𝙲𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 ₂₄

➠ ❛Quelle est la limite entre le ciel est la terre ?

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Yamada était vraiment ravi d'aider son nouvel ami avec les rattrapages. Même si ce n'était que pour les entraînements il y prenait du plaisir, surtout qu'il avait un bel alter, et très intéressant à travailler ! 'Nuage' était la marque de fabrique d'Oboro Shirakumo, et lorsqu'il montrait ce dont il était capable, ce n'était rien comparé à ce qu'il découvrait sur lui-même depuis qu'il a été transféré en filière super-héroïque. Bien sûr, il avait été mis au courant du départ d'une certaine élève qui lui avait permis d'intégrer la classe, mais il n'en connaissait aucun détail. Il a simplement su qu'elle était proche d'Hizashi et Shōta. Enfin, surtout du premier.

Parlant d'eux, le premier était en baskets dans le sable avec son sweat trop grand, et attendait la prochaine attaque d'Oboro. Le second, bien présent mais seulement physiquement, traînait sur son téléphone portable, recroquevillé sur un rocher aux côtés de leurs sacs de sortie avec bouteilles d'eau et casse-croûte.

L'aîné des garçons était debout sur un nuage, et en deux temps trois mouvements, passa au-dessus du bilingue et, aidé de la force centrifuge pour rester assis la tête en bas, profita de son passage pour tendre son bras vers le sol et claquer le visage du blond qui ne l'avait pas vu venir, quand bien même l'attaque sournoise était des plus évidente venant du plus grand. Revenant à sa position initial, riant ouvertement les bras croisés, Oboro défia Hizashi d'un regard malicieux teinté de bleu et d'étoiles pétillantes. Le blond sourit à son tour et activa son alter dans toutes les directions où son ami s'échappait en espérant faire disparaître son assise, pensant en disperser les molécules rien qu'avec les vibrations de l'air qu'engendrait sa voix puissante. Aizawa fronça des sourcils, gêné par tout ce raffut, mais décida de ne pas intervenir quand bien même le bruit l'empêchait de se concentrer sur sa lecture. Toutefois, il trouvait ridicule que Yuei ne prévoie aucun cours particulier pour les nouveaux élèves d'une autre filière pour rattraper leur retard. Qu'ils se débrouillent pour arriver aux niveaux des anciens ? Ils étaient bien gonflés, ces professeurs grassement payés. Se reposer sur ses camarades risquaient de ne pas suffire, étant eux-mêmes des apprentis et à la traîne pour la plupart. Oboro avait de la chance de côtoyer deux bons élèves, vraiment beaucoup de chance. Shōta trouvait cela révoltant. Et lorsqu'il releva enfin ses yeux de son cellulaire, il ne vit que deux idiots en train de rire et envoyer des attaques tour à tour, comme un vulgaire jeu de rôle sans aucune productivité. Il soupira et se leva, les interrompant.

« Hizashi, je prends le relais.

- What, seriously ?

- Hm hm. »

L'énergique et l'enthousiaste s'échangèrent un regard entendu, et le premier se laissa tomber non loin d'eux, trépignant d'ores-et-déjà d'impatience. Le noiraud referma sa veste pour plus d'aise et vint se planter face au nuage toujours actif d'Oboro, dont l'amusement ne lui disait rien qui vaille, au plus jeune.

« Attaque-moi.

- Je me demandais quand j'aurais l'occasion de me mesurer à toi ! »

Et là, sans attendre, son assise de coton s'éleva de quelques mètres avant de l'envoyer sur Aizawa, le poussant par les épaules avec les deux mains, avant de faire une roulade avant dans l'air et atterrir sur les deux pieds. Shōta, qui était tombé sur le derrière, se releva en vitesse et réfléchit à une tactique. Il voulut alors attraper son ruban mais par malheur, à défaut de l'avoir laissé dans sa mallette au lycée, ne posa sa main que sur le col de sa veste tout bonnement utile à l'empêcher d'avoir froid en cette journée de février. Il grimaça de mécontentement, esquiva une nouvelle attaque et en profita pour envoyer un coup de pied retourné dans le bas du dos de son camarade. Son adversaire fit la roue pour se rattraper et s'arrêta accroupis, tournant très légèrement la tête derrière lui pour croiser le regard examinateur du plus petit. Oboro y perçut beaucoup de choses dans ce regard onyx. On disait que les yeux étaient les miroirs de l'âme, et ce que le nouvel élève saisissait, était que Shōta ne prenait pas ce combat à la légère. Car bien que profondément sombres, cette noirceur en disait plus que n'importe quelle autre couleur.

Soudainement, après un certain temps de cogitation, le plus jeune n'eut pas le temps de réagir car Oboro courut dans sa direction. Il enchaîna un coup que le noiraud esquiva difficilement, il songea à une riposte mais il sentit son corps rencontrer brusquement le sable, et aussi vif que son énergie remarquable lui permettait, le nuageux l'attrapa par le bras pour le relever d'un coup sec, et le fit tournoyer, un tour, deux, trois, quatre, avant de le lâcher avec brutalité. Si Aizawa était tout déboussolé par ces attaques dénuées de sens et de tactiques, comme si sa façon de combattre se résumait à surprendre son adversaire par des prises de décisions rapides et le plus efficacement possible, le noiraud comprit bien vite que son corps venait d'heurter un corps moelleux, semblable à un nuage, qui avait ralenti sa chute horizontale. Il se redressa, le regard sombre, cligna plusieurs fois des yeux et se tourna vers Shirakumo qui le fixait, les bras croisés, fier de pouvoir montrer ce dont il était capable. Pas étonnant que Yuei lui ait donné une chance d'intégrer la filière super-héroïque. Shōta l'avait sous-estimé, ne restait plus qu'à monter la difficulté de quelques crans en cessant de retenir ses coups, par peur de blesser un novice qui ne semblait pas l'être. Il devait réfléchir à comment le battre.

Il se leva du nuage qui l'avait rattrapé et activa son alter sur celui aux cheveux ondulés, dont les invocations disparurent d'un claquement de doigts. Une fois sur ses deux pieds dans le sable, le noiraud s'élança en avant, profitant du trouble soudain chez son adversaire qui avait pris du temps à se rappeler de l'alter effaceur qu'il ne voyait que si peu souvent. Les signes ne trompaient pas, ses yeux rubis et ses cheveux flottants accompagnèrent les quelques coups qu'envoya Shōta à Oboro, sous le regard attentif d'Hizashi qui prenait un plaisir fou à commenter le combat, avec son énergie si propre à lui-même.

« C'est incroyable ce que nous voyons là, c'est peut-être le combat du SIÈCLE ! L'inarrêtable Oboro Shirakumo fera-t-il le poids face à l'ingéniosité d'Eraser Head ? Seul cet affrontement nous le dira ! OH MY- Shirakumo vient d'employer la technique d'enchaînement d'esquives ! Eraser Head a la rage en lui, combien de temps va-t-il tenir ?? WAH ce coup de pied était si agile que j'en ai eu des frissons ! It's unbelievable ! »

Un nuage de poussière et de sable se dispersa dans les airs, éblouissant Shōta qui se retrouva alors handicapé, l'obligeant à faire une pause dans ses attaques pour laisser le paysage se modeler et ainsi cesser de lui brûler les yeux déjà irrités par la sécheresse causée par son alter. Sans spécialement se douter de ce problème oculaire, Oboro saisit sa chance pour fendre l'amas moléculaire avec son pied et ainsi envoyer Shōta au tapis. Assommé, le souffle coupé, le noiraud s'immobilisa sur le sol, et lorsque le nuage se dissipa, Hizashi put constater les dégâts.

« ET C'EST UNE VICTOIRE POUR OBORO !! »

Souriant à l'exclamation de son camarade aux yeux trop verts, il finit par refaire face au meilleur ami de ce dernier et s'accroupi près de lui.

« C'était un très bon combat, pour quelqu'un qui fait bien vingt centimètres de moins que moi.

- J-je n'avais aucune chance, haleta Aizawa en acceptant la main tendue du nuageux qui l'aida à se mettre assis.

- Mais même ! C'était super ! Je suis vraiment content d'avoir pu m'entraîner avec vous deux, vous êtes trop classes ! complimenta-t-il conplétement fanatique. »

Aizawa, totalement incertain, se contenta de détourner le regard en fronçant des sourcils. Il n'y avait rien de spécialement "classe". Et puis, il a fait l'erreur d'effacer l'alter d'Oboro, lequel devait justement montrer ce dont il était capable. Quel boulet il a été pour le nouvel élève de la filière héroïque.

Le blond, qui n'avait pas raté une miette de la scène, courut jusqu'à eux et checka le plus grand avant d'avoir un mouvement vers l'autre pour passer son bras par-dessus les épaules du plus jeune, mais se ravisa au dernier moment, se souvenant qu'il ne voulait plus subir les proximités tactiles de l'énergique. Un peu comme si malgré tous les efforts, il n'arrivait pas à apprécier les marques d'affection peut-être un peu trop personnelles du blond. Il n'a jamais été émotionnellement démonstratif, mais son petit doigt disait à Yamada que quelque chose s'était passé pour une demande aussi soudaine.

« Hizashi, mes gouttes... »

Si Oboro pencha la tête avec interrogation, celui à l'alter vocal, lui, comprit la demande et fouilla dans le sac de son meilleur ami pour en sortir la fiole contre la sécheresse oculaire. Il ne les mettait qu'après avoir utilisé son alter, mais il craignait devoir en prendre plus à l'avenir. Il devrait diminuer l'utilisation de son alter.

Comme ils avaient tous les mains pleines de poussière, Shōta dut prendre sur lui et attendre que Yamada se lave les siennes avec une bouteille d'eau afin de lui administrer proprement les gouttes. Il devrait apprendre à le faire lui-même, mais il n'avait pas confiance en lui, préférant laisser cette responsabilité à son meilleur ami, n'utilisant jamais son alter en dehors de leur fréquentation. Après avoir papillonné des yeux et rebaissé la tête, le plus jeune des trois remarqua que Shirakumo observait les manipulations avec attention.

« Ton alter te fait toujours ça ?

- L'utilisation excessive de mon effacement n'est pas sans conséquence, oui.

- Et toi, Hizashi-kun, il se passe quoi si tu utilises trop ton alter ?

- Pas grand-chose sur le court therme, mais si reaaaaallyyyyy I overuse my quirk pendant genre quelques heures non-stop, je peux perdre la voix et avoir les oreilles qui sifflent ! C'EST PAS DINGUE SI TU VOIS CE QUE JE VEUX DIRE !!

- Ouais, je vois tout à fait, rigola le nuageux en se bouchant les oreilles quelques secondes. Personnellement, je n'ai pas encore connu de mauvaises conséquences d'emploi de mon alter, à croire que je suis trop génial pour qu'il m'arrive quelque chose de mauvais !

- La chance !! »

Shōta, qui jusque là demeurait silencieux, passa sa main dans ses cheveux pour les redresser légèrement. Dans le mouvement, Hizashi avait remarqué qu'il avait le visage tourné vers le sol, les lèvres pincées. Il décida de prendre les commandes de la situation.

« Oi les guys, ça vous dirait de venir chez moi une fois après les exam' pour fêter le début des vacances ?

- Ouais, grave ! Ça me rappelle que je dois potentiellement rentrer pour réviser.

- Parfait ! Shōta, t'es chaud ?

- ... Je n'ai pas le choix.

- Ça veut dire qu'il est partant !! »

[...]

Après le départ d'Oboro, les deux meilleurs amis partagèrent un bout du trajet. Le soleil déclinait fortement, et un léger courant d'air froid se faisait ressentir. Shōta avait réenfilé son écharpe mais l'avait très légèrement desserrée pour ne pas s'y noyer. Il marchait la tête basse, les mains tenant mollement les lanières de son sac à dos. Hizashi, lui, regardait droit devant lui avec un sourire bête, comme bien trop souvent depuis quelque temps. Il jeta un regard en coin à Aizawa, et le détourna aussitôt, se mordant les joues, ce qui lui donnait un air plus ridicule qu'à l'accoutumé. Il triturait nerveusement ses écouteurs au fond de la poche de sa doudoune, les emmêlant très certainement du bout de ses gants, tandis que son cœur cognait à vive allure contre sa cage thoracique. Il était vraiment content que Shōta ne fuit pas Oboro, il avait besoin d'autres amis que lui. Mais il était encore plus heureux de se retrouver seul avec lui. Bien que déçu de ne plus pouvoir lui montrer son affection amicale en public, il ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter.

« Au fait, Shōta, pourquoi tu ne veux plus que je t'appelle Shō-chan ? Je pensais que tu aimais ce surnom.

- ...

- Je saiiiis les gens sont trop à juger juste parce que nous, eh bien, on a une amitié vraiment cool et eux sont peut-être jaloux. Mais je peux comprendre parfaitement que tu ne veuilles plus que je t'embrasse sur le front ou qu'on se tienne la main, ça peut faire trop couple ! Mais le surnom, quand même ! C'est pas grand-chose !

- Je ne veux pas qu'on nous pense en couple. »

Le murmure de Shōta avait mis une pause dans sa tirade. Mais comme plus rien n'en suivit, celui aux lunettes triangulaires poursuivit.

« Mais on n'en est pas un !

- Même si entre nous c'est clair et net, beaucoup le croit. Imagine si une personne se retrouve attirée par toi et apprécie l'idiot bruyant que tu es, mais qu'elle se rend compte que tu es potentiellement en couple avec moi. Elle ne tentera jamais sa chance et toi, tu attendras stupidement que quelqu'un s'intéresse à toi, ou alors tu te demanderas pourquoi la personne que t'aimes ne remarque pas tes avances ou les ignore tout simplement.

- Tu n'es pas du genre à réfléchir à ce genre de chose, Shō-chan, trancha Hizashi avec un sérieux troublant mais pas moins provocateur.

- Hizashi tu-...

- Tu t'en fiches pas mal de la romance, je te pensais même aromantique voire asexuel quand on s'est rencontré. Donc n'essaye pas de me faire croire quoi que ce soit par rapport à moi et mes envies de me trouver quelqu'un. Je sais comment tu fonctionnes, Shō-chan. »

Le jeune bilingue s'était arrêté, entraînant la halte d'Aizawa. Ils étaient tous deux face-à-face, aussi froids qu'interrogateurs. Et si le noiraud avait toujours trouvé son meilleur ami pas assez réfléchi, il devait bien admettre que les remarques et arguments de ce dernier mettaient en doute tout ce qu'il pensait avoir compris sur Hizashi. De nature naïf et optimiste, finalement, Yamada avait lui aussi ses côtés insoupçonnés. Il était un être humain lui aussi, après tout.

« Je t'ai dit la vérité, à toi de me la dire. Pourquoi est-ce que tu veux que je change mon comportement par rapport à toi ?

- Parce qu'il faut qu'on apprenne à s'instaurer des limites.

- Mais quelles limites ?! J'ai tout de même le droit de te montrer que je tiens à mon meilleur ami, quand même ! s'emporta le blond en remuant les bras dans tous les sens, en bon hyperactif qu'il semblait être. Les amis se saluent dans la rue, les couples s'enlacent et s'embrassent, les parents décoiffent leurs enfants et moi, tout ce que je fais, c'est te tenir la main et te donner un surnom affectif ! Je ne faisais de mal à personne !! Et OSE seulement me dire que tu n'aimais pas ça !

- Ne crie pas si fort, les gens n'ont pas spécialement besoin de te l'entendre le beugler dans la rue ! cria Shōta en simple contrepartie, vexé.

- Je veux une seule raison valable qui m'interdise de me comporter comme je l'ai toujours fait !

- Tu n'as pas envie de la savoir, tu pourrais quand même avoir la politesse de respecter ce que je te demande ! Sale... sale gros nul !

- MOI ? NUL ?! Je suis bien content de ne pas être en couple avec toi, ma vie ne serait qu'un vide sans couleur, idiot !

- Espèce de gamin tu es si bruyant et narcissique, j'aurais dû comprendre dès que j'ai vu ta face avec tes lunettes stupides qu'on était intellectuellement incompatibles !!

- Tu es cynique et un gros naze ! Si c'est comme ça, on n'est plus meilleurs amis ! Non tu sais quoi ? On n'est plus amis du tout, comme ça aucun problème !

- Parfait !

- PARFAIT ! »

Yamada partit en courant en direction du métro, les poings aussi serrés que les dents, laissant en plan total un Aizawa tout en colère mais pas moins déboussolé par la dispute. Les quelques personnes qui avaient jeté un vague coup d'œil aux fenêtres, qui s'étaient demandées alors pourquoi deux gamins criaient en pleine rue, ne s'en inquiétaient pas. Même les meilleurs amis se prenaient la tête de temps en temps, il n'y avait pas de quoi s'alarmer... N'est-ce pas ?

[...]

Il voulait s'enterrer six pieds sous terre. Il voulait faire cesser ses pleurs et ses hoquets. Il voulait que son lit l'avale tout cru. Combien de larmes encore fallait-il compter avant d'arrêter d'être triste ? Comment calculait-on la déprime ? En litre ? Hizashi n'arrivait plus à se calmer, ni même intéragir avec ses pensées, il était même persuadé avoir déversé trente pourcents de son eau corporelle contre son pauvre oreiller, humide et maltraité. Il se sentait anéanti, anéanti par ce qu'il avait dit mais surtout, ce qu'il avait entendu.

Mais tout de même, ce qu'il avait dit... Bordel, pourquoi est-ce que la colère tenait des propos aussi fausses que blessantes ? C'était dur. Extrêmement dur de digérer ces mots dépourvus d'amour. Extrêmement dur de ne pas recevoir de notification sur son téléphone, eux qui d'habitude discutaient les soirs jusqu'à pas d'heure que ce soit pour parler de tout et n'importe quoi le weekend, ou à propos des devoirs à faire la semaine.

Parlant de ça, Yamada n'était même pas capable de se lever pour terminer sa fiche de japonais à peine entamée à rendre pour le lendemain. Il n'était bon qu'à s'enfoncer le visage dans le matelas pour étouffer sa frustration, seul dans le noir, dans cette chambre qui ne le réconfortait pas. Il n'était bon qu'à se trouver pitoyable d'avoir surréagi, d'avoir ainsi mal pris la demande de Shōta. Il se disait que bien sûr, Aizawa avait honte d'être son meilleur ami, Hizashi n'était pas la meilleure des compagnies après tout... C'était pour ça qu'autant d'enfants s'amusaient à l'embêter en primaire. C'était pour ça que Sutikkunori le détestait autant. C'était pour ça que le noiraud et lui se disputaient. Parce qu'ils étaient incompatibles.

Tout simplement.

Un peu plus loin, la porte de sa chambre s'entrebâilla lentement, laissant percevoir le visage d'un homme aux petites lunettes rondes. Voyant son fils aussi dépité, Tōya referma la porte derrière lui et courba le lit sous son poids. Il n'avait pris aucune peine à allumer la lumière, peu ravi à l'idée de devoir se confronter à un Hizashi en larmes. Il y a bien des années maintenant qu'il ne l'avait pas vu ainsi. Le voir dans cet état lamentable risquerait de déchirer son cœur.

« Hé, Hiza, mon garçon... Tu veux bien raconter à ton vieux père ce qui ne va pas ? Tu n'es même pas descendu dîner. »

L'adolescent roula la tête sur le côté pour croiser le regard de son parent, en vain, faute du manque de luminosité. Il toussota entre deux hoquets.

« Shōta is a dumbass.

- Ah, donc vous vous êtes disputés, conclut-il, déjà fier d'avoir trouvé la base du problème. Je peux savoir pourquoi ? Je pourrais essayer de vous aider.

- Il a honte d'être mon meilleur ami parce que je suis tactile !

- C'est dans ta façon de fonctionner et il l'avait accepté, quel est le problème maintenant ? Que s'est-il passé exactement ?

- Je ne sais pas, on parlait et on a commencé à crier, je voulais juste qu'il comprenne que ça me gonfle de devoir changer juste parce qu'il fait son petit capricieux !

- ... Oh... Je vois... »

Les deux Yamada demeurèrent silencieux un instant encore. Toujours peiné, le plus jeune se décala légèrement et posa sa tête sur les cuisses de son père, s'essuyant médiocrement le visage avec ses mains tout en reniflant.

« Papa, dis, est-ce que tu me trouves nul de pleurer comme un gamin pour un gars qui s'en fiche de moi... ?

- Jamais tu ne seras nul, Hizashi. Que tu aies quatre, huit, seize ou quarante ans, tu as le droit d'avoir envie de pleurer. C'est ce qui nous rend humain.

- M-mais ce n'est pas digne d'un futur super-héros !

- Je ne connais pas personnellement de super-héros, mais je suis persuadé que même eux ont leurs instants de chagrin. »

Tōya posa sa main dans le dos de son fils pour tenter de le réconforter, n'étant pas très à l'aise, ni même habitué à devoir gérer les crises d'adolescents en pleine puberté. Lui aussi avait été jeune, et Dieu seul savait à quel point il était compliqué, surtout à cette période de la vie, de se contrôler émotionnellement. Et à son plus grand soulagement, il venait tout juste de constater que sa progéniture ne pleurait plus.

« Trouvez du temps pour en discuter lorsque tout sera calmé entre vous, lui conseilla le père en souriant avec bienveillance, faisant tirer sa petite moustache blonde vers le haut. »

Hizashi attendit quelques secondes avant de se redresser en position assise, se frottant continuellement les paupières pour espérer un temps soit peu les faire dégonfler, quand bien même cela ne fonctionna pas. Il reposa son regard trop vert sur son paternel, s'étant habitué à l'obscurité et pouvant dès à présent percevoir une partie de ses traits dans la nuit de sa chambre.

« Thanks, dad. »

Il hésita un instant.

« Je t'aime.

- Je t'aime aussi, Hiza. »

Les deux garçons restèrent ainsi un instant encore, avant que le plus jeune ne se jette dans les bras de son père. D'abord surpris par l'approche, l'adulte accepta néanmoins l'étreinte de son fils. L'échange fut certes bref, mais suffisant. Lorsqu'ils s'éloignèrent l'un de l'autre, quelques secondes s'écoulèrent encore avant que le père ne se lève en soufflant du nez, sans que le jeune garçon ne détache les yeux de lui.

« Ta mère t'a laissé du poulet. Tu veux quand même manger un peu avant d'aller te coucher ?

- ... Non merci, je n'ai pas faim.

- Je te ferai un petit-déjeuner copieux demain alors. Bonne nuit fiston.

- 'nuit papa. Merci. »

Après un petit sourire de Tōya, l'adolescent se retrouva seul dans sa chambre, encore une fois. Mais cette fois, il ne s'écroula pas en sanglot, non, à la place il s'empara de son téléphone et envoya un énième message à Nao, qui bien sûr ne répondait plus aux SMS depuis des mois, avant de se tourner vers Oboro, souhaitant se changer un tout petit peu les idées.

💬🎧

【Yo, tu dors ?】

🗨 ☁️

【Nah, je regarde ma fiche de devoir avec désespoir ;) Et toi ?】

💬🎧

【Duh】

🗨 ☁️

【XD】

🗨 ☁️

【Je rigole je rigole ! Tout roule ?】

💬🎧

【Yes, ouais carrément, tout baigne】

🗨 ☁️

【Tu voulais quelque chose alors ?】

💬🎧

【Te demander si demain ça te dirait qu'on vienne plus tôt au lycée pour trouver quelqu'un qui aurait fait le devoir et recopier sur lui】

🗨 ☁️

【Ton génie me plait, Yamada-sama UwU】

Hizashi eut un petit rire. Oboro était marrant, et quand bien même il n'était pas aussi énergique que lui, il ne pouvait s'empêcher de noter qu'ils se ressemblaient beaucoup. Optimistes. Drôles (sur certains aspects). Amicals. Sociables. Extravertis. Talentueux. Sauf que lui, contrairement à ses deux cadets, semblait plus vif, plus affirmé. Il était une personne idéale. Un modèle à suivre.

Puis lentement, son sourire fana et son doigt glissa de lui-même jusqu'à sa galerie, et il sélectionna la photo de lui et l'introverti lors de leurs vacances dans la préfecture de Chiba. Son cœur accéléra sa cadence et son pouce se mit à trembler. Pourquoi se mettait-il dans un état pareil ? Il devait vraiment apprendre à gérer ses crises d'adolescences. Mais surtout comprendre pourquoi il était aussi frustré de ne plus pouvoir serrer son meilleur ami dans ses bras.

Il voulait vraiment que Shōta devienne ami avec Oboro, mais à quoi cela servirait si leur propre amitié courrait à sa propre perte ?

Hizashi devait s'excuser. Il ne supporterait pas de perdre aussi bêtement son meilleur ami.

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