Chapitre 88 : Albion

Royaume de Boréalis, cité, château, cour, deux mois plus tard, début d'après-midi

« Roi Arthur, bienvenu à Boréalis. », les salua Aurore avec un sourire poli.

Comme toujours depuis son couronnement, elle portait son éternelle armure et avait remplacé la cape rouge Pendragon par une cape bleu Ambrosius avec la chouette argentée emblématique du royaume de Boréalis. En toute honnêteté, c'était sous les conseils du Prophète de la cour, qui avait jugé qu'il était important que la délégation de Camelot, pays ouvertement contre la magie depuis de très nombreuses années, se rappelle en étant accueillie à Boréalis que la magie aurait toujours le dessus sur eux, et que leur Reine était avant tout une combattante avant d'être une Souveraine. Arthur s'y était plié, étant venu sans armure mais seulement avec son épée. De toute façon, Aurore avait prévu d'abandonner son armure pour les « pourparlers » qui auraient lieu le lendemain, après un banquet de bienvenue pour le premier Roi extérieur à Boréalis à mettre les pieds dans le royaume.

Le regard de la Reine s'illumina lorsque Guenièvre, qui avait continué à aider Arthur après leur divorce le temps de la transition et qui était par conséquent toujours aussi richement vêtue malgré le retour de son statut de fille du peuple, lui fit un discret signe de la main. Se prêtant à la mascarade, Arthur rendit la politesse à la nouvelle Reine.

« Merci de nous accueillir en ce jour béni qui, je l'espère, débouchera sur un traité de paix entre nos royaumes. »

« Je l'espère sincèrement. », répondit la Reine de Boréalis. « Voilà trop longtemps que mon royaume est fermé au monde à cause d'un ancien Roi de Camelot. »

« J'ose espérer pouvoir réparer ce qui a été brisé par le passé. Nous aurions beaucoup à gagner à vous avoir comme ami. »

Aurore s'apprêtait à répondre lorsqu'elle vit le léger sourire amusé d'Arthur et ses yeux qui regardaient derrière elle. Elle se retourna donc et imita inconsciemment le sourire du blond lorsqu'elle vit son aîné dévaler les escaliers et manquer de trébucher sur ses propres pieds.

« P-Pardon. », s'excusa Merlin, avec une révérence qui manquait cruellement d'élégance malgré ses nombreux entraînements au cours de l'année passée.

« Panne de réveil ? », firent les deux Souverains, si amusés par cette scène familière de l'époque de Camelot qu'ils en oublièrent le protocole.

« Mon serviteur a mis une heure à me choisir une tenue, ce n'est pas de ma faute. Rory, par pitié, je n'ai pas besoin de serviteur, tu le sais. »

« Arrête de râler, c'est censé te faire gagner du temps pour que tu puisses en passer plus à expérimenter je-ne-sais-quoi dans ta tour. », rétorqua Aurore, avant que le vent ne lui rappelle brusquement la situation. « Hum... Roi Arthur, voici mon frère aîné, le Prince Merlin de Boréalis. »

« C'est un honneur. », fit Arthur en inclinant la tête avec respect, sans pouvoir se départir de son petit sourire amusé.

« Nous allons vous conduire à vos appartements, afin que vous puissiez prendre un peu de repos. Lirou, j'ai encore de nombreuses choses à mettre en place pour ce soir, tu peux conduire nos invités ? »

« Compte sur moi. », sourit Merlin.

« Merci. Dame Guenièvre, pourriez-vous m'aider ? En tant qu'ancienne Reine de Camelot, votre aide serait précieuse pour éviter toute... activité ou aliment susceptible de déclencher une guerre. »

Guenièvre se retint de pouffer et acquiesça à la place.

« Bien entendu. »

« Allons-y. Lirou, je te laisse avec nos invités. »

Merlin déposa un baiser protecteur sur son front, geste qui lui fut rendu par sa cadette avant qu'elle ne s'éclipse avec Guenièvre.

« Vous êtes étonnement familiers l'un avec l'autre en public. », murmura Arthur alors que Merlin les conduisait à l'étage réservé pour l'occasion à la délégation de Camelot.

« Le protocole de Boréalis est plus souple que celui de Camelot. L'amour est une source importante de magie, alors les démonstrations d'affection en public sont loin d'être interdites. »

« ... je propose d'assouplir le protocole de Camelot pour faire de même, qu'en dis-tu Merl ? »

« J'en dis que tu m'avais manqué Arthy. »

« Quelle est votre lien officiel avec Camelot pour le moment, pour Aurore et toi ? »

« Ce qui était déjà officiel à Camelot : le fait que j'étais votre serviteur et ma sœur Chevalière de la Reine et une de vos conseillères. Les gens du château ne seront pas gênés si on montre la même familiarité qu'avant, mais Rory préfère attendre que le traité soit signé, pour éviter des révoltes populaires. »

« C'est préférable dans une telle situation. Nous sommes avant tout représentants de nos royaumes, tous les trois. »

« En effet. C'est moins grave pour ma sœur et Guenièvre, mais elle ne tient pas à prendre de risque. »

« Plus que quelques jours... »

« J'ai hâte. », souffla Merlin.

« Moi aussi Merl. »

Royaume de Boréalis, cité, château, salle du conseil, le lendemain, fin de journée

Arthur retint un sourire en voyant la grande table ronde, très similaire à celle de sa propre salle du conseil, qui trônait dans celle de Boréalis, alors que la Reine appliquait sa signature sur le traité. Aurore et lui s'étaient indéniablement influencés de la meilleure des manières. Lorsqu'il l'eut également signé, ils se serrèrent la main en signe d'alliance, pour les yeux du conseil de Boréalis et ceux de la délégation de Camelot.

« Conformément au traité qui vient d'être établi. », fit le scribe de Boréalis. « Camelot consent à se placer sous l'autorité divine des Sept Archons et à placer le Prince Merlin de Boréalis à la fonction de Magicien de la cour de Camelot. En échange, Boréalis consent à rejoindre l'unification de tous les royaumes sous la bannière du Grand Royaume d'Albion, à l'unique condition qu'au moins un des Souverains soit de Boréalis, et ce pour chaque génération de Souverains d'Albion qui se succéderont, afin que la magie garde toujours une place prépondérante dans ce royaume. Pour sceller cette nouvelle alliance, le Roi Arthur de Camelot épousera le Prince Merlin de Boréalis, et la Reine Aurore de Boréalis épousera Guenièvre, l'ancienne Reine de Camelot. »

Contents de ce traité, les délégations prirent congé pour profiter du reste de la journée. Seuls les deux couples restèrent pour « peaufiner » les détails pratiques, qui avaient en réalité été déjà prévus de longue date par Aurore et Arthur. Libérés du protocole, chacun alla se nicher dans les bras de son aimé, après plus d'un an de séparation.

« C'était beaucoup trop long. », soupira Aurore contre Guenièvre, assise sur une chaise autour de la table.

« Mais tu fais de l'excellent travail, aussi bien selon Merlin, Arthur ou moi. »

« Je parlais de nous, ensemble. »

« Je sais, justement. Il était important de bien faire les choses pour construire un avenir solide à nos royaumes. »

« Tu as raison Gwenny. »

Sans attendre de réponse, Aurore l'embrassa farouchement, avide de son amour et de sa tendresse depuis trop longtemps. A peine quelques sièges plus loin, Arthur semblait déjà prêt à faire l'amour à Merlin sur la table et ne se contenait que parce que le Prince avait encore toute sa tête pour générer de petits chocs magiques pour l'arrêter quand il allait trop loin.

« Merl... », râla Arthur contre ses lèvres.

« On aura tout le temps après le mariage. »

« Espèce de prude ! »

« C'est surtout indécent de faire cela ici, au beau milieu de la salle du conseil, avec ma sœur et Guenièvre à moins de deux mètres, alors qu'on vient tout juste d'enterrer la hache de guerre entre Camelot et Boréalis. Et de toute façon, il faut bien que quelqu'un soit raisonnable, et ce n'est certainement pas toi Arthy. »

« Oh tais-toi Merl, cela fait une éternité que j'attends cette rencontre... c'était tellement dur sans toi près de moi. »

Merlin rougit furieusement sous le regard brûlant d'Arthur.

« Pourquoi faut-il que tu veuilles absolument me faire l'amour ? Cela fait des années qu'on attend, on peut bien attendre un peu plus longtemps et simplement se câliner, comme Guenièvre et Rory, non ? »

« O-Oui, pardon. C'est juste que... tu étais près de moi, à mes côtés, pendant des années et... une seule année sans toi m'a paru une éternité. »

Arthur inspira profondément et se retira, permettant à Merlin de descendre de la table. Ils s'installèrent sur un siège, le Prince blotti contre le Roi alors que celui-ci lui caressait tendrement les cheveux.

« Que veux-tu pour nos fiançailles ? Pas un tournoi, je suppose. »

« Quitte à faire voler les traditions, oui. », confirma Merlin.

« Qu'est-ce-qui te ferait plaisir alors ? »

« Un festival des arts et de la magie. Quelque chose qui célèbre l'union et l'harmonie que nous construisons pour Albion. »

« J'aime beaucoup l'idée... », sourit Arthur, réfléchissant déjà à comment mettre tout cela en place. « Tu es définitivement l'homme de ma vie Merl, je t'aime. »

« Je t'aime aussi Arthy. », murmura Merlin avant de l'embrasser. « Depuis toujours, et pour toujours. »

« Depuis toujours, et pour toujours. »

De leur côté, Guenièvre s'était mise à tresser délicatement les cheveux de sa chère et tendre, qui fredonnait paisiblement.

« Qu'est-ce-qui nous attend désormais Ella ? Y a-t-il un protocole particulier à suivre pour les mariages ? »

« Le protocole de Boréalis fait que mon frère devra s'installer à Camelot au plus tôt pour, soi-disant, s'installer et se préparer à ses futurs fonctions, et que tu devras faire de même ici. Pour apprendre à connaître la population, les coutumes locales, etc. Tu devras porter du bleu Ambrosius, comme moi désormais, mais mon frère portera les couleurs d'Albion, un violet profond avec comme emblème la chouette d'argent de Boréalis et le dragon d'or de Camelot, pour symboliser cette alliance entre nos deux royaumes. »

« Ne pourrait-on pas tous porter du violet Albion ? »

« Dans quelques générations, sans doute. Mais l'amitié que nous venons de forger entre nos royaumes est encore bien trop fragile pour que nous puissions le permettre. Lirou portera du violet Albion, car il représente à lui seul toute l'ampleur de cette amitié et de notre unification aux autres royaumes. Pour le moment, nous ne sommes unis aux autres que parce que nous le sommes avec Camelot, mais d'ici quelques mois, quand j'aurais rencontré tous les Souverains, Albion sera véritablement réel. »

« Tu as sans doute raison. En attendant, l'avenir s'annonce plutôt radieux. »

« Nous avons enfin notre fin heureuse. », approuva Aurore.

« Après tout ce qu'il s'est passé, tu l'as bien mérité. »

« Nous l'avons bien mérité Gwenny. »

Albion, château de Camelot et de Boréalis, quelques mois plus tard, à quelques semaines d'intervalle

« La Reine Guenièvre Ambrosius de Boréalis ! »

« Longue vie à la Reine ! »

Aurore regarda d'un air appréciateur sa femme, dont la tenue de couronnement était nettement plus simple que la sienne, même si la couronne était identique. Moins bouffante et bien plus fluide, la robe restait d'un magnifique bleu Ambrosius et la jupe scintillait comme des étoiles dans le ciel noir, mais la sœur de Merlin savait pertinemment que sa Reine était bien plus jolie sans tous les ornements qu'elle avait porté en tant que Reine de Camelot.

Surprenant son regard, Guenièvre sourit, amusée, et la tira vers elle pour l'embrasser tendrement, sous les vivats de la foule.

*

« L'Enchanteur Merlin Pendragon ! »

« Longue vie à l'Enchanteur ! »

Vêtu de ses éternelles bottes (comme neuves depuis une réparation magique à Boréalis), d'un pantalon brun et d'une robe violet Albion par-dessus une tunique plus claires, les deux étant brodées d'or, Merlin se retourna vers la foule. Il portait toujours son éternelle attache à cheveux offerte par Aurore, mais celle-ci était savamment entrelacée avec les arabesques de sa couronne d'or et de saphirs qui brillait désormais sur sa tête.

Merlin soupira intérieurement de soulagement. Vraiment, quelle merveilleuse idée de remplacer « Roi consort et Magicien de la cour d'Albion Merlin Pendragon » par simplement « Merlin l'Enchanteur » ! Sa sœur était définitivement un génie ! Arthur avait ainsi créé le titre d'Enchanteur.eresse pour celleux qui seraient à la fois Souverain.e et Magicien.ne de la cour d'Albion, et Merlin en était vraiment soulagé. Il était plus à l'aise de cette façon, même si concrètement cela ne changeait rien, mais il était un homme simple. Il n'avait pas besoin d'un titre à rallonge, il n'avait pas besoin de titre tout court, quoi qu'en dise Arthur. Mais bon, que pouvait-il refuser à son tendre Roi ?

Merlin vint prendre la main d'Arthur et entrelaça leurs doigts, avant de le regarder avec la plus grande des tendresses. Le Roi rosit et vint embrasser son Enchanteur, plus qu'heureux de pouvoir désormais le faire aux yeux de tous.

**

Présente aux deux mariages, la Princesse Mithian de Nemeth se tamponnait les yeux avec un mouchoir, heureuse pour ses amis. Elle savait qu'avec eux, tout irait bien à l'avenir. Chacun aurait sa propre fin heureuse, comme celle que Merlin, Arthur, Guenièvre et Aurore venaient d'obtenir, eux qui la méritait plus que n'importe qui au monde.

Avec des Souverains comme eux, Albion ne pouvait qu'être éternel.

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