Chapitre 4
Le vendredi, c'était sa journée préférée. Il pouvait danser toute la journée. Pendant ses cours, entre ses cours, pendant la pause repas, qu'il prenait dans sa salle, après ses cours. Toute la nuit, même, s'il le voulait.
Kidou se leva de son lit, commençant sa routine habituelle. Sa coiffure. Sa tenue. Son café. Ses clés. Son sac. Ses chaussures. Le bus. Et puis, en descendant du bus, il marcha en direction du bâtiment principal. À peine entré, une annonce retentit.
Le proviseur, Michiya Kudou, le convoquait dans son bureau. Ne cherchant pas à comprendre, il s'y rendit, passant en revue ses anciens cours, se demandant s'il avait fait une bêtise. Arrivé devant le bureau de Kudou, il toqua deux fois avec son point, avant d'ouvrir la porte.
« Bonjour, Kidou-kun. Où préfères-tu Yuuto ?
— Comme vous voulez, dit Kidou, fermant la porte derrière lui.
— Laisse ouvert, je te prie. »
Un peu surpris, il rouvrit la porte. Devant celle-ci se tenait son pire cauchemar ; Reiji Kageyama. Il recula, instinctivement.
« Cela faisait longtemps, Kidou-kun...
— Kageyama... ? Que faites-vous ici ?
— Kageyama est venu avec ses élèves. C'est de ça que je veux te parler.
Kidou déglutit. Il reprit son sang-froid peu à peu, se rapprochant du bureau de Kudou. Ses poils s'étaient hérissés à la seule vue de Kageyama. Alors cet article était bel et bien vrai.
« A partir d'aujourd'hui, et jusqu'à Noël, tu devras entraîner les douze élèves de la Teikoku Gakuen. Ils doivent monter un ballet, pour le présenter le soir de Noël. Tes cours seront annulés. Tu n'iras pas assister à tes cours habituels, et tu n'en donneras qu'à la Teikoku. Je te ferai d'ailleurs parvenir les cours sont tu auras besoin par mail.
— Et Kageyama ? Demanda Kidou.
— Il assistera à tes cours le lundi et le mercredi. Toute la journée.
— Très bien. »
Kidou s'en alla après ça, sans lancer un regard à Kageyama, resté pour discuter avec Kudou. Il marcha d'un pas rapide à sa salle de danse, où il s'enferma. A peine derrière la porte, il tomba au sol, haletant fortement, hocquetant, même. Un flot de souvenirs ressurgissaient dans son esprit. Il secoua la tête, cherchant à enterrer ses cauchemars.
Onii-chan ! Tu veux bien danser avec moi ?
Il retira ses lunettes, les laissant tomber au sol. Il les jeta au loin. Il ne pouvait plus les voir. Il ne voulait plus. Il ne pouvait plus...
Yuuto !
« Tais-toi, tais-toi, je t'en prie... »
Kidou ! Plus haute, la jambe !
« Taisez-vous ! » Cria-t-il dans la salle insonorisée.
Pourquoi ? Pourquoi Kageyama devait-il revenir aussi violemment dans sa vie ? Pourquoi était-il encore là ?
Viens, Onii-chan, on va danser, ça ira mieux après, tu verras...
Kidou se recroquevilla contre lui même, serrant ses genoux contre son torse. Il lâcha un simple nom avant de fondre en pleurs silencieux.
« Haruna... »
***
« Je crois que c'est là. »
Le bleuté se stoppa devant la salle de danse. Derrière lui se trouvaient ses camarades.
« On toque ou on entre direct ?
— Poussez-vous. »
Le jeune étudiant poussa ses deux camarades, avant d'ouvrir la porte avec son pied. Celui qui était le capitaine lâcha un "espèce de bourrin". Ils entrèrent dans la salle, où l'on entendait un homme râler.
« Mais tu vas marcher oui ? »
Il tourna la tête vers la douzaine d'étudiants. Il se releva, mettant un léger coup à l'enceinte - visiblement dysfonctionnante - et replaçant ses lunettes bleues. Il toussota puis prit la parole :
« Bonjour à tous. Je suppose que vous êtes les étudiants de la Teikoku Gakuen, et que vous me connaissez. »
La porte se referma. Puis, quelqu'un lâcha :
« Nan, j'te connais pas, moi, t'es qui ? »
Le garçon au crâne rasé sortit de la foule. Il écarquilla les yeux :
« Ah, si ! T'es le connard qui m'a bousculé hier soir !
— Fudou ! Lâcha le garçon à la crinière de lion.
— Je ne suis pas un "connard", je me nomme Kidou Yuuto.
— Kidou... ça me dit rien.
— Tu le fais exprès ou quoi ? Kidou Yuuto, c'est le danseur le plus connu à Tokyo ! Tu l'as déjà oublié malgré mes efforts ?! » S'étonna un garçon aux cheveux verts, avec un masque blanc.
Kidou avait déjà reconnu les quatre étudiants de la veille. Et celui nommé Fudou était déjà encré dans son esprit, étrangement.
« S'il vous plaît. A partir d'aujourd'hui, je serai votre professeur. Je vous enseignerai tout ce qu'il faudra pour votre ballet. Soyez prévenus directement, je n'accepterai aucun relâchement de votre part. Même si je doute que vous essayiez.
— Que voulez-vous dire ? Demanda le bleuté au cache-œil.
— Vous ne devez pas vaincre Kageyama ? »
La crinière de lion esquissa un sourire, avant de s'incliner légèrement.
« Nous nous en remettons à vous pour cette entraînement, Kidou-san. Nous espérons qu'avec vous, Kageyama-san soit scié au fond de son siège, lors de la représentation. »
Kidou lâcha un petit rire.
« Bien. Nous allons commencer par les bases, aujourd'hui. Les étirements, et évidemment, savoir quel ballet vous voulez. Avant tout, partez vous changer. Celui qui n'a pas sa tenue devra me faire cent pompes. »
La douzaine d'élèves partit dans les vestiaires. Kidou s'étira les bras, lâchant un bâillement. Il avait hâte de voir ce que la Teikoku avait en réserve.
* * *
« Fudou-kun, c'est ça ? »
Le concerné leva la tête vers Kidou. Ils étaient désormais tous changés, sauf un.
« Tu vas me faire cent pompes, s'il te plaît.
— Pfff... »
Les mains dans les poches et grommelant, il s'exécuta. Kidou s'approcha des autres, les faisant s'échauffer. Il interrogea chaque danseur, demandant son nom et sa motivation. Chacun avait une motivation différente, ou, au contraire, la même que d'autres. Lorsqu'il interrogea le bleuté, Sakuma, il lui répondit :
« Je n'ai plus envie de faire du football de cette manière. Je ne veux plus jamais jouer pour Kageyama-san.
— Sakuma-kun, est-ce qu'il t'a montré une technique de football ?
— Une technique, dites-vous ?
— Interdite. »
Kidou fixa Sakuma dans les yeux. Ils avaient très bien compris tous les deux ce que l'autre voulait et savait.
« A Genda aussi. C'est pour cette raison que nous avons suivi Fudou.
— Suivi ? On dirait plutôt qu'il est là parce qu'on l'a forcé. »
Fudou, un peu plus loin, faisait ses pompes. Il en était déjà à soixante. Sakuma fit tourner ses poignets.
« Ça va peut-être vous surprendre, mais c'est lui qui a lancé ce défi à Kageyama-san. »
Kidou s'écarta de Sakuma, le laissant s'échauffer. Il fixait Fudou. Il voulait en savoir plus sur lui. Quelque chose lui disait qu'il lui ressemblait. A la fin de la journée, après avoir cerné les compétences de chacun, Kidou stoppa Fudou, le forçant à rester dans la salle.
« Tu me veux quoi ?
— Je suis ton professeur, s'il te plaît. Un petit vouvoiement ne serait pas de trop.
— Vous me voulez quoi ? Répéta Fudou, levant les yeux au ciel.
— Je dois te parler de quelque chose.
— De votre playlist de spéciale tango ? Ironisa Fudou.
— De Kageyama. »
Fudou stoppa son rire. Son regard croisa celui de Kidou.
« J'écoute.
— C'est bien toi qui lui as proposé ce contrat ?
— Oui.
— Je peux savoir pourquoi ? Simple curiosité.
— Il est allé trop loin. On faisait partie des deux clubs, foot et danse, mais en football, il nous poussait au delà de nos limites. Quant à la danse, il créait des exercices si durs qu'on avait du mal à tenir.
— En vous obligeant à utiliser des techniques interdites, au football ?
— Bordel... comment tu...
— Je faisais partie de la Teikoku Gakuen, avant, du club de football et de danse, mais j'ai fini par partir. Il était allé trop loin. Sauf qu'il s'est vengé, et ce qu'il a fait, jamais je ne pourrai lui pardonner. Je me vengerai avec vous.
— Kidou... Il t'a fait quoi, au juste ? »
Kidou ferma les yeux. Est-ce qu'il pouvait vraiment raconter ça à un étudiant ?
Yuuto !
« Je ne peux pas te le dire.
— Tu te fous de moi ?
— J'ai le droit d'avoir une vie privée. Ce n'est pas parce qu'on se connait depuis une journée que je vais t'ouvrir mon cœur. »
Fudou expira par le nez. Il n'avait pas tort.
« Tu rentres pas ?
— Je suis toujours seul chez moi, alors je m'en fous de l'heure à laquelle je rentre.
— Je vais rentrer, moi.
— Tu me servirais un verre, chez toi ? Histoire de trinquer à note future vengeance ?
— Et te laisser faire des repérages pour me cambrioler ? Et puis quoi encore? Ironisa Kidou.
— Roh ça va, les seules choses que j'aie volé c'est des chips dans un Konbini. »
Kidou sourit, amusé par la révélation du brun. Il accepta finalement de le laisser venir, et tous deux sortirent de l'Université tout en discutant des membres de la Teikoku Gakuen.
« Tiens, c'est pas Kidou, ça ? Fit Hiroto, assis sous un arbre dans le campus.
— Ah, si, mais qu'est-ce qu'il fait avec un étudiant de la Teikoku ? Lâcha Midorikawa, levant les yeux de ses fiches.
— Aucune idée... Qu'est-ce qu'il s'est passé entre eux ? »
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