Je l'appelle Ziggy

Duma










Si on me rate à midi, il est impossible de m’intercepter à la sortie. Delilah comme tout mon petit monde le sait, je n’empreinte jamais le même chemin, une fois mon boulot terminé. Ce qui dans une ville aussi grande que New-York, soutien inconditionnel de l’anonymat, aussi vivante que pleine, reviendrai chercher une aiguille dans une motte de foin, pour qui essayerait de me trouver. Ma collègue n’étant ni stupide, ni suicidaire, c’est sans surprise que je la découvre derrière la porte d’entrée, après avoir dévalé à toute vitesse l’escalier. Il est vingt et une heure, et voilà trente minutes que j’ai déposé mes affaires chez moi ––plutôt chez Dona pour être plus honnête.


–– Salut.


–– Bonsoir Del. Viens, entre. J’espère que tu as faim. Roxanne est rentrée avec les reste d’un buffet. De quoi nourrir tout un régiment.


–– Non à tout sauf à la nourriture, rigole cette dernière, trois doigts en l’air comme une vraie girl scoute. Sinon, toi ça va ?


–– Si tu veux savoir si je gère bien mon renvoie, la réponse est non. Et si ta question est plutôt, est-ce que je regrette ? Là encore c’est non. Il méritait ça et plus encore. J’aurais dû l’insulter ce connard, et peut-être mon renvoie aurait eu un sens.


Un rire léger agite les épaules de ma voisine. Moi j’ai encore dans la bouche, le goût amer de toutes les vacheries qui me sont tombées dessus ces dernières heures, alors impossible de montrer les dents.


–– Si ça peut te consoler, sache qu’il peinait à soutenir nos regards après ton départ. Lysa m’a même dit qu’elle l’a entendu avouer à son frère que tu étais la deuxième personne à l’avoir autant humilié de sa vie.


Tant mieux, connard !


–– Donc le châtain c’était son frère ?


Delilah confirme de la tête, lorsque la voix suraiguë de Dona s’élève au-dessus du bruit des couverts.


–– Qui s’est ce châtain clair ?


Du Dona tout cru. Elle n’en manque jamais une pour rajouter son grain de sel. Pas étonnant qu’elle fasse dans le People.


–– Qui a dit clair Dona ?


Elle hausse les épaules, et je n’en finis pas de rouler des yeux, tout en secouant la tête à raison. C’est une affaire, cette fille.


–– Personne, mais tant que ça vous pousse à parler, sourit-elle avec sincérité, les yeux pleins d’étoiles de victoire. Alors, notre spécimen du soir, qui est-ce ?


–– Le frère du monsieur dont je vous parlais tout à l’heure.


–– L’homme qui t’a fait renvoyer ?


Enfonce le couteau dans la plaie Dona. J’en ai vraiment besoin là.


–– C’est ça. Mais dépêchons, je détesterais avoir à aller réchauffer mon plat, j’ai horreur de ça.


J’ai surtout la mouche. L’impression d’être enfoncée dans un tas de caca, n’est pas des plus plaisantes. Perdre ce boulot c’est comme faire quarante-cinq pas en arrière. Une régression fatale dans mon processus d’émancipation. Alors oui, c’est plus qu’une déception à mes yeux, c’est un drame.

Quand j’ai quitté la maison de mes parents, je me suis jurée de ne plus jamais me laisser vivre de la charité de quiconque, fusse-t-elle certifiée désintéressée, et ce peu importe qu’elle vienne d’une personne de mon entourage. La vie s’est amplement chargée de m’apprendre que ces dernières sont les pires qui soient. Alors, vivement le retour des beaux jours, je déteste avoir à penser souvent à mon passé.

Je finis mon diner avec peine, contrairement à aux autres. Non pas qu’il soit mauvais. D’ailleurs, même s’il l’était, je l’aurais quand-même terminé, parce qu’on ne peut pas se permettre de gaspiller de la nourriture nous. Des diners de ce genre, copieux et équilibrés, on en a droit je dirais, une fois tous les mois ––et encore, elle n’est pas écrite dans le marbre cette référence. Je n’ai pas d’appétit à cause de cette sensation étrange qui persiste dans mon corps. Un malaise sournois qui me vaut des tourments aussi physiques que psychologiques. Le sentiment d’avoir tout raté, une insatisfaction accablante. L’impression d’avoir été prise dans une tempête dans le désert, qui a réduit en débris tout le chantier de ma vie. Pour preuve, tout à l’heure dans le parc, je n’ai pas pu poser le moindre mot sur l’histoire que je suis en train d’écrire.  En d’autres termes, je viens de passer une journée inutile, fichue, improductive.


–– Allez les jeunes, baille Roxanne, je vais me coucher. C’est peut-être samedi demain, mais le boulot continue pour moi. Et toi Duma, ne t’inquiète pas, je suis sûre que tu trouveras vite un autre job à tenir. On va se serrer les coudes, comme on en a pris l’habitude.


Roxanne a dû reprendre l’affaire familiale à la mort de leur père il y a sept mois, la gestion d’une supérette sur William st. C’est aussi la sœur aînée de Dona ma meilleure amie et en quelque sorte, ma sauveuse. Sans elle, je n’aurais jamais eu le courage de quitter le cocon familial, alias mon ancienne vie toxique de recluse de service.


–– Merci Rock, mais vous avez déjà tant fait pour moi. Ne t’en fait pas, on continue comme avant, je paie mon loyer et ma part des courses. J’ai quelques économies, je vais gérer.


Économies dans lesquels puiser revient à remettre chaque fois, à un peu plus tard, la reprise de mes cours à la fac, ça aussi c’est vrai. Mais j’insiste, ma liberté vaut bien plus que ça. Elle et sa sœur le savent mieux que personne, voilà pourquoi celle-ci renonce à la première objection.

Un baiser dans mes cheveux conclut cet échange qui n’est pas à son round un, je précise, puis elle grimpe l’escalier.

Mes amis et moi ne tardons d’ailleurs pas à la suivre, après la grande vaisselle. Enfin, amies, parce que Cameron je le tolère plus que je ne l’aime. Ce dernier prétend que je jalouse sa relation avec Dona, pointant du doigt mon côté possessif et maternel, mais la vérité est qu’il a une mauvaise influence sur cette dernière. Frivole et envieux, il en fait une personne déraisonnable qui s’entête à courir après le luxe et la vie facile, en dépensant sans compter, sans se soucier de sa situation financière.

À Los Angeles on pouvait se permettre de claquer l’argent de mes parents par les fenêtres, c’était bien le seul avantage que m’offrait ma vie, mais plus maintenant. Malheureusement Dona aime les belles choses, Cameron débute dans la mode et n’aspire qu’à forcer l’accès des plus grandes soirées et à côtoyer les cercles les plus fermés de la haute couture, et entre temps, ça coute cher de jouer les riches alors que, plus que pauvres, on est à demi du statut de misérables.


–– Ce n’est que de l’investissement poulette, oppose Cameron, comme à chaque fois que je me lance dans une longue litanie de sermons, lorsque Dona commande une de mes affaires personnelles pour leurs sorties hyper chics. Et bientôt nous l’aurons nos intérêts. Tu as une idée de ce que ça représente, être invitée à cette fête. Rihanna en personne y sera ma sainte, ne manque-t-il d’ironiser sur la fin. Rihanna !


Inutile de prolonger l’évangélisation avec ces deux-là, ça ne sert à rien. Et Dieu sait que j’y ai laissé de la salive.


–– Je ne sais même pas pourquoi je perds encore mon temps à essayer de vous passer le savon. Quant à toi Dona, j’ai grande impression que tu aimes juste jouer avec mes nerfs. Tu le sais très bien, jamais je ne te refuserais quoique ce soit, mais comme tu sais aussi que selon la destination de vos petites virées de types investissements, grimacé-je en esquissant des guillemets de mes doigts, je vais ronchonner comme une mère poule ayant repéré un épervier, tu fais quand-même exprès de venir demander. Ça t’amuse hein, de me foutre le trouble et le froid dans le sang, pas vrai ?


–– Et comment ! J’adore te voir jouer les mamans protectrices avec moi, psalmodie cette dernière sans se défaire du rire dans sa gorge. On marche comme ça depuis toujours. Je fais des bêtises, et toi tu répares. Tout nickel. Et tu vois bien que lorsque tu essaies d’inverser les rôles, ça va toujours en couilles, Mamounette.


Et elle me plaque un baiser bruyant sur le crâne, avant de passer ses ongles manucurés à la perfection entre les lignes de mes vanilles collées. Plus rusée qu’un renard affamé, ainsi tue-t-elle dans l’œuf, jusqu’à ma simple volonté de m’irriter. Les caresses sur le cuir chevelure, voilà mon talon d’Achille, ou mon péché mignon, chacun y va au feeling.

Non sans un pincement au cœur, je décide de ranger mes leçons de morale de côté, pour me laisser porter par toute la douceur de ses frôlements répétitifs sur mon cuir chevelure, et l’air frais de la nuit malgré l’été. Un moment de pure bonheur que Delilah prend un malin plaisir à gâcher en ramenant le sujet de la furie de ce matin sur le tapis.

Et dire que je commençais à peine à oublier les malheurs de ma vie. Avec ce rappel arrive une colère si lourde qu’elle m’incite à m’arracher de la poitrine de ma brunette préférée, pour être en mesure de la soutenir ––et d’éviter mon propre effondrement dans la même lancée.


–– Alors Dou ? Tu fais exprès d’ignorer la raison de ma présence ici ou quoi ? Cette femme ? Cette gifle ?


Dona cesse immédiatement ses cajoleries, et pour bien m’apprendre qu’elle est tout aussi intriguée par ce ragot de la dernière heure, elle ne se limite pas seulement à glisser sa tête contre mon épaule, non, ça démontre pas assez l’urgence de la situation d’après elle. Tordre le cou pour avoir mon visage en ligne de mire, ça oui par contre.


–– Putain de gymnastique de commère, ricané en la repoussant du plat de ma main, moins enragée qu’au début, grâce à ses improbables prouesses.


Elle a réussi à me voler un rire grelottant. Néanmoins, tout le mérite de mon retour au calme revient à Tchékhov dont la truffe balaie la peau de ma cuisse, de manière bien plus pressante encore que son souffle en alerte.


–– Revenu de drague ? plaisanté-je en caressant la tête de mon chien, ma meilleure trouvaille newyorkaise, ma plus belle action de l’année, juste pour les faire mariner un peu ––et les faire chier, il en va de soi.


Ce vieux coquin de dix ans s’est entiché de la jeune et jolie Marinette, un labrador à la fourrure blanche d’à peine trois ans, et si en temps normal il passe déjà une claire partie de son temps dans ses pattes, lorsque cette dernière est en chaleur, dire qu’il dort dans sa chatte est un euphémisme.

Je crois qu’en ce moment, ils en sont encore à la période de négociation, d’où son retour de si bonne heure. Et même si je ronchonne de ne pas le voir plus souvent que je le voudrais, j’y gagne beaucoup dans l’histoire, étant non seulement dispensée de frais de gardiennage, mais des crises d’angoisses de ne pas le savoir en sécurité et de la tristesse de ne pas le savoir heureux, aussi. Miss Darby adore les animaux et sa petite protégée semble être l’âme-sœur de mon vieux compagnon.


–– Allez, mais accouche, merde !


À force de traîner avec les commères, on en devient forcément une. Je vous parle en tant que première reporter et espionne en cheffe, de la bande. C’est donc un sourire aux lèvres que j’observe Cameron se frotter presque les mains d’anticipation, lui qui nous a souvent reproché, Delilah et moi, d’être des branleuses avides de ragots, dans l’espoir de combler les vides d’une vie pauvre en sensations fortes ––par simple paresse, je précise.

Ouais, monsieur « l’investisseur » aime à dispatcher çà et là des discours de motivation achetés à quelques dollars à la librairie du coin. Il rêve de richesse, il rêve de grandeur, s’ennuie de ceux qui n’ont pas les mêmes ambitions ––et me traite moi particulièrement de « mauvais berger » prêchant le faux à savoir, vivre de liberté et d’eau fraîche, alors que mon avenir financier est déjà tout tracé, tout chargé de dollars surtout.
S’il savait…

Soit, sans plus attendre, et après avoir fait de la place entre mes jambes à mon berger allemand, je me lance dans le douloureux récit de ce déboire. Il a peut-être été sans conséquences certes, mais n’en demeure pas moins bileux, même carrément limitrophe avec le lot bien acide des situations de la vie qui révoltent et dont les racines baillent aigrement dans l’impuissance et chosification du révolté, par un être encore plus chose, mais qui préfère l’ignorer, fuir la glace et même parfois la briser, par simple lâcheté.


–– Oh mon Dieu, non ! rit ce qu’on fait de plus cliché et de blond, depuis la création des temps.


Cameron est parfait dans la peau du beau surfer californien avec sa chevelure d’or et son regard océanique, avec un côté féminin qui donne tout son sens à son aura féline. Dommage que du féminin, mentalement parlant, il n’est pris que le pire, tant il aussi complexé par son physique, qu’il est divin.


–– Dou tu jures ? s’avance à sa suite Dona qui a carrément quitté la chaise lit, faisant ainsi plus de place pour moi et mon toutou. Elle t’a vraiment… (elle couvre son rire moqueur du plat de sa main, pour un effet amplificateur) giflé !


Mes membres n’ont jamais été aussi raides. Pas même quand je me suis faite prendre par mes parents le soir du bal de promo, sur le point de faire le mur. La honte, c’est pourri, je le jure sur la tête de mes ancêtres.


–– Et foutu la chemise de son mec sur la tronche, confirmé-je résignée. Mais elle a encore fait pire, elle m’a menacé de mort.


S’ils n’étaient pas déjà sur les fesses, là c’est bon, ils viennent de dégringoler d’un étage.


–– Si, si, je vous jure. Sur la tête mon Tchekhov, me bidonné-je en évitant la langue collante du molosse.


D’ailleurs ce dernier se met à aboyer, mécontent de se faire bouder. Si je ne cède pas dans les secondes qui vont suivre, môsieur va me claquer la porte au nez et aller se fourrer Dieu sait où, pour me faire payer mon insolence. Il est hyper capricieux le bonhomme, et me mène par le bout de la baguette. Il peut bien s’en vanter le molosse, il est bien le seul dont je consens à suivre les règles, le seul à me faire danser à son rythme.


–– Moi j’appelle ça un signe, s’en mêle enfin la responsable de tout ce merdier.


De quoi ramener le calme et tous nos regards chargés d’interrogations et d’étonnement sur cette dernière. Adossée contre la rambarde métallique de la petite terrasse verte de ma chambre, elle roule des yeux sous les lumières rougeoyantes des guirlandes saturant l’espace aériens des lieux, hausse les épaules, puis change de position avant d’entamer son explication.


–– C’est le troisième mec maqué que tu te tapes en l’espace de trois mois à peine Dou, insiste cette dernière, l’air agacée de voir l’évidence là où je ne la trouve pas moi.


Affalée dans l’énorme fauteuil dont la forme rappelle sans détour aucun, un gant de baseball, elle croise pieds et mains. Ses yeux hors de leurs orbites font foi du choc éprouvé par cette dernière face nos trois incompréhensions réunies.


–– Ne me dites pas que vous ne trouvez rien d’étrange, vous aussi ? s’enquiert-elle, le regard oscillant entre Cameron étalé sur le transat bleu marine à côté d’elle, le coude plié sous sa tête, et Dona assise en bouddha à même le sol, face à Tchekhov et moi.


Clairement oui, eux non plus ne trouvent rien d’étrange au fait que je me tape un mec différent à chacune de mes sorties hebdomadaires. Je la vois déjà venir, elle me l’a souvent reprochée.


–– Si c’est pour sortir le vieux discours réchauffé n fois sur la chasteté, autant te dire tout de suite…


–– Eh bien, c’est exactement ça ma cocotte. Et tu sais pourquoi ?


Bien entendu, elle n’attend aucune réponse de ma part. Ni de personne d’ailleurs, sauf que Cameron comme toutes les âmes ici présentes ont déjà saisis la portée de son discours.


–– Parce qu’elle le fait pour les mauvaises raisons ?


Delilah acquiesce.


–– J’allais le dire, se plaint Dona.


Et moi je tombe à la renverse. Depuis quand ils me tiennent tous pour cobaye expérimental ?


–– Vous voyez quand vous voulez…


–– Je ne fais rien pour les mauvaises raisons. Je fais juste comme tous les jeunes adultes, je cherche ma voie. Et la mer est si vaste.


Mon inclinaison brouillonne, plus que le sous-entendu derrière ma dernière phrase, leur vole des rires laconiques. Je ne manque pas d’ailleurs de leur emboiter le pas, lorsque ma voisine fait voler jusqu’à moi un coussin en guise de représailles.


–– Tu n’es pas croyable.


Évidemment que je ne le suis pas. Et eux ils sont bien pires encore. Qu’est-ce que j’y peux moi si trouver le bon s’avère être aussi compliqué que me tailler l’ongle du gros orteil avec les dents ? Le seul ayant trouvé la route jusqu’à mon cœur est de l’autre côté de la rue, derrière cette fenêtre si parfaitement alignée avec celle de ma chambre, que je me suis souvent amusée à croire que nous étions des étoiles doubles liées par la gravitation et destinées à briller côte à côte.

On ne pouvait pas faire plus aveugle à Harlem, ça c’est sûr. Le beau Jason qui est soit dit en passant le frère aîné de ma voisine et ex-collègue, aussi spectaculaire qu’un dieu barbare avec ses boucles désordonnées et son regard d’acier est gay. Voilà pourquoi je suis réduite à baver devant sa splendide enveloppe de valeureux guerrier Zoulou, en chantant sans le talent de la diva Céline Dion, cet air mélancolique et très à l’image de ma vie amoureuse dernièrement : Ziggy.

Jason est mon Ziggy. Et non, ce n’est pas de ma faute si Jason ne m’aimera jamais, même si je suis folle de lui.

Pour autant, s’ils ont raison sur certains points, ils se trompent lourdement sur d’autres. Mes raisons sont peut-être mauvaises en effet, mais me soigner de cette blessure accidentelle n’est pas la principale, ni même la secondaire, derrière ma cavale amoureuse.

J’ai ma mémoire, mes hontes, toutes ces croyances à présent désuètes dans mon encéphale, un passé dont je me suis échappée par une nuit aussi noire que glacée, apeurée, mais aussi pleine d’espoirs et rassurée par la présence de mon inconditionnelle Dona à mes côtés.


–– C’est bien Duma ça, elle aime avoir raison, enchaîne d’ailleurs cette dernière, pour me tirer de la pente glissante de mes souvenirs. Perds pas ton temps à essayer de la raisonner. Elle aime expérimenter par elle-même.


Dona me connait mieux que les deux autres. Elle m’a surtout connu sous mes pires jours, et m’a acceptée quand-même. Moi en revanche, je suis l’une des seules au monde à avoir droit au meilleur d’elle. Pour la plupart, c’est une personne égoïste, matérialiste, médisante et superficielle. Lorsque nous nous sommes liées d’amitié à l’époque, les gens sur le campus ont souvent dits qu’elle ne restait avec moi que par intérêt. J’ai toujours eu la main large, et tout le monde le savait. Mais j’étais surtout timide, très renfermée et généralement prompt à rejeter tous ceux qui essayaient de trop s’approcher, sur le plan émotionnel, quitte à me montrer méchante parfois, voire cruelle. Je n’avais pour cela, pas d’amis, mais cette petite bouille brune au regard amende a su dépasser tout ça pour se faire une place constante à mes côtés. Chose que la plupart se sont empressés de voir comme une ruse, pour me faire multiplier mes gestes de générosité.

Que nenni ! Oui, parce que chaque fois que j’ai eu besoin d’aide, les plus improbables inclues, elle a toujours répondu présente. La preuve, je vis chez elle dans cette ville, en santé et en sécurité, encore plus fauchée qu’elle ne l’a jamais été durant nos premières années fac, et ce n’est que par entêtement, si je veille à payer un loyer symbolique à sœur tous les mois.

La vie m’en a donnée des leçons et celle-ci en fait tout aussi partie, l’expérience de la vie varie d’un individu à un autre. Et souvent il existe simplement des cœurs faits pour ne pas s’entendre, lorsque d’autres sont nés pour s’aimer. Chaque rencontre est unique, chaque relation aussi. Et des vérités, il y en a autant qu’il y a d’êtres humains, si ce n’est plus.


–– Ce sont des bêtises tout ça. Il y a plus important au feu pour moi en plus, soufflé-je aux étoiles étalée comme des miettes sur le ciel lugubre de cette nuit estivale, sans arrêter de cajoler mon chien que je soupçonne d’être sur le point de s’endormir d’ailleurs. J’ai besoin de trouver un boulot au plus vite. Tu peux donc dormir sur tes deux oreilles Del, je ne suis pas prête d’aller claquer le moindre dollar nulle part, dans les jours à venir. C’est fini pour moi les sorties. Pour le moment.


–– J’en suis certaine, s’empresse de me rassurer ma meilleure amie, tu trouveras vite quelque chose.


–– Je vais chercher de mon côté aussi, complète Delilah, toujours prête à venir à ma rescousse.


Pour ce qui est de Cameron, il ne faut jamais compter sur lui pour quoique ce soit, et surtout s’il n’y gagne rien. C’est la raison pour laquelle entre lui et Dona ça fonctionne aussi bien. Sans jamais d’embrouilles, ils se limitent à un échange de bons procédés équitables. Et Dieu sait que ceci vaut aussi pour tout. Pour tout ! 

J’ai donc le droit d’être choquée au moment où le battement de ses mains, remplace les bruits de fonds en provenance du voisinage. On va du chat errant accro aux poubelles de miss Darby, du hibou guetteur squattant l’arbre situé près de la fenêtre de Jason, à la famille Smith en train de célébrer en grande pompe, pour la nième fois, l’admission en NBA de leur fils aîné.


–– Pour moi c’est déjà tout trouvé. J’ai quelques relations si tu veux, je pourrais te dénicher une place de mannequin dans le magazine hip hop d’un pote.


–– Et c’est quoi la suite ? Je me retrouve à me trémousser pour les beaux yeux de Tiga un de ces matins ?


–– Pour un bon pactole aussi, relève-t-il mi- hilare.


–– Non merci. Très peu pour moi en fait. Je n’ai pas assez de courage. Pas que je sois complexée par mon corps non plus… bon, j’ai des préjugés ça c’est sûr, des appréhensions aussi, sans parler du qu’en dira-t-on… Non, je ne pourrais pas. Je n’ai pas encore l’esprit aussi libre. Merci, mais non.


Quoique ça pourrait-être une excellente occasion pour achever définitivement mes parents. Me voir apparaître à moitié nue, si ce n’est totalement sur un magazine, voire à la télévision, ça c’est sûr, les enverrait sans détour vers les portes de l’enfer, eux et leur foutue morale ––biaisée–– à la con. Comme j’aimerais tant pouvoir penser que ce ne serait pas plus mal et en être ravie ! Malheureusement, le cœur est ce qu’il est, et je n’y arrive pas.


–– C’est toi qui voit.


Il hausse les épaules, et offre ainsi la possibilité à la soirée de se poursuivre sur une note plus légère, lorsque Dona s’affole sur les premières notes de Black and Yellow de Wiz Khalifa, provenant de la fête d’à côté.










Il se faire tard je sais, mais voilà. J'avais besoin de prendre le temps de corrigé et en le faisant je me suis endormie 😂😥. Disons que la journée était des plus étranges aussi.

Sinon, voilà on avance petit à petit. Il y aura beaucoup de chapitre de ce genre. La vie entre amis. Pour celles qui me lisent depuis, c'est un aspect que j'aime beaucoup insérer dans mes histoires. Je crois que c'est au même titre que la romance un amour tout aussi important, qui connait aussi ses hauts, ses bas et ses imperfections.

Voilà j'espère que vous avez apprécié le chapitre. N'hésitez pas à me le faire savoir en commentaires. Ça fait toujours plaisir.

Allez, bonne nuit et à la semaine prochaine. Ciao.

Love guys 😜❤️
🖤🖤🖤
Alphy.

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