𝙲𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 ₄₈
➠ ❛Protéger une étoile de sa propre lumière en pleine nuit❜
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« A-allô ?...
- Salut Shōta, c'est Nemuri ! Désolée, je te réveille ?
- C'n'est pas comme s'i'était deux heures du ma'in... Tu 'eux quoi ?...
- Tu te souviens que j'fais une fête ?
- Ouais ?... Et... ?
- À laquelle tu ne voulais pas venir ?
- Accouche. Qu'est-ce que tu m'veux ?
- Je crois qu'on a rendu Hizashi complétement bourré.
- ... Vous avez fait quoi ?
- Je ne peux pas joindre ses parents par téléphone et je ne peux pas m'en occuper plus longtemps, j'ai des invités qui veulent que j'anime la soirée ! Je suis vraiment désolée de te déranger avec ça mais est-ce que tu pourrais venir s'il te plait ? C'est urgent !
- ... Pourquoi moi ?
- Shōta, s'il te plait. C'est ton ami.
- ... Qu'il se débrouille.
- Non non non non ne raccroche pas ! Pitié j'ai vraiiiment besoin de toi !
- Et j'y gagne quoi ?
- Tu veux y gagner quelque chose ? Tu viens juste aider un ami !
- Il est assez grand pour se gérer tout seul.
- Je pensais ça aussi, mais je me suis trompé ! S'il te plait, je ne sais pas quoi faire.
- ...
- Allez, je ne te demanderais rien si je pouvais gérer moi-même, tu le sais très bien.
- ... Bien. »
Aizawa raccrocha et se mit assis dans son lit, se frotta les yeux en grognant, avant de se lever et tituber jusqu'à ses vêtements. Il se changea du mieux qu'il put et passa à pas feutrés devant la chambre de sa mère, contrôla qu'elle dormait bel et bien, et quitta la maison avec cette même discrétion, non sans oublier de laisser un mot sur le frigo. Il allait se faire gronder par Makura, il le savait bien, mais quelles autres alternatives avait-il ? Son meilleur ami avait besoin de lui.
Quel idiot.
« Tch, je savais que cette fête était une mauvaise idée... »
Il attrapa un car nocturne et ressortit l'invitation de la poche de sa veste pour trouver l'adresse de Nemuri.
Mais vraiment, quel idiot... Et s'il lui arrivait quelque chose, à lui aussi ? Le noiraud s'en sentirait tenu pour responsable, qu'importe ce que dira le peuple. Finalement, ça le rassurait de se déplacer jusqu'à là-bas, d'une certaine manière...
.
.
.
Il reconnut le vélo orange fluo d'Hizashi posé contrôle la clôture du jardin et sut directement qu'il était à la bonne adresse. Toujours exténué par ce début de nuit trop court pour son organisme, Shōta se dirigea jusqu'à l'entrée où un garçon attendait, adossé contre le mur. Il baissa la tête sur le noiraud sans même chercher à savoir ce qu'il faisait là.
« Entre sans toquer, personne ne t'entendra sinon. »
Alors, suivant son conseil sans un mot, il ouvrit la porte et pénétra dans la grotte maudite des fêtards nocturnes. Immédiatement un haut le cœur l'agrippa à l'estomac tant l'odeur d'alcool et de tabac étaient ignobles, ses sens ne s'y étaient pas préparés. Quatre personnes utilisaient le salon comme dancefloor tandis que les autres invités chillaient sur le canapé et les fauteuils en attendant qu'un peu d'action ne leur soient offerte. Timidement, l'aspirant héros de même pas dix-sept ans s'approcha d'un groupe de gens bourrés qui parlaient de choses que diraient les gens bourrés.
« Hum, excusez-moi, je cherche Nemuri Kayama...
- Hein ? Ah, wé, 'doit être en haut j'crois. »
Il tourna la tête vers la direction désignée par l'index du jeune inconnu aux esprits peu clairs et hésita s'il devait le croire ou non. Finalement, il décida de contrôler l'étage qui lui semblait bien probable d'abriter l'hôtesse de cette maison. Alors il escalada les escaliers comme un mont infranchissable, et une fois en haut, il aperçut la première porte ouverte. Il y risqua un coup d'œil et comprit qu'il s'agissait de la pièce où les invités avaient jetés leurs affaires. Il reconnut sans peine le sac et la veste verte et blanche de son meilleur ami. Mais le principal concerné n'était pas dans cette chambre. Alors il continua son aventure jusqu'au fond du couloir et toqua à la chambre suivante. Personne ne lui répondit. Il répéta l'action les trois portes suivantes jusqu'à ce que, au bout de la cinquième tentative, une voix l'invita à entrer, ce à quoi Shōta ne se gêna pas pour s'exécuter.
Dans cette pièce, la lumière n'y avait pas été allumée mais le jeune garçon reconnut facilement la silhouette généreuse de Nemuri, assise sur le matelas au centre de la pièce, faiblement éclairée par la Lune. Elle se leva et s'approcha d'Aizawa.
« Merci d'être venu, je ne sais plus quoi faire de lui. »
À la fin de sa phrase, un bruit de chasse d'eau se fit entendre derrière la porte de ce qui semblait être une petite salle-de bain.
« Ses passages aux toilettes m'épuisent, je te jure. J'aurais voulu l'endormir avec mon alter mais j'ai peur que son état le plonge dans un coma éthylique, on doit le maintenir éveillé jusqu'à ce qu'il aille mieux. Un Hizashi bourré c'est marrant deux minutes, mais pas plus !
- Son dernier verre remonte à quand ?
- Cinq minutes, je l'ai tiré ici de force en attendant que tu arrives. Je te le confie. Vous restez ici ou tu le ramènes ?
- Euh, je...
- Non, ne le ramène pas, ses parents vont me tuer ! J'ai mieux, sors avec lui prendre l'air et revenez plus tard quand il sera physiquement prêt à dormir sans risquer de vomir dans mes draps.
- Ah parce que c'est ta chambre ?
- Oui, toutes les autres sont occupés... »
La porte de la salle de bain s'ouvrit sur un blond aux joues brûlantes et mal équilibré sur ses deux jambes. Lorsqu'il aperçut son meilleur ami, Hizashi eut un éclair d'enthousiasme dans son regard trop vert.
« Shō !! T'es venuuu !
- Je vous laisse, souffla Nemuri en partant.
- À plus tard, soupira Aizawa sans détacher son regard du bilingue qui titubait jusqu'à lui. »
Bilingue qui, surprenant le nouvel arrivant, se laissa à moitié tomber en avant pour serrer Shōta dans ses bras.
« 'Tin, j'te jure sans you j'me sentais soo lonely ! Pourquoi tu n'viens que maintenant ?!
- Nemuri m'a demandé de venir, tu es complétement bourré...
- Ah donc quand c'est elle qui te dit d'venir, tu viens, et quand c'est moi tu refuses ?!
- Non mais, tu ne comprends pas, je suis là parce que je n'avais pas le choix ! Pourquoi tu as bu autant ?! s'énerva le noiraud en le repoussant.
- J'ai même pas bu a lot ! Promis j'ai fait attention !
- Je vois le résultat. »
Hizashi était tout décoiffé et sa chemise à moitié mal reboutonné, signe qu'il avait peut-être essayé de se déshabiller - à moins que cela ne soit l'œuvre de quelqu'un d'autre ? S'il avait l'air épouvantable, le plus jeune ne put s'empêcher de regretter de ne pas avoir été là pour le surveiller de plus près.
Non, c'était idiot de penser ainsi ! Hizashi était suffisamment grand pour être conscient de ses agissements. Shōta n'était en rien fautif !
« Hizashi, bon sang, mais pourquoi on dirait que tu as essayé de reboutonner ta chemise avec les pieds? »
Le blond baissa grotesquement la tête sur son torse et se toucha avec les mains, comme s'il cherchait à comprendre la question.
« J'avais trop chaud, mais Nemuri ne m'a pas laissé me déshabiller...
- Tu as toujours trop chaud ? demanda-t-il alors plus doucement.
- Yeah, j'étoufferais presque !
- Viens, on va prendre l'air dans ce cas-là... »
Hizashi hocha la tête et tituba jusqu'à la porte, sous le regard examinateur d'Aizawa qui ne voulait pas le voir tomber. Dans les escaliers, il l'aida bien entendu, mais pour traverser la salle de séjour il se contenta de le serrer par le poignet pour le tirer de force jusqu'à l'extérieur. Après tout, il était furieux contre lui et voulait le faire comprendre. Mais cet abruti ne comprenait déjà pas comment marcher droit, sa tentative de faire savoir sa colère était peut-être vaine.
Il n'avait pas prévu aller bien loin, juste marcher dans le quartier peu habité où la fête se déroulait. Il faisait très froid, certes, mais malgré ses insistances Hizashi refusait d'enfiler sa veste. Alors, convaincu qu'il la voudrait plus tard, Aizawa la portait sous son bras, les mains dans les poches pendant que le blond zigzaguait le long du trottoir en monologuant de tellement de choses que le plus jeune ne savait même plus où donner de la tête.
Finalement, au bout d'à peine dix minutes, l'aîné s'arrêta de marcher et fixa devant lui. Shōta se tourna vers lui, surpris.
« Tu te sens mal ? »
Le blond, pour unique réponse, posa sa main sur son ventre, plié en avant en gémissant.
« Super, ne manquait plus que ça. »
Il fit quelques pas pour arriver derrière lui et posa sa main sur le haut de son dos, mais impossible pour lui de régurgiter quoi que ce soit. Quelle chance, en plus d'être ivre, le voilà nauséeux à en être malade.
« Zashi, mets ta veste. »
Yamada releva péniblement la tête et se laissa basculer sur le côté, rattrapé de justesse par Shōta qui n'eut que ses réflexes pour ne pas le laisser s'effondrer contre le bitume froid. Il émit un rire bête.
« O-oh, hé ! Ça va ? Tu as toujours ton neurone, Hizashi ? »
Il sentait son meilleur ami frémir dans ses bras tandis qu'il souriait. Aizawa ne savait pas quoi faire de plus, il n'avait jamais fait face à quelqu'un qui avait trop bu. Même ses parents avaient la décence de ne jamais dépasser les bords en sa présence. Déjà qu'Hizashi était bizarre en étant sobre, le voilà totalement dépassé. Et pour couronner le tout, il refusait de mettre sa veste ; quelle meilleure moyen pour attraper la crève ? Il ferait mieux de le ramener à l'intérieur avant qu'il n'en subisse les conséquences néfastes... Oui, voilà. C'était la chose la plus rationnelle à faire. Alors, bras-dessus-dessous, il l'aida tant bien que mal à rebrousser le chemin, pour seule objectif en tête ; mettre Hizashi en sécurité.
Une fois de retour, Nemuri qui se baladait dans la salle principale avec un paquet de chips, se tourna vers ses petits frères de cœur.
« Alors ?
- Alors rien. Il allait juste tomber malade à marcher comme ça dehors, répondit-il au tac-au-tac à Kayama en refermant derrière lui.
- Tu lui as donné de l'eau ? lui conseilla Nobuo que Shōta ne connaissait pas encore, assis dans un fauteuil, les jambes étirées sur la table basse.
- Non, je dois ?
- Ça peut aider. »
Il décida de lui faire confiance et interpela Hizashi qui s'était d'ores-et-déjà dirigé vers les invités qui dansaient sur la piste de fortune, riant bêtement lorsque l'un d'eux lui prit le bras pour le faire tournoyer.
« Bon, surveillez-le, je vais lui chercher de l'eau... soupira Aizawa, vaincu. »
Il se dirigea vers ce qui semblait être la cuisine et après un bref coup d'œil, il devina que le peu de nourriture disponible confirmait que la plupart des invités avaient très certainement le ventre vide. Peut-être que la balade de son amie avec les chips servait à faire grignoter ces invités qui buvaient comme des trous. Quelle responsabilité de sa part... Il prépara un grand verre d'eau et revint sur ses pas pour retrouver un blondinet totalement fou sur la piste aux côtés des gens qui les avaient rejoints. Il devait bien y avoir une bonne dizaine de personnes dans le salon, ce qui était relativement beaucoup pour un presque trois heures du matin. Et dire qu'il devrait être en train de dormir !
« Hizashi. »
Mais Hizashi ne l'entendait pas à travers ses kilomètres d'années lumières de cotons qui lui embrouillait l'esprit. Alors le noiraud posa le verre sur la table basse et se laissa tomber sur le canapé avec les deux autres personnes qui y discutaient, sans même attirer leur attention. Il allait attendre ici jusqu'à ce que Yamada ne daigne de revenir.
.
.
Lorsque la playlist se termina, le silence pesa dans la maison des Kayama. Shōta, qui semblait s'être endormi sur le canapé, fut doucement réveillé par Nemuri. Celle-ci affichait une mine fatiguée.
« Je lui ai fait boire de l'eau, il est enfin parti vomir. Je crois. Je te le laisse, à demain... »
Il n'avait pas le courage de lui dire qu'ils étaient déjà demain, que le Soleil se levait dans deux heures environs, qu'il ne servait plus à grand chose d'aller se coucher maintenant. Mais il n'en dit rien, hochant même la tête pour acquiescer. Il bailla et se leva péniblement, et un peu difficilement, trouva la salle de bain au bout d'un couloir inexploré jusque lors. Lorsqu'il entrebâilla la porte, il découvrit son meilleur ami assis près de la cuvette au couvercle rabattu, adossé contre la baignoire. Il prit pour assise le rebord de celle-ci et prit une voix rassurante.
« Tu te sens mieux ?
- Yeah, I guess...
- Tu veux aller dormir ?
- I think...
- Tu arrives à te lever ? »
Cette fois, Hizashi prit plus de temps pour trouver une réponse à cette question bête. Il posa ses mains sur le carrelage, tâcha de se hisser, mais il ne sut comment équilibrer son poids pour se remettre debout sans tomber. Après deux essais vains, il accepta l'aide silencieusement proposé de son meilleur ami aux iris couleur nuit pour se remettre sur les deux pieds. Le corps lourd, Yamada enroula ses bras derrière la nuque de Shōta et cala son visage contre la clavicule de celui-ci. Le noiraud frémit à cette proximité mais aussi aux chatouillis que lui procurait le souffle chaud du nippon-anglais contre sa chair. Il chercha à le repousser mais Yamada ne sembla pas en accord.
« Pourquoi tu n'étais pas v'nu plus tôt, Shō-chan ?
- Pour éviter de supporter les gens qui auraient fini dans le même état que toi. »
Le noiraud posa sa main sur son torse pour décoller leurs corps, et le blond se rattrapa de justesse en posant une main au rebord de la baignoire.
« Alors why est-ce que tu es venu ?
- Parce que Kayama me l'a demandé.
- Même pas pour moi ?
- Elle ne voulait pas avoir à s'occuper de toi, elle a autre chose à faire.
- But si je n'avais pas bu tu serais quand même venu, or not ?
- Probablement pas. Maintenant viens, tu dois dormir.
- J'veux pas dormir !
- La musique est terminée tu entends bien que c'est fini, il est presque cinq heures !
- Tu aurais pu rester chez toi pour dormir si tu ne voulais pas venir !
- Hizashi, tu n'as pas encore toute ta tête, entends-toi parler. Viens.
- Je voulais juste que tu sois là !
- Bah je suis là maintenant, s'énerva le noiraud. »
Il tendit le bras vers celui aux yeux trop verts mais ce dernier eut un brusque mouvement de recul et se prit le lavabo dans le rein. Ses jambes tremblèrent mais il tint le coup pour ne pas tomber.
« Hizashi, tu vas te faire du mal !
- Pourquoi tu es v'nu si tu ne voulais pas venir à cette fête ?! s'emporta-t-il en donnant un coup de pied dans le vide pour éloigner Shōta. »
Shōta qui, peu ravi et encore légèrement assommé par le sommeil, se frotta la paupière avec contrariété.
« Pourquoi t'es si indécis ?! Indécis avec your choice, or with me ?!
- Je n'en sais rien, je suis épuisé. On doit dormir. On a école demain je te signale.
- Je n'en ai rien à faire de l'école, I just want answer. D'abord tu dis ne pas vouloir venir, tu m'as fait un cinéma pas possible et après m'avoir laissé tout seul avec des grands, tu débarques comme une fleur and without problem !
- Je n'ai pas fait tout un cinéma, toi tu en fais, et rien qu'à l'instant ! Je suis là parce que tu es bourré et Kayama voulait que quelqu'un te surveille !
- Then WHAT¸ je ne peux compter que sur Nemuri maintenant ?! IT'S HER MY BEST FRIEND NOW ?!
- Mais j'avais peur qu'il t'arrive quelque chose, bon sang !! J'étais inquiet, j'ai passé la nuit à te surveiller et quand j'ai enfin pu dormir ne serait qu'une petite heure ou qu'est-ce que j'en sais, j'en prends plein la gueule ! Ce n'est pas toi qui dois être en colère, c'est moi ! Moi qui ai traversé la ville à deux heures du matin pour récupérer un imbécile qui se plaint d'une pseudo-solitude ! Tu avais tout ce beau monde pour te tenir compagnie cette nuit, ça ne te suffisait pas ?! C'est quoi le problème avec toi ?
- The problem ? C'est TOI mon problème ! »
Shōta se raidit subitement.
« Je suis amoureux d'un garçon qui s'en branle complétement de me ! Tu sais ce que ça fait d'aimer quelqu'un sans rien avoir en retour, juste accepter avec suffisance une amitié ?!!
- Mais c'est ce que j'ai moi-même subi, Hizashi !! J'ai vécu ça avec Oboro, et ça me convenait ! Pourquoi tu ne t'y conformes pas ? Pourquoi es-tu si égoïste ?! »
Silence. Yamada tremblait sur ses jambes, face à un petit noiraud qui refoulait clairement son envie d'éclater en sanglots.
« J'aime à penser que m'être abstenu à lui avouer ces sentiments n'aurait pas été vain, que de nous deux je serais le seul à souffrir par simple envie de ne pas réduire à néant notre amitié ! Mais toi tu fais tout de travers, Hizashi. Quand tu sais qu'une relation est vouée à l'échec, tu... Tu fais... P-pourquoi tu ne t'abstiens pas, toi ?! Pourquoi suis-je le seul à m'inquiéter un minimum de notre amitié ? On dirait que tu t'en fous, que tout ce qui compte, c'est toi et tes sentiments ! »
Ils se fixèrent dans le blanc de l'œil avec désespoir.
« Hizashi, si je suis venu c'est parce que j'avais peur qu'il t'arrive quelque chose... »
Ça lui coûtait de le dire, mais il le devait bien. Il fallait qu'il trouve les mots justes pour calmer le désastre qui s'aventurait dangereusement dans leur amitié.
« J'aurais pu rester chez moi, en effet. Mais si jamais tu te blessais par ton inconscience maladive, je m'en voudrais parce que j'aurais pu agir. Alors j'ai agi. J'ai appris de mes erreurs et tu es tout ce qu'il me reste pour le moment. Ne gâche rien, pitié, c'est assez difficile comme ça.
- ... Since when tu parles plus que moi ? ricana le blond en s'essuyant les yeux sous ses lunettes.
- Je ne suis pas amoureux de toi, tu peux comprendre ça ? Mais ça ne veut pas dire que je ne t'apprécie pas. C'est différent. Je t'apprécie comme on peut apprécier un parent, ou une sœur, un frère, je n'en sais rien.
- Mais est-ce qu'un jour tu pourrais m'aimer pour de vrai ? »
Aizawa entrouvrit les lèvres sans savoir que dire. Il regardait attentivement les joues rouges de son meilleur ami, ses cheveux décoiffés, cette chemise mal boutonnée mais surtout, la légère transparence de ses verres de lunettes qui laissait entrevoir le ptosis à son œil gauche. Il semblait avoir même oublié comment respirer par le nez, ressemblant à un poisson asphyxié avec des cheveux blonds. Qu'avait-il à répondre à ça ? Shōta n'en avait aucune idée, et il craignait que l'impatience d'Hizashi ne le pousse à exprimer de façon irréfléchie.
« Je... »
Il ne savait pas quoi dire.
« Je ne suis pas doué pour exprimer mes sentiments... »
Il devait faire attention aux choix des mots.
« Je ne sais pas grand-chose de l'Amour avec un grand A que tu es persuadé de ressentir pour moi. C'est très flatteur de ta part, mais je ne suis pas intéressé... Et je crois bien que même si je développais des sentiments pour toi, un jour, ça ne fonctionnerait pas entre nous deux. »
Hizashi ouvrit la bouche mais Shōta l'interrompit avant même qu'il eut le temps de commencer une phrase.
« Je me sens terriblement mal au fond de moi. Je suis comme cette stupide métaphore du trou noir que tu t'amuses à répéter pour essayer de me faire rire, sauf qu'au lieu d'être cette source d'inspiration que tu admires, je n'en suis que le mauvais côté ; j'entraîne le malheur. Mes parents. Nao. ... Lui... Bientôt toi... Et ça commence, tu souffres déjà par ma faute... »
Il passa une main dans ses cheveux noirs, le regard bas.
« Si je ne te fais pas déjà souffrir... Merde, tu mérites tellement mieux qu'un gars comme moi.
- Et moi je t'aime parce que l'univers a conspiré à ce que je croise ton chemin. »
Hizashi avait prononcé ces mots si difficilement que Shōta ne se rendit compte que seulement maintenant qu'il avant abandonné l'idée de s'essuyer les yeux, que deux traits de larmes ruisselaient sur ses joues brûlants de chaleur et d'alcool.
« Et voilà, regarde-toi, je t'ai encore fait du mal, murmura le plus jeune en sentant son cœur battre douloureusement dans sa cage thoracique.
- Plus je te regarde et plus I'm falling in love with you, insista le blond.
- ... Tu es toujours ivre...
- Mais mes sentiments pour toi ne sont pas différents.
- J'ai dit 'non'. Arrête. Tais-toi. »
Hizashi renifla en se frottant les yeux, déplaçant même ses lunettes sur son front sous le geste, laissant ainsi à nus ses yeux verts en anneaux si hypnotiques.
« T'es méchant... »
Le noiraud soupira.
« Voilà. Je suis méchant. Maintenant va dormir. »
Il tourna les talons en tirant le manche de la chemise de son meilleur ami, mais Hizashi ne bougea pas. Figés dans cette position, les deux amis regardèrent le sol, Shōta dos à son aîné, un triste soupir glissant au bout de ses lèvres.
« Hizashi... »
Il risqua un demi-tour pour le regarder.
« S'il te plait, écoute-moi, tu n'en fais toujours qu'à ta tête...
- Tell me honnêtement. Si c'était moi à la place d'Oboro, t'aurais été plus heureux ? »
Il y avait des choses qui ne se disaient pas. Des questions destructrices qui devraient rester secrètes, intimes, pour faire le moins de dégâts possibles... Et si une simple interrogation pouvait tuer, Shōta en serait mort sur le coup, au milieu de cette salle de bain au carrelage glacé et aux murs bleu et beige. Et la brûlure que lui laissa la question s'imprima dans son esprit avec trouble, voire un choc qu'il n'était pas sûr de saisir. Qu'Hizashi le lui demande le ramena presque à la réalité. Presque ; parce que ce cauchemar n'était pas faux. Et cette souffrance qu'il percevait chez son dissemblable n'avait rien de plus vrai.
« Tu es fou de me demander ça... fut la seule réponse qu'il put murmurer après un long instant d'hébétement. Bien sûr que non...
- But, c'est lui que tu aimes, pas moi. »
Et voilà. Shōta et sa grande gueule, même lorsqu'il essayait d'être attentif dans le choix de ses mots, il ne faisait que le blesser. Encore et encore. Si des tournures de phrases implicites pouvaient lui faire autant de mal, qu'en serait-il des baisers passionnés qui expliciteraient tout ce que les mots ne pourront dire ? Comment pouvait-il rendre heureux Hizashi alors qu'il était un générateur de mauvaises ondes à lui tout seul ?
« Hizashi, tu es en plein délire, tu dois te reposer. On en reparlera demain. »
Ou jamais.
« Viens. »
Il attira délicatement son meilleur ami contre lui, et étonnamment, Yamada ne lutta plus. Il se laissa péniblement entraîner jusqu'au salon où plus aucune âme n'y vivait, et lourdement, il tomba sur le canapé. Shōta resta debout pour le surveiller. Il observa le blond se tourner et se retourner quelques fois avant de fermer les yeux, face contre le dossier du sofa, jusqu'à ne plus être physiquement capable de se mouvoir davantage. Soulagé qu'il se soit enfin endormi, Aizawa prit la direction du jardin et, après avoir chassé d'un balayement de pied les mégots de cigarettes, prit pour assise le perron. L'air frais de dehors l'enivra et soulagea son odorat. Son mal de tête aussi s'estompait, et il attendit. Il attendit le Soleil qui se levait tranquillement au loin, annonçant un dimanche paisible et peu couvert.
Lorsque la coupole aux couleurs chaudes se tacheta d'oiseaux, Shōta se leva et entra à nouveau dans la villa. Tout en ouvrant sa doudoune, il contrôla rapidement que son meilleur ami n'avait pas bougé, et fort heureusement, il dormait toujours, paisiblement même. Il hésita un long instant avant de se diriger vers le canapé et s'assit près de sa tête. Sa main plongea dans les cheveux flavescents de Yamada, tandis qu'un triste regard s'imprimait sur son visage pâle.
'Si c'était moi à la place d'Oboro, t'aurais été plus heureux ?'
Le noiraud ferma les yeux, la poitrine compressée sous l'émotion. Oboro aurait pu se tenir devant lui, son cœur battrait pareil. Douloureusement pareil.
Et toi, Hizashi, aurais-tu préféré être à sa place ?
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Merci pour les 10k vues ❤ J'espère que ce chapitre vous a plu parce que croyez-moi, vous n'êtes pas au bout de vos peines x) À dans deux semaines !~
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