Chapitre 37 : Les épées jumelles

Royaume de Camelot, cité, château, appartements d'Arthur, après l'entraînement

« Entrez ! », fit Arthur, sachant très bien qui venait de toquer.

La porte s'ouvrit sur Aurore, seulement vêtue de son ensemble noire et de ses bottes brunes. Merlin entra à sa suite, ayant aidé sa cadette à retirer son armure, et vint s'occuper de son Prince. Naturellement, la déesse mit un peu d'ordre dans la chambre d'Arthur pour aider son aîné. Lorsque le magicien eut terminé d'enlever l'armure et la côte de maille de son blond, ce dernier leur fit signe de le suivre jusqu'à la table à manger. Sur celle-ci étaient disposées les épées jumelles.

« Elles sont magnifiques ! », sourit Aurore.

« C'est vrai ! », approuva Merlin. « Même moi je suis capable de dire qu'elles sont d'excellente qualité. »

« J'espère bien qu'elles vous plaisent, parce que ce sont les vôtres. »

Aurore pencha la tête sur le côté, perplexe, alors que Merlin n'aurait pas été plus sonné s'il s'était pris le château sur la tête. Arthur étouffa un petit rire en voyant la tête de son valet.

« Vous saviez... une simple épée aurait fait l'affaire... », balbutia Aurore. « Je veux dire... même la vôtre n'est pas aussi... aussi... travaillée ? »

Elle fronça les sourcils, peu certaine d'avoir employé le bon mot. Heureusement, Arthur avait tout de même compris où elle voulait en venir.

« Je sais, mais Nahida voulait que je les fasse forger pour vous. Elle m'a amené des plans et du minerai en quantité pour ça. La tienne, c'est celle-ci. »

Le blond désigna l'épée avec la garde en forme de croissant de lune, et Aurore s'empressa de la saisir. Elle la soupesa un instant, avant que l'arme ne se mette à scintiller quelques instants. Arthur esquissa un mouvement de recul, alors qu'Aurore s'éloignait pour faire quelques mouvements avec sa nouvelle épée.

« Elle est parfaite... », sourit Aurore.

Elle regarda son frère, toujours figé, et lui donna un léger coup sur la tête avec la garde de sa nouvelle arme.

« Aïe ! », réagit Merlin, avant de se frotter la tête.

Lorsqu'elle désigna du menton l'autre épée, Merlin lui obéit et la récupéra. A son contact, elle s'illumina quelques instants à son tour. Incertain, il fit quelques mouvements, s'attendant à retrouver sa malhabileté habituelle. Pourtant, il la mania avec une dextérité que pourrait (presque) lui envier Arthur.

« Rory, en quoi ces épées sont faites ? Si c'est Nahida qui a apporté les plans et les matériaux, je doute que ce soient des épées normales... »

« C'est exactement ce que je voulais vous demander. », fit Arthur.

Sans répondre, Aurore récupéra l'arme de son frère et posa les deux épées sur la table, avant de se pencher dessus. Ses yeux s'illuminèrent d'aurore et, malgré l'absence de son Gnosis sur elle, elle fut en mesure d'identifier la particularité de ces armes.

« Elles sont faites d'un alliage d'adamantine, de mithril et de solanium. Mes connaissances sont très limitées sur le royaume des dieux, mais pour autant que je sache, ce sont des métaux qui n'existent pas dans le monde mortel. Ils n'existent que dans le monde des esprits, sur les terres réservées aux dieux. »

« Comment Nahida a pu les avoir alors ? », voulut savoir Merlin.

« Les terres divines sont dans le monde des esprits, mais c'est le seul lieu de ce monde dans lequel des personnes de sang divin peuvent entrer et sortir à leur guise. Les dieux, morts ou vivants, sont dès la naissance reliés à ces terres, et par extension au monde des esprits. Nahida peut donc voyager entre les deux mondes sans problème, comme si elle ne passait que d'un royaume à un autre. Pour faire simple, les dieux peuvent ouvrir le voile qui sépare notre monde avec celui des esprits sans soucis, n'importe quand et sans conséquence, alors qu'un mortel, même aussi puissant que Morgause, doit sacrifier quelqu'un pour que le voile s'ouvre. »

« Donc, Nahida serait allée dans le monde des esprits pour récupérer ces métaux ? Mais pourquoi ? », voulut savoir Arthur.

« Ce ne sont que trois des nombreux métaux pouvant être utilisés pour forger les armes de n'importe quelle personne ayant du sang divin. Des armes forgées dans de tels métaux sont dangereuses entre de mauvaises mains. »

« Elles sont magiques ? »

« Oui et non. C'est compliqué. », admit Aurore. « Entre les mains de gens comme Lirou ou moi, de telles armes sont considérées comme étant plus puissantes qu'une lame forgée dans le souffle d'un dragon, qui est actuellement la seule façon pour un non-dieu de me tuer. Elles sont indestructibles et, plus important, elles sont intimement liées à l'âme et au cœur de son détenteur. Elles ont la capacité de tout détruire, mais n'affectent que ceux qu'il considère comme ses ennemis, voire éventuellement ses adversaires. Pour ses alliés, une telle arme est inoffensive, elle peut même les guérir lorsqu'un allié blessé est en contact avec elle. »

Elle s'interrompit, cherchant parmi toutes les informations sur le royaume des dieux qu'elle avait accumulé au cours de la dernière année grâce à Nahida. Merlin et Arthur la regardèrent attentivement, lui laissant le temps nécessaire pour rappeler à sa mémoire ce dont elle avait besoin.

« Comme je l'ai dit, une arme forgée dans des matériaux divins est liée à l'âme et au cœur de celui qui la manie. Donc, une telle arme n'a qu'un seul maître, personne d'autre que celui pour qui elle a été forgée ne peut la manier. »

« J'ai pu les manier tout à l'heure. », réfuta Arthur.

« Mais pas dans l'intention de les utiliser comme vos épées. Vous les avez maniées afin de déterminer si elles étaient ou non de bonnes épées. A aucun moment vous n'avez décidé qu'elles deviendraient vos épées. Et elles l'ont senti. »

« Mais comment ça se fait que j'ai l'impression de savoir manier une épée pareille ? », interrogea Merlin, perplexe.

« Ce genre d'armes est fait pour que des détenteurs de sang divin puissent se défendre, qu'ils soient des guerriers accomplis ou des gringalets comme toi, grand frère. Ces armes confèrent à leurs maîtres des capacités de combat au moins équivalentes au meilleur des mortels. Ces capacités diffèrent selon les métaux utilisés, mais les nôtres vont avant tout nous accorder une vitesse, une agilité et une endurance hors normes, et notre force sera accrue. Ceci dit, je me dois de te prévenir : seul quelqu'un ayant déjà des capacités au combat pourra exploiter toute la force guerrière offerte par une telle arme. »

« La différence sera importante ? »

« Je ne sais pas trop Arthur. », avoua Aurore. « On ne dirait pas, mais je ne sais que peu de choses sur ce qui est lié aux dieux. Mais, sans trop m'avancer, je dirais que Merlin pourrait avoir un niveau au moins équivalent à celui du chevalier de Camelot moyen. Après tout, ces armes sont conçues pour nous permettre de nous défendre. Selon les intentions de celui qui manie une telle arme, elle peut détruire ou au contraire sauver notre monde. »

Le silence s'installa de longues minutes durant, les deux amis encaissant les informations données par Aurore.

« Autre chose à savoir ? », demanda finalement Arthur.

« Hmm... oui ! A titre personnel, mon épée peut canaliser ma magie, avec ou sans Gnosis, dans une mesure plus ou moins importante. De manière générale, ce genre d'armes est capable d'encaisser une magie divine. Je ne sais pas à quel point mon épée peut supporter ma magie sans mon Gnosis, mais je ne vous ai jamais caché quoi que ce soit, alors autant vous le dire. »

Merlin la regarda du coin de l'œil, et elle répondit à sa question muette par un léger hochement de tête, à peine perceptible : oui, son épée était capable de supporter la magie du puissant Emrys.

« En effet, et j'apprécie ton honnêteté. Le fait que tu sois franche et sans filtre m'a permis dès le début de te faire confiance, une fois que j'ai appris pour ta magie. Ceci dit, toute forme de magie est toujours interdite à Camelot, donc ne l'utilise pas, même maintenant que ton épée est capable de supporter une telle puissance. »

« Je ne comptais pas faire autrement. »

Merlin se mordit légèrement la lèvre inférieure, le compliment d'Arthur envers Aurore lui faisant l'effet d'une dague en plein cœur. Arthur aimait le fait que sa sœur soit honnête sur tout, mais son valet ne faisait que lui mentir à propos de ses sentiments et, surtout, de sa magie. Il n'était pas jaloux de sa cadette, mais un tel constat faisait mal. Une petite part de lui-même ne pouvait s'empêcher de lui murmurer perfidement ce qui aurait pu se passer s'il avait eu le courage et assez confiance en Arthur pour lui dire la vérité sur lui.

Peut-être l'aurait-il pris aussi bien que pour Aurore. Il ne le saurait jamais. Même si Merlin décidait de lui dire maintenant, il ne pouvait garantir qu'Arthur ne décide tout simplement pas de le renvoyer ou, pire, de le rejeter en tant qu'ami (et peut-être un peu plus).

« Pourquoi Nahida vous a demandé de les faire forger ? », voulut savoir Aurore.

« Je n'en ai aucune idée. », rétorqua Arthur. « Elle m'a simplement dit qu'entre vos mains, elles sauveraient Albion. »

« Je me demande ce qu'elle voulait dire par là... », murmura Merlin, approuvée par sa sœur.

« Quoi qu'il en soit, j'imagine qu'on peut dire que de tels épées ne sont pas magiques dans le sens où on peut l'imaginer... », réfléchit Arthur. « Cependant, j'aimerais que leurs propriétés restent aussi secrètes que possible. Mon père est encore le Roi... pour expliquer les nouvelles capacités de Merlin, on n'aura qu'à dire qu'Aurore et moi l'avons entraîné durement, durant son temps libre. C'est ce qui paraîtra le plus vraisemblable. »

Le frère et la sœur hochèrent la tête de concert, puis Arthur se dirigea vers son armoire et en sortit un fourreau qui s'attachait dans le dos, avant de le lancer habilement sur la tête de Merlin, qui se mit à râler.

« Pourquoi vous me le jetez dessus ? », marmonna Merlin en le retirant.

« Tu auras besoin de quelque chose pour transporter ton épée au quotidien, non ? Il est hors de question que tu t'en sépares pour tes tâches quotidiennes. Et elle te gênerait si tu la mettais comme les chevaliers et moi. Déjà que tu n'es pas un serviteur très compétent, autant ne pas en rajouter, hm ? », fit narquoisement Arthur, masquant habilement le fait que ça le rassurait qu'il ait constamment une telle arme avec lui.

Merlin lui tira la langue, dans une grande démonstration de maturité, alors que sa sœur s'affairait déjà à lui attacher le fourreau. Elle le mit de sorte à ce que le dégainement de l'épée soit le plus naturel et facile possible.

« Et voilà ! », sourit Aurore en y rangeant l'épée de son frère, faisant claquer la garde de l'épée contre le fourreau.

« Merci, mais comment on va expliquer le fait que je me balade avec une épée, maintenant ? »

« Tu es mon serviteur, et le frère d'une déesse qui est désormais chevalière de Camelot. Cela justifie amplement que tu ais une arme pour te défendre à tout moment, surtout maintenant que Morgane en a après le trône. », répondit simplement le Prince.

Merlin hocha la tête, puis Arthur les congédia pour qu'ils se remettent au travail.

« Tu viens avec moi Rory ? »

« Désolée... », sourit-elle, désolée. « J'ai promis à Gwenny de l'aider dans ses tâches. Maintenant qu'elle s'occupe d'Uther, elle n'a plus le temps de faire toutes ses corvées... mais on se retrouve pour manger chez Gaius, si tu veux. »

« C'est mieux que rien. »

Merlin rassembla un sourire sincère et radieux, espérant qu'il soit assez convaincant pour que sa sœur ne remarque pas sa déception. Celle-ci haussa un sourcil, sentant qu'il était bizarre, mais décida visiblement de lui en parler plus tard car elle hocha la tête et prit congé du duo. Merlin ne tarda pas à suivre, une fois Arthur prêt pour le reste de la journée.

« Tu sais, elle ne va pas s'envoler. », se moqua Arthur, dans une tentative maladroite de réconforter le magicien.

« Je sais. »

Le blond voulut insister, voyant bien que quelque chose lui minait le moral, mais il ne sut que dire. Il ne pouvait pas comprendre le lien fusionnel entre son valet et sa sœur, il ne l'avait jamais expérimenté et sa propre sœur avait trahi Camelot à peine quelques semaines plus tôt. Il n'arrivait pas à trouver les mots. Alors il regarda avec tristesse son valet partir, le cœur en peine, pour aller polir son armure.

Lorsque Merlin eut refermé la porte, Arthur soupira. Il espérait que son cher valet reprendrait du poil de la bête au cours de la journée. Il ne pouvait supporter de le savoir mal...

« Si seulement tout pouvait redevenir comme avant, quand il n'y avait que Rory et moi... »

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