9- Eau et surprises


Je secoue la tête et me remets en marche. Je me fais des idées, il faut que j'arrête de m'inquiéter pour un rien ! Je dois plutôt profiter de ce paysage fantastique. Je lève la tête et pousse un petit cri, à la fois de surprise et d'émerveillement.

La partie évidée de la montagne a une forme conique, les parois de pierre gris pâle s'élevant jusqu'à... jusqu'à... Une étrange source lumineuse. De celle-ci émanent des rayons dorés, qui tombent sur la cité et parent le paysage de couleurs chaleureuses.

Des dizaines de petites cascades cristallines jaillissent de la paroi de la montagne, projetant des éclaboussures étincelantes aux environs, ainsi que des buissons aux feuilles d'un vert intense. Plusieurs maisons s'élèvent entre les chutes d'eau, perchées sur des avancées de pierre ancrées jusqu'à mi-hauteur dans les murs d'Al-Drim.

Je reste ébahie devant ce spectacle incroyable, et ne remarque même pas que nous sommes arrivés à destination.

-Rhuwen ? m'interromps Hava. Tu viens, il va bientôt faire nuit.

Je redescends sur terre -ou plutôt sous terre- et me tourne vers les Drimels. Tous deux me regardent d'un air légèrement impatient. Je remarque qu'ils se tiennent devant une grande étendue d'eau très propre. Hava nous entraîne à sa suite vers un coin du « lac », d'où entre et sort une multitude de gens. Intriguée, je me penche vers l'eau et sursaute.

Cette foule ne sort pas directement de l'eau, mais d'un tunnel de verre circulaire ! Alwey et Hava entrent dans le passage et je m'empresse de les rejoindre. Émerveillée, j'observe autour de moi. Des centaines de petits poissons argentés nagent tranquillement dans l'eau, s'arrêtant de temps en temps pour observer les passants de leurs gros yeux noirs. Leurs écailles miroitantes sont irisées par les rayons de lumière crépusculaire qui percent à travers la surface.

Et un peu plus loin... Des bâtiments. Des dizaines de bâtiments de verre, dans lesquels se presse une foule de Drimels.

-Où sommes-nous ? je souffle.

-À Ishel, le quartier subaquatique du Secteur Eau, répond Alwey.

-Le Secteur Eau ?

-Oui, Al-Drim est divisée en six secteurs, explique-t-il. Le Secteur Eau, réservé à l'Art, au divertissement, et à la restauration. Le Secteur Terre, dédié à la culture, à l'enseignement, et aux plantes. Le Secteur Feu, destiné aux marchands et aux habitations de classe moyenne. Puis le Secteur Ombre, pour les logements, et le Secteur Air, également pour les habitations, mais d'une classe plus élevée. Ces cinq Secteurs sont organisés en un pentagone, dont le centre est une grande place, nommée l'Aarag, ce qui signifie le « Cœur » en Drimel Ancien.

Abasourdie, je regarde mes pieds, les yeux exorbités. Soudain, un détail me revient en mémoire.

-Mais... tu as parlé de six Secteurs... Quel est le dernier ?

-C'est le Secteur Lumière. Réservé aux Enevalans, les dirigeants d'Al-Drim. Il se trouve tout en haut, dit-il en désignant la source de lumière, au sommet de la montagne, qu'on perçoit à travers la surface.

Je ne réponds pas, tentant d'assimiler toutes ces explications paranormales. Plongée dans mes pensées, je suis inconsciemment les Drimels jusqu'à l'un des bâtiments de verre, attenant au tunnel où nous évoluons. J'observe ce dernier d'un œil intrigué. Les parois sont réfléchissantes, de ce fait, on ne voit pas directement l'intérieur. L'édifice possède une étonnante forme de bulle gigantesque.

Hava se dirige vers l'entrée, qui est uniquement obstruée par un drap blanc évanescent. À mon passage, le tissu me donne l'impression de passer sous un voile d'eau. Et je ne suis pas au bout de mes surprises... L'intérieur est encore plus incroyable que l'extérieur. Des convives mangent, assis sur des sortes de bulles de verre, autour de tables formées de plaques de marbre blanc rectangulaires. Mais... Les tables sont comme suspendues dans l'air. Comme la lampe, à la Clinique. Et les murs, non réfléchissants depuis l'intérieur, laissent apercevoir le splendide ballet des poissons argentés.

Un homme portant une chemise blanche et ample, ainsi qu'un pantalon noir vient à notre rencontre.

-Bienvenue au restaurant Acqua, Lord et Lady, nous accueille-t-il.

Il nous conduit à une table et s'en va à grands pas élégants. Je m'installe sur l'un des sièges et constate avec étonnement qu'il est très confortable, malgré sa matière. Curieuse, je passe discrètement mon pied entre la table et le sol, mais ne sens aucun obstacle. N'y tenant plus, je demande :

-Comment les tables font-elles pour tenir comme ça ?

-Par lévitation magnétique, répond Hava.

-Ha... Et... À quoi est-ce que ça sert ? Pourquoi ils ne mettent pas tout simplement des pieds normaux aux tables ?

-Parce-que c'est plus esthétique, mais c'est surtout bien plus pratique et confortable pour mettre ses jambes !

-Effectivement...

Je cherche le menu des yeux, mais, sur la table, il n'y a rien d'autre que trois petits pavés de métal argenté. J'en attrape un et, par mégarde, j'appuie sur un bouton sur le côté de la chose. Je sursaute légèrement quand un écran blanc jaillit du pavé.

-Qu'est-ce que c'est ?! je m'étonne.

-Le menu, indique Alwey en regardant le sien. Tu as juste à appuyer sur ce que tu veux.

J'acquiesce et me mets à consulter la carte. Que de choses bizarres ! Je finis par opter pour un plat du nom d'« Erlan », sur les conseils d'Hava. Une fois notre repas choisi, je pose la question qui me torture l'esprit depuis plusieurs minutes.

-Comment faites-vous pour vous nourrir, sous terre ?

-Nous mangeons des plantes qui se sont adaptées pour pousser avec peu de lumière, explique Hava, mais aussi des fruits et légumes provenant de l'extérieur, que nous cultivons incognito en nous faisant passer pour des humains.

-Vous ne mangez pas de viande ? je demande, étonnée.

-Manger des êtres vivants ?! Alors ça, jamais ! Quelle horreur ! Pourquoi ne pas manger des humains, tant qu'on y est !

Je deviens verte en pensant aux rares fois où j'ai mangé de la viande, étant donné que j'ai une certaine répulsion pour ces produits. C'est vrai que de ce point de vue...

-Nous ne sommes pas comme les humains qui se goinfrent de chair animale sans aucun remord, intervient Alwey. Nous ne polluons pas non plus la nature avec des pesticides ou du plastique. Mais les humains ont une vie si courte... Ils n'ont pas à penser à leur avenir ! Ils ne pensent pas non plus à celui de leur descendance, d'ailleurs.

-Ah ? Combien de temps vivent les Drimels ? je demande, intriguée.

- En moyenne trois-cents ans.

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