Chapitre 29 : Je vous aime en silence
Royaume de Camelot, cité, arène, le lendemain
Gilli entra dans l'arène, après qu'Arthur et Uther aient gagné leur combat. Le jeune paysan devait affronter un certain Nollar, un bandit qui l'avait humilié sur le chemin vers Camelot. Très vite, il fut immobilisé par un complice de Nollar, situé dans les tribunes. Toutefois, Gilli fit appel à sa bague, ce qui propulsa Nollar plus loin. Celui-ci rampa alors jusqu'à son arme, mais le paysan l'acheva sans pitié, avant de prendre conscience de ce qu'il avait fait. Il s'enfuit alors vers l'armurerie, choqué, suivi par Merlin.
Sous son casque, Aurore regardait son frère partir, alors que son combat n'allait pas tarder à commencer.
« Va, grand frère. Montre-toi digne de notre ascendance, et libère-le de l'influence que la magie a sur lui... »
Une fois le corps de Nollar évacué, Morgane annonça le début du combat suivant. Dans les tribunes, Guenièvre applaudit à tout rompre pour encourager celle qu'elle avait choisi comme sa favorite dans le tournoi.
Epée en main, prête à fendre les airs, Aurore regarda son adversaire du jour. Son compagnon de toujours lui souffla que ce dernier était extrêmement rapide. Elle devait être prudente.
Son adversaire était petit et mince, un avantage physique dont disposait également la barde. Toutefois, lorsqu'il engagea les hostilités, elle remarqua que son style était particulièrement offensif. Il agissait comme une vipère : il attaquait très vite et de sorte à neutraliser son adversaire aussitôt. Aurore n'avait d'autre choix que d'éviter constamment ses attaques, son arme ne pouvant décemment lui permettre de contrer les deux épée courbées de son ennemi temporaire.
« Allez Ella... », murmura Guenièvre, inquiète.
Par prudence, Aurore obtempéra rapidement un prudent retrait pour garder son adversaire le plus loin possible d'elle. La distance instaurée lui permit alors de remarquer qu'il commençait à être franchement épuisé, à son inverse. La barde sourit, ayant une idée en tête. Elle fonça sur son adversaire et, pendant plusieurs minutes, entreprit de l'attaquer aussi vite et agressivement que possible, pour le forcer à la contrer constamment et ainsi le fatiguer.
Au bout d'un moment, il évita de justesse un coup d'Aurore en courant pour se mettre dans son dos. Il mit un genou à terre, offrant une magnifique ouverture à la jeune déesse, qui ne s'en priva pas. Elle fit un vif et ample mouvement de sa main armée, de sorte que la garde de son épée assomme définitivement son adversaire.
Le silence se fit quelques secondes, avant que la foule ne se mette à exulter. Guenièvre applaudissait à tout rompre, soulagée, et Morgane souriait, trouvant que la participation d'Uther et d'Aurore mettait du piment dans ce tournoi important mais au combien rasoir à ses yeux. Dans le cas d'Uther, elle espérait qu'il périsse au cours d'un affrontement, et dans le cas d'Aurore, celle-ci lui devait désormais une faveur pour l'avoir aidé à participer. Elle savait très bien qu'elle ne pourrait pas rallier la barde à sa cause, mais elle pourrait toujours abattre cette carte pour l'empêcher d'agir contre elle lorsque Morgause jugerait que l'heure de Morgane à la tête de Camelot serait arrivée.
Royaume de Camelot, cité, maison de Guenièvre
« Comment tu te sens ? », s'inquiéta Guenièvre.
« Très bien, merci. L'avantage de vivre sur les routes, c'est qu'on devient très endurant. Et ce n'est pas parce que je monte Moonlight que j'échappe à la règle. »
« Ton adversaire était rapide. »
« Mais il misait tout sur ses attaques rapides, il n'aurait pas tenu longtemps sur un champ de bataille. »
« Tu étais sérieusement en difficulté, comment c'est possible ? Seul Arthur arrive à te tenir tête. »
« Mine de rien, le casque que je porte me rend plus lente. Mes mouvements ne sont pas tout à fait identiques à d'habitude. En plus, j'étouffe là-dessous ! »
Guenièvre rigola et mit un linge imbibé d'eau fraîche sur le front d'Aurore, qui en soupira d'aise.
« Demain, il y a les demi-finales. Arthur et Uther vont s'affronter, et toi tu vas affronter le mage, c'est cela ? »
« Gilli ? En effet. »
« Sais-tu les effets de sa magie ? »
« D'après Gaius, sa bague sert de canal à ses pouvoirs, un peu comme mon Gnosis. Mais apparemment, il s'en sert surtout pour s'accorder une force et un maniement de l'épée que même Arthur lui envierait. »
« As-tu déjà un plan ? »
« Pas vraiment. Sa magie le rend imprévisible. »
« Si c'est sa bague qui lui permet d'user de ses pouvoirs... »
« ... alors il deviendra inoffensif sans. », comprit Aurore. « C'est vicieux ça Gwenny, je ne t'imaginais pas comme ça ! »
En réponse, Guenièvre rit, gênée.
« C'était une idée comme ça. J'espère simplement que tes pouvoirs ne s'activeront pas à son contact... »
« Ne t'en fais pas pour ça, depuis que j'ai mon Gnosis, j'ai un total contrôle sur ma magie. Rien ne peut les déclencher sans mon accord désormais, que je porte le Gnosis ou non. Enfin, rien qui ne soit extérieur, je ne sais pas encore ce qu'il en est lorsque mes émotions sont très fortes... »
« C'est rassurant. »
Aurore lui sourit puis récupéra le lingue humide pour le mettre sur sa nuque, sous ses cheveux.
« Ah... ça fait du bien... », souffla-t-elle.
« Hahaha ! Tu dois vraiment avoir chaud avec ce casque ! »
« Tu n'imagines même pas... »
Royaume de Camelot, cité, arène, le lendemain
« Bonne chance. », fit Arthur à son père, alors que le combat était sur le point de débuter.
« A toi aussi. Tu en auras besoin. »
« N'en soyez pas si sûr Père. »
« Quand j'avais ton âge, quand j'ai conquis Camelot, je n'ai pas hérité de son royaume, je l'ai gagné. Un jour, tu seras assez fort pour prendre ma couronne mais pas tout de suite. Prêt ? »
Arthur hocha la tête et Uther lança les offensives. Il prit son fils par surprise, mais celui-ci se reprit vite. Le combat était rude, mais le Prince finit par mettre le Roi à terre.
« Votre jeu de jambes, ça a toujours été votre point faible. », affirma Arthur.
Uther se releva et renversa difficilement la balance, faisant perdre à Arthur son épée. Le fils fut mis à terre par son père, et il mit du temps à se relever, assez pour que la victoire revienne au Roi, que le peuple acclama.
« Vive le Roi ! Vive le Roi ! »
« Bien joué ! Cela n'a pas dû être facile. », fit Merlin à Arthur, lorsqu'il revint vers lui.
« Si ce n'était pas mon père... », ragea Arthur, qui l'avait laissé gagner sous les conseils de son valet, avant de rejoindre la tente royale.
« Le Roi est qualifié pour la finale. », fit Gaius à Merlin. « Tu as du souci à te faire pour son prochain adversaire... »
Merlin regarda le chevalier masqué et Gilli entrer dans l'arène. La lutte s'engagea entre les deux, le jeune magicien usant encore et toujours de sa magie. Toutefois, cela ne lui permit pas de venir à bout de son adversaire, à la grande surprise de Merlin, Gilli et Gaius. Le chevalier masqué semblait manquer cruellement de force, mais il compensait cela par sa vitesse d'attaque. Il attaquait très rapidement, sans que Gilli ne puisse le contrer, et s'éloignait aussitôt que son coup était porté, si bien que la force magique du paysan en était neutralisé.
« Impressionnant... », murmura Gaius.
Merlin fronça les sourcils. Maintenant qu'il pouvait observer plus en détails les mouvements du chevalier masqué, ils lui semblaient de plus en plus familiers. Il aurait presque pu jurer que c'était sa cadette s'il n'était pas certain que jamais elle ne s'inscrirait à ce genre de choses, encore moins dans un pays duquel elle était bannie.
Dans l'arène, la donne avait changé. Gilli avait réussi à plaquer Aurore contre les barrières de bois délimitant l'aire de combat. Elle tenta de se dégager mais ne réussit qu'à se rapprocher de l'emplacement de Gaius et Merlin. Dans les tribunes, les spectateurs hurlaient d'exaltation, encourageant leur favori.
Aurore serra les dents et, à court d'option, donna un coup de genoux dans l'entre-jambe de Gilli. Celui-ci poussa un cri de fillette avant de se plier en deux, plantant son épée dans le sol pour s'appuyer dessus. Aurore en profita pour récupérer l'anneau de Gilli, grandement soutenue par le vent qui l'aidait à déloger la bague du doigt de son adversaire.
Gilli serra la mâchoire et se releva avec difficulté avant de foncer sur la barde. Celle-ci se laissa à nouveau plaquer contre la barrière mais repoussa Gilli en se maintenant à la barrière avec sa main libre. Habilement, tout en maniant l'épée d'une main, elle glissa l'anneau entre les doigts de son aîné, qui n'eut pas le temps de réagir tant cela se passait vite. Aussitôt la bague livrée, Aurore fonça sur Gilli pour reprendre son combat, laissant Merlin montrer à Gaius l'objet.
« Ce chevalier savait qu'il utilisait la magie ? », s'étonna Gaius. « Mais pourquoi te l'avoir donné à toi ? »
« Il semblerait qu'il le savait, mais je ne saurais dire comment, ni pourquoi il m'a donné la bague... pour autant que je sache, on ne se connaît pas. »
« Tu es certain ? Cela pourrait très bien être ta sœur. »
« Gaius, ce tournoi est réservé aux hommes non bannis du royaume. »
« Rien ne permet de l'attester. La seule règle, c'est... »
« ... c'est qu'il n'y a pas de règle... », murmura Merlin. « Vous avez raison, c'est possible. En plus, ce chevalier bouge comme elle. Mais Rory m'aurait prévenu... »
« Peut-être qu'elle ne voulait pas t'attirer d'ennuis. Cela ne m'étonnerait pas d'elle. »
Merlin s'apprêtait à répondre quand il entendit Gilli grogner de rage, furieux d'avoir perdu sa bague. Il se concentra alors sur le combat, et vit que le paysan fonçait sur le chevalier comme un taureau foncerait sur un toréador agitant un tissu rouge. Le chevalier masqué fonçait également sur Gilli mais, au dernier moment, il sauta au-dessus du paysan en tournant sur lui même, l'assommant avec la garde de son épée au passage. Gilli s'effondra au sol, alors que le chevalier atterrissait derrière lui.
Merlin fit claquer sa langue, agacé.
« C'est elle. Je reconnaîtrai cette figure entre mille, c'est elle qui l' a inventé : la brise bondissante. »
« Tu dois lui parler Merlin ! Si Uther découvre qui elle est, il va la faire exécuter ! »
« Et que fait-on de la bague de Gilli ? »
« Il a été éliminé, tu peux donc la lui rendre. Mais ne perds pas de temps : je te rappelle qu'Aurore t'a déposé un cadeau au moment même où une intrusion a été remarquée dans le château. Si elle s'est inscrite au tournoi, il est possible qu'elle cherche à tuer Uther. Si elle est de connivence avec Morgane, cela expliquerait pourquoi elle l'a convaincu de participer au tournoi. »
« Cessez de soupçonner ma sœur ! », s'énerva Merlin. « Jamais elle ne ferait une chose pareille Gaius ! »
En colère, le magicien s'éloigna pour aller rendre la bague à Gilli. De son côté, Aurore repartait discrètement avec Guenièvre, peinée pour son aîné. La confiance que Merlin lui portait la touchait, mais, en même temps, il la faisait se sentir comme une moins-que-rien.
Il était vrai qu'elle n'était pas vraiment une alliée de Morgane, mais elle n'était pas vraiment une de ses ennemies non plus...
Royaume de Camelot, forêt, clairière, nuit
« Oh... drakon, e male soi ftengometh tesd'hup'anankes, erkheo... »
Répondant à l'appel de Merlin, Kilgharrah arriva et se posa dans la clairière.
« Je commençais à espérer que tu m'avais oublié. »
« Non, aucun risque. », rit le magicien.
« Le problème, jeune magicien, c'est que tu as envie de parler mais que tu n'as pas envie d'écouter. Après notre dernière rencontre, tu as choisi d'ignorer mon conseil. »
Merlin grimaça, ne s'en souvenant que trop bien. S'il avait laissé Morgane mourir, alors Uther n'aurait pas manqué de se faire tuer. Au lieu de cela, il avait créé l'avenir qu'il avait tenté d'empêcher.
« Je suis désolé... »
« Un Seigneur des dragons ne doit jamais abuser de son pouvoir. Je vois bien là l'influence de l'absence de ta sœur. Quelle raison as-tu de faire appel à moi cette fois-ci ? »
« Rory, justement. Elle s'est inscrite dans un tournoi, en cachant son identité, alors qu'elle a été bannie du royaume. Je n'ai pas eu l'opportunité de la revoir depuis qu'Arthur a arrangé une rencontre, mais ce jour-là, elle était déjà perdue quant à ce qu'elle devait faire par rapport à son destin. Elle ne savait si elle devait renverser Uther ou attendre qu'Arthur devienne Roi, et Gaius la soupçonne de pouvoir être l'alliée de Morgane. »
« Et tu as peur que cela soit le cas. »
Merlin hocha la tête.
« Demain, elle doit combattre contre Uther. Si jamais les doutes de Gaius sont fondés, j'ai peur qu'elle ne veuille tuer Uther... »
« Ce n'est pas impossible, le destin de la jeune déesse est très floue. Les prophéties la concernant ne cessent de changer. Actuellement, il est fait mention d'une alliance entre la sorcière et la jeune déesse. Cependant, rassure-toi : l'heure n'est pas encore venue, et son avenir peut toujours changer. »
« Donc, elle n'est pas alliée à Morgane ? »
« Pas pour le moment, du moins. »
« Que dois-je faire pour changer son avenir ? »
« Ce n'est pas à toi de le décider Merlin. Mais prends garde : il est écrit que c'est par ta faute qu'elle se retournera contre Camelot. »
« P... Par ma faute ? », pâlit Merlin. « Je... je ne comprends pas... qu'est-ce-que cela signifie ? »
« Je l'ignore jeune magicien, je peux simplement te conseiller d'être prudent, et de ne pas lui en parler. Elle est encore jeune, elle risquerait de faire la même erreur que toi, de tout faire pour empêcher ce potentiel avenir d'arriver et de le provoquer en conséquence. Ceci dit, tu as encore quelques années avant que ce futur n'arrive, rien n'est gravé dans le marbre, mais ne relâche pas ta vigilance pour autant. »
Merlin se mordit la lèvre. Par quel moyen pourrait-il retourner sa propre sœur contre Camelot ? Cela n'avait aucun sens.
« Merlin, cet avenir peut ne pas arriver. Tu es son grand frère, il ne tient qu'à toi d'éviter qu'elle ne s'égare par ta faute, et de la ramener si jamais cela arrive. Je suis certain que tu en es capable. »
« ... vous avez raison ! Et puis, son avenir peut changer, comme vous l'avez dit ! Je ne la laisserai pas devenir l'ennemie de Camelot ! Je ne le supporterai pas. »
« Puisses-tu avoir raison Merlin. Car, si cet avenir finit par arriver, nul doute que l'espoir d'Albion unifiée dans la magie s'éteindra, définitivement. »
Royaume de Camelot, cité, arène, le lendemain
« Pour la gloire ! », clama Uther en levant son épée.
En réponse, Aurore l'imita, sans toutefois parler, afin de ne pas griller sa couverture. Guenièvre regarda la barde, priant un instant pour sa victoire, tandis que Merlin faisait de même, espérant de tout son cœur que la présence de sa cadette à ce tournoi n'avait rien à voir avec Morgane.
Le premier à ouvrir les hostilités fut Uther, qui chargea sur Aurore. Celle-ci l'évita d'une roulade sur le côté, réfléchissant à la manière dont elle pouvait exploiter la faiblesse du Roi qu'Arthur avait révélé la veille. Ses connaissances de l'escrime étaient malheureusement trop faibles, c'est pourquoi elle préféra se référer à son principal atout : sa connexion avec le vent.
Après quelques minutes à écouter le vent tout en combattant, Aurore se mit à compter dans sa tête le tempo du jeu de jambes d'Uther. Elle se le martela, comme une litanie mentale, jusqu'à apercevoir une faille : Uther faisait reposer son poids sur une seule jambe toutes les dix secondes. Sans hésiter, elle l'exploita dès que possible, donnant un puissant coup d'épée sur l'intérieur du genou de la jambe en question, avec le plat de son arme. Pris au dépourvu, Uther perdit l'équilibre quelques secondes, mais ce fut bien plus qu'assez pour qu'Aurore se glisse dans son angle mort et ne mette son épée sous sa gorge.
A cette vision, Merlin se redressa, le cœur battant à tout rompre.
« Ne fais pas ça Rory, ne fais pas ça... »
Heureusement, la barde ne resta qu'un instant dans cette position, elle mania habilement son épée pour venir assommer le Roi avec sa garde.
Sous les regards choqués de la majorité des spectateurs, le Roi s'effondra au sol, laissant le chevalier masqué victorieux.
Le silence plana quelques secondes avant que Guenièvre et Morgane n'applaudissent à tout rompre, vite imitées par le public. Merlin, lui, se détendit et afficha un sourire soulagé avant d'applaudir sa cadette.
Arthur, qui était dans les tribunes avec la pupille du Roi, se leva pour s'approcher de la rambarde. Aussitôt, le silence se fit dans le public.
« Chevalier masqué, vous êtes le nouveau champion de ce tournoi ! L'or est à vous, vous l'avez amplement mérité. Puis-je vous demander de retirer votre casque ? Je suis certain que vous apporterez la gloire à votre famille, et peut-être pourriez-vous intégrer les chevaliers de Camelot. Un tel talent à l'épée, c'est vraiment incroyable ! »
« Vous savez très bien que je n'attends que cela, Arthur. »
Le blond se figea en reconnaissant la voix, bien qu'elle était déformée. Aurore planta son épée dans le sol puis porta les mains à son cou pour retirer son casque. Elle laissa ainsi ses boucles cascader librement sur ses épaules, ne les replaçant que grossièrement en secouant la tête. Guenièvre ne put s'empêcher de l'admirer, la trouvant vraiment magnifique avec son sourire victorieux et heureux.
« Aurore ?! », s'étouffa Arthur.
La concernée cala son casque contre sa hanche, alors que les femmes dans les tribunes applaudissaient de plus belles, félicitant l'adolescente. Le sourire d'Aurore s'élargit et elle récupéra son épée pour la pointer vers le ciel. Les applaudissements s'intensifièrent, alors qu'Arthur était sous le choc.
« Arthur ? », fit Morgane. « Vous devriez applaudir notre championne, vous savez. »
« M-Morgane... elle a été bannie... et c'est une fille. »
« Cela ne vous a jamais dérangé. De plus, ce tournoi n'a pas de règles, tout le monde peut y participer, aussi bien les mages, les personnes bannies, et... les filles. »
Ne pouvant qu'admettre qu'elle avait raison, Arthur soupira mais applaudit très vite Aurore avec un sourire sincère. Il avait peur de la réaction de son père, mais il n'y pouvait rien malheureusement. Il se demanda un instant si Merlin était au courant, mais finit par abandonner cette option : il lui avait clairement dit que jamais elle ne s'inscrirait à ce genre de choses. Il était donc certain qu'elle l'avait fait sans l'informer au préalable.
Un peu plus tard, Morgane, Guenièvre, Arthur, Merlin et Aurore se réunirent dans la loge royale, pendant que Gaius veillait sur le Roi à l'infirmerie.
« Tu as pris de gros risques Aurore ! », la fustigea Arthur. « Tu imagines ce que va dire mon père ?! »
« Rien ne m'interdisait de participer à ce tournoi Arthur, il n'y a aucune règle. C'est bien le principe de ce tournoi. »
« Il n'y a aucune règle, du moment que les lois de Camelot sont respectées ! »
« Mais rien ne le stipule clairement. », insista Aurore. « C'est une faille de ce tournoi. J'aurais pu tuer votre père si je le voulais vraiment. Heureusement pour vous, mon but dans ce tournoi était simplement d'éviter que ma lame ne s'émousse, en réalité je me fiche d'avoir gagné ou non. »
« Pourtant, jamais tu ne te serais inscrite à ce genre de tournoi avant. », fit Merlin. « En tout cas, cela explique les armoiries sur ta tunique. Si ma mémoire est bonne, ce sont celles de Barbatos. J'aurais dû les reconnaître... »
« En effet. », marmonna le Prince.
« Je viens de le dire, je voulais simplement me dérouiller un peu, et mesurer mon niveau accessoirement. Je n'en ai pas trop l'occasion quand je voyage, j'évite de m'attirer des ennuis. Ce tournoi était une opportunité, je l'ai simplement saisi. Ce n'était qu'un entraînement pour moi, si tu préfères. Je ne veux même pas les cent pièces d'or, je comptais t'en donner la moitié et donner l'autre à Gwenny en remerciement. »
« Tu étais au courant ?! », demanda Arthur, en regardant Gwen.
« Je lui ai demandé de loger Aurore, pour éviter que quelqu'un ne la dénonce. », intervint Morgane. « Par précaution. »
« Vous étiez dans le coup également ? »
« Je ne voyais pas quel mal il y avait de lui permettre de s'entraîner. Elle n'est pas comme vous, avec des entraînements presque journaliers avec des soldats. Personne d'autre que Guenièvre et moi n'étions dans le coup, comme vous dites. »
Merlin se passa une main lasse sur le visage, sans savoir qu'Arthur faisait de même. Aurore ne put s'empêcher de sourire devant cette synchronicité, de même que Guenièvre.
« Uther va te faire exécuter Rory... »
« Pas si je pars avant qu'il ne se réveille. Le tournoi est terminé, son absence de règles ne s'applique plus, je ne peux donc rester plus longtemps. »
« Ce serait préférable. », sourit Morgane. « Ne t'en fais pas, Arthur et moi serons en mesure de gérer Uther. »
« Ne me mêlez pas à ça ! »
« Allons ! », fit innocemment Morgane. « Vous n'allez quand même pas laissez la petite sœur de Merlin se faire pourchasser et exécuter par Uther, si ? Vous savez à quel point Merlin serait effondré si cela venait à se passer... »
Aurore, mal à l'aise, se força à sourire. Arthur venait de détourner le visage, pour cacher que Morgane avait raison, et Merlin fronçait les sourcils, incertain de ce que cela voulait dire dans la bouche de la sorcière.
« Hum... je vais y aller. Arthur, je peux compter sur vous pour diviser le prix en deux, pour Lirou et Gwenny ? »
« Bien sûr. D'ailleurs, depuis quand tu l'appelles ainsi ? »
« Pourquoi, vous êtes jaloux ? Je peux vous trouver un surnom affectueux, si vous voulez. »
« Ce... ça ira, merci. », marmonna Arthur. « File, avant que mon père ne se réveille. »
Aurore hocha la tête, puis enlaça son frère et Guenièvre, la remerciant de son accueil chaleureux. Celle-ci lui rendit son étreinte puis lui tendit son sac, où elle avait rangé ses affaires afin de lui permettre de partir plus rapidement. La barde le mit sur son dos puis s'inclina devant Morgane pour la remercier de son aide.
« Ce fut un plaisir. », dit sincèrement Morgane. « J'espère que nos chemins se croiseront très vite de nouveau. »
Aurore sourit simplement puis posa affectueusement la main sur les cheveux d'Arthur pendant quelques secondes. Celui-ci rougit et toussota pour masquer sa gêne, lui souhaitant malgré tout bon voyage. Elle eut un sourire amusée puis salua tout le monde avant de sortir de la tente. Sa jument l'attendait déjà, prête à partir.
Ce fut ainsi que la déesse du vent repartie, mais son chemin recroisera très bientôt celui de Camelot. Pour le Bien ou pour le Mal, il en reviendra à elle de le décider.
Royaume de Camelot, cité, château, salle à manger, le soir venu
« Qui qu'elle soit, cette jeune fille est une talentueuse épéiste... êtes-vous certaine qu'elle n'a pas usé de magie ? », interrogea Uther, alors qu'ils arrivaient à table ensemble.
« Certaine. », répondit Morgane, avant de prendre une mine faussement terrifiée. « J'ai passé un an... un an en étant exposée à la magie... je... je sais la reconnaître, désormais. Je vous assure qu'elle n'était pas une sorcière. »
Uther hocha la tête, attrapant la main de Morgane dans un geste réconfortant. Celle-ci força un sourire rassuré.
« Et elle n'a pas voulu du prix ? »
« En aucun cas. Elle a préféré l'offrir à Merlin et Guenièvre, en disant qu'il fallait bien cela pour récompenser un minimum leur dévouement envers Arthur et moi. »
« Quel curieux personnage... quoi qu'il en soit, c'était un beau combat. », admit le Roi.
« Oui, mais vous surpassez toujours Arthur. Vous pourriez peut-être lui donner quelques leçons. »
Arthur se retint de lever les yeux au ciel et ravala sa rage en prenant une gorgée de vin. Il sourit inconsciemment en sentant que son Merlin avait sorti une bouteille de vin des mille vents, il reconnaissait le goût rafraîchissant et la légère amertume qu'il avait senti lors du banquet des Cinq Royaumes. La différence, c'était que celui dont il venait de prendre une gorgée était bien plus sucré que celui qu'Aurore avait partagé ce soir-là. Cela eut pour effet de détendre le blond, alors qu'Uther disait qu'au contraire, c'était lui qui avait beaucoup appris de son combat avec le Prince.
« Je ne vois pas quoi. », rétorqua Morgane.
« Arthur est bien meilleur guerrier que vous ne croyez. »
« Mais hélas, il n'a pas été assez bon. », minauda la sorcière en regardant Arthur.
Encore une fois, le blond prit une gorgée de vin, se calmant un peu. Son sot de valet avait vraiment de l'avenir en tant que vigneron, il en était certain.
« Parce qu'il a faussé ce combat pour que je puisse sauver la face. C'est lui qui aurait dû combattre la jeune fille qui se cachait sous le casque du chevalier masqué. »
« Vous le saviez ? », s'étouffa Arthur.
« J'ai suivi tes progrès à l'épée depuis que tu étais petit garçon. Je sais que tes capacités surpassent celles de quiconque. Je t'en serai éternellement reconnaissant. J'espère que quand tu seras roi, et que tu auras toi-même des fils, ceux-ci te procureront le même honneur. En vérité, le résultat le plus satisfaisant de ce tournoi c'est... c'est qu'Arthur m'a démontré par ses actes qu'il était désormais réellement prêt à être Roi. »
Uther leva son verre, suivi de son fils. N'ayant pas le choix, Morgane les imita. Arthur regarda son valet et le congédia d'un signe de tête, avec un sourire. Il sourit pour le remercier et quitta discrètement la pièce. Pendant un instant, le blond regarda Merlin s'éloigner, avant de se reconcentrer sur Uther et Morgane.
Royaume de Camelot, cité, château, remparts
Merlin s'accouda sur la pierre, regardant les étoiles qui scintillaient dans la nuit. Il regarda la bouteille qu'il avait ouverte spécialement pour Arthur, en espérant que cela le détendrait un peu suite à ce qu'il avait été contraint de faire pour Uther. Il fit un sourire teinté d'ironie en lisant l'étiquette.
« Amour dévorant »
Il n'avait pas trouvé de nom mieux que celui-ci quand il avait fait le vin, un soir d'automne de l'année passée. Il y avait mis de l'herbe à lampe, des cerises et des pétales de chrysanthèmes à aubes. A ses yeux, l'herbe à lampe représentait le courage d'un explorateur car elle était parfois sa seule source de lumière dans la nuit. Les cerises représentait son amour véritable mais si ambivalent pour Arthur, leur goût sucré mais acidulé exprimant à la perfection la tendresse mais aussi la joie de l'embêter qu'il éprouvait. Quant aux chrysanthèmes à aubes, elles représentaient la volonté de défenseur forte comme autrefois, ou plutôt la sienne toujours aussi éternellement forte de protéger Arthur et qui n'avait pas faibli depuis le premier jour.
Son amour pour Arthur était si fort qu'il le dévorait de l'intérieur, tout comme les cerises avait dévoré les pétales et l'herbe à lampe de son vin.
Merlin lâcha un lourd soupir. Il leva à nouveau les yeux vers les étoiles et fit quelque chose qu'il s'était juré de ne plus jamais faire, car cela faisait s'emballer sa magie : chanter ses sentiments.
« On me dit qu'en amour, tout est possible
Mais là, je vis un amour impossible
Je suis votre confident, votre bras droit
Je pouvais aimer tout le monde, mais pas mon futur Roi
J'ai pas su contrôler mes sentiments
Donc je reste à ma place gentiment
Vous me connaissez, vous savez que je vous respecte
Mais quand je suis avec vous, oui, je reste bête... »
Il inspira profondément et sa voix, qui n'était qu'un murmure jusqu'alors, se fit plus forte.
« Je vous regarde, vous me regardez
Vous doutez de rien, je le sais bien
Vous me faites sourire, ça me fait souffrir
Ça mène à rien, je le sais bien
Je vous aime en silence, il faut que j'y renonce
Mon cœur me relance, je garde tout, c'est ça ma réponse
Je vous aime en silence, il faut que j'y renonce
Mon cœur me relance, je garde tout, c'est ça ma réponse
Je vous aime en silence, je vous aime en silence
Je vous aime en silence, je vous aime en silence »
Il se tut un instant, passant sa main dans ses cheveux, mais ses sentiments étaient trop forts. Maintenant qu'il avait fait sauter les serrures, il devait tout laisser sortir. Alors il continua, criant son mal-être à la Lune, mère de la magie.
« Quand vous me regardez, je me perds
Quand vous êtes présent, je me retrouve
Quand vous me conseillez, ça me sert
Quand je suis avec vous, je me découvre
Quand je bloque, je me pose des questions
Et je reste à ma place gentiment
Vous n'y êtes pour rien, donc je l'accepte
Et je ne laisserai rien apparaître
Je vous regarde, vous me regardez
Vous doutez de rien, je le sais bien
Vous me faites sourire, ça me fait souffrir
Ça mène à rien, je le sais bien
Je vous aime en silence, il faut que j'y renonce
Mon cœur me relance, je garde tout, c'est ça ma réponse
Je vous aime en silence, il faut que j'y renonce
Mon cœur me relance, je garde tout, c'est ça ma réponse
Je vous aime en silence, je vous aime en silence
Je vous aime en silence, je vous aime en silence »
Merlin se hissa sur les remparts et s'y assit, laissant pendre ses jambes dans le vide. Sa voix se fit plus triste, résignée et douloureuse.
« Je vous veux mais je m'en veux aussi
Si je vous le dis, ça va changer nos vies
Je vous aime en silence
Je vous aime en silence
Je vous veux mais je m'en veux aussi
Si je vous le dis, ça va changer nos vies
Je vous aime en silence
Je vous aime en silence »
Ses yeux devinrent dorés et une fine pluie commença à tomber, avant de s'intensifier, comme si le ciel pleurait avec lui. Merlin ne bougea pas, ses larmes se mêlant à la pluie.
« Je vous aime en silence, Arthur Pendragon. »
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