Chapitre 4 - Killian
L'après-midi passe. Mon équipe et moi-même on doit se rendre à l'évidence : l'orage ne va pas cesser de sitôt. Cependant, je suis déterminé à avoir un cliché « sacrifice virginal » dans mon calendrier, et je l'aurais. Tant pis si on ne peut pas partir le jour prévu. Le temps est à la pluie ? J'attendrais.
Il faut que je m'occupe de cette fille dont j'ignore le nom, mais qui est la remplaçante de Jade. Mon flair me dit que les clichés que j'ai pris dans l'après-midi sont à couper le souffle, mais je veux en faire d'autres, juste pour en avoir le cœur net.
Tandis que la pluie tombe à verse, je reviens sur le plateau. La nuit tombe et il n'y a personne dans le décor, mais je peux imaginer cette délicieuse femme sur la banquette, sa peau blanche et humide éclairée à la lueur des bougies. Rayonnante et un brin... nerveuse.
Ce qui m'a définitivement convaincu que cette fille n'est pas jade, c'est son regard quand je lui ai demandé d'ouvrir les bras et de jeter sa tête en arrière. J'avais déjà un doute, mais là, c'était une certitude.
Jade adore montrer son corps et l'aurait fait avec un abandon total. Cette fille, très clairement, n'est pas habituée à ce type de choses. Elle tremblait et tressaillait à un point que je me sentais presque coupable. Pourtant, elle est venue à Kauai de son propre chef. Elle savait ce qu'elle avait à faire. Quelqu'un la briefé. Pourquoi ? Comment ? Peu importe, tant que j'ai mes photos.
Mais pourquoi ne me dit-elle pas qui elle est ? Pense-t-elle pouvoir me duper ? Personne n'y est jamais parvenu. Ça m'obsède, alors que je ne dois pas. Je m'en fiche de qui elle est ou non, tant qu'elle fait sa part de boulot.
J'attrape mon téléphone et appelle Stone.
—L'orage est fini, terminons-en.
Lola
Malgré la pluie diluvienne, l'air est chaud et humide.
Stone m'appelle au moment où je finis de me sécher après avoir pris une longue douche pour détendre mes muscles. Ce qui n'a pas vraiment fonctionné. Il me demande de revenir sur le plateau, habillée pour la séance. Avant même d'avoir posé le combiné, mon cœur bat la chamade, mes mains tremblent légèrement.
Je dois y retourner.
Habillée pour la séance.
Seigneur...
Stone a même rajouté de ne pas me soucier de mes cheveux, Killian les veut détachés, mouillés et décoiffés. Ça m'arrange, car ma longue chevelure brune est trop indisciplinée pour que j'arrive à faire quoi que ce soit dedans aujourd'hui.
J'enlève ma robe, enfile le string et drape la bande de tissu autour de ma poitrine. Je ne peux m'empêcher de grimacer face à mon reflet dans le miroir. Je passe ensuite le peignoir de soie que m'a donné Jen.
Rien à faire. Je me sens toujours aussi nue.
Je quitte ma chambre, traverse le hall de l'hôtel. La nuit est presque tombée quand je parviens au plateau éclairé. Mes pieds sur la terre humide produisent un bruit mouillé que semble me suivre. Les cris inquiétants des oiseaux nocturnes, çà et là, et les gouttes qui tambourinent lourdement sur les feuilles des arbres me font frissonner.
J'arrive, complètement trempée. Protégées par la toile qui fait office de toit, une multitude de bougies, posées au sol et sur les banquettes, créent un halo de lumière chaude. Derrière son appareil, Killian attend.
La scène me couple le souffle. Tout comme Killian. Sa chemise sculpte son grand corps solide et son jean semble avoir été cousu sur lui.
Ses cheveux bruns, un peu ondulés, frôlent le col de sa chemise et, avant que je n'ai fait le moindre bruit, il lève la tête, repousse une mèche qui lui tombe sur le front, dévoilant son visage mouillé par la pluie.
Je trouve son expression indéchiffrable.
—Ah, tu es venue...
—Pourquoi, tu croyais que je ne viendrais pas ?
—Oui, cela m'a traversé l'esprit. J'imaginais même que tu comptais me faire poireauter et te supplier comme une Amazone.
J'ai vraiment du mal à me représenter ce grand type si fier en train de supplier qui que ce soit...
—En fait j'étais tellement sûr que tu allais prendre ton temps que j'ai dis à Stone et à Jen de ne pas se presser.
Une brume nocturne s'est installée autour de nous et j'ai l'impression qu'on est seule au monde. Le bruit de la pluie dans la forêt est la plus jolie des musiques.
D'un hochement de tête, Killian m'indique une large banquette recouvert de velours pourpre.
—Bon, maintenant que tu es là, finissons-en.
—Et l'éclairage ?
—Les bougies suffiront.
—C'est beau, ne pus-je m'empêcher de dire, admirative.
Je suis autant éblouie par la flamme des bougies que l'air absorbé de Killian.
Un frisson me parcours sans que je puisse définir si c'est la surprise, la peur, la nervosité, ou tout cela simultanément.
Killian me dévisage comme s'il pouvait lire en moi. Ça m'angoisse autant que ça me rend nerveuse.
Consciente de chacun de mes mouvements et de son regard posé sur moi, j'avance vers la banquette.
—Le peignoir..., dit-il en tendant sa main pour m'en débarrasser.
J'essaie de dénouer la ceinture de mes doigts tremblants, mais, entre la soie mouillée et la présence de Killian près de moi, j'en suis incapable.
Avec un grognement d'impatience, il écarte mes doigts et défait le nœud en un clin d'œil. Il ne s'arrête pas là et ouvre sans façon le peignoir, me le ôte et l'envoie valser sur une chaise pliante.
—Enlève aussi ça, dit-il en montrant le bandeau.
Je me retiens de protester, bien que j'en meure d'envie.
Impassible, Killian me détaille de la tête aux pieds, comme s'il évaluait chaque centimètre carré de mon corps, du bout de mes orteils jusqu'à la racine de mes cheveux. Pour me donner contenance, je me baisse pour enlever mes sandales. En relevant la tête, je croise le regard de Killian, et tressaille en y décelant une étincelle de désir. Je ne pense pas l'imaginer...
Je puise le courage nécessaire en moi pour me mettre face à l'objectif.
Il pointe la banquette du doigt, je m'y assois docilement.
—Allonge-toi.
Son ton sans appel a un côté irrésistible au lieu qu'il m'exaspère. Je m'allonge sur le dos et fixe la toile de couleur blanc cassé.
—Lève les bras.
Je suis ses instructions à la lettre, mais cela ne paraît pas suffisant à Killian qui écarte l'œil du viseur pour me regarder directement.
—Qu'y a-t-il ? demandé-je, tremblante. Ce n'est pas bien ?
Je suis allongée, offerte en sacrifice, pourtant.
—Si, si, me rassure-t-il.
Il me dévisage comme s'il n'en croyait pas ses yeux. Je ne sais quoi en penser.
—En fait, c'est magnifique.
Il retire l'appareil du trépied et me regarde à nouveau à travers l'objectif.
—Cambre toi. A peine.
J'obéis et faillit sursauter quand Killian, que je n'ai pas vu approcher, appuie son genou sur la banquette sans cesser de braquer l'appareil sur moi.
—C'est exactement l'angle qu'il me faut.
Je ne m'étais pas attendue à ce qu'il pense à voix haute.
—Tu te souviens de la séance à Fidji, Jade ?
Sa voix, si proche, me met en état d'alerte, tout comme sa question.
—Mmm...
—Ce jour-là, tu as failli me rendre dingue. Tu es vraiment une sale gosse. Tu as passé ton temps à cacher mes films, à débrancher les spots et à nous donner des frayeurs avec tes maladies imaginaires...
Je ne savais pas que Jade se comportait de la sorte...
—Tu te souviens ? Tu m'as tendu le peignoir et en dessous, tu...
Il rit, mais ça n'atteint pas ses yeux et me regarde droit dans les miens.
—Bon, je te passe les détails, car tu connais la suite aussi bien que moi.
J'aurais donné n'importe quoi pour connaître cette fameuse suite, ou pas. Mais il est hors de question que je le lui demande. Je me ferais griller à coup sûr.
—Toujours prête à me rendre fou alors que tu sais parfaitement qu'au travail j'ai besoin de concentration et je déteste les embrouilles.
Je ressens le besoin absurde de m'excuser alors que ce n'est pas moi la fautive. Mais à ses yeux, si. C'est de Jade qu'il s'agit et non de moi. Mais j'aurais voulu trouver les mots pour qu'il lui pardonne.
Killian approche une bougie près de ma hanche et l'allume avec un regard concentré. Il me prend ensuite les bras et les place de sorte qu'ils forment un arc parfait au-dessus de ma tête. Puis, il glisse une main sous mes genoux pour les soulever très légèrement.
Chaque nerf de mon corps vibre quand il me touche. Je m'efforce de penser que Killian est juste un photographe en plein travail.
Un homme qui ne voit même pas que je suis nue...
Lentement, il remet le bandeau, le drape sur ma poitrine, mon ventre, puis il en dépose l'extrémité entre mes jambes. Quand sa main frôle l'intérieur de ma cuisse, un petit gémissement m'échappe. Un son intime qui sonne comme une prière.
Mon Dieu, que je suis mauvaise comédienne ! Je suis censée jouer la calme et sophistiquée Jade ainsi que feindre une complète indifférence à propos de ce que je montre. Mais mon corps tremble de nouveau à m'en faire mal.
Je ferme les yeux pour tenter d'endiguer tout ce qui me traverse et ce que Killian fait naître en moi.
—Il faut que tu ouvres les yeux pour la photo.
Au moment où je soulève mes paupières, le bruit caractéristique du diaporama résonne dans ma tête.
Les gens vont me voir comme ça, étirée, offerte... nue.
—Tu te rappelles le Nouveau-Mexique ?
Killian est occupé avec son appareil et me parle sans me regarder. Comment fait-il pour rester si stoïque ?
—Eh bien...
—C'était notre première séance ensemble. Tu es arrivée avec une heure de retard et tu as hurlé que tu détestais les vêtements que tu devais porter. Tu as fait un caprice et je me suis fait engueuler par le directeur artistique. Tu te sentais si coupable après, que tu as tenu à m'embrasser quand on a eu fini.
Il dévie l'attention de son appareil et me regarde de si près, que je constate que ses pupilles sont parsemés de petites pépites dorées qui brillent avec la lumière vacillante des bougies.
Et ces yeux attendent quelque chose de moi. Du moins, c'est l'impression que j'ai.
—Tu m'avais dit que ce serait notre rituel. Qu'on s'embrasserait après chaque séance.
Oh non...
—Et tu as toujours tenu ta promesse, même quand je ne voulais pas. Donc aujourd'hui je me demande ce que tu attends pour m'embrasser...
Il me pose cette question sur un ton bas et envoûtant qui ne fait que renforcer l'attraction que je ressens.
Je ferme les yeux et attend durant quelques secondes interminables. Constatant que rien n'arrive, je soulève mes paupières et fait face à Killian qui m'observe, amusé.
—C'est toi qui est censé m'embrasser. Tu te souviens ?
Mon Dieu... Je ne suis pas du style à faire le premier pas.
Il hausse un sourcil.
—Il y a un problème ?
—Non, aucun.
Je m'éclaircis la voix et passe ma langue sur mes lèvres.
—Aucun problème.
Mon pouls bas fort tandis que Killian ne quitte pas ma bouche du regard.
—C'est vrai que tu as toujours été une allumeuse...
Non, je ne le suis pas, mais Jade sûrement. Je me rends compte que je ne la connais pas si bien que ça, mais d'un autre côté, c'est normal, on passe peu de temps ensemble. Des moments que je vénère.
Cependant, il vient de m'irriter. On va voir s'il est inflammable !
Je relève la tête et pose mes lèvres sur les siennes.
***************
Coucou mes chatons ♥
Une suite ici, j'espère que cela vous a plu ♥
Des bisous ♥
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