la prof nous désigne de petites boules bleues, des âmes des morts qu'il fallait attraper. Je tendis la main jusqu'à ce qu'Heather me percute de plein fouet.

-Je sais bien que je suis irrésistible Heather, mais ce n'est pas la peine de se jeter sur moi non plus.

- Tu n'es pas irrésistible, et si j'avais eu envie de le jeter sur toi, ça aurait été pour l'étrangler.-Pour m'étrangler? Fais attention, je mors.

Sur ce, je retroussais mes lèvres lui dévoilant mes crocs pointues, élégamment ciselés.

- Tu n'auras même pas le temps d'essayer.

Je feintais à droite, reposant tout mon poids sur ma jambe droite. Elle suivit le mouvement, l'ombre d'un sourire sur les lèvres. Je basculais mon corps sur la gauche et la pris de revers. Malheureusement pour elle, elle fut trop lente. Plaquant mon bras sur sa nuque, je l'attirais à moi, son dos contre mon torse.

-Combien de fois ai-je entendu cette phrase? Et combien de fois je les ai détrompées ? J'ai tué plus de vie que tu ne serais capable d'en compter. Des milliers probablement.

Ses doigts s'accrochèrent à mon bras, plongeant ses ongles dans ma chair. Elle haletait. Je sentis à nouveau ce frisson d'excitation me parcourir l'échine, d'avoir à nouveau le droit d'abréger une vie.

-Cette chose qui bat dans ton cou, c'est la jugulaire, sussurai-je en me penchant vers son oreille sans pour autant baisser la garde. En d'autres termes, ce qui te maintient en vie.

Mes canines effleurèrent sa peau délicate.

-Je pourrais plonger mes dents sous la surface de ta chair, pomper ton sang. Et je le ferais si lentement que tu entendras ta peau céder sous la pression de mes canines.

Ses yeux fixant le ciel reflétaient les nuages, semblable à du coton.

-Mais je n'en n'ai pas l'autorisation, pas vrai ? Je dois me contenter de prélever ce liquide vermeil sur des animaux. Mais je vais te confier un secret, Heather. J'ai déjà goûté au sang humain. Nous avons juste, ma soeur et moi, pris les précautions nécessaires. Nous l'avons liquidé, puis enterrer. Simple comme bonjour, n'est-ce pas?

Je resserrai l'étau autour de sa gorge.

-Je ne te connais pas suffisamment pour savoir quels méfaits ou non tu as commis avant de venir t'enfermer ici, mais je sais que tu te meurs à petits feux. L'envie te fuit, ton âme se perd et la vie t'abandonne. Tu es experte en magie, ma belle reine des glaces, plus qu'il n'en faut pour partir d'ici. Je pourrais te redonner le frisson d'interdit, comment tu pourrais gouter à sa merveilleuse sensation. Qu'en dis-tu?

-Effectivement, tu ne me connais pas assez. Sinon,tu saurais que je n'accepte jamais les propositions de ce genre. Et que....

Une lame sortit de sa botte et transperça ma jambe. Je serrais les dents pour contrôler la douleur.

- .... Je viens d'une famille riche. Très riche. Donc me payer des chaussures ayant quelques particularités, je le peux.

Petite sotte. Tu viens de signer ton arrêt de mort. Tes parents ne t'ont jamais dit de ne pas te mettre un vampire à dos ?

-Tu tiens à jouer? Alors on va s'amuser.

Je sortis à mon tour un poignard dissimulé sous les pans de cette idiote robe. Pivotant sur les talons, je me ruai sur elle, mon poing en avant. Elle se cambra, se préparant à riposter mais elle ignorait comment réellement se battre. Je me laissais retomber et lui fauchai les jambes, retenant une grimace de douleur là où sa lame avait entaillé ma jambe. Elle s'écroula à terre. En quelques secondes, je fus sur elle, le poignard en travers de sa gorge. Elle agrippa la pointe pour la déloger mais ne réussit qu'à se blesser. Une goutte de sang perla sur la pulpe de son index. Une goutte de sang d'un rouge si vif, si lumineux que j'en perdis la raison. L'odeur cuivrée m'assaillit les narines. Instinctivement, mes lèvres se retroussèrent sur mes canines qui se mirent à s'allonger perçant mes gencives. Je les avais toujours comparées à des instruments chirurgicaux précis, d'une élégance rare et fine. Je me penchai en avant immobilisant ses bras et jambes. Je ne pouvais plus me contrôler, les instincts du tueur et du vampire étaient de retour.

Elle avait peur. Et j'adorais inspirer cette sensation à ma proie.

Le sang avait ce goût merveilleux de l'impardonnable et du sacrifice. Heather se débattait mais je ne voyais plus que son sang. Cette odeur qui m'appelaient, que je sentais en songe.

Alors que je m'apprêtais à plonger mes dents dans son cou, des pics de glace émergèrent du sol. Flûte.

La glace me projeta dans les airs. Je rebondis sur le sol, pieds ancrés dans la terre, totalement désorienté. Le sang. J'avais failli envoyer balader toutes les règles au bout de la première journée. Au-dessus de nous, un éclair zébra le ciel, aussi électrique que l'air entre nous. Un filet de pluie tomba du ciel. En quelques secondes, il se transforma en crachin. La glace fondit alors que notre classe revenait des sous-bois en s'abritant. J'observais Heather à travers la cohue, le souffle court.

. J'avais réussi à percer la carapace de la reine des glaces, j'étais parvenue à la terrifier.

Cette blessure qu'Heather m'a infligée était méritée mais elle était loin de la culpabilité qui m'envahissait. Mais pourquoi s'était-elle coupée? Et ce sang... Je ne parvenais pas à me sortir cet arôme divin, si perfide qui m'appelait.

La prof nous donna rendez-vous dans le bureau de la dirlo. Holloway nous ouvrit la porte et en nous voyant tous les trois, elle nous laissa passer, s'écartant légèrement vers la droite.

Je restais silencieux. Que pouvais-je bien dire? Hé m'dame, vous savez c'est sa faute, si elle ne sait pas se battre correctement. Nan, dans ces conditions valait mieux se la fermer.

- Ces jeunes gens, ont enfreint la plupart des règles majeures de l'établissement. Et tout cela en un seul cours !

Elle resserra sa poigne.

- Ils se sont tous les deux battus, à mains nues, puis avec armes blanches et avec magie. Ils étaient tous deux en possession d'armes blanches et n'en avaient pas informé le personnel de l'établissement. Et ce jeune homme, à éloigné volontairement et surement avec préméditation, cette jeune fille présente, du reste du groupe, et à essayer de boire son sang.

Avec préméditation ? Elle me prenait pour quoi, celle-là ?

-Ce n'est pas tout à fait vrai. Je ne l'ai pas fait intentionnellement, en aucun cas, bien sûr. Nous nous sommes éloignés, c'est vrai, mais je n'avais pas pour but de faire d'elle ma victime. On discutait simplement lorsqu'une lame est jaillie de sa botte et m'a blessé. Je me suis défendue et c'est à son tour qu'elle s'est blessée. Mais ne vous inquiétez pas, elle m'a foutu une raclée. Plus de peur que de mal non?

Je croisai les doigts pour qu'elle sache discerner la vérité lorsqu'elle l'entend.

Il a aussi oublié qu'il a commencé en m'attaquant. Et que sa lame était une vrai capable de tuer.

- Vous voyez ?! Il possédait une véritable lame ! Et puis d'ailleurs, elle se tourna vers Illian, pourquoi vous êtes vous éloignés pour "discuter"? Vous étiez en cours je vous rappelle. Et je vous avais clairement dis de ne pas vous éloigner

-Je suis tombée, c'est tout, et du coup je suis resté trop loin.

-Elle m'a percuté.

Holloway remua la tête avant de croiser mon regard. Un coup à la porte se fit entendre. Des élèves entrèrent, tous en faveur d'Heather. Pourtant, ce qu'elle annonça me pris au dépourvu.

-Je ne vais pas te dénoncer, pour cette fois. Tu as une deuxième chance. Je ne veux plus entendre parler d'une bagarre dans laquelle tu es impliqué. Tu déposeras également toutes tes lames dans mon bureau ce soir, cela va de soi. Je vais également décider avec le professeur Copeland d'une horaire pour laquelle il t'apprendra à te contrôler davantage. Tu assisteras aussi Dame Tate dès qu'elle te le demandera pendant un mois, et tu sera en colle samedi après-midi. Oh, et inutile de préciser que je ne voudrais pas que cette affaire s'ébruite, dans ton propre intérêt.

-Je sais tenir ma langue.

Je fis un clin d'œil discret à Heather avec un sourire enjôleur. Que voulez-vous, les habitudes ont la peau dure !

Après l'entrevue avec la directrice, je m'étais inconsciemment dirigé vers la salle commune des Serdragon. J'ignorai ce que je comptais faire après ce que j'ai fait à Heather. En tout cas, je ne passais plus inaperçu, mon nom était sur toutes les bouches. Rageusement, j'avais ôté la robe de sorcier. Je ne me sentais pas plus sorcier après un jour de cours, j'étais seulement un tueur, un assassin à cause de ma nature. Blouson en cuir, jean noir avec bottes de motard et les cheveux en bataille. C'était comme ça que je me sentais le mieux, pas déguisé en robe. La lame d'Heather avait percé mon pantalon, une tâche de sang nimbait le tissu pas suffisamment noir pour la dissimuler.

Lorsque je pénétrai dans la salle, les conversations se turent et les regards convergèrent vers moi.

Certains me regardaient avec pitié d'autre avec curiosité.

-Ne vous gênez pas pour moi, maugréai-je.

-Déjà à cran la première journée ? Bon courage pour la suite, dit une fille assise sur un sofa.

-Ouais, j'ai failli donner à une Chimérique un allé simple pour l'Enfer, ricanai-je.

-Si c'est pour arrêter de se faire agresser les yeux par leurs robes jaunes criards je te soutiens.

Je ne pus retenir un sourire. Je secouai la tête et m'enfermai dans ma piaule.

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