*Modifié le 14.04.22*

— Confirmez-vous qu'un meurtre brutal vient d'être perpétré au sein même du bâtiment principal de l'A.C.M.C.N ?

— D'après une source anonyme, des métamorphes seraient responsables ?! C'est vrai ?

— Ce crime est-il en lien avec les horribles meurtres rituels que, vous et la police de cette ville, essayez à tout prix de dissimuler à la population ?

Les questions fusaient, toutes plus précises et agressives les unes que les autres. Les journalistes nous encerclaient, nous coupant toutes retraites, la porte de l'issue de secours venant de se refermer derrière nous dans un claquement sec et définitif. Worth, d'ordinaire calme, posé et sûr de lui dans les situations extrêmes, semblait, pour une fois, se laisser dominer par la colère.

— Pas de commentaire ! grogna-t-il en brandissant sa plaque aux nez des vautours qui se rapprochaient.

— Mademoiselle Moore est impliquée ?! tenta une brunette en tailleurs en nous balançant son micro sous le nez.

— On vous a dit, pas de commentaires ! m'écriai-je à mon tour d'une voix forte et sonore en sortant la petite carte plastifiée de ma poche pour la brandir sous le nez des rats qui nous acculaient.

Les flashs crépitèrent et le mitraillage de question reprit de plus belle. Worth, poussant un grondement agacé, commença à tenter de nous frayer un passage dans la foule de plus en plus dense.

— Vous faites partie de la police maintenant ?! s'exclama une autre femme brune à lunettes, comme si c'était la meilleure blague de l'année.

— Êtes-vous suspecte dans ce meurtre, Mademoiselle Moore ?

— Votre présence signifie-t-elle que c'est bien votre secrétaire qui a été retrouvée là-haut ? A-t-elle vraiment été violée ?

Cette dernière question me fit comme un uppercut à l'estomac. Non ! Ces souvenirs ne devaient pas m'atteindre, pas maintenant... jamais ! La main de l'inspecteur saisit soudain la mienne, forte et rassurante au milieu de ce chaos. Il me jeta un bref regard emplit d'un tel maelstrom de sentiments que je baissai aussitôt les yeux, rompant le contact la première.

— Pour la dernière fois, pas de commentaire ! Dégagez le chemin !

Tandis qu'il m'entraînait lentement derrière lui, j'essayai de me concentrer sur l'instant et le drame actuel. Rien dans ce que j'avais vu là-haut, ne m'avait laissé penser à une agression sexuelle, pourquoi cette question dans ce cas ? Prêchait-il le faux pour savoir le vrai ? D'où venaient toutes leurs infos ? Comment pouvaient-ils en savoir autant ?

« Chef vous êtes où ? Besoin d'un coup de main ? » retentit soudain la voix d'Allistaire par le récepteur radio de Worth, dans un concert de parasites grésillant.

— Ce n'est pas trop tôt ! lui répondit-il en bougonnant. Porte de secours est, à l'arrière du bâtiment. Amenez des renforts !

— Tous ces meurtres ont-ils un rapport avec le projet de loi anti-métamorphes qui doit être présenté au parlement prochainement par Brandon Frye, le porte-parole du mouvement politique A.S ?

— Cet homme est un activiste et en aucun cas un homme politique. Son soi-disant parti n'a aucune légitimité et n'a d'ailleurs pas été approuvé par le parlement ! ne pus-je m'empêcher de répondre dans un grondement féroce, m'attirant un regard noir de Worth alors que nous nous dégagions enfin.

— J'ai bien peur que vous ne fassiez erreur, me répliqua le journaliste dans un ricanement. Monsieur Frye est officiellement invité au gala de ce soir, en tant que représentant politique officiel de son nouveau parti. Vous avez une longueur de retard, pour une fois, mademoiselle Moore ! cria-t-il à mon intention alors que Worth m'entraînait à l'écart au pas de course.

Au moment où nous tournions au coin du bâtiment, certains journalistes tenaces sur nos talons, Allistaire, Monroe ainsi que plusieurs policiers en uniformes arrivèrent en courant.

— Interpellez tout le monde ! leur ordonna-t-il d'un ton pas commode, sa main enserrant toujours la mienne en ralentissant à peine l'allure.

— Pardon ? Vous voulez que l'on arrête des journalistes ! s'exclama Monroe, ses yeux écarquillés passant du visage de Worth à nos mains jointes. Vous savez bien que l'on ne peut pas faire ça !

— Comme témoins indirects, répondit-il en s'arrêtant enfin, si bien que j'en profitai pour m'éloigner de lui. Ils ont des informations qu'ils ne devraient pas avoir. Je veux connaître leurs sources. On se retrouve au commissariat pour le débriefing.

— Où allez-vous ? Vous ne nous avez encore jamais laissé en solo sur le terrain ! s'étonna Allistaire en me jetant un regard perplexe.

Apparemment, il semblait penser que j'étais la cause seule et unique du changement de comportement de son patron et il n'avait sans doute pas tout à fait tort ! Enfin, c'était plus précisément le lien qui existait entre nous qui était en train de nous bousiller le cerveau à tous les deux.

— Je dois éloigner Han... Mademoiselle Moore d'ici, elle est trop médiatique. Je suis sûre que des hélicos de la télé sont déjà en route ! Et puis, il faut bien un début à tout ! File-moi les clés !

Allistaire les lui lança sans faire de commentaire et nous rejoignîmes la poubelle banalisée qui nous avait amené ici, en sentant les regards désapprobateurs de ses hommes dans notre dos.

Contrairement à son habitude, il ne vint pas m'ouvrir la portière et claqua la sienne avec tellement de force que la poignée faillit lui rester dans les mains. Il mit le contact et démarra en un temps record, les mains crispées sur le volant.

— Si tu ne veux pas givrer tout l'habitacle, tu ferais mieux de te calmer, lui dis-je en constatant que le plastique bon marché commençait déjà à blanchir et l'air à se rafraichir.

— Comment ont-ils fait pour arriver si vite ? s'exclama-t-il en doublant rageusement une mamie qui se trainait sur la file de gauche.

— Allistaire n'avait pas dû les semer aussi bien qu'il l'avait cru...

— Tu crois vraiment à cette théorie ?

— Pas plus que toi apparemment ! Non, il les a prévenus ! Je te l'ai dit, il joue avec nous.

— Mais pourquoi ? C'est un métamorphe, ça n'a pas de sens ! On est à un tournant politique crucial pour une entente durable, tous ces meurtres odieux vont vous nuire.

— Et c'est exactement ce qu'il cherche ! lui répondis-je dans un soupir. Vous n'êtes pas les seuls à avoir vos extrémistes, nous aussi et ils sont beaucoup plus guerrier que politicien !

— Alors toutes ces horreurs ce serait juste pour empêcher la conciliation finale entre les humains et les métamorphes ?! Tu veux vraiment me faire gober ça ?

Je ne répondis rien. Worth n'était pas métamorphe et même s'il avait côtoyé notre univers durant un certain laps de temps, il ne pouvait pas vraiment appréhender toute la complexité de notre monde et de son fonctionnement. Kane était un métamorphe puissant, doublé d'un sociopathe dangereux et terriblement intelligent. Tout ce qu'il voulait il l'obtenait, par la ruse ou par la force. La seule vraie question à se poser était : pourquoi était-il revenu ? « Pour toi » me susurra ma conscience, me faisant frissonner alors que les souvenirs cherchaient à s'ancrer un petit peu plus encore dans ma mémoire.

La voiture stoppa brusquement dans un grincement de suspensions martyrisées, lorsque Worth se gara sur le parking défoncé du commissariat. Pressée de m'éloigner de lui, j'actionnai immédiatement la poignée pour sortir du véhicule. Un petit clic électronique audible et reconnaissable résonna dans l'habitacle, tandis que la portière restait close malgré tous mes efforts pour l'ouvrir.

— Tu joues à quoi ? Laisse-moi sortir ! lui ordonnai-je excédée, en me tournant vers lui dans un mouvement de colère.

— Je t'empêche de te sauver comme une voleuse. Je veux des réponses, me répondit-il d'une voix sourde, son regard intense assombrit par tout un tas d'émotions réprimées. Il t'a violé ?

Sa question, violente et intrusive, m'atteignit comme une flèche en plein cœur, me replongeant directement en enfer.

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Voilà, comme promis, un chapitre par semaine :-) J'espère que le rythme vous convient car pour le moment, je ne peux pas faire mieux, malheureusement ^.^

A très vite sur la suite ;-) Merci de me lire <3