P1 - Chapitre 7 : L'attaque de Loka, la quête des O'Braack !
...Et si ce n'était pas une simple coïncidence...?
Cela faisait déjà un sacré temps que j'avais rangé ma carte, je me tenais prêt à agir, mon couteau à la main.
Je suivais les pas discrets de Kéolys, bravant le courant de villageois qui courraient, affolés et terrifiés à l'idée d'être zigouillés. C'était la pagaille, un désordre impossible !
De la poussière dorée émanait du sol, brouillant légèrement notre vue. Je ne m'attendais pas vraiment à ce genre d'accueil de la part des Lokéens. Après tout, cela serait étrange de conserver sa convivialité lors d'une attaque surprise de la Nation des Glaces !
Les hostilités se déroulaient dans les quartiers Nord du village.
La Brigade Glacée se déchaînait... contre une organisation résistante nombreuse et parfaitement agencée. Les stands du marché s'écroulaient un à un, tout comme les maisonnettes colorées.
Un membre de la BG repoussa la poussière dorée en déclenchant une petite tempête de givre... qui ne m'empêcha pas de me faire longtemps vaciller, me forçant à me tenir contre un mur.
J'interdis à Tobby de bouger et surtout d'aboyer. Ils étaient là, tous, nos ennemis : Ces êtres aux teints blafards, aux yeux polaires, avec des cheveux bleu pâle. Ils portaient tous l'uniforme bleu clair de la Brigade Glacée ainsi que le Flocon, symbole de la Reine de Glace, brodé au niveau du cœur. L'autre différence capitale : ils n'avaient pas de longues oreilles, comme nous, les Elfes.
La formation ennemie se dispersa en un geste, lançant de puissants jets de neige sous toutes ces formes – donc : poudreuse, glaçon, glacial, collante... ayant soit pour objectif de déstabiliser les rangs adverses ou les blesser mortellement ! – en direction des résistants qui se protégeaient les uns et les autres tout en avançant vers eux.
Les résistants étaient loin d'être des amateurs. En vue du nombre et de l'équipement militaire utilisé, ce n'était pas une intervention de routine mais bien une investigation spéciale, je le craignais... Une bonne partie était en armure et fortement armée, c'était ça qui me mettait la pouce à l'oreille.
Ils étaient déterminés à garder leur position, ne prenant pas cette attaque à la légère...
C'était le moment où je pris enfin mes jambes à mon cou... et pour mon frère téméraire de se jeter dans la bataille !
— Garde Kazul près de toi, et mets-toi à l'abri, vraiment ! me lança-t-il, fraternel.
— Ouais, ouais... vas-y ! acquiesçais-je, timidement, en rabattant le kaélo autour de moi.
— Je reviens tout de suite, me promit-il, avec son sourire malicieux, démontrant toute son ambition.
— Fais attention à toi ! Je veux pas retrouver ton corps sur le champ de bataille ! lui lançais-je, l'air presque menaçant, alors qu'il était déjà loin.
Non mais c'était vrai : Je ne voulais pas perdre mon jumeau, ma moitié, mon autre moi...
Il brandit son arc et tira sa première flèche précisément dans le cœur d'un membre de la Brigade qui venait de le... non, nous prendre pour cible. Il se déplaçait de maison en maison, de ruines en ruines, de rochers en rochers, tuant ses assaillants tout en secourant les résistants blessés à découvert lorsque leurs protections s'effondraient.
Je me collais nerveusement contre le mur de cette maison, la peur m'envahissant peu à peu, tremblant terriblement. Je devais conserver mon contrôle ou alors la peur prendrait le dessus et me rendrais vulnérable et inefficace.
J'entrais dans ladite maison, Kazul protégé dans mon haut, Tobby marchant pratiquement sur mes pieds. Elle était sans vie, impeccablement rangée. C'était sûrement une personne riche qui y avait élu domicile. Dommage qu'après cette attaque tout sera en désordre, voire détruit...
Les maisonnettes de Loka comportait quelques petites pièces ou alors une grande multi-fonctions. C'était typiquement le cas ici présent, il n'y en avait qu'une qui servait de chambre, cuisine, salle de séjour, etc.
Quand tout à coup, j'aperçus une chauve-souris aux yeux rouges se poster sur le bord de la fenêtre sans verre. Par réflexe, je masquais mon visage.
— Tobby, est-ce que je dois m'en méfier ?
Il approuva de la tête.
— Alors, neutralise-là ! ordonnais-je, spontanément.
Alors qu'il s'exécutait, celle-ci cria de manière stridente. Si fortement et longuement que je crus perdre mes tympans ! Le défaut de l'ouïe surdéveloppée !
Tobby envoya une sphère végétale sur la chauve-souris qui fut emprisonnée dedans. Au contact, elle hurla un peu comme lorsque l'on exorcise un démon qui aurait préféré continuer à faire ses magouilles dans son être possédé.
Elle s'écrasa au sol, enfermée dans la demi-sphère qui devint une douce lumière verte enveloppant son corps. Ses yeux devinrent noirs, leur couleur habituelle.
— Bien Tobby ! Elle causera plus de soucis à personne. Malheureusement, elle a appelé des renforts pour nous éliminer, fis-je aux animaux en guise d'avertissement.
La chauve-souris nous salua, reconnaissante de l'avoir délivrée de son maléfice. Ensuite, elle s'en était allée, comme si de rien était.
Effectivement, les chauves-souris étaient exploitées, comme des objets. Plus précisément, elles servaient de caméras ou d'espions pour les Elfes grâce à un accessoire permettant de les corrompre. Les corrompre permettaient non seulement d'espionner mais cela les rendait également beaucoup plus agressives et puissantes qu'à l'état sauvage ou domestique. Les chauves-souris utilisées prenaient alors les yeux rouges.
Mère Nature ne supportait pas du tout que la faune soit utilisée comme objets ou comme du bétail, en dehors des animaux de la ferme. Le pouvoir de la Terre était la solution la plus sensée pour les délivrer de leur sort, même si le sang chaud des Elfes leur dictait bien souvent de mettre un terme à leur existence dès qu'ils les repèrent...
Si elle ne m'avait pas attaqué, c'était sûrement parce qu'elle était heureuse de retrouver son libre arbitre et donc d'avoir échappé à l'emprise de son maître... que je pensais pouvoir nommer : La Reine de Glace, étant très friande de la manœuvre qu'elle jugeait elle-même « indispensable pour gouverner ».
Mon instinct ne me présumait rien de bon.
— Je crois que les ennuis arrivent. Je sais pas comment, mais je le sens...
Je fis bien de me méfier, me cachant sous un canapé blanc loin de la porte d'entrée, accolé à un mur. J'entendis et vis trois paires de chaussures débarquées dans la maisonnette.
Une explosion retentit proche de moi. L'un des loyaux sujets de la Reine de Glace s'approcha de la fenêtre sans vitre, se trouvant presque adjacent au canapé pour voir ce qu'il venait de se passer.
J'étais pétrifié d'angoisse. J'essayais vainement de contrôler ma respiration haletante.
Les Glacés sillonnaient la maison de fond en comble. Que cherchaient-ils ? Des résistants planqués ? L'un des deux derniers fit dégringoler l'armoire beige, brisant toutes les magnifiques assiettes en porcelaine en mille morceaux.
— Eh ! On est pas là pour détruire les biens des habitants ! On se tient à la mission ! On élimine les gêneurs s'il le faut ! On casse pas le matériel pour rien, c'est toujours utile ! Mais on oublie pas la mission ! réprima l'autre, colérique et autoritaire, me dévoilant leur ordre hiérarchique.
— Je... je suis désolé Monsieur... répondit le subordonné, lamentablement.
— Bon, on a plus rien à faire ici, répliqua l'autre Glacé posté à la fenêtre.
Et, alors qu'ils s'apprêtaient à sortir, Kazul eut la merveilleuse idée de chantonner tout bas. Dès les premières notes, n'attendant pas la fin du couplet, je lui mis le doigt sur la bou... euh, le bec.
— Eh, vous avez entendu ? fit remarquer l'un des trois Glacés en se stoppant comme un seul homme.
— Euh... nan, rien...
N'ayant absolument pas apprécié, le kaélo me mordilla le doigt et chanta fortement. J'avais envie de le tuer.
Enfin, après tout, vue la réaction de Kéo lorsque son bout de chou avait été blessé, je ne voulais pas imaginer si jamais il devait mourir...
— Ah, si, si ! se rattrapa le Glacé, finalement.
Les hommes de la Brigade Glacée se dirigèrent au canapé par grandes enjambées, les paumes recouvertes d'un étrange fluide bleutée affreusement glaciale en vue du givre apparent aux alentours. La chaleur chuta précipitamment.
Tobby explosa la porte du placard auquel il était caché, faisant face aux Glacés. Effectuant un mouvement circulaire de la tête, trois petits ovales couleur pastèque apparurent en lévitant devant lui. Ces ovales s'ouvrirent pour laisser place à des mâchoires munies de dents acérées et de ronces tranchantes.
Les ronces enlacèrent les Glacés à la vitesse de l'éclair pour les paralyser, les mâchoires tentant de les mordre.
Le second concentra sa magie polaire dans sa gorge, faisant geler la ronce, où jaillit un laser de glace brisant la ronce et la graine en face de lui en deux. Les ronces perdirent de l'ampleur, devenant sans vie, et s'abattirent sur le sol avant de disparaître dans la masse.
Le capitaine des deux congela son corps en entier pour devenir un véritable golem de glace. Il ôta la vie aux ronces et à la graine le retenant en otage en un coup de poing fracassant.
Apeuré, Tobby commençait à reculer lentement. Le sol s'est mis à trembler, autant que la peur grandissait dans l'être du canidé végétal.
Jaillissant du canapé, je lançais le couteau dans la gorge du Glacé libéré, mourant sur le coup. Poursuivant mon élan de courage impulsé par mon tokës, je pris deux bocaux de verre à côté de moi. Je lançais le vide dans la figure du Glacé toujours prisonnier de la plante pour m'assurer qu'elle ne le laisse pas s'enfuir, puis le second, rempli d'une poussière étrange, dans la figure du golem.
Les yeux embrumés, l'ennemi tituba jusqu'à trébucher par un petit tabouret qu'il brisa en deux, tout en maugréant des obscénités.
Agrippant Kazul à la volée, félicitant vivement Tobby pour m'avoir fait gagner du temps, je m'enfuis dehors. Sans arme, tel l'inconscient que j'étais.
La bataille faisait rage. Les affrontements belliqueux démontraient toute la violence et le mauvais qu'un être conscient pouvait infliger.
Je vis un assaillant congeler la tête d'un résistant pour l'arracher à son corps. Un compère fit de même avec les bras d'un résistant.
Dans les deux cas, les bourreaux semblaient fiers des souffrances engendrées.
Dans les deux cas, les victimes étaient à l'agonie avant d'exprimer leur dernier soupir.
Les Glacés étaient des êtres sans cœur et sans scrupule d'une sournoiserie inimaginable, ne se délectant que de la mort et de l'humiliation des « êtres inférieurs ». Ces hommes cruels et sadiques me dégoûtaient au plus haut point.
Ma foi, niveau violence, les résistants pouvaient leur faire de la concurrence. Par vengeance, ils avaient tenté l'expérience en disséquant les membres d'un Glacé en trois coups de katana. Même, en une course, l'un d'eux avait coupé la tête de plusieurs Glacés, pris par surprise, armé de ses deux sabres. Deux autres « alliés » se chargeait d'embrocher les serviteurs de Sa Majesté de givre.
Ensuite, je tournais ma tête à droite, en direction de l'explosion servant en réalité de diversion. Mon regard fut retenu par une jeune demoiselle en tenue de combat, masqué des pieds à la tête. Je ne voyais rien mise à part ses yeux verts qui me toisaient d'un air impassible, son nez droit ainsi que ses fines lèvres rosées qui ne bougeaient pas non plus, sur un visage d'un teint blanc.
Le cri furieux du Capitaine en armure de glace me sortit de mes rêveries. Je courus me réfugier vers la gauche mais... retournant mon regard, la jeune femme avait disparu.
Le plus important pour l'instant était qu'il venait de me prendre en chasse, tentant de le fuir par n'importe quel moyen.
Je faisais des zigzags à travers le champ de bataille, ou plutôt entre les maisons, en espérant le semer. Je m'arrêtais parfois pour reprendre mon souffle, dissimulé par un mur de maison ou en ruine.
Cependant, il apparaissait systématiquement derrière en détruisant la barricade rudimentaire.
Je courais tellement vite, sans m'arrêter que j'en perdis Tobby dans la bataille et... Kazul. Après le coup de pression, je me rappelais qu'il avait changé de monture – sur le tokës – en espérant retrouver une meilleure tranquillité.
Durant ma course effrénée, j'aperçus Kéolys, arborant une posture des plus braves, tirer avec une précision hors pair. Les corps tombaient à la vitesse de la lumière, presque sans pouvoir lutter.
Trois résistants me prirent sous leur aile pour affronter le Capitaine de la Brigade, me permettant de reprendre mon souffle. Tout en restant sur mes gardes, non désireux de finir congeler ou pire... mort.
Le Capitaine écrasa l'un des trois entre ses bras fortifiés comme une crêpe, et mit un autre à terre après l'avoir mitraillé de coups fatals.
— Je vous aurais tous ! promit ouvertement le golem de glace, effroyable.
Il se répétait sans cesse, comme si ses menaces décuplaient ses forces. Hélas, le dernier ne pouvait pas survivre seul... alors je me glissais entre les maisons pour qu'il me perde de vue pour de bon.
Soudainement, la réalité me frappa. L'organisation résistante si déterminée faiblissait, se resserrait, les effectifs ayant fortement diminués par rapport à ceux des Glacés.
Je ne serais vous justifier cet acte, mais je me sentis attiré par une maison. C'était plus fort que moi, comme si quelque chose me poussait à pénétrer son enceinte. Elle se trouvait proche de la plage de ce fin sable blanc et des magnifiques vagues aux reflets scintillants du Soleil Orange à son zénith.
C'était une petite maison de briques rouges, joliment décoré de milles et un coquillages, une porte caramel. On aurait dit une maison avec un style enfantin, tout droit tirer des rêves créatifs d'un enfant. Cela donnait déjà une idée sur les intérêts du ou de la propriétaire.
La porte entrouverte, je décidais donc d'entrer et parcourir ce même couleur que la porte, également décoré de coquillages. Le couloir débouchait sur un miroir et quatre pièces. Un miroir qui rendait mon reflet, remarquant mes cheveux sales et mon visage noirci... Je devais vraiment prendre une douche. Je devais puer ! Imaginez, mes cheveux bruns étaient devenus gris de poussières avec des particules d'or. Nouveau style absolument pas hygiénique !
Je m'armais d'un chandelier trouvé sur le meuble à côté du porte manteau vide. Être en possession de cette pseudo arme me rassurait.
J'entrais dans la première pièce de gauche, sans un bruit de préférence. C'était une salle de bain vomissant de rose de toutes parts ! Toutes teintes de rose confondues partout, partout ! Il y avait même des licornes à crinière arc-en-ciel sur les murs !
Ce décor me fit sourire, surprenant.
Dans l'autre pièce, rien de surprenant. C'étaient les toilettes, tout ce qu'il y a de plus banales. Ah, si ! Sur le dos de la porte il y avait un motif particulièrement drôle : un singe beige aux yeux bleus exorbités, coiffé d'une queue de cheval blonde, avec un chapeau de cow-boy rose !
Je me pinçais les lèvres pour ne pas rire, toutes les portes étaient entrouvertes.
Je pénétrais dans la pièce d'en face. Un véritable dépotoir. Des cartons, des carnets de photos, photos du monde... toute cette masse prenait la poussière.
Plusieurs planches de surf tenaient accrochées au mur. D'ailleurs, les murs et le plafond étaient bleu, bleu comme l'Océan Gëloven.
Je tombais sur une photo qui retint mon regard. Je passais mes doigts dessus pour retirer le voile de poussières. Un couple mixte d'âge mur et une fille aux longs cheveux noirs. Le visage de l'homme et celui de la femme me paraissaient familiers... malgré qu'ils soient plus jeunes.
La vérité finit par me frapper !
La Maison aux Coquillages appartenait à Kërcënimi O'Braack, la personne que nous étions venue chercher, signant l'aboutissement de notre quête...
La surprise me fit crier, mais un autre cri plus aigu que moi et plus puissant couvrit le mien. Un cri de détresse demandant à l'aide... puis le silence total.
Je ne m'attardais pas sur les autres souvenirs familiaux – ce n'était pas très respectueux de violer la vie privée des gens, encore pire sans leur accord – et me précipitais dans la dernière salle.
Je ne devais pas m'intéresser à ça en premier mais wow ! La chambre était toute aussi enfantine et rose ! Composée d'un lit double rose fuchsia, constituée d'un lit double rose fuchsia, d'une armoire au teint rose pâle, murs au motif de princesse...
Mais tout était sans dessus-dessous.
La chambre de la fille des O'Braack me fit passer du « Je vais exploser de rire vu la décoration » à « Euh............ Il faut que face quelque chose ! »
Mais, ce que je vis dépassa toute ce que j'espérais : Kërcënimi flottait inconsciente au-dessus du sol, entourée d'une espèce de nid de magie glaciale, Un nid blanc aux reflets bleus d'une lumière époustouflante.
Enfin je la voyais de mes propres yeux : C'était une jolie jeune femme attendant impatiemment la majorité, aux longs cheveux avec de belles boucles noires, aux petits yeux caramel pigmentés de rouge, avec un petit nez et des lèvres aussi fines et blanches que sa peau.
Elle était entourée de quatre Glacés, source du pouvoir des sorts de glace qui la maintenaient dans cette situation de paralysie.
Ils ne t'ont pas encore remarqué. Fuis, c'est mieux pour toi. Sauve ta propre vie plutôt que la sienne, tu ne la connais même pas. Qu'est-ce que cela te chante de ne pas réussir ta quête ? Qu'as-tu à gagner, ou perdre ? Ferais-tu le poids face à autant de monde ? me stoppa ma tête, faisant écho à ma logique et mon instinct de survie.
Nooon ! Ne l'écoute pas ! Tu n'es pas comme ça ! Écoutes plutôt ton cœur, tu ne peux pas laisser cette femme sans défense. Que dirais-tu aux O'Braack en revenant sur Kurajo ou que penseront-ils de toi si tu ne les revois jamais et qu'eux ne revoient jamais leur fille ? Veux-tu encore une fois passé pour un lâche et risquer de perdre une vie, une vie que tu avais à charge en plus ? rétorqua mon cœur, faisant écho à ma sensibilité et mon instinct de solidarité inter-espèces.
Mon esprit avait tranché : Mon cœur prit le dessus sur ma tête, ma sensibilité prit le dessus sur ma peur, suffisamment pour m'offrir un minimum de courage dans ce corps de lâche.
Armé du chandelier, je sortis de l'ombre, appréciant l'effet de surprise. Puis, je frappais les membres de la Brigade Glacée avec hargne.
En les frappant, le flux magique était alors temporairement coupé, sans pour autant détruire le nid de magie glaciale. La coupure permit à la femme aux cheveux noirs de sortir de sa transe pendant quelques instants cruciaux.
— Zayn, libère-moi de leur emprise ! Je ne veux pas vivre ça, je ne peux pas le mériter ! s'écria Kërcënimi, distincte, d'une voix des plus suppliantes, fixant ses yeux dans les miens.
Sans attendre, comme je l'avais prédit, ils me désarmèrent sans difficulté et me repoussèrent avec force dans le lit. Chouette piste d'atterrissage !
Ensuite, trois Glacés reprirent leur esprit, réitérant le flux polaire. Par défaut, elle sombra de nouveau dans l'inconscience, malgré son instant de lutte.
Comment connaissait-elle mon deuxième prénom ? Comment était-ce possible ? Je ne l'utilisais jamais car je ne l'aimais pas... puis, je ne l'avais jamais vue de ma vie ! Enfin, sauf ici, quoi.
Je n'eus le temps de me torturer l'esprit davantage : le quatrième homme me toisait de son air déselfisé, impassible, préparant mon coup de grâce.
Je cherchais quelque chose pour contre-attaquer... mais ne trouvais rien. Alors, je décidais de me lever.
Et il chargea son rayon de glace dans ma direction, en continu. Par réflexe, mes mains se placèrent devant moi pour me protéger, même si j'étais persuadé que c'était inutile.
Et tout se passa très vite ! Une résistante déboula dans la pièce, armée d'un plateau d'argent trouvé je ne savais où, le plaçant in extremis entre moi et le rayon.
De justesse, soit à trois millisecondes de l'impact mortel. Le rayon ricocha dans la tête de son coéquipier, mourant sur le coup avec cette puissance d'attaque.
— Merci... fis-je, gêné.
— C'est pas le moment, pis, c'est pas toi que j'suis venu sauvé ! Mais merci à toi de m'avoir montré la voie ! rétorqua-t-elle, avec franchise.
Je fis un petit « Oh... » déçu mais compréhensif.
— Vous ne l'aurez pas Damoiselle ! Kërcënimi O'Braack est à nous ! déclara l'homme qui avait failli me tuer quelques instants plus tôt.
— Continuez de rêver, la Résistance empêchera la réalisation des malicieux projets de la Reine des Glaces pour détruire la Nation elfique d'El'Terra'Gevaar ! rugit-t-elle.
Par ailleurs, elle me paraissait familière... Ses yeux verts ne me semblaient pas étrangers.
— Vous arrivez trop tard, murmura l'homme de la Brigade, sournoisement.
Désormais, j'en étais sûr : La quête des résistants de La Délivrance et l'attaque de Loka n'étaient pas une simple coïncidence... Il y avait plus qu'à savoir pourquoi !
Si je survivais, évidemment.
L'homme sortit un appareil en forme de demi-sphère et joignit son Capitaine. Il l'informa qu'ils avaient « ce qu'[ils étaient] venus chercher » et qu'il suffisait de créer une diversion pour embarquer le corps sans contrainte. À comprendre : Sans Elfes contre l'Empire Glacé dans les pattes.
— Je ne vous laisserais pas faire ! persista la résistante, farouche.
Elle dégaina son sabre et le trancha en pièces sans résistance. Et l'imita, contactant les résistants.
Risqué, elle venait de demander à ses alliés de se rejoindre en un seul et même lieu, prête à tout pour sauver Kërcënimi. Mais pourquoi donner autant d'importance à une seule personne ? Étrange...
J'imaginais déjà la multitude de corps sans vie d'alliés comme d'ennemis recouvrant le champ de bataille... comme cela devait être à Dashuria après l'attaque, sans le moindre doute.
Les trois ennemis en uniforme ennemi déplacèrent le corps. Immédiatement, la résistante les attaqua, comme une mère protégerait ses petits dans la nature.
Toujours connecté au corps de la fille O'Braack, l'un d'eux tendit sa main : Un laser jaillit vers ma courageuse sauveuse.
Elle évita l'attaque d'un cheveu, le rayon fusant dans un tableau à la place qui commençait à geler. Une vapeur froide se dégagea autour de l'impact.
Ils finirent par sortir la fille des O'Braack en explosant la fenêtre pour « agrandir l'espace » pour leur permettre le passage.
Quatre hommes de la BG rejoignirent le nid de givre pour les dépanner. Le groupe se sépara en deux : La première partie se posta en extérieur au niveau de l'embouchure, et la seconde partie se plaça entre nous et le nid, notamment pour bloquer toute potentiel attaque de la part de ma partenaire de bataille... que je ne reverrais sans doute jamais.
Une fois remise de l'attaque, la résistante retenta.
Un Glacé s'apprêtait à la remettre à sa place quand l'un des hommes à l'extérieur leva la main, l'air négligeant. L'air de dire : « Ne lui fais rien. C'est inutile. Nous avons déjà ce qu'il nous faut ». Alors, le Glacé s'arrêta, l'air terriblement déçu de ne pas pouvoir changer la demoiselle insouciante en charpie, comme les autres satanés résistants mettant des bâtons dans les roues de Sa Majesté de Glace – devait-il pensé.
Tout de même, il la poussa violemment contre le mur, à côté du lit où je me trouvais.
Elle se retint fermement de gémir légèrement, se pinçant les lèvres. Son sabre tomba à côté d'elle, un peu sonnée.
Enfin, une chose incroyable se produisit : Des résistants apparurent, encerclant les hommes de la Brigade Glacée. Un homme bien particulier, d'au moins trente ans, se dégagea de la foule. Il avait de courts cheveux rouges, avec une frange épaisse tombant presque dans son œil gauche, quelques cicatrices couvraient son visage – et je songeais qu'il devait en avoir beaucoup d'autres ! – ainsi que des yeux gris, un nez tordu, et des lèvres rouges très charnues.
Il portait une tenue de pirate comme vous et moi connaissons ! Je ne pouvais douter de sa surpuissance en vue de son arme à feu – très peu répandue sur El'Terra'Gevaar – par rapport aux Elfes... mais par rapport à des êtres capables de manier l'art de la cryokinésie destructrice, cela ne permettait pas le titre de « surpuissant ». Il était équipé d'un sabre également. Il avait tous les attraits d'un véritable pirate !
— Vous avez perdu, rendez-vous. Redonnez le droit de vie à cette femme... Ou vous mourrez tous ! déclara-t-il, sans pitié.
— Euh... fit un Glacé, joueur, ne redoutant aucunement la Résistance.
Il osa un pas.
Le résistant tira. Le Glacé reprit sa place initiale.
— Génial ! s'exclama « ma partenaire », ravivée. Nous avons encore une chance...
— C'est trop facile... contrais-je avec mon fâcheux pessimisme.
Il m'était évident que les Glacés étaient supérieurs en puissance qu'une tribu d'êtres sans pouvoir !
Elle grogna un propos incompréhensible. Un juron des temps anciens ? Son grognement s'accentua dès lors qu'elle vit que j'avais raison.
Les quatre Glacés levèrent leurs mains en signe de capitulation, leur sourire prétentieux ne les quittant aucunement.
— J'aimerais bien me rendre... Mais Monsieur Pirate, penses-tu que nous, les Glacés, avons joué toutes les cartes en notre possession ? Crois-tu que nous sommes si peu nombreux ? lança le même homme, trompeur puis méprisant. Vous vous êtes fait avoir comme des bleus. Moi qui jugeais la Résistance beaucoup plus préparée... Cessez d'être aussi naïfs et imprudents. Vous pensez déjà avoir gagner alors que c'est pas le cas.
Son arrogance me donnait la gerbe, vraiment.
— J'te permets pas d'insulter la Résistance ! réprima le pirate, faisant claquer sa langue.
— Désolé, je fais que juger les faits, dit-il avec une hypocrisie non voilée.
— Assez, mon cher. Il est temps d'en finir. Nous avons déjà perdu assez de temps comme ça ! Tu vois, Red, il bluff ! répliqua un autre résistant, impatient d'en découdre.
— Tout à fait ! approuva le dénommé Red, dressant son sabre.
Le Glacé arqua un sourcil.
— Justement, j'allais y venir très cher. ASSEZ PARLER, FINISSONS-EN ! cria ce dernier avec intensité.
Les ennemis ne bougeaient pas face aux ordres ni face aux résistants qui brandissaient leurs armes. Cet instant me parut aussi long que notre interminable traversée dans les plaines et le désert.
L'instant passé, l'intégralité des Glacés jaillirent de leur cachette : Leurs lasers bleus foudroyèrent les trois quarts des résistants.
Si limpide... que personne ne put riposter.
Les corps se gelèrent vivement et, au contact du sol... ils explosèrent en mille morceaux. Le seul truc positif, c'était qu'ils n'avaient pas souffert...
Par chance, Red avait évité l'attaque. De peu.
— C'était le premier à éliminer ! Bandes d'incapables ! Il est trop influent pour rester en vie ! maugréa le même Glacé.
Le golem de glace, l'un des Capitaines de la Brigade, sauta d'une maison, provoquant un mini tremblement de terre. Ensuite, il se dressa devant le Glacé qui dirigeait les opérations.
— Les ordres ont changé. On décolle maintenant, les gars ! informa-t-il, avant de chuchoter distinctement avec frustration. Si j'étais le seul à décider, cela aurait fait bien longtemps que l'on aurait pu se défouler sur ces traîtres...
Même si on voyait clairement son mécontentement face à la décision prise en commun... ainsi que l'envie irrémédiable de nous éclater la tronche.
Par ailleurs, son armure de glace commençait à fondre. Pour je ne savais quelle raison, il donna un coup de pied dans le ventre du Glacé, le forçant à se courber, comme pour affirmer son autorité.
— Bon, j'ai dit, on décolle ! réitéra-t-il, plus fortement encore.
Vivement, la trentaine de Glacés se rapprocha du cocon de glace, partageant cet état de transe en compagnie des trois premiers à avoir emprisonner Kërcënimi O'Braack, lui privant le contrôle de son corps.
Ils offrirent leur pouvoir élémentaire au cocon pour enrichir sa forme, le fortifier, pour d'obscures desseins. Les Glacés appartenant à la boucle, les reliant par le flux de magie polaire, avaient tous les yeux lumineux de la même couleur du cocon.
Et les transformations s'opérèrent : Une sphère se forma au-dessus du corps de la femme brune, reliée à un léger flux plus clair considéré par des fils magiques s'entremêlant entre eux dans la confusion. Je ne savais toujours pas pourquoi ils faisaient tout ça, mais la puissance réunie dans cette sphère était parfaitement visible, la ressentant distinctement faisant tendre mes muscles.
Puis, des « bras » de la taille de ma tête avec un crochet à chaque extrémité jaillirent de la sphère. Ils agissaient comme des fouets, violents et givrants. Ils attaquèrent les résistants.
Cette sphère était un véritable centre offensif d'une machine destructrice... prenant sa source dans le corps d'une Elfe à l'apogée de sa vitalité.
Dans tous les cas, le message était clair : « Tu te fais toucher, t'es mort » OU presque.
Le désastreux flux de magie polaire métamorphosa notre environnement : Les températures douces du printemps chutèrent pour rejoindre nos températures hivernales ; il commençait à sérieusement neiger. Le quartier du Nord de Loka était plongé dans l'hiver !
Les résistants étaient conscients qu'ils avaient perdu : S'ils s'approchaient du corps, c'était la mort assurée. Le golem de glace – dont son corps venait de se reformer à cause du changement temporel – semblait nous laissait une chance de survie.
J'entendis la résistante adresser des prières d'espoir à la Déesse, notre Créatrice, en murmures.
— Mère Nature, Mère de toute la Nation des Elfes, je vous en prie, écoutez-moi...
Ils vont détruire vos créations, tout détruire. Ils dérèglent vos saisons, ils tentent d'installer un hiver éternel, mortel pour la faune, la flore et nous, sur El'Terra'Gevaar... Si ça arriverait, vous serez impuissante face à la Reine des Glaces, vous devez faire quelque chose... Nous n'avons pas réussi aujourd'hui d'empêcher sa création... C'est pour cette raison que je vous supplie de nous aider ! répétait-elle, les mains jointes, obstinée.
Elle était très optimiste la petite, moi, Mère Nature n'avait jamais répondu à mes prières !
Fiouuu ! Fiouuu ! Fiouu ! Des bruits brefs retinrent notre intention.
Les Glacés nous faussaient déjà compagnie en emportant le « cœur de givre » ! Les résistants se plaquèrent au sol, paniqués, face à cet ultime assaut.
Des flèches sortirent de nulle part, se plantant avec précision dans les cœurs des Glacés, tombant un à un à une vitesse impressionnante. Un être masqué dans l'ombre était l'auteur de ses exploits surprenants.
— ... Qu'est-ce ? Enfin, qui est-ce...? fit la demoiselle à mes côtés, médusée.
Elle n'était qu'une parmi tant d'autres à être stupéfaite.
— C'est... Kéolys Turíndo, mon frère jumeau ! exclamais-je, exprimant toute l'admiration que j'avais pour lui.
Pour être parfaitement honnête, c'était bien la seule « chose » dans ma vie auquel je pouvais être aussi fier, mon frère étant beaucoup plus héroïque, talentueux et téméraire que moi, impossible de le nier.
— Mère Nature nous a envoyé un Héros !
On sentirait presque de l'admiration dans sa voix. Moi, jaloux ? Non, du tout ! Les trucs de stars, de héros, c'est vraiment pas pour moi, vous savez !!
Kéolys était accompagné de Kazul qui le prévenait des ennemis comme un radar, sans pour autant avertir l'entourage en chantonnant puisqu'ils possédaient un lien télépathique leur permettant de se comprendre sans parler.
Tobby revint également sur le champ de bataille aux côtés du « sauveur » : Il n'allait pas laisser Kazul rester l'unique vedette quand même, hein !
Mon tokës des forêts dévia plusieurs tires des Glacés, sauvant de nombreuses fois la vie à Kéo. Hélas, Red fut obligé de le ramener hors champs de tire du « cœur de givre » et des Glacés car il s'était tordu la patte gauche, l'exposant à un grand danger.
Il lui avait sauvé la fin in extremis, un fouet de la machine de glace venait de faucher l'endroit même où il se trouvait il y a quelques instants.
Le Soleil Orange tentait une percée musclée dans le ciel brumeux de l'hiver artificiel.
— Mère Nature tente de faire fondre la « sphère hivernale » et libérer la femme ! lança la jeune femme, persuadée et soulagée. Un bon point pour nous !
— Si tu le dis... C'est peut-être aussi le fait que Kéo a affaibli quelque peu l'arme suite à ses meurtres à répétition, contrais-je, encore.
Raaah ! Foutu pessimisme quand tu nous tiens !
Je sentis clairement cette envie irrépressible en elle de m'étrangler, juste par plaisir et pour se détendre.
Malgré les monumentales exploits de Kéolys, la Brigade Glacée restait toujours en nette supériorité numérique. Les bras du « cœur de givre » ciblèrent Kéolys, déterminés à le voir tomber pour de bon.
Le Capitaine de la BG hurlait des ordres menaçants, les feux étant relancés, sans user de violence envers ses soldats cette fois.
Kéo se retrouva précipitamment encerclé par les bras glacés. Il suffisait qu'un autre bras face son apparition, et il serait transpercé, ne sachant pas se concentrer sur un de plus. L'Ennemi ne le laissa pas attendre dans l'angoisse : Notre crainte se réalisa, un bras le fouetta sans crier gars.
Il tenta de se défendre en tirant une flèche, en vain, se brisant en deux à l'impact. L'épouvante se lisait sur son visage, des gouttes de sueur perlant sur son front.
Kéo voyait sa mort arriver peu à peu, sans nulle échappatoire.
Le bras se rapprocha et se rapprocha encore à une vitesse foudroyante.
Et... IMPACT !
Alors qu'il croyait que sa fin approchait, il constata que l'impact avait bien eu lieu mais il n'avait rien. Dès qu'il ouvrit les yeux, il découvrit le pirate du nom de Red, son visage crispé face à lui.
— Pour avoir redonné espoir à mes Elfes, tu méritais au moins ça... souffla le pirate aux cheveux flamboyants, d'une voix douloureuse.
Le bras le toucha pleinement désormais. Il hurla de douleur, tombant à genoux, la tête tombant dans la fine couche de neige blanche.
Il expectora pas mal de sang, semblant se décrocher les poumons.
Le sacrifice du Leader Red fut gravé à jamais dans la mémoire de mon frère et de la mienne... Un Red sous cette vision d'horreur, de souffrance, de cet homme victorieux.
L'archer désigné comme un Héros se dressa, seul, contre les Glacés de la Brigade détachés de l'arme destructrice.
Cette dernière osa une autre tentative. Limpide, il ne se fit pas avoir deux fois et les bras se refermèrent sur... du vide. La « sphère hivernale » comme disait l'un des résistants ne fut guère contente.
Le cocon nuageux la protégeant du Soleil Orange se remit en service au-dessus d'elle. Des couches et des couches de neige furent éjectées de l'entité magique intelligente, puisant son énergie dans le corps de ses adversaires et d'une jeune Elfe, tout autour d'elle même. Ce n'était pas très défensif, mais cela montrait son énervement face aux êtres qui lui résistaient avec aplomb.
— Túlkas Red ! s'écria la résistante, la tête dans les mains. Noooooon !
Puis, ni une, ni deux, elle sortit de l'abri, deux larmes coulant sur ses joues. Une détermination incomparable pétillait dans ses beaux yeux verts. Vraiment surprenante cette fille, elle était capable de changer d'humeur en deux secondes : passant de « Désolation immense » à « Je ferais tout pour le sauver ».
— Túlkas, j'arrive ! T'inquiète pas ! cria-t-elle, espérant qu'il puisse l'entendre.
Elle dégaina son sabre et sauta par la fenêtre pour secourir le pirate blessé en protégeant mon frère... un véritable inconnu à ses yeux.
Elle me fit comprendre que je devais faire quelque chose, moi aussi. Un homme me tendit un poignard affreusement aiguisé, manquant de l'attraper à cause de mes mauvais réflexes. C'était de la chance, puisqu'en vue de ma précision hors-pair, il serait tombé dans la neige.
Je contournais l'arme destructrice par la droite, le côté dépeuplé de résistants, de Lokéens, ni Glacés. Une voie sans personne me menant directement au Capitaine. Dans son dos, je lui sautais dessus. Serais-je devenu fou ? Est-ce cela le courage ?
J'enfonçais le poignard entre deux parties de l'armure de glace, fendant la tendre chair blanche du Capitaine de l'armée ennemie.
Il avait beau être deux fois plus grand que moi, cela ne l'avait pas empêché d'hurler de douleur et... de surprise. On aurait dit le géant et le nain !
— Descends, descends de là ! Maintenant ! ordonnait-t-il, furieux, réitérant sans discontinuité.
Il essayait de m'attraper, mais je me déplaçais avant qu'il ne puisse me mettre la main dessus !
— Maintenant, vous allez partir tout de suite. Nous sommes pas capables de lutter contre la Brigade Glacée. Alors, arrêtez ce massacre, maintenant ! Si vous voulez pas mourir, menaçais-je, avec les yeux du Diable, tout en l'étranglant de toutes mes forces.
Je le sentais se plier à ma volonté. Kéolys me rejoignit vivement après avoir fui la terrible arme glacière, pointant une flèche en direction du torse du Capitaine.
— Faites ce qu'il dit, ou je n'hésiterai pas à tirer ! Et vous savez que je plaisante pas, vous m'avez déjà vu à l'œuvre !
— En revanche, si vous m'achevez, mes soldats vous déchiquetteront sur le champ. Ils n'accepteraient pas de laisser les survivants qui ont ôté la vie à leur chef, question d'honneur et de loyauté, répliqua le Capitaine du tac-au-tac, se gonflant de puissance comme s'il retrouvait sa position de force.
— On parie ? tentais-je, joueur, resserrant mon étreinte sur son cou.
— Il a raison, Néo... stoppa Kéolys, en train de se raidir.
Je desserrais alors mes mains autour de son cou, retirant également le poignard, sans pour autant me déloger. J'appréciais les effets que me sentir grand me procuraient.
Le Capitaine rapprocha ses mains glacés, fortifiées par l'armure le recouvrant, où un flux de magie glaciale s'y concentra. Et, il envoya la sauce sur... Kéolys !
Par instinct de survie, je sautais par-dessus son cou, atterrissant devant lui.
Mon frère s'était accroupi, les mains devant lui prêtes à subir l'impact.
Je fis de même, mettant mes bras devant moi comme les boxeurs qui affirmaient leur garde.
Sous les yeux de la résistante qui tirait le corps de Túlkas Red blessé et de tous les autres survivants conscients – je n'étais pas sûr que les Glacés contribuant à la puissance de la « pieuvre de glace » soient conscients, pour être parfaitement franc, jugeant que non puisqu'ils paraissaient déconnectés.
Je me pris le rayon glacial de plein fouet.
La réaction de mon métabolisme face à l'attaque me surprit moi-même : Certes, j'eus mal, mes bras brûlant à cause du froid. Mais je n'avais pas plus de douleur que ça, par rapport à ce que les autres Elfes exprimaient. J'étais pas mort, j'avais pas trop gelé, c'est l'essentiel !
— Co... Com... Comment est-ce possible ? Aucun Elfe n'a jamais résisté à l'une de mes attaques ! Tu aurais dû mourir satané Elfe ! Comme tes prédécesseurs ! Espèce de démon ! s'écria le Capitaine, apeuré comme si j'étais un monstre.
— Peut-être avez-vous trouvé plus fort que vous ?! Il serait temps de s'attaquer à des personnes de sa taille plutôt que chercher toujours plus faibles que soit ! me défendit Kéo avec fermeté.
Il tomba à genoux, dépité. Kéolys s'apprêta à en finir, plaçant un poignard sous sa gorge. Je lui tendis la main.
— C'est lâche... On tue pas un homme à terre. C'est déloyal. Tant bien même il a tout pour le mériter ! exclamais-je, justement impartial.
Compréhensif, il rangea son arme.
— Je me rends, répondant avec fierté et honneur à nos adversaires. Nous rentrons, annonça le Capitaine, résigné à tous nous détruire.
— Crois-tu qu'il est sincère ? me consulta Kéolys, méfiant.
— Oui, il l'est, approuvais-je, sûr de mon diagnostic, faisant confiance à mon instinct.
Le Capitaine leva la main et les tentacules de la pieuvre disparurent puis se fut son cœur qui cessa de luire comme une étoile filante. Autrement dit, la plupart des Glacés reprirent alors conscience de leur corps et reprenaient le contrôle sur leur pouvoir.
Organisés comme des machines militaires, ils avancèrent vers le Nord pour rejoindre Monarkia, la Capitale d'El'Terra'Gevaar et résidence de la Reine de Glace, entourant au péril de leur vie le cocon retenant prisonnier la fille des O'Braack.
Le Capitaine en tête de marche. Il avait tenu parole.
Nous avions remporté la bataille, mais sûrement pas la guerre. Nous avons minimisé les pertes du côté des villageois comme des meilleurs éléments de la Résistance.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top