Chapitre 5

/!\ La fin du chapitre aborde un sujet dur qui peut heurter la sensibilité des plus jeunes /!\

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Le samedi est bien entamé quand je décide d'aller faire quelques courses. Je n'ai plus rien à manger. En dehors du lycée, je n'aime pas trop sortir de chez moi, à part pour aller me promener en forêt. Mais j'y suis obligée, si je ne veux pas mourir de faim. J'enfile une veste et prends mon sac avant de sortir. Je m'engouffre dans ma voiture et démarre, direction le supermarché.


Je ne mets pas longtemps à trouver ce que je cherche. J'espère finir mes courses au plus vite.  

— Je vois que vous allez mieux.

Je sursaute et me retourne brusquement. Le médecin qui m'a soignée se trouve derrière moi, un panier dans la main droite. Cependant, il a l'air soucieux. Et je n'en saisis pas la cause car ce n'est certainement pas moi. Je l'observe quelques secondes avant de me dire que je n'ai pas à me préoccuper de lui.

— Grâce à vous.

Il hausse les épaules.

— Je n'ai fait que mon métier.

— Vous n'étiez pas obligé de me soigner, je lui fais remarquer.

— Je dois beaucoup à Gabriel, m'informe-t-il.

Evoquer Gabriel, me fait du mal car ça me rappelle ma vie d'avant, quand j'étais encore un ange.

— Et puis, vous n'êtes pas beaucoup à être déchus, alors ça ne me pose pas de problèmes de vous soigner.

Le médecin semble moins froid que d'habitude, enfin que lorsqu'il me soignait. Et j'en profite pour lui poser quelques questions.

— Gabriel fait toujours ça ?

Il fronce les sourcils.

— Quoi ? Aider les déchus ?

J'acquiesce, attendant sa réponse avec impatiente. J'ai tellement envie de savoir pourquoi Gabriel m'a aidée. Il n'aurait pas dû le faire normalement. Il a pris de risques même si aucun ange n'aurait protesté si on avait découvert que ce qu'il avait fait.

— Parfois. Il fait ça avec ceux qu'il aimait. Il y en a qu'il n'aide pas alors dites-vous que vous êtes chanceuse.

Et la conversation se finit là. Gabriel m'aimait bien. Pourtant, je n'ai jamais rien fait. Je me suis toujours contenté de respecter les lois et d'obéir aux ordres. En tout cas, même je ne reverrai jamais Gabriel, je le remercierai toujours car sans lui, qui sait où je serais en ce moment et surtout dans quel état. Je reprends donc mes courses et les finit rapidement.


Le Lundi, Thala et Quinn ne semblent pas de bonne humeur. Olivia n'est pas aussi joyeuse que d'habitude et ça m'inquiète. Qui s'est-il passé pour qu'ils soient aussi tendus ? Je trouve rapidement ma réponse quand je vois les regards venimeux que lancent les Ravens aux Forget, surtout celui d'Antoine est venu accompagner Maria. Les deux familles se fixent, immobiles, comme si elles attendaient que l'autre bouge pour faire de même. Cette situation est inhabituelle et les humains les regardent trop curieusement. Ils vont finir par se poser des questions. Voir deux familles se détester autant, n'est pas commun pour les humains. Ça sort de l'ordinaire et je suis sûre que beaucoup voudraient savoir pourquoi comme moi. Je soupire en descendant de ma voiture. J'essaie de ne pas me faire remarquer mais mon odeur me trahit sûrement. Le regard noir d'Antoine se pose sur moi et je ne peux pas le soutenir. Je détourne rapidement les yeux. Je me demande vraiment pourquoi Maria est avec lui, surtout qu'elle semble en avoir peur. Mais ce ne sont pas mes affaires et je suis déjà assez préoccupée par Quinn. Cependant, j'ai cette envie de protéger la jeune fille. Je soupire une seconde fois. La journée va être longue, très longue.


J'ai observé Quinn pendant les deux heures de spécialité. Elle n'a pas parlé une seule fois. Elle n'a même pas bougé. Je me demande vraiment ce qu'il s'est passé ce week-end. Et surtout, je me demande comment va se passer le mercredi après-midi si elle reste de mauvaise humeur. En fait, ce n'est pas la journée qui va être longue, c'est la semaine qui va l'être.
Je ne quitte des yeux ni les Ravens, ni les Forget, de la journée et aucun mot n'est sorti de leurs bouches. Ils se contentent de s'observer méchamment, de se surveiller même. Et je me demande si ça ne va pas dégénérer. Dans tous les cas, le professeur Ravens, ne laisserait jamais rien arriver. Enfin, je l'espère.
Le mardi et le mercredi matin se passent exactement comme le lundi. Hostile. Même les humains, qui sont d'habitude si aveugles, ont remarqué que quelque chose cloche. Ils vont se poser encore plus de questions. Je retiens un énième soupire. Pourquoi ai-je atterri dans la seule ville où deux familles de créatures surnaturelles se haïssent ? Etait-ce parce que ma sentence était trop légère ? En tout cas, je commence à ressentir une certaine appréhension car Quinn devrait arriver dans seulement quelques minutes. Comment va se passer cet après-midi ?


Une, deux, cinq, dix, quinze. Quinn a quinze minutes de retard. Je me sens nerveuse. J'aimerais qu'elle vienne même si je redoute cet après-midi. Elle va sûrement être tendue et moins agréable que les précédents mercredis. Mais j'ai tellement besoin de cet après-midi. Cette fille est une bouffée d'air frais dans ma vie et ma routine. J'entends alors une voiture se garer dans l'allée et je n'attends même pas que la personne descende de la voiture pour sortir de la maison. J'esquisse un sourire en voyant Quinn.

— J'ai cru que tu n'allais pas venir, lui avoué-je.

Elle hausse les épaules et s'approche de moi. Elle me semble d'aussi bonne humeur que ce matin. Mon sourire faiblit alors et nous rentrons dans la maison. Comme d'habitude, nous nous installons sur la grande table en verre qui trône au milieu de la pièce principale. Elle ne parle pas et son regard se fait fuyant. Et je n'ose donc pas parler non plus.



Pendant plus d'une heure, le silence règne mais nous arrivons quand même à avancer l'exposé. Mais Quinn n'est si patiente que ça. Elle soupire pour la énième fois et je la regarde, amusée.

— Un problème ?

Elle relève la tête et est surprise en me voyant sourire. Je me sens de plus en plus détendue en sa présence. Je m'ouvre doucement et je n'arrive même plus à garder le masque que je me suis forgée. J'ai l'impression de revivre en sa présence. Elle secoue alors la tête.

— Aucun, ajoute-t-elle avant de reporter son attention sur ses feuilles. 

Je comprends donc que notre après-midi va se finir dans le silence. Quinn ne veut pas parler et ce n'est pas moi qui la forcerais à le faire. Cependant, à cause de notre manque de communication, nous avançons plus lentement que d'habitude. Mais je pense que par rapport aux humains, nous sommes en avance, même si le mercredi prochain sera le dernier avant de devoir rendre nos exposés le lundi suivant. Donc malgré notre lenteur, je suis plutôt satisfaite de nous.
Quinn part plus tôt que d'habitude, sans aucune explication mais je ne le retiens pas. Je referme la porte sur elle et vais rapidement me mettre au piano. Une douce musique mélancolique envahit la maison.


Je me réveille en sursaut. Mon rêve n'était pas très plaisant. Je grimace en me le rappelant mais le chasse rapidement de mes pensées. Je me lève et vais me rafraîchir dans la salle de bain. Je change de débardeur car celui que je porte est trempé de sueur. Je ne sais pas si j'arriverai à me rendormir et je n'ai pas envie de lire ou de jouer du piano. Alors j'enfile une veste et mets des baskets pour aller me promener dans la forêt, derrière chez moi. Ce n'est pas banal de sortir à plus de trois heure du matin mais j'en ai besoin. Il faut que je me change les idées. Heureusement aussi que je n'ai pas cours demain, sinon je ne sais pas si j'aurais été capable de suivre les cours correctement.
Il ne fait pas vraiment chaud mais il n'y a pas de vent. Et je soupire en me rendant compte de ma faiblesse. Je ne l'ai jamais été et je trouve ça frustrant d'être maintenant aussi fragile qu'un humain. J'étais un être mystique et j'en suis réduite à devoir marcher comme tous les êtres humains. Et je déteste vraiment ça !

Je ne compte pas les heures. Je ne sais pas depuis combien de temps, je dérive mais cela me fait du bien. Mais quelque chose vient troubler mon calme alors que ne suis plus qu'à une centaine de mètres de ma maison. J'entends soudain un bruit inhabituel. Je me fige, les sens en alerte. Est-ce un animal ou n'est-ce que mon imagination ? Je tourne sur moi-même, guettant le moindre bruit suspect. Je m'immobilise en voyant alors deux yeux me fixer. Deux yeux violets. Mais ses deux pupilles n'appartiennent pas à un humain. Je recule alors d'un pas, ne voulant pas croire la réalité qui s'impose à moi. Le loup, ou plutôt la louve, avance alors vers moi, son regard toujours encré dans le mien. Son hypnotisant regard violet. J'arrête de reculer. Je reste immobile alors que la louve se rapproche de moi, ne s'arrêtant qu'à quelques centimètres. Elle ne me lâche pas du regard et se stoppe. J'ose alors un geste vers elle. Je lève une main tremblante. Je ne suis pas très rassurée par mon geste mais je ne peux pas m'en empêcher. Et je pose alors ma main derrière une de ses oreilles. La louve émet un grognement qui se rapprocherait d'un ronronnement pour un chat, mais en plus sauvage. Je ne retire pas ma main. Je n'ai pas à avoir peur. Je suis un ange-déchu et cette louve m'inspire confiance et m'attire irrésistiblement. Je fais descendre ma main et me rapproche inconsciemment de la louve gris foncé. Je continue mes caresses sous ses grognements.
Soudain, un hurlement de loup se fait entendre et la louve se tend. Elle s'écarte de moi, les sens en alerte et je dois avouer que je ne suis pas si rassurée que ça. Un deuxième hurlement parvient à nos oreilles. La louve me regarde une dernière fois avant de s'enfoncer dans les buissons.

Je reste figée pendant quelques minutes, le regard fixé sur les bois sombres. Je ne réalise pas vraiment ce qu'il vient de se passer. Cette louve m'a laissée l'approcher, la caresser. Cette louve n'est pas un animal comme les autres, je suis certaine que c'est un loup-garou et le comportement de ce loup-garou n'est pas normal. Je n'aurais jamais dû pouvoir l'approcher. J'en ai déjà vu, et même déjà rencontré, et cela ne s'est jamais bien passé. Les seules fois où les anges et les loups-garous se sont croisés, une bataille s'en est suivie. L'entente entre les deux espèces n'est pas possible, c'est comme si les vampires et les humains pouvaient vivre en harmonie. Mais, je dois aussi avouer, que les anges ne s'entendent avec aucune autre espèce. Mais je ne suis plus un ange et cette louve, avec son regard violet foncé, m'envoûte totalement. Elle m'intrigue sans que je sache pourquoi.


Kaleb se retransforme rapidement. Antoine ne s'est pas transformé alors qu'il serait ravi de tuer les Ravens. Le jeune homme prend alors peur car Maria n'était pas là non plus alors que la rousse aime beaucoup sa forme lupine. Kaleb se dépêche de rentrer dans la maison. Il ne sent pas la présence d'Antoine mais entend d'ici les pleurs de sa sœur. Il monte rapidement les escaliers et entend Maria dans la salle de bain. Il se fige dans le couloir en sentant l'odeur du sang. Il serre les poings et la mâchoire. Il ne faut pas qu'il cède à la colère, d'abord il doit aider la jeune fille. Il essaie de se calmer en respirant calmement. Il parvient à dissiper un peu la rage qu'il l'a envahie. Il doit se calmer pour ne pas effrayer Maria plus qu'elle ne l'est déjà. Puis, il va toquer à la porte de la salle de bain.

 Maria, c'est Kaleb, ouvre moi, s'il te plait, chuchote-t-il.

Il doit la supplier pendant dix minutes avant d'enfin entendre du bruit. Maria déverrouille alors la porte. Kaleb inspire profondément avant d'ouvrir celle-ci doucement. La salle de bain est plongée dans le noir. Kaleb cherche alors Maria du regard. Il la trouve dans un coin, près de la baignoire, repliée sur elle-même. Il s'approche lentement pour ne pas lui faire peur. Il sait comment Maria peut réagir dans cette situation. Et il n'a vraiment pas envie de l'effrayer encore plus. Il voit le mouvement de ses épaules et entend ses sanglots. Il ravale lui-même ses larmes et s'approche un peu plus de sa petite sœur. Même si Maria ne l'est pas biologiquement, il la considère réellement comme telle. Elle semble si fragile, si faible, si brisée. La culpabilité envahit alors Kaleb. Mais il s'efforce de l'oublier et se concentre sur Maria. Il pourra se lamenter plus tard. Pour l'instant, Maria a besoin de lui.
Il s'accroupit devant la jeune fille, ses genoux touchant les siens. Il tend son bras et effleure les cheveux de la rousse. Il essaie de maîtriser ses gestes même s'il tremble. Et rien qu'à ce geste, pourtant anodin, Maria frissonne. Qu'est-ce qu'Antoine lui a encore fait ?

 Chut, c'est moi, la rassure-t-il calmement.

Pourtant, sa colère est bien présente mais il fait tout pour la refouler. Il n'a qu'une seule envie, c'est d'aller frapper son demi-frère. La main de Kaleb se fait aussi légère qu'une plume. Il touche alors la joue de la jeune fille.

 Regarde-moi, s'il te plaît, lui demande-t-il.

Maria gémit, incapable de parler. Elle secoue négativement la tête. Mais Kaleb doit savoir.

 Maria... ce n'est que moi.

Il passe sa main sous le menton de la rousse qui n'oppose aucune résistance. En apercevant le visage de Maria, Kaleb se fait violence pour ne pas crier. Il se mord même la langue. Comment sa famille peut-elle laisser faire Antoine ? Comment lui aussi peut-il accepter que Maria subisse ça ? Ils ne valent pas mieux qu'Antoine. Kaleb examine le visage de sa sœur. Lèvres en sang, pommettes et arcades ouvertes, bleus. Les larmes ruissellent sur les joues de Maria. Celle-ci baisse la tête devant le regard de Kaleb. Il s'assoit alors près d'elle et l'entoure de ses bras. Les sanglots de Maria sont plus violents.

 Je suis tellement désolé, lui murmure le jeune homme.

Il berce Maria en lui murmurant des paroles réconfortantes. Il attend qu'elle se calme, ce qui prend environ une heure. De toute façon, personne ne se préoccupe d'eux. Une fois ses pleurs taris, c'est Maria qui repousse Kaleb.

 Ça va, affirme-t-elle.

 Maria...

 Non Kaleb, laisse-moi, dit-elle plus durement.

Kaleb essaie d'intercepter les yeux de Maria mais celle-ci fuit son regard. Elle grimace et se détache complètement de son frère. Ce dernier soupire et embrasse Maria sur le front avant de sortir de la pièce, la laissant seule malgré sa volonté. Kaleb referme la porte de la salle de bain et tombe sur Antoine. Ses poings se serrent et Antoine ricane.

 Le petit Kaleb, toujours à voler au secours de la pauvre Maria.

 Tu le paieras un jour.

Le visage d'Antoine se durcit.

 Fait attention à toi Kaleb, tu ne voudrais pas qu'il arrive malheur à ta chère et tendre Thala, le menace Antoine.

Les yeux de Kaleb lancent des éclairs alors qu'il tourne les talons pour rejoindre sa chambre. Fermant la porte, il se laisser glisser au sol. Il maudit alors Antoine qui l'empêche d'intervenir. Il maudit sa famille de fermer les yeux sur la situation. Il se maudit de ne pas avoir le courage nécessaire pour agir. Et une larme roule sur sa joue.

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Concernant, la dernière partie, je ne cautionne en aucun cas la violence conjugale. Personne, femme ou homme, ne devrait avoir à subir cela. C'est un sujet grave qui ne doit pas être pris à la légère ! 

Sinon, j'espère que vous aimerez le chapitre. C'est le plus court de l'histoire. 

Le rythme de publication va sûrement changer. Je pense que je publierai plusieurs fois par semaine avec un jour fixe, le dimanche. 

A plus ! 

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