Chapitre 71 : Positiver

Royaume de Camelot, cité, château, appartements d'Arthur et Guenièvre, chambre de Merlin, présent de Merlin, le lendemain

Fredonnant doucement la berceuse qui l'avait momentanément réuni avec sa sœur, Merlin poussa la porte de sa chambre avec un plateau contenant assez de nourriture pour deux personnes. Il le posa sur son bureau puis écarta un peu les rideaux afin de laisser entrer une partie de la lumière du jour. Arthur se mit à gémir doucement à cause de la lumière, faisant sourire le magicien, qui s'approcha du lit.

« Arthy, debout... », fit Merlin d'une voix douce, en lui caressant les cheveux.

« Hm... »

« Debout. Si tu veux qu'on ait le temps de manger ensemble, il faut que tu arrêtes de traîner, crétin. »

A ces mots, Arthur se redressa vivement, soudainement bien réveillé. Merlin masqua un sourire devant les pics improbables qu'avait pris sa chevelure dorée au cours de la nuit.

« Merl ? Tu... souris ? », demanda Arthur, n'osant trop y croire.

« Debout, si tu veux que je t'explique. J'ai une montagne de corvées à faire, et tu as beaucoup de choses qui t'attendent aujourd'hui. »

Merlin s'humecta les lèvres, trouvant toujours aussi étrange d'être presque sommé de le tutoyer lorsqu'ils étaient juste tous les deux ou avec Guenièvre seulement. Cela faisait depuis leur rendez-vous à la frontière des terres de Gedref qu'Arthur lui avait demandé de le tutoyer, soit depuis bien un mois, mais les habitudes faisaient qu'il avait l'impression de faire une bêtise à chaque fois qu'il le faisait.

« Tu veux reprendre le travail ? Tu sais, tu n'es pas obligé si tu ne t'en sens pas capable. », lui dit Arthur avec tendresse. « Tu peux prendre autant de congé que tu veux, je sais à quel point l'absence d'Aurore t'affecte. »

« Le monde ne s'arrête pas de tourner pour autant, et elle va bien. J'ai décidé d'arrêter de m'apitoyer sur mon sort et de voir les choses clairement, comme toi : elle reviendra. Après tout, c'est son époque. Ce n'est qu'une question de temps avant qu'elle ne débarque une nouvelle fois à Camelot. »

« Elle va bien ? »

« Oui, et je sais quand elle est. Pas précisément, mais je le sais. Elle est dans le futur, probablement avec Moonlight puisqu'on ne l'a pas revu elle aussi, donc je n'ai pas trop de soucis à me faire. Avant d'être la déesse de la Liberté, Rory est une voyageuse expérimentée capable de s'adapter assez pour survivre dans n'importe quel environnement, qui a en plus reçu l'enseignement guerrier d'un chevalier de Camelot. »

Arthur sourit, soulagé que son Merlin ait repris du poil de la bête. Ledit Merlin fit une rapide excursion dans la chambre d'à côté pour récupérer le nécessaire pour habiller son Roi. Gwen, qui était réveillée, le salua d'un sourire éteint mais qui se voulait rassurant. Il lui retourna le sourire puis rejoignit Arthur.

« Tu sais quoi ? », décida Arthur lorsqu'il entra de nouveau. « Je t'offre la journée Merl. Tu as passé assez de temps cloîtré dans ce château, alors profite de cette journée pour sortir prendre l'air, je sais que tu adores ça. Et je vais voir pour caler une balade en forêt ensemble dans la journée, sans chasse. On prétextera une mission de repérage, si j'arrive à me libérer ne serait-ce qu'une heure. »

« Oh euh... c'est gentil, mais tu devrais prendre soin de Gwen aussi. Des rumeurs risquent de se répandre si tu donnes l'air de te soucier davantage de ton serviteur que de ta Reine. »

« Ne te préoccupe pas de ça Merlin. Je ne peux pas aider Guenièvre comme j'essaie de t'aider toi. Aurore est la femme qu'elle aime, il est difficile de lui remonter le moral. Imagine que ce soit moi, à la place de ta sœur. Tu serais dans le même état qu'elle. »

« Je n'ai pas dit le contraire... je pense que je vais lui proposer de sortir un peu prendre l'air avec moi, cela nous fera du bien et je sais que cela la soulagera d'avoir des nouvelles de Rory. »

« Tu n'essaies même pas de protester pour reprendre le travail aujourd'hui ? »

« Pas envie. En réalité, j'espérais que tu me demandes de prendre ma journée encore aujourd'hui pour sortir. »

Arthur eut un rictus moqueur et se laissa dévêtir puis vêtir par son cher et tendre. Il garda sa respiration calme pour ne pas céder à la tentation d'arracher les vêtements de Merlin et de le posséder ici et maintenant. Il avait l'habitude des doigts de Merlin sur sa peau, mais cette habitude était devenue un peu insupportable depuis qu'ils étaient officiellement-officieusement ensemble, car il n'était pas touché comme il le voudrait. Les mains de Merlin glissaient légèrement sur son corps, l'effleurant parfois à peine, le rendant hypersensible à chaque toucher. Il sut au léger ricanement du serviteur qu'il savait très bien ce qu'il faisait.

« Depuis quand es-tu aussi vicieux, Merl ? »

« Je l'ai toujours été, tu ne l'avais simplement pas remarqué. »

« Pourquoi me tentes-tu ? Es-tu prêt à passer à l'étape supérieure ? »

Sous le sourcil relevé et suggestif, Merlin rougit furieusement.

« P-Pas vraiment. », balbutia Merlin. « Mais cela me rappelle que... que je ne rêve pas, et ça m'aide à m'habituer à sentir ta peau contre la mienne différemment par rapport à avant... ce qui, j'imagine, me prépare mentalement pour le jour où on passera à l'étape suivante... »

Arthur sourit, amusé devant le marmonnement gêné de son aimé.

« Et tu me fais tourner en bourrique, par la même occasion. »

« C'est ce qui rend l'approche vraiment intéressante ! », rétorqua Merlin, retrouvant ce mordant qui plaisait au Roi.

Il termina de boutonner la chemise de son blond puis ils s'installèrent autour du bureau pour manger ensemble.

« Vous êtes entrés en communication ? », s'étonna Arthur lorsque Merlin lui raconta l'étrange événement de la nuit.

« Pas vraiment. Je ne sais pas trop ce qu'il s'est passé, mais j'ai eu l'impression que... comment dire... on avait créé une sorte d'espace hors du temps. On était séparés par le temps, mais pas vraiment en même temps. C'était trop bref pour que je comprenne vraiment. Avant que tout redevienne à la normale, je sais qu'elle a essayé de me dire avec précision quand elle était, mais je ne l'ai pas entendu. Ses lèvres bougeaient mais aucun son n'en sortait. »

« Au moins, on sait déjà où les dieux doivent chercher actuellement. », émit Arthur. « Ces derniers temps, j'y ai beaucoup réfléchi et je pense que Morrigan a envoyé Aurore dans un temps très éloigné du nôtre. »

« Pourquoi cela ? »

« Eh bien, comme tu l'as dit tout à l'heure, Aurore est une voyageuse expérimentée et aguerrie. Elle sait s'en sortir dans n'importe quel milieu naturel. Elle a plus de mal dès qu'elle doit entrer en contact avec des gens car elle a souvent été chassée des villes et des villages à cause du fait qu'elle maniait l'épée. Que se passerait-il si elle était envoyée à une époque où l'environnement naturel en lui même était complètement différent de ce qu'elle connaît, ou encore une époque où il y a beaucoup moins de milieux naturels qu'aujourd'hui ? »

« ... elle serait beaucoup plus vulnérable... », pâlit Merlin.

« Exactement. Et on sait par Nahida qu'elle ne peut pas user de sa magie divine lorsqu'elle a été bloquée à une époque par quelqu'un. En résumé, dans de telles circonstances, elle serait bien plus facile à éliminer. Morrigan a tout intérêt à l'avoir envoyé très loin dans le passé, ou très loin dans le futur. Merlin, as-tu vu quoi que ce soit qui pourrait aider les dieux à la localiser plus précisément ? »

« Sa tenue était très étrange, et elle utilisait un instrument qui ressemblait vaguement à une guiterne. C'est difficile à décrire, mais l'image est plutôt claire dans ma tête. », réfléchit Merlin.

« Tu saurais la dessiner ? »

« Je devrais. », répondit le magicien, songeant déjà au sort qu'il pourrait utiliser. « Je te le ferai passer avant de quitter le château. »

Arthur hocha la tête et termina de manger.

« Faisons comme cela. Je crois qu'il est temps pour moi de m'occuper du royaume... »

« Comment avancent les lois sur la magie et les couples de même sexe ? »

« Demande-moi plutôt si elles avancent. Le conseil s'obstine à affirmer que l'absence d'Aurore lors de la reprise de Camelot n'est qu'une preuve supplémentaire qu'on ne peut faire confiance à la magie, malgré les très nombreuses explications que j'ai fourni à ce sujet. Et le fait qu'elle est la déesse de la Liberté est de notoriété publique pour le conseil, il sait qu'une loi pour les couples de même sexe est typiquement le genre de choses qu'elle défend. »

« Et il refuse de la laisser influencer légalement le royaume. »

« Tu as tout compris. Je pense qu'il est plus judicieux de battre en retraite pour le moment, et de revenir à la charge quand la situation sera plus propice. », soupira Arthur. « Je sais que c'est important pour toi Merl... »

« N'en dis pas plus, je sais ce que tu vas dire. », rétorqua fermement Merlin. « Ces lois sont importantes pour moi, mais je sais aussi qu'elles le sont pour toi, et qu'elles touchent à des sujets extrêmement sensibles pour Camelot. Je sais que tu fais de ton mieux pour les promulguer, et ça me suffit. Je te connais, tu es tenace. Tu auras le conseil à l'usure. La patience est la vertu des plus grands Souverains, non ? »

« ... merci pour ton soutien Merl. », murmura Arthur en enfouissant son nez dans les cheveux sombres de son aimé. « Tu n'imagines pas à quel point il me donne de la force. Je t'aime Merl. »

« Je t'aime aussi Arthy. »

France, Camargue, ranch Mistral, 21e siècle

« Mistral, allonge ta foulée. », conseilla Aurore.

L'étalon obéit, ce qui lui permit de gagner encore plus en vitesse, lui qui était déjà au maximum dont il pouvait faire preuve avec Léna comme cavalière.

« Je pense qu'à ce stade Léna, il vaut mieux que ce soit Aurore qui t'entraîne. », émit Angelo, lorsque la chevalière sifflota pour demander à Mistral de s'arrêter. « Tu veux bien Aurore ? »

« Si ça peut aider. », sourit Aurore en caressa le museau de Moonlight, qui la suivait comme son ombre. « En plus, ce sera plus simple maintenant que j'ai retrouvé Moonlight. »

La jument hennit joyeusement, faisant sourire la bande.

« Gwen t'a préparé des vêtements plus aptes à l'équitation, si tu veux. », l'informa Angelo. « Ils sont dans la vieille maison. »

« Cela lui ressemble bien... », murmura Aurore. « D'accord, merci. Ce sera sûrement plus confortable et pratique, autant pour moi que pour Moonlight. »

« Tu sembles plus détendue depuis hier soir, c'est cool ! », déclara Anaïs avec joie.

« Ça se voit que Moonlight est ta meilleure amie pour la vie. », fit Léna.

« On a beaucoup voyagé ensemble, elle est comme un pilier pour moi, où que j'aille. J'ai un peu mal vécu le fait qu'elle disparaisse comme ça, désolée si j'ai été désagréable. »

« Je dirais pas désagréable, mais assez distante. », émit Hugo.

« Tu l'étais aussi avec ma sœur hier soir, mais c'est sûrement parce que tu ne la connaissais pas. Tu verras que c'est la personne la plus gentille et généreuse qui existe. », assura Angelo.

« Je veux bien te croire. », rétorqua Aurore avec un sourire légèrement figé, ne le sachant que trop bien. « Léna, je vais me changer et on retourne près de l'obstacle qui te pose un problème. »

« OK ! »

France, Camargue, ranch Mistral, 21e siècle, vieille maison

« Effectivement, c'est beaucoup mieux. », commenta Aurore.

La tenue laissée par Guenièvre était assez similaire à ce que cette dernière portait la veille : des bottes brunes montant jusque sous le genou, un jean bleu (et non gris comme Guenièvre) et une veste à capuche turquoise. Le lot de vêtements comprenait également un tee-shirt blanc avec le symbole de l'élément Anémo comme motif.

« Tu l'as mise ? »

Aurore sursauta et se tourna vers la voix.

« Gwenn... Gwen. », fit Aurore, se mordant la langue pour s'empêcher d'employer le surnom réservé à sa Gwenny.

« Salut ! », lui sourit Guenièvre. « Je suis contente de voir que mes vêtements te vont, j'avais peur qu'ils ne t'aillent pas. »

« On fait a peu près la même taille, tu n'avais pas à t'en faire. Merci pour le prêt. »

« Oh non, garde-les ! », réfuta Gwen. « Le turquoise te va mieux qu'à moi. »

« C'est ma couleur, oui. Le bleu Ambrosius te va étonnement bien. », fit remarquer la chevalière, plus habituée à la voir dans des couleurs pastels comme du bleu, du rose ou du violet.

Guenièvre rougit doucement.

« M-Merci. J'avoue que c'est une couleur que j'ai commencé à porter que récemment. C'est la couleur de la famille royale de Boréalis après tout... j'avais peur que ce soit un peu mal vu de porter ce bleu, surtout que je n'ai rien d'une Reine. »

« De ce qu'on m'a dit, tu as, au contraire, tout d'une Reine. Le sang ne devrait pas être un critère légitimité à un trône quelconque, mais uniquement les compétences nécessaires pour faire de son royaume un endroit meilleur. »

« Ce que tu dis... ça prouve que, toi aussi, tu ferais une bonne Reine. »

« Haha ! Je ne pense pas. », rétorqua Aurore, sur un ton amusé. « J'ai plus à voir avec un chevalier ou un barde qu'avec un Souverain. Porter la Couronne d'un royaume... c'est bien plus de responsabilités que ce que je ne saurais endosser. Ma propre vie est déjà assez compliquée. Ce n'est pas quelque chose pour moi, c'est tout. »

« La Reine Aurore disait la même chose, avant de monter sur le trône. », répondit innocemment Guenièvre.

« Tu ne l'appelles pas par son nom de déesse ? »

Gwen secoua la tête.

« L'appeler par son nom de déesse, c'est oublié qu'elle était humaine avant toute chose, une humaine avec des préoccupations humaines : survivre, résoudre ses problèmes, veiller sur son grand frère Merlin, protéger des dangers de sa vie les gens qu'elle aimait... je préfère l'appeler par son prénom, car il montre la jeune fille généreuse qu'elle était derrière la déesse. »

Aurore sourit doucement. Gwen était décidément la même qu'à l'époque de Camelot.

« Tu as raison, c'est une fille gentille, derrière la déesse, et tout le monde devrait garder cela à l'esprit... bon ! Je dois aller entraîner Léna. »

« D'accord ! A plus tard ! »

Aurore inclina légèrement la tête en guise de réponse puis sortit de la vieille maison. Guenièvre la regarda partir.

« J'avais oublié à quel point tu pouvais être farouche quand il était question de la femme derrière la déesse... Amour. »

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