Chapitre 28
Il était là. Juste là. Il lui tenait le poignet, sans bouger. Comme paralysé.
Ils restaient là, au milieu de la foule de la gare. Incapables de bouger.
Kidou tenait le poignet de Fudou.
Les larmes aux yeux.
Les joues rouges.
La gorge nouée.
- Yuuto... ?
L'intéressé sourit doucement. Fudou lui fit lâcher prise, avant de se blottir dans ses bras.
- Yuuto... Yuuto ! Merde, Yuuto...
Fudou laissa ses larmes couler, ne se souciant plus de ses pleurs qui se faisaient entendre, où les passants qui se tournaient vers eux, les dévisageaient. Il tirait sur la veste du danseur, très fort. Il était bien là. Là, avec lui.
- Akio...
Ils se serrèrent longtemps l'un contre l'autre. Fortement. Le visage dans le creux du cou de l'autre. Et au moment où ils s'écartèrent, ils échangèrent un baiser. Le premier depuis trois mois. Qui relança son cœur. Qui redonnait de la joie à Fudou. Une raison de vivre. Une envie de se rebeller. Qui le fit renaître.
- Tadaima, Akio.
- Okaeri nasai, répondit le brun, essuyant les larmes sur ses joues.
Et ils sourirent tous deux, heureux. Si heureux qu'ils lâchèrent en même temps :
- Tu m'as manqué.
* * *
Kidou observa son téléphone. Son nouveau téléphone. Malgré le fait qu'il ait rompu contact avec Fudou, il se souvenait encore de son numéro. Il voulait l'appeler. Il était parti deux mois et demi plus tôt. Hiroto avait-il tenu son engagement ? Fudou allait-il bien ? Le danseur reposa son téléphone. Il ne pouvait pas craquer maintenant.
Il s'étira, et commença à danser. Une danse après l'autre. Se perfectionnant dans chacune. Comme lorsqu'il avait perdu sa sœur. Il ferma les yeux, seul dans la salle. Haruna le rejoignit, lui tendant les mains. Il exécuta une danse avec elle. La danse. Sa seule façon de tout oublier autour de lui. Comme s'il était seul dans l'univers. Dansant avec le vide, l'espace et le silence, pour toujours. Dansant avec elle pour toujours.
Avec Haruna, pour toujours. Du moins, jusqu'à l'arrivée de Fudou.
« Il va falloir que tu arrêtes. »
- Haruna...
« Tu te détruis de l'intérieur, Onii-chan. »
- Je n'ai aucun remords. J'ai fait ça pour Akio.
« Parce que tu crois qu'une personne comme Hiroto Kira a tenu sa promesse ? »
Kidou ouvrit les yeux. Il regarda autour de lui. Haruna avait déjà disparu. La porte de la salle s'ouvrit sur un jeune garçon aux cheveux bleus foncés, un peu timide.
- E-Excusez-moi, il est presque vingt-heures, on va bientôt fermer...
- Putain, il en reste un ?! Cria une voix de l'extérieur.
- Onii-chan ! Aie un peu de respect pour Yuuto Kidou !
- Qui ça ?
Kidou esquissa un sourire en voyant le plus jeune des deux garçons faire un speech sur lui.
- Je vais chercher mes affaires et j'amène les clés.
- Ah, je, d'accord !
Kidou lâcha un soupir avant de choper son téléphone. Il regarda ses messages avant de récupérer ses affaires. Une fois sorti de la salle, il tendit les clés à l'aîné des Ichihoshi. Le cadet le remercia, lui souhaitant de revenir. Kidou fixa son téléphone. Puis, il composa le numéro de Sakuma.
Il lui demanda d'abord des nouvelles de l'équipe, puis de Fudou. Son sang ne fit qu'un tour lorsqu'il entendit le "rapport" de Sakuma.
Les pleurs de Fudou. Ses crises de paniques. Ses moments de faiblesse.
Il vivait trop mal son départ. Mais surtout, Hiroto n'avait pas tenu sa promesse. Lorsque Kidou raccrocha, il serra son téléphone dans sa main, avant de lâcher un hurlement.
Et le lendemain, il partait pour la ville d'Inazuma.
* * *
Le garçon s'avança doucement vers la salle de repos de son père. Il ouvrit lentement un battant après avoir toqué. Il passa la porte, avant de la refermer. Il s'assit sur le bord, un bouquet à la main. Il fixa le bambou qui claquait sur la pierre, un peu plus loin, déversant de l'eau. Il relâcha tous ses membres, se laissant glisser au sol, assis, plus vide qu'un pantin.
- Joyeux anniversaire, maman.
Le vent donna une réponse à Hiroto, qui se redressa avec difficulté. Il avait toujours cette sensation de tomber au sol, comme s'il n'avait plus de force. D'années en années, l'atmosphère pesante ne faiblissait pas.
- J'ai retrouvé Akio, souffla le gris en déposant le bouquet sur la tombe. Il était heureux. Et il continuait de danser.
L'adolescent s'assit derrière la tombe, s'appuyant légèrement sur la pierre tombale grise.
- Je me sens à la fois bien et totalement con.
- A mon avis, tu ne devrais te sentir que con.
Hiroto se retourna vivement, rouge de honte. Hiroto Kiyama referma le battant, avant de descendre de la maison.
- Qu'est-ce que tu fais là, Kiyama ?
- Je t'ai déjà dit de m'appeler par mon prénom, répondit le rouge.
Le grisé passa une main dans ses cheveux, une fois debout, râlant qu'il refusait d'appeler quelqu'un portant le même prénom que lui.
- Écoute, Hiroto. Il faut que tu arrêtes, avec Akio.
- Je peux pas arrêter. Pas tant que maman me le demandera.
- Hiroto, ta mère est morte !
- Et à cause de qui ?! Hurla le grisé, serrant les poings et baissant la tête.
Le roux écarquilla les yeux en entendant la voix d'Hiroto. Brisée. Plus tremblante que jamais. Et il laissa échapper un soupir en voyant les larmes couler sur les joues de l’héritier Kira.
- C'est sa faute ! Elle s'est suicidée à cause de lui !
- Hiroto…
- Pourquoi fallait-il qu'il m'arrache la seule personne qui m'accordait de l'attention ?! Tu ne peux pas comprendre ! Tu pourras jamais comprendre !
Hiroto reprit son souffle lentement, avant de cracher sa haine :
- Père t'a toujours préféré à moi, toujours ! Hitomiko ne voyait que l'orphelinat ! Seule maman me regardait ! Je voulais juste...
Le grisé se courba, plantant ses ongles dans ses paumes, sous les yeux d'un Kiyama attentif.
- Je voulais juste qu'elle puisse reposer en paix...
- Tu n'étais pas obligé d'aller aussi loin.
Les deux Hiroto relevèrent la tête vers la pièce de repos de Seijirou Kira. Fudou descendit à leur niveau, tenant un bloc de glace dans sa main.
- Akio...? Mais qu'est-ce que tu...
- C'est Ryuuji qui m'a amené ici. Tu vois mon œil ?
L'héritier Kira s'attarda quelques minutes sur la paupière du brun, gonflée et violette. Fudou posa son sachet bleu dessus.
- C'est mon père qui me fait ça, depuis deux mois. Il me bat. Pourquoi ? Parce que je l'ai foutu en prison. Pourquoi ? Parce qu'il me frappait. Pourquoi ? Parce que ma mère est morte. Parce qu'il l'a tuée. On fait tous des erreurs. Parfois on les regrette, parfois c'était nécessaire de les faire pour avancer, que ce soit pour nous ou pour quelqu'un d'autre. Kageyama-san ne voulait sans doute que nous endurcir. Nous montrer que nous n'étions que des enfants faibles. Si il n'avait pas été là, peut-être que je me serais suicidé, moi aussi.
- Akio, tu divagues...
- Hiroto, tu voulais juste la venger, et c'est compréhensible. Mais si tu étais venu me voir et que tu m'aurais demandé de l'argent, j'aurais accepté.
Fudou se baissa près de la tombe, souriant doucement.
- Moi aussi, je l'aimais beaucoup, tu sais ? Alors pardonne-moi. Je suis désolé qu'elle soit morte par ma faute.
Un cri brisa le silence que Fudou avait laissé. Puis, des pleurs, étouffés. Fudou se tourna vers Kiyama, qui serait le grisé contre lui. Le brun fouilla dans sa poche et sortit une photo. Deux jeunes femmes rayonnantes, se tenant par les épaules, avec des médailles d'or.
Aimi et Yumiko, deux amies d'enfance, pour toujours et jusque dans la mort.
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