Chapitre 29 - HARRY
Message de Louis : T'es où ?
Message à Louis : A la boutique... Tu me rejoins ?
Je n'ai pas besoin d'attendre la réponse. Je sais pertinemment que Louis est déjà en chemin pour venir me retrouver.
La nuit est tombée. Je suis assis sur le parquet fraîchement posé, éclairé par l'une des lampes dans le coin de la pièce. Tout est allé très vite : Katia avait pris les devants, le propriétaire du local avait réalisé les principaux travaux de remise en état et aux normes. Le dossier financier a été validé en un peu plus d'un mois.
Je regarde autour de moi, la couleur des murs (plume de paon comme ils l'appellent), les fauteuils moelleux qu'il reste à disposer, les tables en bois clair, les tabourets. Sur le comptoir, il y a les plantes que Katia a ramené tout à l'heure, de toutes les tailles, dans toutes sortes de pots. Je tourne mon visage vers la devanture et les stickers papillons blancs qu'Éléa a choisi. Tout le monde s'est investi dans cette nouvelle boutique. Elle est chaleureuse. A l'image des personnes qui m'entourent aujourd'hui.
Je profite du calme pour faire un peu le bilan de ma vie depuis un an. Quand je suis arrivé en juin l'année dernière, je me voyais juste reprendre la petite boulangerie du village, élever ma fille et profiter des jolis moments que nous aurions partagés.
Mais je suis arrivé, fraîchement séparé de Zayn, j'ai rencontré Louis qui a tout bouleversé dans mon cœur et dans ma tête. Je me suis fait agresser et j'ai dû affronter mes pires craintes, accepter d'être soutenu, épaulé. Aujourd'hui, je me lance dans ce nouveau projet avec Katia, ma meilleure amie. Sans elle, je n'aurais jamais franchi le cap de quitter Paris, de me lancer dans un tel projet professionnel.
Je n'ai aucun regret.
Je suis épanoui et serein. Simplement heureux.
Le verrou tourne et la porte s'ouvre, laissant entrer l'air frais de cette soirée printanière. Je sors de mes pensées et relève mon visage pour voir Louis entrer. Son sourire est contagieux. Je ne retiens pas mes lèvres qui s'étirent quand il s'approche de moi et s'assied à mes côtés. Il embrasse doucement ma joue, ses doigts glissant dans mes boucles.
"Il y a des fauteuils confortables et tu choisis le sol pour te perdre dans tes pensées !
- J'ai une meilleure vue d'ensemble ! je lui réponds avec un clin d'œil.
- Où est Éléa ?
- En haut avec Katia. Elle mourait de faim, tu sais !
- J'imagine ! il me répond en riant. Tu es bien songeur. Ça va ?
- Ouais. On a bientôt terminé. Il ne reste qu'à installer le mobilier exactement comme on veut et les produits non périssables.
- Tout est prêt. On va pouvoir profiter des quelques jours de repos avant l'ouverture et la saison estivale.
- Oui. Cheryl est passée tout à l'heure pour me donner un premier retour sur les invitations envoyées. Et Zayn m'a confirmé qu'il venait avec Gauthier et ses parents.
- Éléa va être contente !
- Elle va être super fière, oui."
La main de Louis glisse sur ma cuisse jusqu'à attraper la mienne et entrelacer nos doigts. Je cale ma tête contre son épaule et soupire d'aise.
Je n'oublie pas les années de bonheur partagées avec Zayn. Grâce à lui, j'ai fondé une famille. Nous serons toujours proches. Je n'imaginais pas rencontrer une autre personne si rapidement après ma rupture, mais Louis s'est imposé à moi. Dès le premier jour. Ce serait mentir que d'affirmer le contraire. Je me souviens parfaitement de ce matin où il est entré par la porte de service, la mine fatiguée et décoiffé, désespéré de devoir acheter des viennoiseries pour ses amis, encore un peu alcoolisés ; ses amis qui sont devenus les miens aujourd'hui. Nous en avons parcouru du chemin, lui et moi. Je me dis parfois que je ne mérite pas sa patience face à mon caractère et mes incertitudes.
Je caresse doucement son torse, ses pectoraux légèrement dessinés sous son t-shirt. Je relève mon visage vers le sien et ma main qui glisse le long de sa mâchoire pour l'inciter à me regarder. Nos regards s'accrochent, son sourire me fait flancher. J'embrasse ses lèvres avec tout l'amour que j'éprouve pour lui.
"Je t'aime..." je murmure contre ses lèvres.
Louis me rend mon baiser et entoure ma taille de son bras pour rapprocher nos corps. Mon cœur tambourine dans ma poitrine, et l'envie de sentir Louis contre moi, en moi, se propage dans tout mon être.
"On va chercher Éléa et on rentre ?
- Si tu veux oui.
- Tu restes ce soir ?"
Il me répond dans un sourire et je constate, avec plaisir, que nous sommes sur la même longueur d'ondes.
*
* *
L'inauguration du salon de thé a lieu dans cinq jours. Nous avons décidé de fermer la boulangerie pendant une semaine pour nous permettre de tous nous reposer avant l'ouverture simultanée des deux boutiques et l'arrivée des premiers touristes dans notre jolie région.
Depuis mon agression et mon arrêt de travail, c'est le premier dimanche matin que je passe à la maison. Je savoure le moelleux du matelas et de la couette qui me couvre. Mais surtout, je m'abandonne aux douces caresses de Louis.
J'ai beau être en congés, mon horloge interne me réveille à l'aube. J'ai eu du mal à retrouver le sommeil alors j'ai doucement réveillé Louis. Je ne regrette pas. Il m'a fait l'amour avec langueur, dans un silence presque religieux, mordillant ma peau pour retenir ses gémissements.
Nous sommes accrochés l'un à l'autre, le visage de Louis calé contre ma poitrine, mon bras enlaçant ses épaules, mes doigts dessinant des petits cercles sur son bras.
Deux petits coups sont tapés sur la porte de ma chambre, avant qu'elle s'ouvre doucement. J'aperçois la petite tête de ma fille dans l'encadrement de la porte.
"Vous dormez ? demande-t-elle à voix basse.
- Non ma puce. Qu'est-ce que tu veux ?
- Je peux venir ?
- Bien sûr" et je remercie le ciel d'avoir pensé à nous rhabiller après nos ébats.
Éléa pénètre dans la chambre, fait le tour du lit et grimpe de mon côté. Elle embrasse ma joue et s'appuie sur moi pour embrasser celle de Louis.
"Bah alors, minette, tu es déjà réveillée ?" lui dit Louis en se détachant de moi pour lui faire une place entre nous.
C'est la première fois qu'Éléa nous rejoint dans le lit. Elle le faisait tout le temps avant, avec Zayn et moi, puis ici quand je ne travaillais pas. Mais depuis que Louis passe plusieurs nuits à la maison, elle ne le faisait plus. Ils s'entendent très bien tous les deux, mais Éléa gardait une certaine réserve, qu'elle semble avoir levée ce matin.
"J'ai faim, elle répond à Louis.
- T'es un vrai estomac sur pattes, toi ! je lui dis en l'attrapant pour lui faire un câlin.
- C'est pas de ma faute !!! Manou, elle dit que c'est parce que je grandis !!!
- Il faut pas croire tout ce que dit Manou !
- Ah bon ?!? elle répond surprise.
- Il est tôt encore ma puce. Tu nous fais un p'tit câlin et on descend après.
- OK."
Éléa se fond sous la couette, entre Louis et moi, lovée contre moi. Je savoure cet instant calme, tout doux. Cette plénitude m'envahit totalement quand je sens la main de Louis glisser dans ma nuque.
*
* *
C'est une belle journée aujourd'hui. Le ciel est bleu, aucun nuage à l'horizon et le vent souffle juste ce qu'il faut. Évidemment avec ce temps, après le petit-déjeuner, Éléa a décidé de sortir faire une balade sur la plage.
Les mois d'hiver à ne pas pouvoir en profiter pleinement sont derrière nous alors je ne suis pas contre cette sortie.
Éléa est dans sa chambre en train de se préparer pendant que je sors mon appareil photo du tiroir du meuble du salon. La luminosité est belle, je vais en profiter pour faire quelques clichés de la plage et la mer, et d'Éléa pour les envoyer à Zayn.
Je trouve Louis sur la terrasse, une cigarette entre les lèvres, l'air songeur, le regard fixé vers l'horizon. Je m'approche de lui, enlace sa taille. Je lui vole sa cigarette et aspire une taffe avant de lui rendre. Mes lèvres glissent contre sa joue.
"A quoi tu penses ?
- J'irai bien récupérer ma planche et ma combinaison...
- Tu veux surfer ? Tu n'as pas peur d'avoir froid ?
- Non, il fait bon. Le vent vient de la mer et la marée est montante. Même si la houle est pas trop forte, j'ai bien envie d'y aller.
- C'est toi qui sait ! Perso je ne tiens pas debout sur une planche, donc...
- Il faudra remédier à ça ! me dit-il un sourire aux lèvres. J'en ai pour moins de vingt minutes à faire l'aller-retour et récupérer mes affaires. Vous m'attendez ?
- Bien sûr !"
Il écrase sa cigarette et jette le mégot dans la poubelle extérieure avant d'embrasser rapidement mes lèvres et de rentrer dans la maison.
"Tu vas où Loulou ? demande Éléa quand elle le voit passer, depuis l'escalier qu'elle descend.
- J'vais chercher ma planche pour surfer. Vous m'attendez ?
- Oui mais tu te dépêches hein ?
- Oui minette !"
Il claque un bisou sur la joue de ma fille qui me rejoint dans le salon.
Et il n'a pas menti ! A peine vingt minutes plus tard, le klaxon de la voiture de Louis retentit. Éléa descend du canapé et file mettre ses bottes et son manteau. Nous sortons tandis que je rappelle à ma fille de faire attention dans la rue ; même si ce n'est pas une rue très passante, on n'est jamais trop prudent.
Louis a passé le bas de sa combinaison et est torse nu. Je lève les yeux au ciel : je ne suis pas encore suffisamment acclimaté pour me passer de mon pull et ma veste alors qu'il fait à peine 20°C. Éléa est à côté de lui et le regarde décrocher sa planche du dessus de la voiture, très intéressée.
"Je pourrais t'apprendre cette année ? il lui dit. Doris et Ernest ont bien rigolé l'année dernière.
- Hummm.... Ouais, je sais pas. C'est dur quand même !
- Je suis sûr que tu y arriverais !"
Je découvre alors qu'ils ont leurs petits secrets, des instants partagés qu'Éléa ne m'a jamais racontés. Et pourtant, elle ne cessait de me parler de Louis chaque fois qu'elle passait du temps avec lui, l'été dernier.
Je récupère le petit sac à dos que Louis me tend et le passe sur mon épaule. Sa planche sous le bras, il me sourit d'un air charmeur : le cliché du surfeur sexy. Je ris de bon cœur avant de l'embrasser doucement. Nous nous dirigeons vers la plage. Il y a d'autres téméraires comme Louis. Éléa court devant nous. Je porte mon appareil photo à mon œil et commence déjà à la photographier.
Louis m'abandonne et se dirige vers l'eau. Il dépose sa planche sur le sable et termine d'enfiler sa combinaison. Je l'observe, le prend en photo. Il est beau. Le soleil l'oblige à plisser les yeux quand il se tourne vers moi pour me faire un dernier signe de la main avant de se jeter à l'eau. Il me donne froid. Instinctivement, je remonte la fermeture Éclair de ma veste et regarde si Éléa est suffisamment couverte. Elle court, saute dans les petites flaques formées dans le sable. Son rire résonne jusqu'à moi. Je dépose nos affaires sur le sable et m'avance vers ma fille. Je la mitraille littéralement, capture ses rires, ses sourires, ses cheveux qui volent autour de son visage aux joues rosies.
"Viens Papa, on fait des photos tous les deux !"
Je passe la lanière de mon appareil autour de mon cou et prends mon téléphone portable dans la poche de ma veste. On fait des selfies, on grimace. On s'amuse. On chahute.
Éléa se redresse et tire sur ma manche.
"Regarde regarde Papa !!!! Loulou il a une vague !"
J'ai à peine le temps de relever le regard pour voir Louis debout sur sa planche, mais il perd l'équilibre et se retrouve sous l'eau. Je prends la main d'Éléa dans la mienne et nous nous rapprochons du rivage.
"Viens ma puce, je vais faire des photos de Louis."
La marée a légèrement monté. Je récupère nos affaires, passe le sac sur mon dos et me rapproche de l'endroit où est Louis. Le vent souffle un peu plus fort, il nage à contre courant, allongé sur sa planche avant de s'y asseoir. Il scrute l'horizon, concentré. Il s'essaye sur plusieurs vagues. Ça dure une éternité, il faut l'avouer. Mais je suis perdu dans ma contemplation. Il faut l'avouer également !
Et puis, c'est la bonne vague. Il s'élance, prend position et se hisse sur la planche. Éléa, à côté de moi, tape dans ses mains en sautillant. J'admire Louis à travers mon objectif.
La vague le ramène jusqu'au bord. Il descend de sa planche, un grand sourire aux lèvres. Il glisse sa main dans ses cheveux pour les ramener en arrière. Éléa est déjà en train de courir vers lui. Je les rejoins, photographiant toujours le tableau qui se présente devant moi.
"Premières vagues de la saison !!! C'était cool ! dit Louis, en souriant.
- Ça avait l'air, oui ! je lui réponds. On rentre, maintenant ?
- On va goûter ? demande Éléa.
- On va manger peut-être avant, non ?!? Il est bientôt midi."
Je passe ma main dans le dos d'Éléa pour la mettre en route. Louis récupère sa planche et viens m'embrasser. Il est frais et a un goût de sel.
*
* *
C'est l'effervescence à la maison.
Gemma, Michal, Robin et ma mère sont arrivés en début d'après-midi. Éléa est excitée comme une puce. Tout le monde discute dans un joyeux brouhaha tandis que je sens le stress monter en moi au fil des heures qui passent.
Tout est prêt dans la boutique : la mise en place des tables, la décoration pour l'inauguration, la disposition des verres, tasses, assiettes et serviettes. Je vais quitter tout ce petit monde dans une petite demi-heure pour mettre la touche finale aux gourmandises que nous servirons Katia et moi.
Nous attendons une trentaine de personnes : Nos familles, nos amis et plusieurs clients de la boulangerie, fidèles et ravis de nous voir étendre notre commerce. Ce sera aussi "portes ouvertes" pour accueillir les curieux.
Je suis heureux. Impatient. Et terriblement stressé.
Je sors quelques minutes sur la terrasse, lève le visage vers le ciel et laisse le vent et les embruns caresser ma peau. Je respire doucement pour essayer de calmer mon état nerveux, les battements de mon cœur.
Finalement, lorsque j'ai repris la boulangerie d'Alain, ce n'était que la continuité. La clientèle était faite, je n'avais qu'à prouver que j'étais un bon boulanger et proposer quelques nouveautés. Le salon de thé, c'est une autre affaire, une autre aventure. Katia et moi nous lançons dans un commerce que nous ne connaissons pas. Mon amie est sereine et impatiente de s'occuper de notre boutique. J'ai recruté une nouvelle vendeuse, Chloé, pour la boulangerie, laissant à Katia tout le loisir de gérer le salon de thé. Les travaux que nous avons effectués nous ont permis de réunir les deux boutiques. Nous avons ajouté une porte que nous pourrons laisser ouverte pour circuler aisément.
J'ai beau savoir que tout est prêt, la tension ne me quitte pas. Et ce n'est que l'inauguration, pas le premier jour d'ouverture. Je souffle fort, consulte l'heure sur mon téléphone. Je m'apprête à rentrer quand j'entends la baie vitrée coulisser derrière moi.
Ma mère enlace ma taille et cale son visage sur mon épaule.
"Ça va ? me demande-t-elle doucement.
- Ouais. Ça ira mieux dans quelques heures, je réponds en tournant mon visage vers elle.
- Tout va bien se passer. Katia a bien étudié son projet depuis le temps qu'elle en rêve. Et vous êtes attendus par plusieurs clients.
- Oui je sais. C'est une décision mûrement réfléchie même si tout s'est fait en quelques semaines. C'est un nouveau challenge. Plus de temps au travail, moins de temps pour Éléa.
- Tu vas t'organiser, comme tu l'as toujours fait. Et puis les vacances arrivent bientôt, elle va partir quatre semaines avec Zayn.
- M'en parle pas...
- C'est le bon timing Harry. Pour toi comme pour Éléa.
- Ça veut dire aussi, un été entier sans congé pour profiter d'elle... je soupire, soudain inquiet de ne pas avoir fait les bons choix.
- Hey hey !!! me dit-elle en prenant mon visage entre ses mains. Ne remets pas en question tes décisions parce qu'aujourd'hui tu es stressé. Depuis un an que tu es arrivé ici, Éléa n'a pas été mise de côté à cause de ton emploi du temps. Vous vous octroyez des moments pour tous les deux. Ça ne changera pas. Et tu le sais parce que ta fille passera toujours avant tout le reste. Les débuts vont être compliqués mais tu trouveras le moyen d'être toujours présent pour elle, comme tu as toujours réussi à le faire.
- Oui... Tu as raison, je suis trop stressé pour réfléchir correctement. Et puis, j'ai hâte que cette journée passe, en fait. Que le projet soit définitivement lancé.
- File à la boutique. Tout le monde doit t'attendre en plus.
- Oui...
- Je pensais voir Louis à la maison... ajoute-t-elle.
- Il a voulu nous laisser en famille...
- Ne fait-il pas partie de la famille ? me demande-t-elle, le sourcil relevé.
- Pour Éléa et moi, c'est clair... Mais lui ne l'assimile pas tout à fait. Ça ne saurait tarder" j'ajoute, un air entendu sur le visage.
Ma mère me sourit tendrement et embrasse ma joue avant de m'enlacer. L'étreinte d'une mère est toujours revigorante. C'est le cœur regonflé que j'entre dans la maison à sa suite, quand Zayn, ses parents et Gauthier font leur entrée.
Éléa crie de joie. Je ne lui avais pas dit que Zayn serait là. Pourtant, c'est aussi une journée importante pour elle, c'était normal que ses deux pères soient présents, pour profiter des étoiles qui vont probablement inonder son regard.
Nous nous saluons. Trisha me serre dans ses bras, Gauthier me serre la main. Éléa est dans les bras de Zayn. Elle le serre si fort que je crains qu'il manque d'air. Il m'adresse un grand sourire. Je suis heureux de les voir réunis.
"Faites comme chez vous. Surveillez ma poupette ! Et à tout à l'heure !"
J'entends tout le monde me dire au revoir alors que j'ouvre la porte d'entrée, mon sac à la main. Je tombe nez à nez avec Louis qui s'apprêtait à frapper.
"Je venais voir si tu voulais que je t'emmène à la boutique ?
- Ma mère t'a appelé en douce ?
- Oui ! il me répond, en baissant le regard sur ses chaussures, gêné. Elle m'a presque engueulé !"
Je ne peux pas m'empêcher de rire. Ma mère est surprenante parfois. Mais cette réaction me prouve qu'elle a accepté Louis dans ma vie et qu'elle a confiance en lui, en nous. Elle n'imposerait pas une relation à son fils, et surtout pas Éléa. Je m'agrippe à la taille de Louis et l'embrasse. Avec avidité. Parce que j'ai besoin de ressentir, j'ai besoin de faire s'emballer mon cœur, j'ai besoin de me raccrocher à quelque chose de rassurant. Et aujourd'hui, plus que n'importe quel jour, Louis est cette personne, mon ancre.
Une dizaine de minutes plus tard, il arrête la voiture devant la boulangerie. Le salon de thé est faiblement éclairé, la devanture cachée sous une grande toile bleue.
C'était l'effervescence à la maison. C'est l'effervescence à la boutique également. J'entends Katia énumérer l'ordre des mignardises que nous allons proposer et j'aperçois Julien en train de lever les yeux au ciel. Elle le voit faire et commence à rouspéter. Julien souffle alors qu'il s'adresse à moi :
"Vous arrivez à pic Harry ! On est en train de perdre Katia !" me dit-il.
Je ris et presse son épaule alors qu'il passe près de moi pour retourner à sa tâche. Je pensais être le plus stressé des deux mais finalement Katia surpasse tout. Ses joues sont rouges et ses cheveux en bataille à force d'y glisser ses doigts dedans. Je m'approche de mon amie et la serre plus fort que de raison entre mes bras.
"Calme-toi. Ça va bien se passer !
- Harry tu m'étouffes, je l'entends contre ma poitrine. On va pas avoir assez de petits-fours à proposer.
- On a fait les comptes dix fois, Katia, je lui dis en me détachant d'elle. Dix fois c'était déjà trop. On est bon. Et tout est prêt.
- Je sais mais je veux que ce soit parfait... elle répond en calant son front contre mon épaule.
- Ça le sera ma belle ! Tu y as mis tout ton cœur !
- Merci. Qu'est-ce que je ferais sans toi ?
- Tu sais il y a peine trente minutes, j'étais dans le même état !!!
- On fait une belle équipe de stressés, tiens !!!"
Nous rions à l'unisson et soufflons fort tous les deux pour nous rebooster. Je retrousse les manches de mon t-shirt et vais me laver les mains avant de commencer à finaliser nos préparations et présentations.
A 16h30, Katia et moi rejoignons l'appartement de ses parents pour nous préparer. Liam et Cheryl sont déjà arrivés et discutent avec Louis, installés dans les fauteuils du salon de thé. Nous apercevons Séverine et Niall arriver lorsque nous passons la porte de l'immeuble attenante à la boulangerie.
Je prends rapidement une douche puis enfile un jean slim noir avec une chemise bleue ciel avec des petits motifs plus clairs. C'est un cadeau de Louis. Je retrousse les manches jusqu'à mi-bras puis enfile une paire de bottines noires. Je me regarde dans le miroir et souffle fort pour me donner du courage. Je glisse mes doigts dans mes cheveux. Depuis mon arrivée, je ne les ai pas coupés et j'aime assez la longueur qu'ils ont désormais, légèrement au-dessus de mes épaules.
Katia me rejoint, toute pimpante dans sa jolie robe fleurie. Elle a attaché ses cheveux en un petit chignon et s'est légèrement maquillée. Elle rayonne. Nous nous étreignons rapidement et descendons rejoindre nos invités.
Nos familles sont là et nos amis arrivent au fur et à mesure. C'est le champagne qui coule à flot, exceptionnellement dans notre salon de thé. Mais je passe volontiers derrière le comptoir quand on me demande un café. Je mets en pratique mes après-midi d'apprentissage. Nos clients habitués passent la porte, dégustent nos petites gourmandises et découvrent nos macarons à la fleur d'oranger. Tout le monde semble ravi, et beaucoup viennent nous féliciter pour le projet et pour l'atmosphère chaleureuse qui se dégage du lieux.
Je passe de groupe en groupe, une corbeille à la main remplie des délicieux financiers d'une biscuiterie renommée de la région. Nous avons conclu un partenariat et je suis heureux de faire découvrir ces douceurs à mes parents et ex-beaux-parents. Zayn et Gauthier sont accaparés par Éléa qui leur fait visiter les moindres recoins de la boutique et reste en admiration devant l'envolée de papillons blancs sur la vitrine du coin des "petits buveurs de chocolat".
Katia a eu raison de me pousser. Je l'aime beaucoup cette boutique. Elle nous ressemble beaucoup finalement.
Je cherche mon amie du regard et lui fais signe de me rejoindre. Je pense que le moment est venu pour nous de remercier nos convives et de découvrir le nom de notre enseigne.
Je me racle la gorge avant d'attirer l'attention de tout le monde.
"Bonjour à tous et merci infiniment d'avoir répondu présent à notre invitation. Merci à ceux qui au détour de leur chemin, on eu l'idée de passer notre porte. Katia a cette idée depuis des mois. Elle a commencé à installer une table dans la boulangerie, puis à servir des cafés à certains de nos clients. Elle m'a eu à l'usure et aujourd'hui je dois reconnaître qu'elle a eu raison. Cette boutique est chaleureuse et nous espérons que vous y viendrez comme "à la maison". C'est ce que nous recherchons et nous espérons y parvenir.
- Nous souhaiterions remercier toutes les personnes, tous nos amis qui de près ou de loin ont rendu ce projet possible, enchaîne Katia. Je dois avouer que certains d'entre vous se sont rendus complices de mes plans pour faire flancher Harry ! Très sincèrement, nous espérons que vous trouverez ici l'endroit où il est agréable de passer du temps, lire ou discuter, jouer un peu de musique... Cet endroit c'est le nôtre pour qu'il devienne le vôtre.
- Ma puce, tu nous rejoins ?" j'interpelle Éléa.
Ma fille vient vers moi, un peu intimidée. Zayn se place juste devant nous, son téléphone entre les mains. J'aperçois Louis, un grand sourire sur les lèvres, lui aussi prêt à photographier ou filmer ma fille.
"Je pense qu'il est maintenant temps de vous accueillir, je commence en prenant ma fille dans mes bras, à la Élea's Bakery !!!"
Sous les applaudissements, la toile tombe et le regard d'Éléa s'illumine. Écris en jolies lettres calligraphiées, son prénom s'affiche sur le mur du fond de la boutique et bien sûr sur la devanture.
"C'est comme moi !!!! elle me dit en me regardant.
- Oui ma puce !
- C'est trop top mon papa !!!! Daddy ! Daddy ! T'as vu c'est mon nom !" elle dit à Zayn en se détachant de mon étreinte.
Louis me rejoint et vient embrasser ma joue, visiblement heureux pour moi, pour nous.
La fin d'après-midi se poursuit puis chacun commence à quitter le salon de thé.
Éléa est rentrée avec Zayn et nos familles. Louis est resté pour nous aider à ranger et nettoyer. Nous nous installons autour d'une table, Katia sur les genoux de son amoureux Nicolas, Liam, Cheryl, Séverine et Niall. Louis et moi arrivons avec un plateau et du champagne. Tous ensemble, nous trinquons à une nouvelle aventure.
Quand tout le monde est parti et que tout est rangé, prêt à servir pour le jour J, je verrouille la porte. Je me recule de quelques pas et observe nos deux devantures qui n'en font plus qu'une. Katia me souhaite une bonne soirée et embrasse ma joue avant de monter en voiture avec Nicolas. Louis apparaît à ma gauche. Je sens son regard sur moi. Je tourne mon visage vers lui, son regard est rempli de fierté.
"Tu te souviens malheureusement de cette soirée où nous étions toi et moi en train de regarder la boulangerie souillée...
- Oui, malheureusement. Ce n'était pas la fin de soirée que j'avais prévue.
- Ce soir-là, chez moi, tu as évoqué ton envie de rentrer à Paris.
- Ouais, je me rappelle...
- Je suis vraiment heureux que tu sois resté, que tu te sois battu et qu'aujourd'hui tu ais mis de côté toutes tes peurs."
Je me tourne totalement vers Louis et l'embrasse. J'enlace son corps et me rapproche de lui.
"Katia m'a convaincu mais honnêtement si je suis parvenu à surpasser les pires instants de ma vie, c'est grâce à toi Louis.
- J'aurais peut-être été égoïste, mais je me serais battu plus fort pour te garder ici. J'espérais rencontrer une personne avec qui partager ma vie. Le ciel m'a entendu et t'a mis sur mon chemin. Et chaque jour qui passe, je le remercie pour cette chance.
- Louis...
- Non vraiment Harry. C'est important de se dire qu'on s'aime parce que je t'aime. Je t'aime tellement."
Je capture ses lèvres pour le faire taire, pour lui répondre avec des gestes et des sensations que son amour est réciproque et plus encore.
*
* *
Je suis parti au petit matin, laissant Louis entre les bras de Morphée. J'ai laissé un mot sur le bloc note du réfrigérateur en lui demandant de me rejoindre pour le déjeuner que nous partagerons en famille.
Je suis rentré à la maison en passant par la plage, profitant du lever du soleil et de l'air frais et pur. J'ai arrêté de faire le bilan de l'année écoulée et me concentre sur l'avenir.
La maison est encore calme quand je rentre. Je prépare le petit-déjeuner en buvant un café. Robin ne tarde pas à me rejoindre, puis ma mère. Je monte dans la chambre d'Éléa et me couche près d'elle pour la câliner. Elle est toute chaude de sommeil. J'embrasse ses petites joues et savoure cet instant. Éléa est le centre de mon univers, ça ne changera jamais. Je la laisse se réveiller tranquillement et file prendre une douche dans la salle d'eau de ma chambre.
Je suis impatient comme un enfant avant Noël et j'ai l'impression que les heures s'allongent aujourd'hui.
Assis dans le canapé à discuter avec Robin, Michal et ma sœur, je ne peux empêcher ma jambe de trépigner. Ma mère est en train de préparer le déjeuner, Éléa descend de sa chambre.
"Papa, c'est quand qu'on va sur la plage ?
- Cet après-midi Éléa, intervient ma mère. On va bientôt manger.
- En fait, je réponds, on va aller chercher Louis.
- Ah bon ?!? Tu ne m'avais pas dit.
- On en aura pas pour longtemps, je lui dis en la rejoignant dans la cuisine et en embrassant sa joue. T'en fais pas pour ton rôti !"
Elle me donne une petite tape sur le torse et je ris. Éléa me renvoie un regard complice et je lui dis qu'elle peut mettre ses chaussures et sa veste.
Message à Louis : Éléa veut aller voir la mer. Tu nous rejoins sur la plage ?
Message de Louis : OK. Je suis là dans 5 min. Je partais.
"On revient, je dis à l'attention de ma famille. Tu as le petit paquet, je chuchote à l'oreille de ma fille.
- Oui, elle me répond doucement.
- Qu'est-ce que vous manigancez tous les deux? demande Gemma.
- C'est une surprise pour Loulou !
- Allez on y va, nous. A tout de suite !"
Je réponds avant que l'on commence à me poser des questions. Éléa et moi sortons de la maison. Le soleil brille et annonce encore une belle journée en Normandie.
Louis nous rejoint sur la plage quelques minutes plus tard. Je regarde l'horizon, les caps de Flamanville et du Rozel qui nous entourent, la mer, magnifique et scintillante. Je capte le regard de Louis qui s'approche de nous. Éléa glisse sa main dans la mienne. Je tourne mon visage vers elle et la vois me sourire, le regard rempli de malice.
Je suis chez moi ici. Définitivement.
C'est une décision mûrement réfléchie, que nous avons prise ensemble, Éléa et moi. C'est elle qui a eu l'idée de la surprise pour Louis.
"Salut vous deux ! dit Louis en arrivant à notre hauteur. Il embrasse la joue d'Éléa avant de capturer doucement mes lèvres. Ça va ?
- Oui. Très bien.
- Vous êtes sûrs ? Vous êtes bizarres. J'ai l'impression de vous avoir surpris à faire une bêtise !
- Non non. Ça va."
C'est difficile de contenir mon sourire et l'impatience d'Éléa qui tire sur mon bras.
"On a un cadeau pour toi Loulou !!!!, elle finit par craquer.
- Ah bon ? Mais pourquoi ? c'est pas mon anniversaire...
- C'est pas vraiment un cadeau, plus une proposition.
- Quoi ? demande Louis surpris, désarçonné.
- T'inquiète pas, je ris doucement. Tu lui donnes ma puce ?"
Éléa tend le petit sachet à Louis. Il l'attrape et son regard passe de l'un à l'autre avant de revenir sur le paquet entre ses mains. Il l'ouvre avec précaution et en sort une clef.
"Éléa et moi avons beaucoup discuté, je dis à Louis dont le regard accroché au mien s'illumine quand il comprend. On aimerait beaucoup que tu viennes vivre avec nous, Louis.
- Y a déjà plein de bazar à toi à la maison, en plus ! ajoute Éléa, comme pour le convaincre d'accepter, ce qui au fil des jours est devenu une évidence.
- Qu'est-ce que tu en penses ? je demande, soudain inquiet qu'il puisse refuser.
- Ce serait un plaisir de vivre avec vous deux.
- Ouiiii !!!!!"
Éléa lâche ma main pour s'accrocher à Louis. J'imite ma fille et enlace Louis. Ses lèvres rejoignent les miennes, souriantes.
"Allez on rentre ! Il faut le dire à Manou et tout le monde."
Éléa file devant nous en sautillant. Je glisse ma main dans celle de Louis. Il les porte à ses lèvres et embrasse la mienne.
"Tu es sûr ? il demande doucement.
- Certain. Et toi ? Éléa et moi dans ta vie ?
- Je vous prends tous les deux. Je te prends toi tout entier Harry."
*
* *
Et bien voilà.... nous y sommes.
Nous n'avons plus qu'à laisser vivre les loulous et Éléa dans leur jolie Normandie.
On les retrouvera pour un épilogue, bien sûr.
Merci...
Des bisous
Mimi
#Bakeryfic
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top