Chapitre 12 : Un endroit où revenir, entre deux voyages

Royaume de Camelot, cité, château, appartements de Morgane, une semaine plus tard

« Entrez. », fit Morgane lorsqu'elle entendit quelqu'un toquer à sa porte.

La porte s'ouvrit et Arthur entra.

« Désolé de vous déranger Dame Morgane, je cherche Aurore. »

« En quoi puis-je vous aider Arthur ? », répondit la concernée, en plein nettoyage de sa lyre.

« Ton frère est au pilori, et j'ai besoin de quelqu'un pour m'entraîner. Cela te tente ? »

L'adolescente tenta vainement de contenir sa joie, mais le sourire qu'elle tentait de réprimer et l'étincelle qui s'était allumée dans ses yeux ne pouvaient être ignorés par Morgane et Arthur.

« Vas-y Aurore, je sais où te trouver si jamais j'ai besoin de toi. »

« Merci Morgane ! Vous êtes la meilleure ! Je vous confie ma lyre ! »

Délicatement, elle donna son instrument à la pupille du Roi, avant de sortir avec enthousiasme de la chambre. Arthur et Morgane s'échangèrent un sourire mi-amusé, mi-complice, puis le Prince quitta à son tour.

Royaume de Camelot, cité, château, terrain d'entraînement, plus tard

« Tu es rapide ! », fit Arthur, visant la cible que tenait Aurore sans parvenir à l'atteindre.

« Vous m'avez demandé de faire la cible mouvante, non ? »

« En effet ! »

Arthur eut un claquement de langue lorsqu'il rata une nouvelle fois la cible. Il avait déjà pu remarquer que l'adolescente était rapide et agile avec une épée, mais force était de constater que même sans et tenant une cible à bout de bras, elle l'était au moins tout autant.

« Ce qui est sûr, c'est qu'avec toi, c'est un véritable entraînement. »

« Vous devriez arrêter de critiquer mon frère. Il vous est extrêmement dévoué, bien trop pour la façon dont vous le traitez. »

« C'est mon serviteur, c'est son rôle de m'être dévoué. »

« Mais ce n'est pas son rôle de risquer constamment sa vie pour vous. », contredit Aurore. « S'il vous plaît, traitez-le avec plus de respect. »

« Cela ne changerait rien. »

« C'est un conseil que je vous donne Arthur : les serviteurs qui sont très bien traités, avec respect, vouent à leur maître une fidélité et une loyauté sans faille, que même la plus puissante des magies ne peut altérer. L'inverse est tout aussi véridique. »

« C'est quelque chose que tu as appris en voyageant ? »

« Vous seriez surpris de tout ce que l'on peut apprendre d'un voyage. »

« Es-tu en train de me dire que Merlin pourrait me trahir parce que je le traite mal ? »

« Vous traitez bien mieux vos serviteurs que la plupart des nobles, mais ce n'est pas encore suffisant. Merlin ne se retournera jamais contre vous, mais cela n'a rien à voir avec le fait qu'il est votre serviteur. »

« Pourquoi donc, alors ? »

« Secret fraternel. Désolée, mais vous n'en saurez pas plus. Essayez de le traiter comme un ami, plutôt que comme un serviteur. C'est ce que Dame Morgane fait avec Guenièvre. »

« ... je garderai en tête ton conseil. », dit simplement Arthur.

Aurore hocha la tête, puis le Prince lui proposa un petit duel à l'épée, pour évaluer son niveau.

Sans grande surprise, ce fut l'adolescente qui remporta le duel, bien que la confrontation fut aussi serré que lors de la bataille d'Ealdor.

Royaume de Camelot, cité, château, appartements de Morgane, deux heures plus tard

« Bon anniversaire ! »

Merlin sourit en voyant l'air éberlué de sa cadette. Elle était tellement surprise qu'elle ressemblait à un poisson hors de l'eau, avec les yeux exorbités et la bouche qui ne faisait que s'ouvrir et se refermer.

« C... Comment... »

« Je n'étais pas vraiment au pilori ce matin. », avoua Merlin. « J'ai demandé à Arthur de te distraire, tu m'aurais vu venir à des kilomètres sinon. »

Amusé, il exerça une pression sur la mâchoire de sa cadette pour qu'elle ferme la bouche, ce qu'elle fit. Elle secoua la tête pour reprendre ses esprits, faisant danser les tresses qui encadraient son visage.

« Tu m'as organisé une fête d'anniversaire ?! »

« J'ai reçu de l'aide... »

D'un mouvement de la main, il désigna les quelques invités, à savoir Morgane, Guenièvre et Arthur.

« Donc en fait, Arthur m'occupait tout à l'heure, pour que je parte des appartements de Morgane. »

« En effet, mais c'est toujours intéressant de s'entraîner avec une escrimeuse aussi chevronnée que toi. », confirma le concerné.

« Quel âge cela te fait ? », voulut savoir Guenièvre, alors que Merlin posait sur la tête de sa sœur une couronne de fleurs.

« Quatorze ans ! »

« J'avais oublié qu'elle était beaucoup plus jeune que Merlin... on ne dirait pas pourtant. », fit Morgane.

« Je ne sais pas vraiment comment je dois le prendre. », marmonna Merlin.

Guenièvre prit la main d'Aurore et la tira vers la table à manger de sa Dame, sur laquelle il y avait un gâteau. La servante s'arma d'un couteau et découpa des tranches pour tout le monde.

 « Il est magnifique ! », sourit Aurore, ravie.

« C'est grâce à Guenièvre. », affirma Merlin.

« On fait une bonne équipe derrière les fourneaux. », confirma la concernée. « Goûte Aurore ! »

La fêtée du jour s'exécuta, et un grand sourire prit place sur ses lèvres.

« Tu es toujours aussi bon pâtissier Lirou ! »

« C'est vrai Merlin ? », s'étonna Arthur.

« Disons que je me débrouille. », rougit Merlin.

Sans répondre, le Prince prit un bout de son morceau de gâteau et le mangea. Un léger sourire prit place sur ses lèvres. Son valet était visiblement très loin de seulement se débrouiller en pâtisserie. Jamais il n'avait mangé de gâteau aussi bon.

« C'est vraiment excellent. Pourquoi ne m'en as-tu jamais fait ? »

« Vous ne me l'avez jamais demandé. Et puis, il faut faire attention à votre poids. »

« Je ne suis pas obèse ! »

« Je n'ai jamais dit que vous l'étiez, mais c'est bien la preuve que le régime fonctionne. »

Le visage d'Arthur se durcit devant l'insolence de son valet mais, avant qu'il ne puisse lui faire une remarque bien cinglante, les trois filles de la pièce éclatèrent de rire.

« Vous ne pouvez vraiment pas vous en empêcher ! », rit Guenièvre.

Merlin se mit bien vite à rire à son tour, et Arthur finit par se détendre et secouer la tête, faussement désespéré, malgré un petit sourire sur ses lèvres.

« Depuis quand tu as autant de cran, grand frère ? »

« Depuis mon arrivée à Camelot et que j'ai compris qu'il fallait que les membres de la haute société redescendent sur Terre. Enfin, pour la plupart. »

« Sur ça, je ne peux pas te donner tort. Arthur et Morgane sont les premiers que j'arrive à apprécier. Tu risques de me revoir souvent. »

« Pas trop souvent j'espère, tu sais que c'est dangereux pour toi. »

« T'inquiète ! Mais je me sens bien ici, à Camelot. »

« Reviens quand tu veux, tu seras toujours la bienvenue ici. », murmura Merlin en l'enlaçant.

« Tu as trouvé ta place ? »

« Je n'en serai jamais vraiment sûr tant qu'Arthur ne saura pas. Mais on peut dire que oui, en quelque sorte. Ma vie a un sens désormais. »

« Alors tant mieux. »

Après un certain temps à discuter joyeusement tout en mangeant du gâteau, un chevalier toqua à la porte et annonça que le Roi voulait s'entretenir avec Arthur. Le blond prit donc congé mais autorisa Merlin à rester.

« Et maintenant, les cadeaux ! », s'excita Morgane.

Elle fit signe à Guenièvre de venir l'aider et elles déplacèrent un mannequin de bois qui était habillé d'une tenue étrangère au style de Camelot et dont la couleur dominante était le vert.

« Les couturières l'ont terminé hier ! », précisa Morgane. « Qu'en dis-tu ? »

« Elle est magnifique ! Encore mieux que je ne l'avais imaginé ! »

« Et j'ai même la touche finale. », sourit Merlin.

Il s'approcha et épingla sur le béret vert et doré une fleur blanche, une cécilia, en tissu.

« C'est parfait... », souffla Aurore, ravie.

« Va l'essayer ! », la pressa Guenièvre.

Avec enthousiasme, l'adolescente se plia à sa volonté et la servante lui mena la tenue derrière le paravent de sa Dame. Aurore s'habilla seule, pendant que Guenièvre entreprenait de fixer sur sa nouvelle ceinture son épée rengainé. La sœur de Merlin l'attacha ensuite à sa taille et glissa dans son dos, dans la petite besace qui était intégrée à la ceinture, sa chère lyre qui en devenait ainsi invisible car cachée par la longue cape que l'adolescente portait. Une fois habillée, elle rejoignit Merlin, Morgane et Guenièvre.

 « Oh Aurore, tu es magnifique ! », s'extasia Morgane.

« Elle a raison, cette tenue te va vraiment bien. Elle te correspond complètement ! », affirma Merlin.

« Le vert est définitivement ta couleur. », sourit Guenièvre.

Morgane conduisit l'adolescente devant son miroir, pour qu'elle puisse voir à quoi elle ressemblait.

« Incroyable ! J'ai l'air d'une vraie barde voyageant au gré du vent, comme ça ! C'est vraiment parfait ! Merci Morgane ! »

La pupille du Roi eut un sourire heureux, contaminée par la joie de la sœur de Merlin.

« Cela m'a fait plaisir ! »

Aurore lui sourit en retour.

« Vous ne pouvez pas savoir à quel point c'est important pour moi que vous ayez organisé une fête d'anniversaire pour moi. Ce n'est rien d'exceptionnel, mais cela me touche vraiment. »

Merlin enlaça de nouveau sa sœur, qui lui rendit son étreinte.

« Tu peux venir à Camelot quand tu veux. », sourit Morgane. « Tout barde a besoin d'un endroit où revenir par moment. »

L'adolescente essuya quelques larmes.

« O-Oui... merci... argh ! Stupide sensibilité ! »

Sa réaction fit rire Merlin et Guenièvre et sourire d'amusement Morgane.

« Tu n'es plus seule désormais. », chuchota le magicien en lui caressant les cheveux. « Si Arthur et Morgane t'acceptent avec tes compétences à l'épée, tout le royaume fera de même. »

Aurore se blottit contre son aîné, incapable d'exprimer toute la reconnaissance qu'elle éprouvait envers lui, qui avait toujours essayé de lui fournir une ancre en ce monde, un endroit où revenir après ses voyages. Ealdor était oppressant pour elle comme pour lui, mais Camelot semblait représenter un nouveau départ pour eux deux.

« Je t'aime grand frère, tu sais. »

« Je t'aime aussi Rory. »

Merlin déposa un baiser sur son front, tandis que Guenièvre et Morgane les regardaient, attendries. Les deux enfants d'Hunith étaient indéniablement proches malgré la distance physique qu'il y avait très souvent entre eux. Ils se témoignaient une affection comme Morgane n'en avait quasiment jamais vu.

« Ils sont si fusionnels, alors qu'ils sont à l'opposé l'un de l'autre. », commenta Guenièvre, en murmurant.

« Ils ont dû traverser ensemble des épreuves dont nous n'avons pas connaissance, et j'imagine que le secret des pouvoirs d'Aurore les a rapprochés. Elle n'avait qu'Hunith et Merlin comme confidents jusqu'à très récemment, et je doute qu'elle se soit beaucoup confiée à leur mère, vu comment ils ont l'air de se comprendre sans rien dire. »

Gwen sourit, plus que d'accord avec la pupille du Roi. Elle-même n'était pas aussi proche de son frère, Elyan. Cela lui faisait chaud au cœur de voir Aurore et Merlin aussi fusionnels, alors même que l'adolescente était similaire à Elyan, toujours à aller où son cœur la guidait.

« C'est sans doute ce qui rend Aurore aussi redoutable à l'épée, et Merlin dévoué à Arthur à un tel point qu'il est prêt à risquer sa vie pour lui. Probablement l'a-t-il souvent fait pour Aurore par le passé. »

« Le principal, c'est qu'ils s'entendent bien malgré qu'Aurore voyage toujours. Je ne pense pas qu'ils se soucient du reste. »

« ... vous avez sans doute raison ma Dame. »

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